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Chapitre 91 - Les véhicules à moteur et l'équipement lourd

L’INDUSTRIE DE L’AUTOMOBILE ET DU MATÉRIEL DE TRANSPORT LOURD

Franklin E. Mirer

Généralités

L’industrie de l’automobile et du matériel de transport lourd comprend différents secteurs qui produisent:

Une ligne d’assemblage typique de production de véhicules assemble des pièces et des composants provenant de diverses usines de fabrication. Les éléments d’un véhicule peuvent être fabriqués au sein d’une même entreprise ou être achetés à d’autres entreprises. Ce secteur industriel a un siècle d’existence. La production en Amérique du Nord, en Europe et, depuis la seconde guerre mondiale, au Japon, s’est progressivement concentrée autour de quelques groupes qui ont conservé leurs usines d’assemblage en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie, pour la commercialisation sur ces marchés. Depuis les années soixante-dix, le commerce international de véhicules finis s’est développé et les échanges commerciaux d’équipements d’origine et de pièces détachées produits par des usines situées dans les pays en développement sont en augmentation constante.

La fabrication, d’une part, de poids lourds, d’autobus et de matériels agricoles et de travaux publics, et, d’autre part, celle de véhicules de tourisme constituent deux secteurs bien distincts; certains constructeurs d’automobiles cependant sont présents sur ces deux marchés et fabriquent même aussi du matériel agricole et de travaux publics. Dans la première catégorie, les véhicules sont en général équipés de moteurs diesel de grosse cylindrée, les rythmes de production sont nettement plus lents, les volumes moins importants et les procédés moins mécanisés.

Les différents types d’usines de production, les méthodes de fabrication et les produits automobiles correspondants sont énumérés dans le tableau 91.1. La figure 91.1 est un diagramme des différentes étapes de la production automobile. Les activités principales sont les suivantes: assemblage de la carrosserie pour les véhicules et les voitures de tourisme; assemblage de la carrosserie pour les camions et les autobus; fabrication de pièces et d’accessoires d’automobiles; fonderies de fer et d’acier; fonderies de métaux non ferreux; emboutissage; forges de fer et d’acier; équipements électriques des moteurs; production de pièces de garnissage et de finition; etc. La fabrication des composants emploie plus de personnes que les opérations d’assemblage. A ces services il faut ajouter des bureaux d’études, des services de construction et d’entretien des installations et des équipements, des services administratifs et de direction, un réseau commercial et des services après-vente et de réparation. Il est à noter qu’aux Etats-Unis, pour citer ce pays, le réseau commercial, l’après-vente et les pièces de rechange emploient environ deux fois plus de personnel que la production.

Tableau 91.1 Les méthodes de fabrication dans la production d'automobiles

Type d’installations

Produits et méthodes

Fonderie de métaux ferreux

Pièces coulées pour blocs-moteurs et autres éléments

Fonderie d’aluminium et moulage sous pression

Blocs-moteurs et culasses, carters de transmission, autres pièces

Forge et traitement thermique

Pièces préusinées pour moteurs, suspensions et transmissions

Emboutissage

Panneaux de carrosserie et sous-ensembles

Moteur

Usinage de pièces coulées, assemblage du produit fini

Transmission

Usinage de pièces coulées et forgées, assemblage du produit fini

Verre

Pare-brise, vitres latérales et vitres arrière

Autres pièces

Usinage, emboutissage et montage, y compris freins, pièces de suspension, chauffage et climatisation, équipement antipollution, éclairage du véhicule

Electricité et électronique

Systèmes d’allumage, radio, moteurs, modules de commande

Accessoires et garnitures extérieures

Panneaux de carrosserie moulés en polymères, éléments de garnissage

Garnitures intérieures

Mousses de sièges, sièges complets, tableaux de bord, panneaux intérieurs

Assemblage véhicule

Carrosserie, peinture, assemblage châssis, assemblage final

Magasin de pièces détachées

Stockage, peinture et montage des pièces, emballage et expédition

Figure 91.1 Diagramme de la production d'automobiles

Figure 91.1

La main-d’œuvre est principalement masculine. Aux Etats-Unis, par exemple, ce secteur emploie 80% d’hommes. En revanche, on trouve un personnel essentiellement féminin dans le secteur du garnissage et dans ceux où le travail est moins dur. Peu d’ouvriers évoluent vers des postes d’employés de bureau ou de techniciens et des emplois professionnels. Toutefois, les agents de maîtrise sur les lignes d’assemblage viennent souvent des unités de production et de maintenance. Environ 20% du personnel ouvrier est qualifié; selon les opérations, cette proportion est extrêmement variable, à savoir de moins de 10% des ouvriers sur les lignes d’assemblage jusqu’à presque 50% dans l’emboutissage. En raison de compressions de personnel survenues au cours des années quatre-vingt, l’âge moyen du personnel, à la fin des années quatre-vingt-dix, est supérieur à 45 ans, l’industrie n’ayant recommencé à embaucher que depuis 1994.

Les principaux secteurs et les principales méthodes de fabrication

La fonderie de métaux ferreux

La fonderie est un procédé de fabrication de pièces métalliques dans lequel on coule du métal en fusion dans une cavité à l’intérieur d’un moule résistant à la chaleur, qui correspond à la forme extérieure ou à la forme négative du modèle de l’objet métallique désiré. Le moule peut comporter des noyaux permettant de ménager des cavités internes dans l’objet métallique monté. Les principales étapes du travail de fonderie sont les suivantes:

Les fonderies de métaux ferreux de production en série sont un élément caractéristique de l’industrie automobile. Elles sont utilisées pour la fabrication de blocs-moteurs, de culasses, etc. Il existe deux principaux types de fonderies de métaux ferreux: les fonderies de fonte grise et les fonderies de fonte GS. Les fonderies de fonte grise utilisent de la ferraille ou de la fonte brute (lingots neufs) pour réaliser des pièces en fonte courante. Pour obtenir des fontes ductiles, on ajoute du magnésium, du cérium ou d’autres additifs dans les poches de coulée du métal en fusion, avant la coulée, pour produire des pièces en fonte nodulaire ou malléable. Les différents additifs employés dans ces opérations ne présentent que de faibles risques pour le personnel.

