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Chapitre 94 - Les services d'enseignement et de formation

GÉNÉRALITÉS

E. Gelpi*

* Adapté de la 3e édition de l'Encyclopaedia of Occupational Health and Safety.

Le champ d’action du métier d’enseignant s’étend de l’école maternelle à l’institut postuniversitaire. Enseigner, c’est aussi bien impartir une instruction scolaire que dispenser une formation scientifique, artistique et technique — dans le laboratoire, l’atelier ou le studio d’art — ou encore une éducation physique, sur le terrain de sport, au gymnase, à la piscine. Dans la plupart des pays, tout un chacun est, à un moment ou à un autre de sa vie, soumis à l’influence de cette profession; les enseignants eux-mêmes sont formés dans des disciplines aussi diverses que les matières qu’ils enseignent. Les plus anciens dans le métier y exercent souvent par ailleurs des fonctions administratives et de direction.

De plus, l’éducation permanente ayant connu un développement considérable, on est amené à revoir l’idée que l’on se fait généralement de l’enseignant œuvrant au sein d’un établissement traditionnel (école, université). Aujourd’hui, la profession emploie des méthodes didactiques formelles et non formelles, dans le cadre de formations de base ou continues, à l’intérieur et hors d’institutions à vocation pédagogique.

Outre les élèves d’âge scolaire et les étudiants d’université, on voit apparaître en nombre croissant, et un peu partout dans le monde, d’autres catégories d’apprenants: jeunes demandeurs d’emplois, femmes cherchant à réintégrer le marché du travail, retraités, travailleurs migrants, personnes handicapées, membres issus des groupes communautaires, etc. On trouve, en particulier, des sous-groupes de la population jusque-là exclus des structures traditionnelles d’enseignement: les illettrés ou les personnes handicapées, par exemple.

La multiplicité actuelle des aménagements consacrés à l’apprentissage n’est pas un phénomène récent, et l’autodidaxie, de même que la formation permanente, a toujours existé sous une forme ou une autre. Ce qui est nouveau, c’est l’apparition toujours plus fréquente de services structurés d’éducation permanente, que ce soit dans des cadres qui, à l’origine, n’étaient pas destinés à l’enseignement (usines, bureaux, centres de loisirs), ou par des moyens inédits (associations, médias de masse, autoapprentissage assisté). Une telle expansion des activités d’éducation a eu pour effet d’augmenter le nombre de pédagogues, qu’ils soient professionnels ou bénévoles.

Il peut arriver que les diverses activités relevant de l’enseignement se recoupent: on trouvera des enseignants, des moniteurs, des formateurs, des chargés de cours, des animateurs et organisateurs de projets éducatifs, des conseillers d’éducation ou d’orientation professionnelle, des spécialistes de l’éducation des adultes, des administrateurs, etc.

Si l’on considère les effectifs du corps enseignant sur le marché du travail, on note qu’ils constituent l’une des catégories les plus importantes de la main-d’œuvre salariée dans la plupart des pays.

L’importance de leurs syndicats n’a cessé de croître, en même temps que leurs effectifs. Du fait de la souplesse de leur emploi du temps, les enseignants ont pu jouer un rôle de premier plan dans la vie politique de nombreux pays.

Un type nouveau d’éducateur — qui n’est pas exactement un enseignant au sens traditionnel du terme — est apparu dans de nombreux systèmes où l’école est devenue un centre de formation continue ou d’éducation tout au long de la vie. Ces éducateurs sont des professionnels provenant de différents secteurs, comprenant des maîtres-artisans ou des artistes, par exemple, qui contribuent de manière permanente ou occasionnelle à ces activités éducatives.

Les établissements d’enseignement ouvrent leurs portes à des groupes ou catégories plus diverses de la population et embrassent de plus en plus d’activités externes et extra-muros. Deux grandes tendances peuvent être relevées à cet égard: d’une part, l’instauration de relations avec le secteur de l’industrie (personnel, structures et procédés); d’autre part, un rapprochement avec les collectivités locales, à partir duquel davantage de passerelles peuvent se créer entre l’enseignement scolaire et les projets éducatifs des collectivités.

Les universités et autres centres d’études supérieures s’efforcent d’actualiser la formation initiale des enseignants en leur proposant des stages de perfectionnement. Outre les cours consacrés aux diverses disciplines et à la pédagogie, ces institutions proposent des formations en sociologie de l’éducation, en économie et en anthropologie. Cependant, de nombreux obstacles subsistent à l’incorporation des futurs enseignants dans des stages au sein de collectivités locales, dans les lieux de travail, ou dans certains établissements éducatifs et culturels. Le service national qui s’est généralisé dans plusieurs pays leur fournit une expérience appréciable de travail sur le terrain.

Les dépenses considérables faites dans les domaines de la communication et de l’information favorisent l’autoformation sous forme individuelle ou collective. Le problème de la relation entre l’autoapprentissage et l’enseignement se pose maintenant avec plus d’acuité. La différence entre une formation autodidacte chez ceux qui n’ont pas fréquenté l’école et l’autoformation constante des jeunes et des adultes n’a pas toujours été appréciée à sa juste valeur par les corps enseignants.

Ces nouvelles politiques et activités éducatives soulèvent un certain nombre de questions, notamment quant à la survenue des risques et à leur prévention. La formation permanente, dépassant le cadre de l’école, transforme la collectivité, le lieu de travail, le laboratoire et l’environnement lui-même en espaces éducatifs. Dans ces cadres nouveaux, les enseignants devraient disposer d’une assistance ainsi que d’une couverture assurance spécifiques. Pour prévenir les risques, les divers sites devraient être adaptés aux activités d’apprentissage. Plusieurs écoles ont été transformées et équipées pour leur permettre d’accueillir tous les membres de la collectivité quels qu’ils soient et pour en faire des centres d’activités créatrices et productives, des lieux de réunion, et non plus seulement des lieux d’enseignement.

Les liens existant entre les enseignants/formateurs et les différentes périodes de la vie des élèves/stagiaires (les temps de loisirs, la durée du travail, la vie de famille, la durée de l’apprentissage) méritent également qu’on y consacre des efforts importants de recherche, d’information et d’adaptation.

Les relations entre les enseignants et les familles des élèves se développent elles aussi; il arrive que des membres de la famille assistent à des conférences ou à des cours dans l’école. Le décalage entre le modèle familial et le modèle didactique oblige les enseignants à rechercher avidement une compréhension mutuelle entre les deux sphères sous l’angle psychologique, sociologique et anthropologique. La sphère familiale influence le comportement de certains élèves qui sont dès lors susceptibles d’être confrontés à des contradictions flagrantes entre l’éducation reçue à la maison, d’une part, et les modèles et normes de comportement qui prévalent à l’école, d’autre part.

Malgré le vaste éventail des formes d’enseignement existantes, certaines caractéristiques demeurent invariables: l’enseignant ne transmet pas uniquement des connaissances ou des compétences, mais aussi un mode de pensée; il doit préparer l’élève pour l’étape suivante de son développement, stimuler son intérêt pour l’étude et solliciter sa participation active.

LES ÉCOLES PRIMAIRES ET SECONDAIRES

Michael McCann

Les écoles primaires et secondaires emploient un personnel très divers: enseignants, aides-enseignants, administrateurs, personnel infirmier, de bureau ou de réfectoire, etc., qui tous sont nécessaires au bon fonctionnement de l’établissement. Ce personnel est généralement exposé aux nuisances propres aux environnements intérieurs et de bureau: pollution de l’air, éclairage inadéquat, chauffage ou climatisation mal réglés, utilisation de machines de bureau, glissades et chutes, problèmes ergonomiques dus à un mobilier de bureau mal conçu et risques d’incendie. Les précautions à prendre correspondent aux normes prévues pour ce type de milieu; toutefois, les prescriptions en matière d’architecture et de protection contre l’incendie sont particulières dans le cas d’établissements scolaires en raison du grand nombre d’enfants présents. A cela s’ajoute la nécessité de prendre garde à la présence d’amiante (s’agissant surtout du personnel de surveillance et d’entretien), d’éclats de peinture à base de plomb, de pesticides et d’herbicides, de radon, de champs électromagnétiques (en particulier dans le cas d’écoles bâties au voisinage de lignes à haute tension). Il n’est pas rare non plus que des troubles oculaires et respiratoires soient signalés quand les locaux sont repeints ou, dans certains pays, lorsque le toit de l’école est goudronné à neuf alors que les élèves sont présents. Les travaux de peinture et de goudronnage ne devraient être effectués que lorsque les locaux sont inoccupés.