Les ateliers de fonderie de ce secteur utilisent en général des fours à induction ou des cubilots pour la fusion du métal. Un cubilot est un four vertical de grande hauteur, ouvert à sa partie supérieure, équipé de portes pivotantes à sa base. Il est chargé par le haut, avec une alternance de couches de coke, de chaux et de métal; le métal en fusion est récupéré dans la partie inférieure. Dans un four à induction, on obtient la fusion du métal en faisant passer un courant électrique à forte intensité dans des enroulements en cuivre situés à l’extérieur du four. Ce procédé induit un courant électrique à la périphérie de la charge de métal, qui chauffe celle-ci du fait de sa forte résistance électrique. La fusion progresse de l’extérieur vers l’intérieur de la charge.

Dans les fonderies de métaux ferreux, les moules sont traditionnellement réalisés en sable à vert (sable siliceux, poussière de charbon, argile et agglomérants organiques), versé autour du modèle, constitué en général de deux parties, puis serré. Dans les fonderies, cette opération peut être effectuée manuellement ou mécaniquement sur un tapis roulant. On retire le modèle, et le moule est assemblé mécaniquement ou manuellement. Ce dernier doit comporter un jet de coulée.

Si l’intérieur de la pièce coulée doit être creux, il est nécessaire d’insérer un noyau dans le moule. Les noyaux peuvent être réalisés avec un mélange de sable et de résines phénol-formol thermodurcissables (ou résines similaires) qui est ensuite chauffé (procédé en boîte chaude ) ou avec des mélanges uréthane/sable aux amines qui durcissent à température ambiante (procédé en boîte froide ). Le mélange résine/sable est versé dans une boîte à noyau, dotée d’une cavité ayant la forme désirée du noyau.

Les pièces fabriquées en fonte grise sont généralement de taille importante, comme les blocs-moteurs, ce qui augmente les risques physiques au poste de travail et cause des problèmes accrus de dépoussiérage.

Les polluants atmosphériques présents dans les opérations de fonderie

Poussières de silice. Des poussières de silice sont émises par les opérations de finition, de décochage et d’éjection, de moulage, de fabrication de noyaux et par les activités de maintenance des installations de sablage et de fusion. Dans les années soixante-dix, des études de prélèvement de l’air ambiant ont mis en évidence des surexpositions répétées à la silice, tout particulièrement dans les opérations de finition. A ce propos, les expositions à la silice observées étaient plus importantes dans les ateliers de fonderie mécanisés que dans les ateliers non mécanisés. On a alors renforcé les mesures de protection en fermant les zones de travail et en équipant les installations de sablage et de décochage de dispositifs d’aspiration. On a aussi mécanisé les ateliers et instauré des contrôles d’ambiance périodiques, ce qui a permis de réduire les concentrations dans l’air. Des systèmes de ventilation classiques existent aujourd’hui pour la plupart des opérations de fonderie. On note cependant des niveaux d’exposition supérieurs aux limites lors des opérations de finition, lorsqu’il faut éliminer les restes de sable et de silice sur les surfaces des pièces coulées après décochage.

Monoxyde de carbone . On enregistre des niveaux particulièrement dangereux de monoxyde de carbone lors des opérations de maintenance des cubilots, lorsque la ventilation des ateliers de fusion est défectueuse, et des niveaux trop élevés dans les tunnels de refroidissement. Il existe également une exposition au monoxyde de carbone lors de la fusion en cubilot et lors de la combustion du carbone dans les moules en sable à vert. On observe aussi des expositions au dioxyde de soufre d’origine inconnue, peut-être dues à des polluants sulfureux présents dans le moule.

Vapeurs métalliques . Les opérations de fusion et de coulée dégagent des vapeurs métalliques. Il est nécessaire d’utiliser des hottes au-dessus des postes de coulée afin d’aspirer aussi bien les vapeurs métalliques que les gaz de combustion. Des expositions excessives aux vapeurs de plomb peuvent parfois être constatées dans les fonderies de fer et elles sont très courantes dans les fonderies de cuivre; les vapeurs de plomb lors de la fusion de la fonte grise sont dues à la contamination par le plomb des ferrailles utilisées.

Autres risques chimiques et physiques. Les émissions produites lors du moulage et de la cuisson des noyaux peuvent contenir du formaldéhyde, des vapeurs d’amines et des produits de pyrolyse des isocyanates. La fabrication industrielle de noyaux de moulage est très caractéristique de l’industrie automobile. Au milieu des années soixante, les noyaux à l’huile ont été remplacés par une méthode phénol-formol en boîte chaude, qui entraîne des niveaux d’exposition importants au formaldéhyde, d’où une augmentation des risques d’irritation des voies respiratoires, de pathologies pulmonaires et de cancers du poumon. Il est donc obligatoire d’installer des dispositifs de ventilation avec aspiration localisée près des machines à mouler les noyaux, près des postes de vérification des noyaux et du convoyeur, et d’utiliser des résines à faibles émissions. Lorsque le moulage des noyaux au phénol-formol a été remplacé par des procédés en boîte froide avec résines uréthanes durcies aux amines, il est indispensable de faire des contrôles suivis sur les joints des boîtes à noyau et d’installer un système de ventilation avec aspiration localisée dans les ateliers où sont stockés les noyaux avant insertion dans le moule, pour protéger le personnel contre les risques oculaires liés aux vapeurs d’amines.

Le personnel employé dans ces zones de travail doit être soumis à des visites médicales à l’embauche, puis périodiques, avec radiographies pulmonaires contrôlées par un spécialiste, explorations fonctionnelles respiratoires et interrogation par questionnaire sur les symptômes éventuels. Ces mesures sont indispensables pour la détection de signes précoces de pneumoconiose, de bronchite chronique et d’emphysème. Etant donné que la protection auditive est souvent inefficace, il est indispensable de procéder aussi à des audiogrammes périodiques.

Le bruit et les vibrations atteignent des valeurs élevées à certains postes de travail, notamment lors du chargement des fours, du dénoyautage mécanique, du démoulage et du décochage des pièces coulées et des opérations d’ébarbage pneumatique.

Les travaux de fonderie dégagent de grandes quantités de chaleur. La chaleur rayonnante lors de la fusion, de la coulée, du décochage, du dénoyautage et du retrait du jet de coulée nécessite des mesures de protection spéciales. Ces mesures comprennent notamment l’allongement des temps de pause, ce qui est une pratique fort répandue. En outre, on prévoit couramment des pauses supplémentaires durant les mois d’été. Il convient également de fournir au personnel des vêtements de protection contre la chaleur, ainsi que des équipements de protection de la face et des yeux pour éviter les risques de cataracte. Des séjours dans des salles de repos climatisées situées à proximité des postes de travail augmentent l’efficacité des pauses.

La fonderie d’aluminium

La fonderie d’aluminium (fonderie et coulée sous pression) est utilisée dans la production de culasses, de carters de transmission, de blocs-moteurs, etc. Dans ces installations, la coulée se fait dans des moules permanents, avec ou sans noyaux de sable: on applique également depuis quelque temps le procédé de moulage à modèle perdu, dans lequel le modèle en mousse de polystyrène n’est pas retiré du moule, mais est vaporisé par le métal en fusion. Enfin, le moulage sous pression consiste à injecter du métal fondu sous pression dans des moules, appelés aussi coquilles. Ce procédé est utilisé pour la fabrication industrielle de pièces de précision de petites dimensions. La coulée sous pression est suivie d’un ébarbage à la presse et de travaux de finition. L’aluminium utilisé peut être fondu sur place ou livré en fusion à la fonderie.

Des risques peuvent survenir en cas de problème de pyrolyse du noyau. Dans les fonderies à moules permanents, avec noyaux de grande taille, il existe des risques d’exposition à la silice. Lors du décochage, la présence d’un système de ventilation avec aspiration localisée est indispensable pour éviter que l’exposition n’atteigne un niveau dangereux.

La fonderie d’autres métaux non ferreux

D’autres procédés de coulée sous pression et d’électrodéposition de métaux non ferreux sont utilisés pour la fabrication des pièces de finition, des accessoires et des pare-chocs, par exemple. L’électrodéposition est un procédé qui consiste à déposer un métal sur un autre métal par réaction électrochimique.

Par le passé, pour la fabrication des pièces de finition en métal brillant, on utilisait du zinc coulé sous pression, qui était revêtu de couches successives de cuivre, de nickel et de chrome, puis poli. A l’heure actuelle, les pièces de carburateurs et d’injecteurs sont également coulées sous pression. De plus en plus, l’extraction manuelle des pièces des machines de coulée sous pression tend à être mécanisée. Par ailleurs, les pièces en métal brillant sont souvent remplacées par des pièces en métal peint et en matière plastique. Les pare-chocs, qui autrefois étaient produits par emboutissage de tôle, puis par dépôt électrochimique, sont de plus en plus souvent en polymère sur les véhicules de tourisme.

L’électrodéposition de chrome, de nickel, de cadmium, de cuivre, etc. s’effectue en général dans des ateliers spéciaux et comporte un risque d’inhalation ou d’absorption cutanée des vapeurs que dégagent les bains d’acides. Une association a été établie entre une incidence accrue du cancer et l’exposition aux vapeurs d’acide chromique et d’acide sulfurique. Ces vapeurs sont également extrêmement corrosives pour la peau et les voies respiratoires. Les bacs d’électrodéposition doivent porter un affichage indiquant leur contenu et être munis de dispositifs mobiles d’aspiration localisée. Des produits tensioactifs antimoussants doivent être incorporés aux bains pour minimiser la formation de vapeurs. Le personnel doit être muni de lunettes, de masques, de gants et de tabliers de protection. Il doit, en outre, être soumis à des examens médicaux périodiques.

L’immersion et le retrait des pièces à traiter dans des bacs ouverts sont des opérations très dangereuses qui sont de plus en plus souvent mécanisées. Le brunissage et le polissage des pièces métallisées, sur bande ou disque de feutre, sont des opérations fatigantes qui entraînent, en outre, des risques d’inhalation de poussières de coton, de chanvre ou de lin. L’aménagement de postes fixes et la mécanisation de ce travail, par exemple avec des machines à polir du type machine-transfert, permettent de réduire ce risque.

Le forgeage et le traitement thermique

On utilise le forgeage à chaud et le forgeage à froid suivi d’un traitement thermique pour produire des pièces de moteur, de transmissions et de suspensions, etc.

Dans le passé, les opérations de forgeage consistaient à chauffer des billettes de fer (lingots) dans des fours à mazout installés à proximité de marteaux-pilons à vapeur. Dans ces marteaux-pilons, le fer chaud était placé dans la moitié inférieure d’une matrice métallique; la moitié supérieure de la matrice était fixée au marteau-pilon. Le fer était travaillé par de multiples chocs du marteau-pilon, pour obtenir la taille et la forme désirées. Actuellement, ces procédés sont remplacés par un chauffage par induction des billettes, qui sont travaillées sur des presses à forger utilisant la pression, au lieu du choc, pour former la pièce métallique, et sur des marteaux-pilons (machines à forger horizontales) ou par un forgeage à froid suivi d’un traitement thermique.

Les niveaux sonores dans les forges sont extrêmement élevés. L’exposition au bruit peut être réduite en remplaçant les fours à mazout par des fours à induction, et les marteaux-pilons à vapeur par des presses à forger et des machines à forger horizontales. Ces opérations sont également génératrices de fumées. La modernisation des fours permet de réduire les fumées de mazout.

Les opérations de forgeage et de traitement thermique dégagent de grosses quantités de chaleur. Il est nécessaire d’équiper ces zones de travail de dispositifs de refroidissement ponctuels, par circulation d’air conditionné au-dessus du personnel, pour réduire la charge thermique.

L’usinage

L’usinage en grande série de blocs-moteurs, de vilebrequins, d’organes de transmission, etc. est caractéristique de l’industrie automobile. Les procédés d’usinage sont appliqués dans différentes installations de fabrication de pièces mécaniques et tout particulièrement dans la fabrication des moteurs, des organes de transmission et des roulements. Les arbres à cames, les engrenages, les différentiels et les tambours de freins sont des pièces usinées. Les postes d’usinage individuels sont progressivement remplacés par des machines multipostes, des cellules d’usinage et des chaînes-transfert dont la longueur peut atteindre 200 m. Les huiles solubles et les liquides de refroidissement synthétiques et semi-synthétiques tendent à remplacer les huiles minérales.

Les lésions causées par des corps étrangers sont courantes dans les opérations d’usinage; une plus grande mécanisation de la manutention et la mise en place d’équipements de protection individuelle constituent des mesures de prévention importantes. Il est à noter cependant que la mécanisation, en particulier par chaînes-transfert de grande longueur, augmente les risques de traumatismes aigus; à titre de mesures de prévention, on doit améliorer les dispositifs d’écrans protecteurs sur les machines et installer des systèmes d’arrêt de sécurité.