Les principales attributions de l’enseignant comportent la préparation des cours (qui peut impliquer l’élaboration d’approches didactiques, la rédaction de notes de cours et la confection de matériels pédagogiques visuels (illustrations, graphiques, etc.); le cours proprement dit (où sont présentées des informations organisées de façon à susciter l’attention et la concentration des apprenants, et où des tableaux noirs, projecteurs, rétroprojecteurs et ordinateurs peuvent être utilisés); la préparation, la surveillance et la correction des examens; et les entretiens individuels avec les élèves. La plus grande part de ces activités a lieu dans des salles de classe. Par ailleurs, les professeurs de matières scientifiques, artistiques, techniques ou d’éducation physique, et d’autres encore, travaillent souvent dans des locaux spécialisés tels que laboratoires, ateliers de dessin, théâtres, gymnases. Les enseignants sont aussi appelés à conduire des sorties de classe au musée, au zoo, etc.

D’autres tâches corollaires peuvent également leur revenir: surveillance des élèves dans les couloirs et à la cantine; réunions avec l’administration, les parents d’élèves ou autres; organisation et supervision des loisirs et des activités extrascolaires; fonctions administratives. En outre, les enseignants prennent part à des conférences et autres stages de mise à jour, qui leur ouvrent éventuellement des possibilités de promotion.

Il est des risques auxquels tous les enseignants sans exception sont exposés. Les maladies infectieuses telles que la tuberculose, la rougeole ou la varicelle se propagent facilement dans un établissement scolaire. La vaccination (des élèves et des enseignants), la tuberculination et d’autres mesures traditionnelles de santé publique sont donc essentielles (voir tableau 94.1). Les classes surpeuplées, le bruit pendant les cours, les emplois du temps surchargés, les installations non conformes, les soucis de promotion et de sécurité de l’emploi et, de manière générale, le peu de latitude décisionnelle face à certaines conditions de travail sont, dans ce milieu, autant de facteurs de stress grave, d’absentéisme et d’épuisement professionnel. La solution consiste, notamment par des réformes institutionnelles, à améliorer les conditions de travail et à mettre en œuvre des programmes de réduction du stress. Il est par ailleurs de plus en plus fréquent, en particulier en milieu urbain, que des actes de violence soient commis à l’encontre des enseignants par des élèves et, parfois, par des intrus. Aux Etats-Unis, il n’est pas rare que des élèves d’établissements secondaires urbains soient armés, même d’armes à feu. Il est essentiel d’organiser des programmes de prévention dans les écoles qui connaissent un problème de violence. De manière générale, les aides-enseignants sont exposés à bon nombre des mêmes risques.

Tableau 94.1 Maladies infectieuses touchant les enseignants et le personnel
des crèches

Maladie

Localisation

Mode de transmission

Observations

Amibiase

Surtout en régions tropicales et subtropicales

Eau et nourriture contaminées par des matières fécales infectées

Consommer une nourriture saine et assainir l’eau

Coqueluche

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

Moins grave chez les adultes; tous les enfants de moins de 7 ans devraient être vaccinés

Cytomégalovirus (CMV)

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air; contact avec de l’urine, de la salive ou du sang

Très contagieux, risque de malformations congénitales

Erythème infectieux (parvovirus-B-19)

A l’échelle mondiale

Contact direct de personne à personne ou gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

Assez peu contagieux; risque pour le fœtus pendant la grossesse

Gale

A l’échelle mondiale

Contact cutané direct

Maladie infectieuse de la peau causée par un parasite animal

Gastro-entérite bactérienne (Salmonella , Shigella, Campylobacter )

A l’échelle mondiale

Transmission de personne à personne, ou via la nourriture ou l’eau par voie fécale-orale

Consommer une nourriture saine et assainir l’eau; se laver soigneusement les mains; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Gastro-entérite virale (rotavirus)

A l’échelle mondiale

Transmission de personne à personne, ou via la nourriture ou l’eau par voie fécale-orale, ainsi que par inhalation de poussières contenant le virus

Consommer une nourriture saine et assainir l’eau

Giardiase (parasite intestinal)

A l’échelle mondiale, mais surtout en régions tropicales et subtropicales

Nourriture et eau contaminées; transmissible aussi par contact de personne à personne

Consommer une nourriture saine et assainir l’eau; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Grippe

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

Très contagieuse; les sujets à haut risque devraient se faire vacciner

Hépatite A

A l’échelle mondiale, mais surtout dans les pays méditerranéens et les pays en développement

Transmission fécale-orale, en particulier par la nourriture et l’eau contaminées; transmission possible par contact direct de personne à personne

Risque d’avortement spontané et de mort à la naissance; consommer une nourriture saine et assainir l’eau; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Hépatite B

A l’échelle mondiale, mais surtout en Asie et en Afrique

Contact sexuel, contact d’une peau écorchée ou de muqueuses avec du sang ou d’autres fluides organiques

Incidence plus élevée chez les enfants vivant en collectivité (par exemple, enfants handicapés); vaccination recommandée dans les situations à haut risque; prendre les précautions universelles pour éviter le contact avec du sang et d’autres fluides organiques; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Herpès simplex de types I et II

A l’échelle mondiale

Contact avec des muqueuses

Extrêmement contagieux; fréquent chez les adultes et chez les jeunes de 10 à 20 ans

Infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH)

A l’échelle mondiale

Contact sexuel, contact d’une peau écorchée ou de muqueuses avec du sang ou d’autres fluides organiques

Entraîne le syndrome d’immunodéficience acquise (sida); prendre les précautions universelles pour éviter le contact avec du sang et d’autres fluides organiques (par exemple, saignements de nez); soumise à déclaration anonyme dans la plupart des pays

Infections par mycoplasme

A l’échelle mondiale

Transmission par voie aérienne après contact rapproché

Cause importante de pneumonie atypique primaire; atteint essentiellement les enfants de 5 à 15 ans

Infections par streptocoques

A l’échelle mondiale

Contact direct de personne à personne

Angine streptococcique, scarlatine et pneumonie d’origine extra-hospitalière, entre autres

Méningite cérébro-spinale (bactérienne)

Surtout en Afrique tropicale et au Brésil

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air; en particulier par contact rapproché

Soumise à déclaration dans la plupart des pays

Mononucléose infectieuse (virus d’Epstein-Barr)

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air; contact direct avec de la salive

Particulièrement répandue chez les jeunes de 10 à 20 ans

Oreillons

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air et contact avec de la salive

Extrêmement contagieux; renvoyer chez eux les enfants atteints; risque éventuel de stérilité chez les adultes; soumis à déclaration dans certains pays

Rougeole

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

Très contagieuse, mais, chez les adultes, menace surtout les sujets non immunisés qui travaillent avec des enfants non vaccinés; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Rubéole

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air; contact direct avec des personnes atteintes

Risque de malformations congénitales; tous les enfants et les employés devraient être vaccinés; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Tuberculose (respiratoire)

A l’échelle mondiale

Gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

Très contagieuse; tous les employés des crèches devraient faire l’objet d’un dépistage; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Varicelle

A l’échelle mondiale

En général, par contact direct de personne à personne, mais possible aussi par les gouttelettes respiratoires en suspension dans l’air

La varicelle est plus grave chez les adultes que chez les enfants; risque de malformations congénitales; soumise à déclaration dans la plupart des pays

Selon les locaux considérés, les enseignants de classes spécialisées peuvent être exposés à des risques professionnels qui viennent s’ajouter à ceux mentionnés: risques chimiques, électriques ou physiques (bruit, rayonnements), risques d’accident ou d’incendie. La figure 94.1 montre un atelier de travail des métaux dans un lycée (appelé école secondaire, notamment au Canada) et la figure 94.2 un laboratoire de science, également dans un lycée, muni de hottes aspirantes et d’une douche d’urgence. Le tableau 94.2 récapitule les précautions à observer selon les disciplines, avec mention des matériels de substitution qui peuvent être employés en milieu scolaire pour plus de sécurité. Les précautions de base à prendre sont abordées dans les chapitres correspondant aux différentes branches (chapitre no 96, «Les arts et les loisirs»; chapitre no 61, «L’utilisation, la manipulation et le stockage des produits chimiques»).