Pour lutter contre les expositions aux vapeurs de liquides de refroidissement, les mesures les plus efficaces consistent à enfermer totalement les postes d’usinage et les systèmes de circulation des liquides, à installer un dispositif d’aspiration localisée avec évacuation vers l’extérieur ou un dispositif de recyclage de l’air par passage au travers d’un filtre à haut rendement, à utiliser des systèmes de refroidissement conçus pour réduire la production de vapeurs et à mettre en place des mesures de contrôle du liquide de refroidissement pour déceler la présence de micro-organismes. L’addition de nitrate aux liquides aminés doit être prohibée, car il existe un risque lié à la nitrosamine. Les huiles ayant une teneur appréciable en hydrocarbures aromatiques polynucléaires (HAP) ne doivent pas être utilisées.

Au cours des opérations de cémentation de l’acier et de trempe, les bains de sels de nitrate et autres traitements thermiques, pour lesquels on utilise des fours et des atmosphères contrôlées, peuvent engendrer des conditions ambiantes nocives et libérer diverses substances toxiques dans l’atmosphère (par exemple, monoxyde de carbone, dioxyde de carbone, cyanures).

Le personnel de logistique et d’entretien, chargé de manipuler les boues de meulage et d’épurer par voie centrifuge les huiles de coupe avant filtration et régénération, est exposé à des risques de dermite. Ce personnel devrait porter des tabliers résistant aux huiles et être invité à se laver soigneusement à la fin de chaque poste de travail.

Le meulage et l’affûtage des outils peuvent présenter des risques liés aux particules de métaux durs (pathologies interstitielles pulmonaires) si l’exposition au cobalt n’est pas mesurée et limitée. Les meules devraient être pourvues d’écrans, les opérateurs devraient porter un équipement pour la protection du visage et des yeux, ainsi qu’un équipement de protection respiratoire.

L’assemblage ultérieur des pièces usinées en un ensemble mécanique présente aussi des risques ergonomiques pour les opérateurs. Dans les usines de moteurs, les essais et les rodages doivent être effectués sur des postes d’essais pourvus de dispositifs d’aspiration des gaz d’échappement (monoxyde de carbone, dioxyde de carbone, hydrocarbures imbrûlés, aldéhydes, oxydes d’azote) et de dispositifs d’insonorisation (chambres sourdes, massifs isolés). L’intensité sonore dans ces locaux peut atteindre 100 à 105 dB avec des pics de fréquence situés entre 600 et 800 Hz.

L’emboutissage

L’emboutissage de tôles (d’acier) pour obtenir des panneaux de carrosserie et d’autres éléments, souvent combiné avec le soudage de sous-ensembles, est effectué dans des grandes usines équipées de presses automatiques de différentes tailles. Les presses à chargement et déchargement individuel ont d’abord été remplacées par des dispositifs d’extraction mécanique puis, plus récemment, par des mécanismes de transfert-navette capables d’effectuer le chargement, ce qui donne des chaînes de presses totalement automatisées. La fabrication de sous-ensembles, comme les capots et les portes, est effectuée sur des presses à soudage par résistance et se fait de plus en plus en îlots robotisés.

La phase principale de ces opérations est l’emboutissage de tôle d’acier, de feuillard et de profilés légers sur des presses automatiques dont les capacités vont de 20 à 2 000 tonnes.

Afin d’assurer la sécurité sur les presses modernes, il est impératif d’utiliser des écrans protecteurs efficaces sur les machines, des garde-mains à proximité des matrices, des commandes de sécurité bimanuelles non blocables, des embrayages à rotation partielle, des contrôleurs de freins, des systèmes d’alimentation et d’éjection automatiques, des systèmes de collecte des déchets, ainsi que de prescrire le port d’un équipement de protection individuelle (tablier, protecteurs des pieds et des jambes, des mains et des bras). Les machines trop anciennes et dangereuses, comme celles équipées d’embrayages à rotation totale et de dispositifs de rappel automatique devraient être éliminées. Une autre opération qui pose de sérieux problèmes de sécurité est la manutention de l’acier laminé à l’aide d’une grue et le chargement de dérouleurs de bobines, avant le découpage en tête d’une chaîne d’emboutissage.

Les opérateurs de presses sont exposés à des niveaux de vapeurs importants, dus aux lubrifiants d’emboutissage dont la composition est similaire à celle des liquides d’usinage (huiles solubles, par exemple). Ils sont aussi exposés à des fumées de soudage, ainsi qu’à des niveaux de bruit élevés. Les mesures de réduction du niveau sonore comprennent l’installation de silencieux sur les soupapes pneumatiques, la pose d’un revêtement amortisseur dans les goulettes métalliques, l’insonorisation des navettes d’amenage et l’isolation phonique des presses; on doit cependant noter que le point d’impact du poinçon sur le flan ne constitue pas la principale source de bruit.

A la sortie de la presse, les pièces sont assemblées en sous-ensembles, capots et portes par exemple, à l’aide de machines à souder par résistance. A ce niveau, les risques sont surtout chimiques: vapeurs de soudage dues au soudage par résistance et aux produits de pyrolyse des revêtements de surface, dont les lubrifiants utilisés pour la découpe et les mastics pour l’étanchéité.

Les panneaux de carrosserie en plastique et les pièces de finition

Les pièces de finition métalliques telles que les profilés chromés tendent à disparaître au profit de matières polymères. Certains éléments de carrosserie sont fabriqués à partir de plastiques renforcés de fibre de verre, de plastiques thermodurcissables, d’acrylonitrile-styrène-butadiène ou de polyéthylène. Les matériaux polyuréthanes peuvent être à haute densité pour certains éléments de carrosserie tels que les faces avant, ou à basse densité, comme dans le cas des mousses utilisées pour les sièges et les pièces de garnissage intérieur.

Le moulage de la mousse de polyuréthane présente des risques de sensibilisation des voies respiratoires dus à l’inhalation de monomère de diisocyanate, ainsi que d’éventuels catalyseurs. Des plaintes continuent d’être enregistrées même pour des opérations qui sont réalisées dans les limites d’utilisation du diisocyanate de toluène. Les risques inhérents à l’exposition au chlorure de méthylène liée à la purge des injecteurs peuvent être importants. Les postes de coulée doivent être fermés et pourvus d’un dispositif de ventilation avec aspiration localisée; les fuites accidentelles d’isocyanate doivent être réduites au minimum grâce à des dispositifs de sécurité et elles doivent être rapidement nettoyées par des équipes spécialisées. Dans ces installations, il existe également des risques d’incendie dans les fours de séchage. En ce qui concerne la fabrication des sièges, elle pose surtout des problèmes ergonomiques, qu’il est possible de réduire par l’utilisation de montages, en particulier pour tendre le garnissage sur les mousses.

Les risques d’exposition au styrène lors de la pose en couche de la fibre de verre devraient être réduits par l’installation d’enceintes fermées pour le stockage des plaques et d’un dispositif de ventilation avec aspiration localisée. Dans le cas également des poussières dues au meulage des pièces séchées contenant des fibres de verre, il faudra réduire l’exposition en installant des dispositifs de ventilation.

L’assemblage du véhicule

L’assemblage des différents éléments pour aboutir au véhicule fini se déroule normalement sur une chaîne sur laquelle travaillent plus de 1 000 employés par poste, auxquels il faut ajouter le personnel de logistique. La majeure partie des travailleurs de l’industrie automobile est affectée à ce type d’opérations.

Une usine d’assemblage se divise en unités: l’atelier de carrosserie, qui peut comprendre des activités de fabrication de sous-ensembles existant également dans les usines d’emboutissage, la peinture, le montage du châssis, l’atelier de sellerie (pouvant être extérieur à l’entreprise) et l’assemblage final. Ces dernières années, les techniques de peinture ont évolué vers des formulations plus réactives et contenant moins de solvants et des procédés plus automatisés et plus robotisés. L’atelier de carrosserie s’est automatisé, les opérations de soudage à l’arc sont réduites et des robots remplacent les pinces à souder.

L’assemblage d’utilitaires légers (camionnettes, pick-up, véhicules polyvalents) ressemble à celui des véhicules de tourisme. Par contre, la fabrication de poids lourds et celle d’engins agricoles et de travaux publics est moins mécanisée et moins automatisée; les cycles sont plus longs, le travail physique plus pénible; le soudage à l’arc est plus largement utilisé et les procédés de peinture sont différents.

C’est l’atelier de carrosserie d’une usine d’assemblage qui assemble la caisse du véhicule. Les machines à souder par résistance peuvent être du type transfert; elles sont robotisées ou manuelles. Même suspendues à un système de contrepoids, les machines à souder demeurent lourdes et peu maniables. Les machines-transfert et les robots ont éliminé de nombreuses opérations manuelles et le personnel n’est plus exposé directement au métal chaud, aux étincelles et aux produits de combustion de l’huile minérale contaminant la tôle. Cependant, l’extension de l’automatisation entraîne une augmentation des risques de lésions graves pour le personnel d’entretien; il est alors utile d’installer, dans les ateliers de carrosserie automatisés, des dispositifs de coupe-circuit électrique et des systèmes protecteurs plus élaborés et automatiques sur les machines, comme les détecteurs de présence. Le soudage à l’arc est peu utilisé. Pendant ce travail, les soudeurs sont exposés à un rayonnement intense de lumière visible et ultraviolette et à l’inhalation de gaz de combustion. Il est donc nécessaire de prévoir un dispositif de ventilation avec aspiration localisée, des écrans de protection, des cloisons, des visières ou des lunettes, des gants et des tabliers spéciaux.

L’atelier de carrosserie est celui qui présente le plus fort risque de lésions par lacération et par action de corps étrangers.

Dans le passé, certaines techniques d’assemblage ou de retouche des défauts des panneaux de carrosserie impliquaient des opérations de brasage avec un alliage de plomb et d’étain (qui renferment aussi des traces d’antimoine). Lors de leur introduction, dans les années trente, ces opérations, et surtout celles de finition, présentaient un risque grave d’intoxication saturnine pouvant même entraîner la mort. On a alors pris des mesures de protection: isolement des cabines de meulage, fourniture d’appareils de protection respiratoire pour les opérateurs de meules, construction d’installations sanitaires et contrôles sanguins pour déceler toute trace de plomb. Malgré tout, des taux anormalement élevés de plomb et des cas isolés de saturnisme chez les travailleurs et dans leur famille ont persisté jusque dans les années soixante-dix. Désormais, aux Etats-Unis, on ne réalise plus de soudage au plomb sur les véhicules de tourisme. Un autre problème est le niveau de bruit dans les ateliers, qui peut aller jusqu’à 95-98 dB, avec des pics de fréquence entre 600 et 800 Hz.

A la sortie de l’atelier de carrosserie, les caisses en blanc arrivent sur un convoyeur à l’atelier de peinture où elles sont dégraissées, le plus souvent par application à la main de solvants. Elles sont ensuite nettoyées dans un tunnel clos (bondérisation) et reçoivent un apprêt. La couche d’apprêt est alors lissée au papier d’émeri humide avec une ponceuse, puis les autres couches de peinture sont appliquées, avant le passage au four. Dans les ateliers de peinture, le personnel risque d’inhaler des vapeurs de toluène, de xylène, de chlorure de méthylène, d’essences minérales, de naphta, d’acétate de butyle, d’acétate d’amyle et d’alcool méthylique dégagées par la carrosserie, la cabine et le nettoyage des pistolets de peinture. La peinture au pistolet s’effectue dans des cabines spéciales, à ventilation par aspiration au sol, approvisionnées continuellement en air filtré. Les vapeurs de solvants sur les postes de peinture sont normalement bien éliminées grâce à la ventilation descendante dont l’emploi est nécessaire pour la qualité du produit. Par le passé, il existait un problème d’inhalation des pigments, d’autant plus que certaines peintures contenaient des sels de chrome ou de plomb. Dans une cabine bien ventilée, le port d’équipements de protection respiratoire ne devrait pas être nécessaire pour respecter les limites d’exposition. De nombreux opérateurs cependant portent volontairement de tels appareils pour la pulvérisation. Les peintures polyuréthane à deux composantes apparues il y a quelque temps ne doivent être pulvérisées que par un personnel portant des casques à adduction d’air et respectant des temps de pause appropriés. Les réglementations environnementales ont favorisé la mise au point des peintures à haute teneur en matières solides contenant moins de solvants. Les nouvelles peintures à base de résines risquent néanmoins de provoquer des expositions au formaldéhyde, et les peintures en poudre contiennent des époxydes qui peuvent être des agents de sensibilisation. D’autre part, le personnel d’autres zones de travail se plaint souvent de problèmes de réaspiration des gaz provenant des dispositifs de ventilation de toit des cabines de peinture et des fours; ce problème peut être évité si l’on utilise des cheminées d’évacuation d’une hauteur suffisante.