Figure 94.1 Atelier de travail des méraux dans un lycée

Figure 94.1

Figure 94.2 Laboratoire de lycée équipé de hottes aspirantes et d'une douche
d'urgence

Figure 94.2

Tableau 94.2 Risques et mesures préventives par disciplines et par niveaux

Disciplines

Activités/matière

Risques

Mesures préventives

Classes primaires

Sciences

Manipulation d’animaux

Morsures et griffures, zoonoses, parasites

N’admettre que des animaux vivants et sains. Les manipuler avec des gants épais. Eviter les animaux susceptibles d’abriter des insectes ou des parasites infectieux

 

Plantes

Allergies, plantes vénéneuses

Eviter les plantes vénéneuses ou allergènes

 

Produits chimiques

Affections cutanées et oculaires, réactions toxiques, allergies

Eviter d’utiliser des produits chimiques toxiques avec les enfants. L’enseignant doit porter un équipement de protection individuelle adapté lors des démonstrations

 

Matériel

Risques électriques, tout risque lié à la sécurité

Se conformer aux consignes générales de sécurité électrique. Veiller à ce que tout le matériel soit convenablement protégé. Bien ranger le matériel, les outils, etc.

Arts

   

N’utiliser que des produits non toxiques. Eviter les solvants, acides, alcalis, aérosols, teintures chimiques, etc.

 

Peinture et dessin

Pigments, solvants

N’utiliser que des peintures pour enfant. Ne pas se servir de crayons pastel, de pigments secs

 

Photographie

Produits photochimiques

Pas de reproduction photographique sur place. Faire développer les pellicules dans le commerce ou utiliser des appareils Polaroïd, des bleus ou des procédés héliographiques

 

Travail sur textile et fibres

Colorants

Eviter les colorants synthétiques; employer des pigments naturels: pelure d’oignon, thé, épinards, etc.

 

Gravure

Acides, solvants
Outils de coupe

Utiliser des encres d’imprimerie à l’eau
Utiliser des chutes de linoléum plutôt que du bois

 

Travail du bois

Outils
Colles

Utiliser des bois tendres et uniquement des outils à main
Utiliser des colles à l’eau

 

Céramique

Silice, métaux toxiques, chaleur, fumée des fours

N’utiliser que de l’argile humide et des chiffons humides. Peindre les poteries plutôt qu’appliquer des vernis à céramique. Ne pas allumer le four en classe

Classes secondaires

Chimie

Générale

 

Tous les laboratoires scolaires devraient être équipés du matériel ci-après: hottes aspirantes en cas d’emploi de produits volatils et toxiques; douches oculaires; douches d’urgence (si utilisation d’acides ou de bases concentrés et d’autres produits corrosifs); trousses d’urgence; extincteurs appropriés; lunettes de protection, gants, blouses de laboratoire; récipients et procédures adéquats pour l’élimination des déchets; dispositifs antidébordement. Eviter les cancérogènes, les mutagènes et les produits très toxiques comme le mercure, le plomb, le cadmium, le chlore, etc.

 

Chimie organique

Solvants

N’employer que sous une hotte aspirante. Utiliser les solvants les moins toxiques. Effectuer des expériences à petite ou à moyenne échelle

   

Peroxydes et explosifs

Ne pas utiliser d’explosifs ou de produits tels que l’éther qui peuvent former des peroxydes explosifs

 

Chimie inorganique

Acides et bases

Eviter autant que possible les acides et les bases concentrés

 

Chimie analytique

Sulfure d’hydrogène

Ne pas utiliser de sulfure d’hydrogène, mais des produits de substitution

 

Entreposage

Incompatibilités



Inflammabilité

Eviter l’entreposage par ordre alphabétique qui occasionne parfois le stockage de produits incompatibles à proximité les uns des autres. Stocker les produits par groupes compatibles
Entreposer les liquides inflammables et combustibles dans des meubles antidéflagrants homologués

Biologie

Dissection

Formol

Ne pas disséquer de spécimens conservés dans le formol. Se servir de petits animaux lyophilisés, de films et de vidéocassettes didactiques, etc.

 

Anesthésie d’insectes

Ether, cyanure

Utiliser de l’alcool éthylique pour anesthésier les insectes. Les réfrigérer pour le comptage

 

Prélèvement de sang

VIH, hépatite B

Eviter si possible. Pour la détermination des groupes sanguins, se servir de scalpels stériles sous surveillance étroite

 

Microscopie

Taches

Eviter le contact cutané avec l’iode ou le bleu de méthylène

 

Culture de bactéries

Pathogènes

Utiliser des procédés stériles pour toutes les bactéries par précaution contre une éventuelle contamination

Physique

Radio-isotopes

Rayonnements ionisants

N’utiliser des radio-isotopes que dans des quantités inférieures aux seuils au-delà desquels une exemption est nécessaire. Réserver leur manipulation à des enseignants formés à cet effet. Mettre au point un programme de radioprotection

 

Electricité et magnétisme

Risques électriques

Se conformer aux consignes générales de sécurité électrique

 

Lasers

Lésions des yeux et de la peau, risques électriques

N’utiliser que des lasers de faible puissance (classe I). Ne jamais regarder de rayons laser directement, ni les faire passer sur le visage ou le corps. Les lasers doivent être munis d’un dispositif de verrouillage

Sciences de la terre

Géologie

Projections

Ecraser les roches dans des sacs de tissu pour éviter les projections. Porter des lunettes de protection

 

Pollution des eaux

Infection, produits toxiques

Ne pas prélever d’échantillons d’eaux usées en raison du risque d’infection. Eviter les produits chimiques dangereux lors des tests de pollution des eaux effectués sur le terrain

 

Atmosphère

Manomètres à mercure

Utiliser des manomètres à huile ou à eau. En cas d’utilisation de manomètres à mercure pour la démonstration, prévoir du matériel contre les fuites de mercure

 

Volcanologie

Dichromate d’ammonium

Ne pas utiliser de dichromate d’ammonium ni de magnésium pour simuler des volcans

 

Observation solaire

Rayons infrarouges

Ne jamais regarder le soleil directement à l’œil nu, ni avec un objectif

Arts et arts industriels

Toutes activités confondues

Ensemble des risques

Eviter la plupart des produits et procédés chimiques dangereux. Assurer une bonne ventilation. Voir également les précautions indiquées sous la rubrique «Chimie»

 

Peinture et dessin

Pigments, solvants

Eviter les pigments au plomb et au cadmium. Eviter également la peinture à l’huile sauf si le nettoyage est exécuté au moyen d’huile végétale. Utiliser les fixatifs en aérosol à l’extérieur

 

Photographie

Produits photochimiques, acides, dioxyde de soufre

Eviter les développements en couleur et les procédés de virage. Equiper la chambre noire d’une bonne ventilation générale. Prévoir des douches oculaires. Utiliser de l’eau plutôt que de l’acide acétique pour le rinçage

 

Travail sur textile et fibres

Colorants, adjuvants de colorant, fumées de cire

Utiliser des colorants liquides aqueux ou mélanger les colorants dans une boîte à gants. Eviter les mordants au dichromate. Ne pas utiliser de solvants pour enlever la cire du batik. Prévoir la ventilation du local si la cire est enlevée au fer chaud

 

Fabrication de papier

Alcali, malaxeurs

Ne pas faire bouillir la lessive. Utiliser des végétaux putréfiés ou décomposés ou recycler du papier et du carton. Pour la préparation de la pâte à papier, employer un gros malaxeur plutôt que des batteurs industriels plus dangereux

 

Gravure

Solvants

Utiliser des encres de sérigraphie à base d’eau et non pas à base de solvants. Nettoyer les plaques à imprimer et les plaques à encrer pour héliogramme avec de l’huile végétale et du produit à vaisselle plutôt qu’avec des solvants. Utiliser des écrans de papier de préférence aux écrans de laque pour la sérigraphie

   

Acides, chlorate de potassium

Utiliser le chlorure ferrique pour graver les plaques de cuivre au lieu de mordant hollandais ou d’acide nitrique sur des plaques de zinc. Pour la gravure à l’acide nitrique, prévoir des douches d’urgence et des douches oculaires. Ventilation par aspiration localisée

   

Dichromates

Utiliser des photoémulsions au diazoïque plutôt qu’au dichromate. En lithographie, remplacer les dichromates par des solutions d’acide citrique

 

Travail du bois

Bois et poussières de bois

Veiller à ce que les machines soient équipées de systèmes de captage des poussières. Eviter les bois de feuillus et les bois traités (par exemple, à l’arséniate de cuivre chromé), qui sont irritants et allergènes. Retirer la poussière de bois pour limiter les risques d’incendie

   

Machines et outils

Veiller à ce que les machines soient équipées de dispositifs de protection, de systèmes de verrouillage et d’arrêt d’urgence

   

Bruit

Réduire les niveaux sonores ou porter des protecteurs de l’ouïe

   

Colles

Recourir autant que possible à des colles à base aqueuse. Eviter les colles au formaldéhyde et à la résorcine, ainsi que les colles à base de solvants

   

Peintures et produits de finition

Utiliser des peintures et des produits de finition à l’eau. Utiliser de la laque à base d’alcool éthylique plutôt que d’alcool méthylique

 

Céramique

Plomb, silice, métaux toxiques, fumées du four

Acheter de l’argile humide. Ne pas employer de vernis à base de plomb. Acheter des vernis tout prêts pour ne pas avoir à mélanger de vernis secs. Ne pulvériser les vernis que dans des caissons de pulvérisation. Utiliser le four à l’extérieur s‘il n’existe pas de dispositif de ventilation par aspiration localisée. Porter des lunettes de protection contre les infrarouges pour regarder dans le four chaud

 

Sculpture

Silice, résines synthétiques, poussières

N’utiliser que des outils à main pour la sculpture sur pierre, afin de réduire la quantité de poussières. Ne pas sculpter sur le grès, le granite ou la stéatite (saponite), qui peuvent contenir de la silice ou de l’amiante. Ne pas utiliser de résines époxy, au polyuréthane ou au polyester qui sont très toxiques. Si l’on doit procéder au chauffage de plastiques, s’assurer que la ventilation permet de bien éliminer les produits de décomposition. Pour enlever les poussières, les aspirer ou les mouiller avant de les balayer

 

Bijoux

Fumées de soudage, acides

Eviter les soudages à l’argent et au cadmium et les fondants au fluorure. Pour patiner, se servir de sulfate d’hydrogène et de sodium plutôt que d’acide sulfurique. Prévoir un système de ventilation par aspiration localisée

 

Emaux

Plomb, brûlures, rayonnement infrarouge

N’utiliser que des émaux sans plomb. Ventiler le four à émailler. Porter des vêtements et des gants de protection contre la chaleur et des lunettes de protection contre les infrarouges

 

Moulage à la cire perdue

Fumées métalliques, silice, rayonnement infrarouge, chaleur

Utiliser une chape à 50% de plâtre et à 50% de sable au lieu de revêtements en cristobalite. Prévoir un système de ventilation par aspiration localisée lors des opérations de chauffage de la cire et de fonte. Porter des vêtements et des gants de protection contre la chaleur

 

Vitraux

Plomb, fondants acides

Utiliser des feuilles de cuivre de préférence au plomb. Employer des baguettes de soudage sans plomb ni antimoine. Eviter les peintures au plomb. Se servir de fondants sans acide ni colophane

 

Soudage

Fumées métalliques, ozone, dioxyde d’azote, risques électriques et d’incendie

Ne pas souder des métaux revêtus d’une couche de zinc, de peinture au plomb, ni les alliages de métaux dangereux (nickel, chrome, etc.). Ne souder que des métaux dont la composition est connue

 

Art publicitaire

Solvants, produits photochimiques, écrans d’ordinateurs

Utiliser du ruban double face adhésive de préférence à la colle au caoutchouc. Utiliser des adhésifs à base d’heptane et non d’hexane. Disposer de caissons de pulvérisation pour la peinture à l’air comprimé. Utiliser des marqueurs à l’eau ou à l’alcool plutôt que des marqueurs au xylène. Voir la rubrique «Photographie» pour les procédés photographiques. Fournir des sièges et un éclairage ergonomiques pour le travail sur ordinateur

Arts du spectacle

Théâtre

Solvants, peintures, fumées de soudage, isocyanates, incendie

Utiliser des peintures et des teintures à l’eau. Ne pas se servir de mousses au polyuréthane en aérosol. Séparer l’aire de soudage des autres espaces de travail. Veiller à la sûreté des modes de montage et de réglage des cintres. Eviter de recourir aux procédés pyrotechniques, armes à feu, brouillards, fumées et autres effets spéciaux dangereux. Ignifuger tous les décors. Baliser toutes les trappes, fosses et parties surélevées

 

Danse

Lésions aiguës ou dues
à des efforts répétés

S’assurer que le revêtement du sol est conforme. Eviter l’organisation de programmes chargés après une période d’inactivité. Prévoir un bon échauffement avant l’activité et une relaxation après. Accorder aux danseurs un temps de repos suffisant pour se rétablir après un accident ou une maladie

 

Musique

Troubles musculo-squelettiques (syndrome du canal carpien, par exemple)

S’assurer que les instruments sont à la bonne dimension et que leur support est adapté aux besoins. Accorder aux musiciens un temps de repos suffisant pour se rétablir après un accident ou une maladie

   

Bruit

Maintenir le niveau sonore à des degrés acceptables. Porter au besoin des protecteurs de l’ouïe. Placer les haut-parleurs de façon à minimiser le niveau sonore. Revêtir les murs de matériaux insonorisants

   

Surmenage vocal

Assurer un bon échauffement. Prévoir des formations et des mises en condition vocale appropriées

Mécanique automobile

Tambours de freins

Amiante

Ne procéder au nettoyage des tambours de freins qu’avec du matériel homologué

 

Dégraissage

Solvants

Utiliser des détergents à l’eau. Se servir d’un agent nettoyant pour pièces

 

Moteurs

Monoxyde de carbone

Prévoir un système d’évacuation des gaz d’échappement

 

Soudage

 

Voir ci-dessus

 

Peinture

Solvants, pigments

Ne procéder aux mises en peinture que dans une cabine de pulvérisation ou en extérieur et porter un appareil de protection respiratoire

Economie domestique

Cuisine et nutrition

Risques électriques

Se conformer aux consignes générales de sécurité électrique

   

Couteaux et autres ustensiles coupants

Toujours couper vers l’extérieur. Veiller à l’affûtage des couteaux

   

Incendie et brûlures

Equiper les fourneaux de hottes de ventilation munies de filtres à graisses avec évacuation extérieure. Porter des gants de protection pour manipuler les objets chauds

   

Produits de nettoyage

Porter des lunettes et des gants de protection ainsi qu’un tablier lors du nettoyage avec des acides ou des bases

Les enseignants des programmes destinés à l’enfance en difficulté peuvent être plus exposés que d’autres en raison, par exemple, de l’agressivité d’élèves souffrant de troubles affectifs, ou de l’incidence d’infections telles que l’hépatite A, B et C parmi les élèves handicapés placés dans des établissements spécialisés (Clemens et coll., 1992).

L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL ET L’APPRENTISSAGE

Gary Gibson

L’enseignement de savoir-faire spécialisés par placement en apprentissage chez un maître remonte au moins à l’Empire romain et se poursuit de nos jours dans les métiers traditionnels de la cordonnerie, de la menuiserie, de la maçonnerie pour ne citer que ceux-là. L’apprentissage peut être non structuré; dans ce cas, celui ou celle qui désire acquérir une qualification donnée trouve un employeur compétent qui lui enseignera le métier en échange de son labeur. Cependant, l’apprentissage se fait le plus souvent suivant des modalités plus officielles, supposant un contrat écrit entre employeur et apprenti, aux termes duquel l’apprenti est tenu de rester au service de l’employeur pendant un temps défini, en contrepartie de la formation qu’il lui dispense. Ces programmes obéissent en principe à des critères liés aux qualifications devant être acquises en fin d’apprentissage, ces critères étant fixés par un syndicat, une chambre professionnelle ou une organisation d’employeurs. Dans certains pays, ce sont les syndicats et les associations patronales qui gèrent directement les programmes d’apprentissage, lesquels associent en général une formation sur le tas structurée à des cours théoriques.

Aujourd’hui, toutefois, où la technique tient une place prépondérante, la demande en personnel qualifié est en augmentation dans de nombreuses spécialités: techniciens de laboratoire, mécaniciens, ajusteurs, esthéticiens-visagistes, cuisiniers, professions du tertiaire et bien d’autres. Ces compétences s’acquièrent habituellement dans les filières professionnelles des établissements scolaires, les écoles professionnelles ou polytechniques ou encore dans les instituts universitaires de premier cycle. Les formations comportent parfois des stages en entreprise.