Dans la production des véhicules utilitaires (camions, tramways, trolleybus), de matériel agricole et de travaux publics, la peinture au pistolet reste largement utilisée, en raison de l’importance des surfaces à traiter et parce qu’il est nécessaire de faire de nombreuses retouches. En outre, les peintures au plomb et au chrome sont toujours employées dans ces opérations.

La carrosserie peinte est séchée dans des fours à air chaud et dans des fours à infrarouges avec système d’évacuation d’air; elle est ensuite acheminée vers la ligne d’assemblage final, c’est-à-dire le point où elle rejoint les composants mécaniques et où carrosserie, moteur et organes de transmission sont réunis et les pièces de finition intérieures sont posées. C’est à ce stade que l’on observe le travail à la chaîne sous sa forme la plus poussée. Chaque ouvrier effectue une série d’opérations qu’il répète sur chaque véhicule, selon des cycles d’environ une minute. Le convoyeur entraîne lentement les carrosseries le long de la ligne d’assemblage. Ces opérations exigent une constante vigilance et peuvent être monotones à l’extrême, ce qui produit parfois un stress important chez certains sujets. Bien qu’elles n’imposent pas de dépense énergétique considérable, toutes ces tâches pratiquement impliquent pour le système musculo-squelettique des risques allant de modérés à sérieux. Les postures ou les mouvements qu’elles obligent à adopter ou à faire, par exemple lors du montage d’accessoires à l’intérieur du véhicule ou du travail sous la voiture, mains et bras au-dessus de la tête, sont les risques les plus facilement contrôlables, qui devraient être notamment atténués par la réduction des efforts physiques et de la répétitivité des opérations. Après l’assemblage final, la voiture est soumise aux essais, puis aux dernières interventions de finition avant d’être expédiée. Les essais peuvent être effectués seulement au banc, la voiture étant testée sur un banc à rouleaux (dans ce cas, l’évacuation des gaz d’échappement est un facteur important), ou être complétés sur piste par des épreuves d’adhérence sur différents revêtements, des essais d’étanchéité à l’eau et à la poussière et des essais sur route en dehors du périmètre de l’usine.

Les magasins de pièces détachées

Les magasins de pièces détachées sont un élément intégrant de la chaîne de distribution du produit fini et de la fourniture de pièces de rechange. Le personnel de ces magasins à grand débit utilise des transpalettes pour reprendre les pièces stockées en hauteur, dans un cadre automatisé et fonctionnant en trois postes. La manutention manuelle des pièces emballées est cependant une pratique courante. Les peintures et les autres produits utilisés dans la fabrication sont aussi stockés dans ces magasins de pièces détachées.

L’essai des prototypes

Les essais des prototypes automobiles sont une activité spécifique à cette industrie. Les pilotes d’essai sont exposés à de nombreux types de stress physiologique, comme les accélérations et les décélérations brutales, les secousses et les vibrations, l’exposition au monoxyde de carbone et aux gaz d’échappement, le bruit, les périodes de travail prolongées et diverses conditions climatiques et d’environnement. Les pilotes d’endurance subissent des stress spécifiques. Ce métier comporte en outre des risques d’accidents mortels.

L’assemblage des poids lourds, des engins agricoles et de travaux publics

Les méthodes appliquées dans ce secteur de l’industrie sont essentiellement les mêmes que pour les véhicules de tourisme et les utilitaires. Les différences sont les suivantes: cadence de production plus lente avec des opérations hors ligne d’assemblage, plus large emploi du soudage à l’arc, rivetage des cabines de camions, manutention des éléments par grue, utilisation de pigments au chrome et sortie de chaîne moteur en marche. Dans ce secteur, les constructeurs sont plus nombreux par rapport au volume produit et l’intégration verticale est plus faible.

La fabrication de locomotives, de voitures de voyageurs et de wagons de marchandises

Les locomotives, les voitures de voyageurs, les wagons de marchandises et les automotrices constituent des segments distincts de la fabrication du matériel ferroviaire. Par rapport à la fabrication de véhicules de tourisme et de camions, les opérations d’assemblage impliquent des cycles plus longs; l’utilisation de grues pour la manutention du matériel est une pratique courante et le soudage à l’arc est très utilisé. Les dimensions des véhicules rendent difficile l’automatisation des opérations de peinture au pistolet et, dans certains cas, le personnel se trouve à l’intérieur même du véhicule pendant le soudage et la mise en peinture.

Les problèmes de santé et les types de maladies

Ces méthodes de production ne sont pas spécifiques à l’industrie automobile mais, bien souvent, le volume de production et le haut degré d’intégration et d’automatisation se conjuguent pour générer des risques particuliers pour les travailleurs. Dans cette industrie complexe, les risques doivent être classés selon trois critères: type d’opération, groupe d’activité et conséquences négatives.

Ces risques, qui ont des causes et des méthodes de prévention distinctes, peuvent être classés en lésions mortelles et graves, lésions, traumatismes répétés, effets chimiques à court terme, maladies professionnelles résultant d’une exposition chimique prolongée, risques liés aux activités de service (y compris les maladies infectieuses et les actes de violence perpétrés par des clients) et risques liés à l’environnement professionnel tels que le stress.

En ce qui concerne les groupes d’activité, on peut distinguer différents groupes présentant des risques spécifiques: travaux spécialisés (maintenance, entretien, fabrication et installation des équipements de production), manutention du matériel mécanique (conduite de véhicules industriels et de grues), service de production (y compris la maintenance non spécialisée et le nettoyage), production fixe (groupe le plus important, incluant les monteurs et les conducteurs de machines), travail de bureau et d’étude, encadrement et direction.

Les conséquences pour la sécurité et la santé communes à tous les secteurs de l’industrie

Selon les données du Bureau américain des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)), l’industrie automobile présente l’un des taux les plus élevés d’accidents, tous domaines confondus, avec un travailleur blessé sur trois chaque année et un travailleur blessé sur dix avec arrêt de travail. Le risque de décès pour cause professionnelle dû à une lésion grave est de un sur 2 000. Certains risques sont caractéristiques en général de la profession. D’autres risques, en particulier les risques chimiques, sont propres aux postes de production particuliers.