Dans ces programmes de formation professionnelle, formateurs et apprenants encourent des risques à cause de la présence de produits chimiques, de machines, d’agents physiques et d’autres nuisances propres au métier ou à la branche. Il n’est pas rare que les élèves fassent leur apprentissage sur de vieilles machines léguées par des usines et qui ne sont pas nécessairement équipées de dispositifs de sécurité modernes: protections incorporées, systèmes de freinage ultrarapide, systèmes d’insonorisation, etc. Les formateurs eux-mêmes ne connaissent pas toujours bien les risques spécifiques, ni donc la manière de les prévenir. La ventilation des locaux, ainsi qu’un certain nombre de moyens de prévention technique, laissent fréquemment à désirer.

Les apprentis se trouvent assez facilement dans des situations de plus grande insécurité, car c’est à eux que l’on confie les besognes les plus salissantes et les plus dangereuses. Dans certains cas, ils constituent tout simplement une main-d’œuvre bon marché. Il est alors encore plus improbable que l’employeur ait été formé à la détection des risques et à leur maîtrise dans le secteur d’activités donné. Les apprentissages non officiels échappent bien souvent à la réglementation; les apprentis n’ont donc guère de recours à leur disposition s’ils sont exploités ou trop exposés.

L’âge constitue aussi un facteur de risques dans les filières d’apprentissage et de formation professionnelle. L’entrée en apprentissage se fait habituellement entre 16 et 18 ans. La formation professionnelle peut commencer dès l’école primaire. Or, selon certaines études, ce sont surtout les travailleurs âgés de 15 à 19 ans qui sont victimes de lésion professionnelle motivant un arrêt de travail. Par ailleurs, la plupart des jeunes travailleurs ayant été victimes d’accidents du travail au cours de l’année 1994 en Ontario, au Canada, étaient employés dans le secteur des services.

De telles statistiques indiquent que les élèves qui s’initient à ces métiers ne mesurent peut-être pas bien l’importance de la formation en matière de sécurité et de santé. Leur attention est peut-être moins soutenue et leur compréhension moindre que celles des adultes et il convient de tenir compte de ce fait dans la conception des programmes qui leur sont destinés. Enfin, certains secteurs, notamment celui des services, méritent de faire l’objet d’une plus grande vigilance, car les soucis de sécurité et de santé n’y sont pas aussi prioritaires qu’ailleurs.

Tout apprentissage ou enseignement professionnel devrait systématiquement prévoir une sensibilisation à la sécurité et à la santé au travail et comporter un volet information et communication en matière de danger. Formateurs et employeurs devraient avoir été dûment formés à l’identification des risques et à leur prévention, tant pour assurer leur propre sécurité que pour pouvoir former correctement les apprentis. L’aménagement matériel et technique du lieu de travail ou de formation doit être conforme aux normes de sécurité.

L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET UNIVERSITAIRE

Susan Magor

Au niveau supérieur, que ce soit dans l’enseignement, dans la recherche ou encore dans les activités d’appui, on s’adonne à des activités et on met en œuvre des substances dangereuses et des procédés si nombreux et si divers que la gestion de la sécurité et de la santé constitue un véritable défi pour les responsables de l’administration. Par définition, la recherche suppose un risque puisqu’elle tente de repousser les limites du moment à la fois du savoir et des techniques. Nombre d’activités de recherche scientifique, technique et médicale requièrent des installations, des moyens et du matériel de pointe coûteux, qu’il n’est pas toujours facile d’acquérir ou dont la mise au point n’est pas encore parachevée. La recherche peut aussi évoluer et se modifier sans que les installations en place n’aient été mises en conformité. La plupart des activités les plus dangereuses sont exécutées à intervalles très espacés et irréguliers, ou à titre expérimental, ne permettant pas d’en prévoir tous les risques. Que ce soit dans le cadre de l’enseignement ou dans celui de la recherche, les produits utilisés contiennent souvent des substances extrêmement dangereuses, alors que les données de sécurité et de toxicité dont on dispose sont insuffisantes, voire inexistantes. De telles substances sont généralement manipulées en quantités relativement faibles, mais dans des conditions qui laissent à désirer et par un personnel souvent mal formé. Il arrive également que certains universitaires très compétents dans leur spécialité fassent peu de cas des prescriptions légales ou administratives en vigueur dès lors que celles-ci semblent limiter leur liberté d’enseigner, et qu’ils n’identifient ou n’admettent pas toujours l’existence de risques pour la sécurité et la santé.

La liberté intellectuelle est un principe sacré que les universitaires, dont certains sont des sommités dans leur discipline, défendent farouchement. Ils combattront ou dédaigneront tout contrôle juridique ou administratif susceptible, à leurs yeux, de porter atteinte à ce principe. De fait, il n’est pas facile d’imposer des méthodes d’identification et de prévention des risques dans le cadre des activités d’enseignement et de recherche. Il faut convaincre les universitaires que les dispositions visant à préserver la sécurité et la santé vont dans le sens de leur mission première et la renforcent au lieu de l’entraver. Lorsqu’elles existent, ces dispositions tendent à protéger la vocation universitaire et les droits de la personne plutôt qu’à poursuivre un objectif de conformité à des règles et à des normes extérieures. Il serait probablement plus efficace de rendre les membres du corps professoral directement responsables de leurs actes et de les obliger à rendre des comptes plutôt que de prescrire des règlements.

Dans l’ensemble, la législation, les normes et les critères de référence en matière de sécurité et de santé ont été conçus pour l’industrie caractérisée par des paramètres bien particuliers: mise en œuvre de quantités considérables de produits chimiques en nombre relativement restreint; risques connus; méthodes éprouvées; et main-d’œuvre stable dans un système de gestion bien défini. Or, l’environnement universitaire diffère du milieu industriel à presque tous ces égards. Dans certains pays ou administrations territoriales, il arrive même que les établissements universitaires ne soient pas soumis à la législation applicable en matière de prévention.

L’université est le plus souvent gérée selon une structure hiérarchique comportant à son sommet l’universitaire, suivi du cadre professionnel non universitaire, puis du technicien et enfin du personnel d’appui. Il est fréquent que des étudiants de deuxième ou de troisième cycle y travaillent à temps partiel comme enseignants ou comme chercheurs. Les universitaires nommés à des postes élevés de direction pour des périodes déterminées ont peu d’expérience dans le domaine de la gestion et ne reçoivent pas de formation pour pallier ce manque. En outre, le taux élevé de roulement des effectifs peut nuire à la pérennité de cet effort. Dans ce type de système, les directeurs de recherche, y compris dans le cas de très grandes institutions, disposent généralement d’une relative autonomie de gestion. Ils ont toute la latitude voulue pour décider des choix budgétaires, de l’aménagement des locaux, de l’achat des biens et des services, de l’organisation du travail et du recrutement. Il se peut donc qu’on néglige de prendre en compte les risques ou même qu’ils ne soient pas perçus du tout.

Les chercheurs universitaires ont coutume d’employer des étudiants de troisième cycle comme assistants de recherche et d’entretenir avec eux des rapports de maître à élève. Ces assistants ne bénéficient pas toujours d’une protection aux termes de la législation sur la sécurité et la santé et, quand bien même ils sont couverts par la loi, ils peuvent répugner à exercer leurs droits ou à attirer l’attention sur des manquements à la sécurité auprès de supérieurs hiérarchiques qui sont peut-être aussi chargés de noter leur travail universitaire. Il est courant qu’ils travaillent de longues heures sous une forte tension, la nuit et en fin de semaine, avec une supervision minimale et des services d’appui quasi inexistants. Les mesures de compression des dépenses et d’économie d’énergie peuvent même amener à contingenter des services essentiels, tels que la sécurité ou la ventilation, pendant la nuit ou les fins de semaine. Les étudiants ne sont bien souvent pas couverts par la législation en matière de sécurité; il faut pourtant impérativement veiller à ce qu’ils bénéficient de la même protection que les autres travailleurs.

Les catégories de risques

Selon l’importance et la nature de l’institution, le type de programmes offerts et la nature des activités de recherche (voir tableau 94.3), il existe un très large éventail de dangers potentiels en milieu universitaire. Les petites facultés où ne sont enseignées que la littérature et les sciences humaines recèlent sans doute relativement moins de nuisances, tandis que les grandes universités, avec leurs écoles de médecine, de génie, de beaux-arts, et leurs vastes programmes de recherche, peuvent présenter de multiples risques, qui peuvent être très graves, tels que ceux qui sont liés à certains agents chimiques, biologiques, physiques (rayonnements ionisants et non ionisants) ou encore ceux qui peuvent perturber la fonction reproductrice humaine.

Tableau 94.3 Risques d'exposition dans les établissements d'enseignement
supérieur et universitaire

Risques

Sources

Lieux/activités

Produits chimiques toxiques (cancérogènes, tératogènes, caustiques, métaux lourds, amiante, silice)

Produits utilisés en laboratoire, solvants, dégraissants, colles, fournitures artistiques, manomètres, thermomètres, produits photochimiques, colorants, déchets dangereux

Laboratoires, studios d’art, ateliers, structures de soins, maintenance, ateliers d’usinage, théâtres, chambres noires, installations et équipements, patinoires de hockey

Substances inflammables et explosives

Produits utilisés en laboratoire, produits de nettoyage, solvants, combustibles

Laboratoires, maintenance, ateliers, studios d’art, chantiers

Pesticides

Fumigation, produits de lutte antiparasitaire, désinfectants

Entretien ménager, entretien des terrains, serres, agriculture

Agents biologiques

Manipulation d’animaux, cultures de cellules et de tissus, fluides corporels et sanguins, prélèvements pour diagnostic, objets piquants et tranchants souillés, déchets solides

Elevages d’animaux, soins de santé, ordre et propreté, laboratoires

Rayonnements non ionisants

Lasers, micro-ondes, aimants, électronique, rayons ultraviolets

Laboratoires, travaux électriques, structures de soins, ateliers, opérations techniques

Rayonnements ionisants

Radio-isotopes, chromatographie en phase gazeuse, rayons X, étalonnage, réacteurs, générateurs de neutrons, gestion des déchets

Laboratoires, installations médicales, installations et équipements

Ergonomie

Manutention, travail de bureau, ordinateurs

Bibliothèques, bureaux, maintenance, manutention, conduite de camions, cantines

Chaleur/froid

Travail à l’extérieur, surmenage

Entretien des terrains, sécurité publique, maintenance, travail sur le terrain, agriculture et foresterie

Bruit

Machines, chaudières et récipients sous pression, ordinateurs, travaux de construction et maintenance, ventilation

Chaufferies, imprimeries, maintenance des locaux et des terrains, travaux de construction, salles d’ordinateurs, laboratoires, ateliers d’usinage, studios d’art

Violence

Communauté interne, communauté externe, conflits domestiques, résistance à la loi

Salles de classes, lieux de réunion, services comptables, réserves, cantine, service du personnel, sécurité

Electricité

Matériel électrique, travaux de construction et maintenance, pose de câbles électriques par des non-professionnels, manifestations spéciales

Laboratoires, ateliers, services de maintenance, chantiers, ateliers d’électronique, résidences, théâtres, manifestations spéciales

Gaz sous pression

Matériel de laboratoire et manipulations, soudage, réfrigérants, matériel de fabrication de glace, construction

Laboratoires, ateliers de travail des métaux, chantiers, ateliers d’usinage, patinoires de hockey

Risques mécaniques

Manutention, robots, travaux de construction et maintenance

Ateliers d’imprimerie, maintenance des locaux et des terrains, installations et équipements, laboratoires scientifiques et techniques, ateliers d’usinage

Objets coupants

Verre brisé, instruments de coupe, aiguilles, récipients de laboratoire, éprouvettes

Entretien ménager, laboratoires, soins de santé, studios d’art, ateliers

L’entretien des locaux, du matériel et des terrains, la manipulation de substances dangereuses, l’utilisation de machines et de véhicules à moteur, ainsi que le travail de bureau sont des types d’activité communs à la plupart des établissements. Ils comportent des risques qui sont abordés ailleurs dans la présente Encyclopédie.

La violence sur le lieu de travail est un problème nouveau qui touche particulièrement les enseignants, le personnel en contact avec le public, les employés qui manient de l’argent et les vigiles.

Les grands centres d’enseignement supérieur sont comparables à des villes où vit et travaille toute une population. On y retrouve donc, et en interaction, les problèmes de sécurité personnelle et collective, d’une part, et les questions de sécurité et de santé au travail, d’autre part.

La prévention et la maîtrise des risques

On ne devrait envisager d’identifier les risques par les procédés ordinaires que sont l’inspection et les enquêtes après accident qu’après avoir examiné très attentivement les installations et programmes proposés. En tout état de cause, on ne devrait autoriser le démarrage des activités qu’après avoir procédé à cet examen. Dès le premier stade de leur planification, les nouveaux projets de recherche et programmes d’enseignement doivent être évalués sous l’angle des risques pour le personnel et l’environnement. Il arrive que les chercheurs ne soient pas au courant des prescriptions et des normes de sécurité applicables à leurs travaux. Pour bien des activités, il conviendrait que chercheurs et préventeurs travaillent ensemble à élaborer des procédures de sécurité tout au long de leurs travaux de recherche alors que de nouveaux risques apparaissent. En principe, l’université a aussi pour mission de diffuser une culture de sécurité. Elle devrait pour cela intégrer les aspects de sécurité et de santé dans les programmes de cours, les manuels d’exploitation et les guides de sécurité pour les laboratoires destinés aux étudiants, ou encore fournir aux employés des renseignements et une formation spécifique. En matière de risques, la communication, la formation et la supervision sont déterminants.

Dans les laboratoires, les ateliers et les studios d’art, il faut compléter le système de ventilation générale grâce à un dispositif d’aspiration localisée. Dans certains cas, il faut prévoir des mesures de confinement des agents biologiques, des systèmes d’isolement ou l’installation d’écrans de protection contre les isotopes radioactifs. S’il ne constitue pas un moyen de prévention primaire, l’équipement de protection individuelle peut néanmoins être la meilleure solution pour se protéger dans des situations temporaires ou encore pour la réalisation d’expériences particulières.

Il est en outre fréquemment nécessaire pour l’institution de mettre sur pied des programmes de gestion des déchets et des matières dangereuses. L’acquisition et la distribution des produits chimiques couramment utilisés devraient être centralisées et il conviendrait par ailleurs d’effectuer les expériences à échelle très réduite pendant les cours pour éviter de devoir stocker des quantités importantes de ces produits dans les laboratoires, studios et ateliers.

En disposant d’un plan d’intervention d’urgence qui prévoit les opérations à mener au cas où surviendrait un événement majeur pour lequel les capacités de riposte normales ne suffiraient pas, on pourra atténuer les effets qu’un accident grave pourrait avoir sur la sécurité et la santé des personnes.

L’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE

Ted J. Rickard

Les problèmes de sécurité et de santé dans le domaine de l’enseignement des arts sont les mêmes de l’école secondaire à l’université. Mais l’enseignement des arts a ceci de particulier que les risques n’y sont souvent pas reconnus alors même qu’ils existent à une échelle semi-industrielle, notamment au niveau des établissements d’enseignement supérieur. Parmi ces risques il faut citer: l’inhalation d’aérocontaminants, l’ingestion ou l’absorption cutanée de produits toxiques, les lésions corporelles dues aux machines et outils, les glissades, les trébuchements et les chutes, les lésions dues à des mouvements répétitifs et autres troubles musculo-squelettiques. Diverses mesures permettent de prévenir ces risques comme l’installation d’un système de ventilation adéquat (ventilation générale et aspiration localisée), la manipulation et l’entreposage des produits chimiques dans de bonnes conditions de sécurité, l’entretien soigneux de machines équipées de dispositifs de sûreté, un bon nettoyage des outils et du matériel, un entretien sanitaire rigoureux des locaux et l’aménagement ergonomique des postes de travail. L’un des meilleurs moyens de prévenir les risques professionnels reste encore d’imposer aux travailleurs de suivre une formation appropriée.

Les enseignants du primaire et du secondaire

Dans les écoles primaires et secondaires, les risques proviennent de la pulvérisation ou de la mauvaise utilisation de solvants et autres produits chimiques, et de l’insuffisance ou de la mauvaise conception de la ventilation. Souvent, c’est parce que l’équipement approprié fait défaut et parce que les propriétés des matériaux utilisés sont mal connues que les conditions de travail sont dangereuses ou insalubres. Parmi les mesures de précaution à adopter, il faut citer le recours à des moyens de prévention technique efficaces, une meilleure connaissance des matériaux utilisés, le remplacement des fournitures dangereuses dans les écoles par des produits plus sûrs (voir tableau 94.2). Ces mesures contribueront à protéger indifféremment les enseignants, les techniciens, les préposés à l’entretien, le personnel administratif et les élèves.