Les travaux spécialisés et la manutention mécanique sont des domaines à hauts risques de traumatismes graves et mortels. Les travaux spécialisés concernent moins de 20% des travailleurs, mais ils représentent 46% des accidents du travail mortels. La manutention mécanique est la cause de 18% des accidents mortels. Pour les travaux spécialisés, les accidents mortels se produisent souvent au cours des activités de maintenance et d’entretien, la cause principale restant l’électrocution. Parmi les mesures de prévention, il y a lieu de citer la mise en place de dispositifs de coupe-circuit électrique, la présence d’écrans protecteurs sur les machines, la prévention des chutes, la sécurité des véhicules industriels et des grues; toutes ces mesures se fondent sur une analyse spécifique de la sécurité du travail.

Inversement, les activités de production fixe présentent des taux supérieurs de lésions et de traumatismes répétés, mais peu de risques mortels. Les lésions musculo-squelettiques, parmi lesquelles les traumatismes répétés, ainsi que les entorses et les foulures provoquées par un effort excessif ou par des mouvements répétitifs représentent 63% des lésions invalidantes sur les lignes d’assemblage et environ la moitié des lésions pour les autres opérations. Les principales mesures de prévention concernent la mise en place de programmes ergonomiques, fondés sur l’analyse des facteurs de risques et sur celle des efforts dynamiques, de leur fréquence et des contraintes de posture, dans les tâches à risques.

Les travaux d’entretien en production et les travaux spécialisés sont responsables de la majeure partie des risques chimiques aigus et sérieux. En général, ce type d’expositions se produit lors de nettoyages de routine, d’interventions en cas d’écoulements accidentels et de pannes des installations de production et au moment de l’entrée dans des espaces confinés au cours des activités de maintenance et d’entretien. Parmi ces risques, les expositions aux solvants sont les plus importantes. On ne connaît pas les conséquences médicales à long terme de ce type d’expositions intermittentes, mais intenses. Les employés chargés de goudronner les planchers de bois dans de nombreuses installations ou de souder les boulons des planchers dans les installations d’emboutissage sont particulièrement exposés aux vapeurs d’asphalte cancérogènes. Une mortalité excessive par cancer du poumon a en effet été observée dans ces groupes. Les mesures de prévention portent particulièrement sur les risques liés à l’entrée dans des espaces confinés et sur les programmes concernant les déchets dangereux et les interventions d’urgence; la prévention à long terme, cependant, devant viser à modifier les méthodes pour éliminer le risque d’exposition.

Les effets des expositions chroniques aux produits chimiques et à certains agents physiques sont plus probants chez les travailleurs occupant un poste fixe, surtout parce que ces groupes peuvent être étudiés plus facilement. Tous les risques liés à une opération décrite ci-après sont dus à des expositions qui demeurent conformes aux limites d’exposition professionnelle existantes et, pour renforcer ces mesures de protection, il sera nécessaire d’abaisser les limites admissibles. A court terme, pour réduire les risques et les niveaux d’exposition, il conviendra d’adopter les meilleures pratiques, y compris en ce qui concerne la conception et l’entretien de dispositifs d’aspiration des gaz.

Les problèmes de surdité liée au bruit sont omniprésents dans tous les secteurs de l’industrie dont il est question.

Tout le personnel de cette industrie est soumis au stress psychosocial, mais ce phénomène est plus apparent parmi les employés de bureau, le personnel de soutien technique et administratif et le personnel de direction et professionnel, car ils sont peu exposés aux autres facteurs de risques. Néanmoins, le stress lié à la tâche est sans doute plus intense parmi le personnel de production et de maintenance, et les effets de ce stress sont également plus importants. Aucun moyen efficace n’a été mis en œuvre pour lutter contre le stress causé par le travail de nuit et le travail posté par rotation. Cependant, on ne doit pas perdre de vue qu’il existe des accords de prise en compte permettant un certain choix par l’intéressé et des primes indemnisant le personnel affecté à des postes atypiques, et que le travail posté est désormais un fait historique et culturel, accepté par le personnel concerné. Comparées aux activités de production, les activités spécialisées et celles de maintenance sont plus souvent effectuées en dehors des heures normales, pendant les jours fériés, les congés et les périodes de fermeture. L’organisation du travail, en général, comprend deux postes de production et un poste de maintenance plus court, ce qui permet de disposer de la flexibilité nécessaire en période d’augmentation de la production.

Dans la partie ci-après, on traitera des risques chimiques et de certains risques physiques spécifiques, par type de production, ainsi que des risques traumatiques et ergonomiques par groupe.

Les fonderies

Parmi tous les secteurs de l’industrie automobile, la fonderie demeure celui qui présente le taux le plus élevé d’accidents mortels, en raison des fuites accidentelles de métal en fusion et des explosions, des activités de maintenance des fours et des risques d’exposition au monoxyde de carbone lors de la maintenance. Ce sont les fonderies qui déclarent le plus de lésions par corps étrangers, par contusions et par brûlures; par contre, on y observe moins de troubles du système musculo-squelettique que dans les autres secteurs. Par ailleurs, les plus hauts niveaux d’exposition au bruit sont enregistrés en fonderie. (Andjelkovich et coll., 1990; Andjelkovich et coll., 1995; Koskela, 1994; Koskela et coll., 1976; Silverstein et coll., 1986; Virtamo et Tossavainen, 1976).

D’après une analyse portant sur des études de mortalité dans l’industrie automobile américaine, 14 d’entre elles sur 15 révèlent une augmentation du nombre de décès par cancer du poumon chez les fondeurs (Egan-Baum, Miller et Waxweiller, 1981; Mirer et coll., 1985). Etant donné que l’on enregistre un nombre important de cancers du poumon chez le personnel de nettoyage, où le risque principal est l’exposition à la silice, il semble que ce soient les poussières contenant de la silice qui sont la principale cause de ces cancers (CIRC, 1987, 1997), bien que l’on ne doive pas non plus ignorer les effets de l’exposition aux hydrocarbures aromatiques polynucléaires (HAP). Sur 11 études, 8 font état d’une mortalité accrue par maladies respiratoires non malignes. Des décès dus à la silicose ont également été enregistrés. Certaines études cliniques font état de modifications radiologiques caractéristiques de la pneumoconiose, de syndromes obstructifs et d’une hausse de la fréquence des pathologies respiratoires, dans des fonderies modernes appliquant, pourtant, des systèmes de protection particulièrement élaborés. Ces effets sont dus à des risques d’exposition mis en évidence à partir des années soixante, mais tout porte à croire que les facteurs de risques subsistent dans les conditions actuelles.