Les enseignants des établissements supérieurs et universitaires

Outre les dangers mentionnés ci-dessus, certains risques sont propres aux établissements d’enseignement supérieur et universitaire du fait que les étudiants, les enseignants et les techniciens effectuent davantage d’expériences et utilisent, pour cette raison, plus de machines et de matériaux potentiellement dangereux. Qui plus est, ces groupes tendent à travailler à plus grande échelle et pendant des périodes plus longues. On se prémunira de ces risques par l’éducation et la formation, la mise en place de moyens de prévention technique, la fourniture d’équipements de protection individuelle, l’établissement de procédures et de politiques écrites de prévention et l’adoption de mesures garantissant leur application.

La liberté artistique

Bien des professeurs et techniciens de l’art sont eux-mêmes des artistes, doublement exposés aux dangers associés aux matériaux et procédés artistiques et, donc, particulièrement menacés dans leur santé. Confrontés aux risques liés à leur spécialité qu’ils ignoraient ou dont ils n’ont pas tenu compte, les artistes ont tendance à réagir de manière défensive. Ce sont souvent des expérimentateurs dont le mode de pensée plutôt anticonformiste les incite à défier les règlements. Il importe néanmoins que les administrateurs d’écoles sachent ne pas sacrifier la sécurité au profit de la liberté artistique.

La responsabilité et la formation

Dans de nombreux pays, les enseignants engagent à la fois leur responsabilité personnelle et celle de leur établissement pour ce qui est de la sécurité des élèves, particulièrement celle des plus jeunes. «Etant donné l’âge et les niveaux de maturité et d’expérience des élèves, et parce que les enseignants agissent in loco parentis (à la place des parents), les écoles doivent offrir un environnement sûr et instituer des pratiques raisonnables pour assurer la protection des élèves» (Qualley, 1986).

Les programmes de sécurité et de santé

Les établissements d’enseignement doivent former les professeurs d’art et les administrateurs à gérer les risques que peuvent présenter les matériaux et les techniques employés, mais aussi leur enseigner à se protéger eux-mêmes et à protéger leurs élèves. Une administration scolaire prévoyante veillera à prescrire une réglementation écrite et à adopter des méthodes et des programmes de sécurité et de santé au travail. Elle exigera que ces prescriptions soient respectées et que les responsables reçoivent une formation régulière à la prévention, dans le souci constant et véritable de favoriser la création artistique en toute sécurité.

LES PROBLÈMES DE SANTÉ ET LES TYPES DE MALADIES

Steven D. Stellman et Joshua E. Muscat

Un peu partout dans le monde, les enseignants représentent une part importante et croissante de la population active. Ainsi, en 1992, on recensait aux Etats-Unis plus de 4,2 millions de personnes dans la catégorie «enseignants du préscolaire au secondaire». Outre les enseignants proprement dits, les écoles emploient d’autres catégories de personnel, dont celui chargé de la surveillance et de l’entretien, des soins infirmiers, de la restauration ou des services techniques.

On n’a guère tendance à envisager l’enseignement comme une profession où l’on est exposé à des produits dangereux. Par conséquent, les problèmes sanitaires liés à l’exercice de cette profession ont été assez peu étudiés. Il reste que les enseignants et le personnel scolaire encourent toutes sortes de risques professionnels, qu’ils soient physiques, chimiques, biologiques ou autres.

La pollution de l’air des locaux de travail est cause fréquente de maladies aiguës chez les enseignants. Elle a souvent pour origine le mauvais entretien des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation. Elle peut provoquer des troubles respiratoires et cutanés graves. On trouve dans l’air des bâtiments récemment construits ou rénovés des substances chimiques, des poussières et des vapeurs diverses qui proviennent des toitures, des matériaux isolants, des moquettes, des rideaux, des meubles, de la peinture, du calfeutrage et ainsi de suite. Les dégâts des eaux non réparés — à la suite, par exemple, d’une fuite dans la toiture — peuvent aussi favoriser la prolifération de micro-organismes dans les matériaux de construction et les systèmes de ventilation et le dégagement d’aérosols biologiques nocifs pour l’appareil respiratoire des occupants des lieux. La contamination des bâtiments scolaires par des micro-organismes peut entraîner des affections respiratoires graves: pneumonie, infections des voies respiratoires supérieures, asthme ou encore rhinite allergique.

Les enseignants des disciplines techniques sont exposés, pour leur part, à d’autres risques spécifiques. Ceux qui enseignent les arts plastiques et les travaux manuels, par exemple, se servent beaucoup de produits chimiques, notamment de pigments, de teintures et de solvants organiques, de métaux et composés métalliques, de minéraux ou de plastiques (Rossol, 1990). D’autres matériaux couramment employés dans les arts plastiques sont connus pour leurs propriétés allergisantes. L’exposition concomitante à plusieurs de ces matériaux est strictement réglementée dans l’industrie, alors qu’elle ne l’est pas dans la salle de classe. Dans les laboratoires, les professeurs de chimie et de biologie sont exposés à des produits toxiques comme le formol et à des risques biologiques. Les enseignants des filières techniques travaillent dans des ateliers empoussiérés où l’on retrouve de fortes concentrations de poussières de bois et de produits de nettoyage ainsi que des niveaux sonores excessifs.

L’enseignement est une profession caractérisée par des taux élevés de stress, d’absentéisme et d’épuisement. Le stress de l’enseignant a de nombreuses origines, qui varient avec le niveau de la classe: relations avec l’administration, questions de programme, promotion professionnelle, manque de motivation des élèves, effectifs des classes, incompatibilité entre différents rôles et, enfin, insécurité de l’emploi. Le stress peut aussi être dû à l’indiscipline des élèves et, éventuellement, aux actes de violence et à la présence d’armes dans l’établissement, en sus des risques physiques et environnementaux tels que le bruit. De fait, les niveaux sonores souhaitables pour une salle de classe se situent entre 40 et 50 décibels (dB) (Silverstone, 1981); or, une enquête menée dans plusieurs écoles a donné des moyennes comprises entre 59 et 65 dB (Orloske et Leddo, 1981). Les enseignants qui exercent un second emploi, ou qui travaillent l’été, encourent parfois d’autres risques professionnels qui peuvent se répercuter sur leur efficacité personnelle et sur leur état de santé général. La majorité des enseignants étant des femmes (elles représentent aux Etats-Unis les trois quarts des effectifs du corps enseignant), il convient aussi de poser la question des conséquences, sur leur santé, du double rôle de salariée et de mère qu’elles sont appelées à jouer. Cependant, il ressort de plusieurs études (Herloff et Jarvholm, 1989) que, en dépit des niveaux élevés de stress qui ont été relevés, le taux de mortalité par maladies cardio-vasculaires est moins élevé chez les enseignants que dans d’autres professions, ce qui pourrait s’expliquer par une consommation moindre de tabac et d’alcool.

On en est venu à se demander de date plus récente si certains établissements scolaires ne recelaient pas des agents cancérogènes: amiante, champs électromagnétiques, plomb, produits de lutte antiparasitaire, radon, autres aérocontaminants (Regents Advisory Committee on Environmental Quality in Schools, 1994). Le risque d’exposition à l’amiante concerne spécialement les personnels de surveillance et d’entretien. On a relevé chez ceux-ci une prévalence élevée d’anomalies caractéristiques des maladies liées à l’amiante (Anderson et coll., 1992). Lee et coll. (1992) ont signalé une plus grande concentration d’amiante en suspension dans l’air dans certains établissements scolaires que dans d’autres types de bâtiments.

Certains bâtiments scolaires sont situés près de lignes à haute tension, qui sont sources de champs électromagnétiques (CEM). Les CEM sont également produits par les écrans de visualisation et par les fils électriques dénudés. Plusieurs études (Savitz, 1993) établissent un lien entre l’exposition aux CEM et l’incidence de la leucémie, du cancer du sein et du cerveau. Les effets potentiels de l’exposition aux produits de lutte antiparasitaire utilisés dans les écoles ont également été étudiés. Selon Wolff et coll. (1993), les résidus de ces produits trouvés dans le tissu adipeux et dans le sérum des sujets atteints du cancer du sein pourraient être reliés à l’apparition de cette maladie.

La forte proportion de femmes dans la profession enseignante a amené à s’interroger sur les risques particuliers de cancer du sein. Plusieurs études ont mis en évidence une augmentation inexplicablement accrue de ce type de cancer. Le dépouillement des certificats de décès établis dans 23 Etats des Etats-Unis entre 1979 et 1987 a montré que les taux de mortalité proportionnelle dus au cancer du sein étaient de 162 chez les enseignantes blanches et de 214 chez leurs homologues noires (Rubin et coll., 1993). Ces chiffres étaient également élevés chez les enseignantes du New Jersey et de la région Portland-Vancouver (Rosenman, 1994; Morton, 1995). Bien que, jusqu’à présent, aucun lien causal n’ait pu être établi entre l’accroissement des taux observés et des facteurs environnementaux spécifiques, ou d’autres facteurs de risque, cette tendance a sensibilisé certaines organisations de l’enseignement au risque de cancer du sein dans cette profession, et des campagnes de dépistage et de détection précoce ont été mises sur pied.

LES PROBLÈMES D’ENVIRONNEMENT ET DE SANTÉ PUBLIQUE

Susan Magor

Les établissements d’enseignement sont tenus de s’assurer que leurs installations, de même que l’ensemble de leurs méthodes de travail, obéissent à la législation en vigueur sur la protection de l’environnement et sur la santé publique; ils doivent également respecter les normes admises en matière de prise en charge des employés, des élèves et des membres de la collectivité où ils sont implantés. En règle générale, les apprenants ne sont pas couverts par la réglementation sur la sécurité et la santé au travail, mais les établissements d’enseignement doivent les protéger avec au moins autant de diligence que n’en exige la législation applicable aux travailleurs. Ces établissements ont de surcroît l’obligation morale d’instruire leurs usagers sur les questions de sécurité individuelle, publique, professionnelle et environnementale les concernant en propre, ou concernant leurs activités.

Les établissements d’enseignement supérieur et universitaire

Sous certains aspects (taille de la population, aire géographique, type de services de base nécessaires, complexité des activités qui s’y déroulent), les grands établissements de l’enseignement supérieur et universitaire tels que les campus et les résidences universitaires sont comparables à de gros villages ou à de petites villes. Outre les problèmes de sécurité et de santé au travail inhérents à de telles institutions (traités au chapitre no 101, «Les services publics et gouvernementaux»), on y rencontre d’autres difficultés du fait que d’importantes populations cohabitent, travaillent et étudient dans une zone définie, difficultés qu’il convient d’aborder.

La gestion des déchets d’un campus peut être une entreprise complexe. En vertu de la législation sur l’environnement, de nombreuses instances imposent des normes rigoureuses de contrôle et de maîtrise des eaux usées et des émissions gazeuses produites au cours des activités d’enseignement, de recherche et de service. Dans certains cas, les besoins des collectivités extérieures au campus peuvent aussi amener l’institution à développer un cadre spécial de relations publiques.

La gestion des déchets chimiques et des déchets solides doit tenir compte des critères de santé au travail, de protection de l’environnement et d’hygiène publique. La plupart des établissements d’une certaine taille ont des programmes de traitement de déchets de grande envergure, étant donné l’hétérogénéité de ces derniers: substances chimiques, radio-isotopes, plomb, amiante, déchets biomédicaux, détritus ordinaires et ménagers, déchets humides et rebuts de matériaux de construction. Mais compte tenu du grand nombre des services administratifs impliqués (et qui ne communiquent pas toujours efficacement entre eux), il est nécessaire de faire un sérieux effort de coordination dans ce domaine.

Les établissements d’enseignement supérieur et universitaire diffèrent de l’industrie tant par le volume que par les types de déchets dangereux qui résultent de leurs activités. Les laboratoires universitaires, par exemple, produisent une grande variété de substances dangereuses, mais en petites quantités. L’élimination des déchets dangereux peut comporter des procédés de neutralisation des acides et des alcalis, ou de récupération à petite échelle des solvants par distillation, ou par un «emballage en laboratoire», lequel consiste à placer des petits récipients de toxiques compatibles entre eux dans des tonneaux, en les séparant par de la sciure ou d’autres matériaux d’emballage pour qu’ils ne se brisent pas. Les campus universitaires étant susceptibles de jeter de très grandes quantités de papier, de verre, de métal et de plastique, des programmes de recyclage peuvent être mis en œuvre dans un geste de responsabilité civique et d’affirmation de la vocation éducative de l’université.

Les institutions situées au cœur de zones urbaines peuvent être lourdement tributaires des services essentiels assurés par la collectivité: police, brigades de sapeurs-pompiers, équipes d’intervention d’urgence, par exemple. La majorité des moyennes et grandes institutions possèdent leurs propres services de sécurité pour le campus, lesquels opèrent souvent en étroite collaboration avec des instances extérieures. Dans maintes villes universitaires, l’université est le principal employeur et doit donc, en principe, assurer une certaine protection aux populations qui assurent sa pérennité.

Les établissements d’enseignement supérieur et universitaire ne sont plus des systèmes en vase clos, coupés de la collectivité dans laquelle ils sont situés. L’éducation s’est ouverte à de vastes secteurs de la société: femmes, étudiants plus âgés, personnes handicapées. La nature même de ces établissements les place dans une situation de risque, car elles rassemblent une population vulnérable, qui accorde une importance particulière à l’échange d’idées et à la divergence de vues, mais où la notion de liberté intellectuelle n’est pas toujours équilibrée par celle de responsabilité professionnelle. On constate, ces dernières années, une recrudescence des actes de violence commis à l’encontre des membres de la communauté éducative par des personnes qui font partie de l’université ou lui sont étrangères. Les agressions de ce type ne sont plus des événements rarissimes. Les campus sont souvent le lieu de manifestations diverses, grands rassemblements, événements sportifs ou politiques, et les problèmes de sécurité publique et de maîtrise des foules doivent y être abordés. Pour satisfaire aux besoins de l’ensemble de la collectivité locale, les plans et dispositifs de sécurité publique et d’intervention d’urgence doivent être constamment réévalués et périodiquement mis à jour. Des mesures d’identification et de gestion des risques doivent être prises lors des compétitions sportives, des sorties de groupe, ou pour toutes sortes d’activités récréatives parrainées par l’institution. Un service d’intervention médicale d’urgence doit être prévu même pour les activités extra-muros. L’identification des risques et la sensibilisation pédagogique demeurent le meilleur moyen d’assurer la sécurité individuelle.

Il convient aussi d’aborder les problèmes de santé publique qui se posent sur les campus tels que la prévention des maladies contagieuses, la salubrité des services de restauration et des aménagements résidentiels, l’approvisionnement en eau potable, la qualité de l’air et la contamination des sols, d’où la nécessité d’élaborer des programmes d’inspection, d’évaluation et de contrôle. A cet égard, la tâche d’informer les étudiants revient habituellement au chargé des services aux étudiants, mais les responsables de la sécurité et de la santé au travail sont souvent également amenés à intervenir. La sensibilisation au risque de contamination par des maladies sexuellement transmissibles ou par des pathogènes véhiculés par le sang ainsi que l’information sur la toxicomanie, l’alcoolisme, le stress et la santé mentale, entres autres, sont particulièrement importantes dans une communauté où les comportements à risque accentuent la probabilité d’exposition au danger. Des services médicaux et de soutien psychologique doivent être disponibles.

Les écoles primaires et secondaires

Ces établissements connaissent sensiblement les mêmes problèmes d’environnement et de santé publique que ceux de l’enseignement supérieur, mais à plus petite échelle. Il est fréquent toutefois que les écoles et circonscriptions scolaires n’aient pas vraiment de programmes de gestion des déchets. Bon nombre d’entre elles sont confrontées à la difficulté d’éliminer des substances explosives comme l’éther et l’acide picrique qui se trouvent entreposées dans leur laboratoire depuis des années (National Research Council (NRC), 1993). Il est arrivé qu’en cherchant à se débarrasser de ces produits un personnel non qualifié provoque des explosions. Par ailleurs, dans certaines circonscriptions scolaires, les établissements peuvent être distants les uns des autres de plusieurs kilomètres. C’est là un obstacle à la centralisation des programmes d’élimination des déchets dangereux, ces derniers devant être transportés sur la voie publique.

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