Les radiographies pulmonaires effectuées sur des fondeurs révèlent des effets liés à l’amiante; les personnes affectées travaillent aussi bien à la production qu’à la maintenance et leur exposition à l’amiante est parfaitement documentée.

Les opérations d’usinage

Une analyse d’études de mortalité sur le personnel d’usinage a mis en évidence une augmentation apparemment liée à l’exposition des cancers de l’estomac, de l’œsophage, du rectum, du pancréas et du larynx (Silverstein et coll., 1988; Eisen et coll., 1992). Les agents cancérogènes connus présents dans les liquides de refroidissement sont les composés aromatiques polynucléaires, les nitrosamines, les paraffines chlorées et le formaldéhyde. Ces agents se retrouvent en moindre quantité dans les formulations actuelles, et les expositions aux particules de liquides de refroidissement ont été réduites, mais des risques de cancers peuvent subsister. Des études cliniques ont mis en évidence des cas d’asthme professionnel, une augmentation des pathologies respiratoires, des réactions croisées avec baisse des capacités respiratoires et, dans un cas, une légionellose associée à une exposition à des particules liquides de refroidissement en suspension dans l’air (Decoufle, 1978; Sultz et coll., 1985; Mallin, Berkeley et Young, 1986; Park et coll., 1988; Delzell et coll., 1993). Les effets respiratoires sont plus marqués en présence d’huiles synthétiques et solubles, qui contiennent des irritants chimiques tels que le kérosène sulfoné, les tallöls, les éthanolamines, le formaldéhyde et les biocides émetteurs de formaldéhyde, ainsi que de produits bactériens tels que les endotoxines. Les pathologies cutanées restent toujours courantes chez les travailleurs occupant des postes d’usinage, tout particulièrement chez ceux exposés aux liquides synthétiques.

L’emboutissage

Les risques caractéristiques liés à l’emboutissage sont les lésions par amputation ou écrasement, notamment mains happées par la presse, lésions diverses aux mains, aux pieds et aux jambes causées par les chutes de métal provenant de la presse.

Les blessures par lacération sont deux fois plus fréquentes dans les usines d’emboutissage que dans les autres secteurs de l’industrie automobile. Ces opérations emploient une plus grande proportion d’ouvriers qualifiés que cette industrie en général, surtout si la construction de matrices se fait sur place. Il est à noter que le changement des matrices est une opération particulièrement dangereuse.

Les études sur la mortalité dans l’emboutissage sont peu nombreuses. L’une d’elles a mis en évidence une augmentation de la mortalité par cancer de l’estomac; une autre a constaté une mortalité accrue par cancer du poumon parmi les soudeurs de maintenance et le personnel exposé aux vapeurs de brai de houille.

La fabrication d’accessoires et l’électrodéposition

Une étude sur la mortalité concernant le personnel d’une usine d’accessoires automobiles a constaté un taux élevé de décès par cancer du poumon dans les activités de moulage d’accessoires en zinc et d’électrodéposition. Les causes sont probablement l’exposition aux vapeurs d’acide chromique et d’acide sulfurique ou aux fumées des machines de coulée sous pression.

L’assemblage du véhicule

Sur l’ensemble des opérations effectuées dans l’industrie automobile, les taux de fréquence des lésions, y compris les troubles traumatiques cumulatifs, sont actuellement les plus élevés sur les postes d’assemblage, ce qui résulte du fort taux de troubles du système musculo-squelettique causés par les gestes répétitifs et les efforts excessifs. Ces troubles représentent plus de 60% des accidents invalidants dans ce secteur.

Plusieurs études sur la mortalité menées dans des usines d’assemblage révèlent une augmentation des décès par cancer du poumon. Aucune opération spécifique du secteur de l’assemblage n’apparaît comme responsable de ce problème et les recherches se poursuivent.

Les essais des prototypes

Il existe un risque d’accidents mortels dans ce secteur.

Les études

Le personnel d’études a fait l’objet d’enquêtes sur la sécurité et la santé dans ce secteur. Les prototypes sont réalisés à partir d’un modèle en bois, à l’aide de bois extrêmement durs, de stratifiés et d’agglomérés. Les maquettes en plastique sont faites en fibre de verre avec des résines polyester-polystyrène. Les maquettes métalliques sont essentiellement constituées de matrices réalisées par usinage de précision. Dans plusieurs études, on note un nombre important de cancers du côlon et du rectum, parfois mortels, chez les maquettistes qui travaillent sur le bois, le plastique et le métal. Aucun agent causal spécifique n’a pu être identifié.

Les problèmes d’environnement et de santé publique

Dans l’industrie automobile, les réglementations environnementales traitent principalement des composés organiques volatils provenant de la peinture au pistolet et d’autres revêtements de surface. Les actions menées pour abaisser la teneur en solvants des peintures ont effectivement favorisé des changements dans la composition des revêtements utilisés. Ces réglementations concernent les secteurs de la fabrication et de l’assemblage des véhicules. Par ailleurs, les ateliers de fonderie sont soumis à des réglementations en matière d’émissions atmosphériques de particules et de dioxyde de soufre et le sable utilisé est traité comme un déchet dangereux.

Les émissions de gaz d’échappement et la sécurité des véhicules représentent des problèmes de sécurité et de santé publique importants, qui sont réglementés en dehors du cadre de la santé au travail.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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Andjelkovich, D.A., Janszen, D.B., Brown, M.H., Richardson, R.B. et Miller, F.J., 1995: «Mortality of iron foundry workers. IV. Analysis of a subcohort exposed to formaldehyde», Journal of Occupational and Environmental Medicine, vol. 37, no 7, pp. 826-837.

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RÉFÉRENCES COMPLÉMENTAIRES

Acquavella, J., Leet, T. et Johnson, G., 1993: «Occupational experience and mortality among a cohort of metal components manufacturing workers», Epidemiology , vol. 4, no 5, pp. 428-434.

Park, R.M., 1996: «The healthy worker survivor effect and mortality at two automotive engine manufacturing plants», American Journal of Industrial Medicine , vol. 30, no 6, pp. 655-663.

Rotimi, C., Austin, E., Delzell, E., Day, K., Macaluso, M. et Honda, Y., 1993: «Retrospective follow-up study of foundry and engine plant workers», ibid., vol. 24, no 4, pp. 485-498.