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Chapitre 61 - L'utilisation, la manipulation et le stockage des produits chimiques

LA SÉCURITÉ DANS LA MANIPULATION ET L’UTILISATION DES PRODUITS CHIMIQUES

Le recueil de directives pratiques du BIT*

*Une bonne partie des informations contenues dans le présent chapitre ont été reprises du recueil de directives pratiques du Bureau international du Travail (BIT) intitulé Sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail (BIT, 1993). Ce recueil fournit des directives pour l’application de la convention (no 170) et de la recommandation (no 177) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les produits chimiques, 1990. Il a pour objet de guider les personnes et les organismes chargés d’élaborer des règles pour l’utilisation des produits chimiques au travail — tels que les autorités compétentes, les cadres dirigeants des entreprises qui fournissent ou mette en œuvre des produits chimiques et les services de secours d’urgence — dont le rôle comprend également la diffusion de conseils à l’intention des fournisseurs de produits chimiques et des organisations d’employeurs et de travailleurs. Le recueil établit des normes minimales et n’est nullement censé dissuader les autorités compétentes d’adopter des normes plus contraignantes. Pour plus d'informations sur les produits chimiques eux-mêmes et leurs familles, on se référera à l'Aide-mémoire des produits chimiques, dans le volume IV de la présente Encyclopédie.

Le recueil de directives pratiques du BIT intitulé Sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail a pour objet (paragr. 1.1.1) de protéger les travailleurs contre les dangers des produits chimiques et de prévenir les maladies et lésions professionnelles imputables à l’utilisation de ces produits au travail, ou d’en réduire l’incidence et, par conséquent, de renforcer la protection du public et de l’environnement en présentant des directives visant:

Les obligations, les responsabilités et les devoirs d’ordre général

Le chapitre 2 du même recueil énonce dans leurs grandes lignes les obligations, responsabilités et devoirs d’ordre général de l’autorité compétente, des employeurs et des travailleurs. Il expose également les responsabilités générales des fournisseurs ainsi que les droits des travailleurs et formule des directives relatives aux dispositions spéciales que l’employeur devrait prendre en matière de protection des informations à caractère confidentiel. Les recommandations finales portent sur la nécessité d’une coopération étroite entre les employeurs, les travailleurs et leurs représentants.

Il incombe à l’organisme gouvernemental compétent, compte tenu des conditions et de la pratique nationales et en consultation avec les organisations les plus représentatives d’employeurs et de travailleurs intéressées, de formuler une politique de sécurité cohérente pour l’utilisation des produits chimiques au travail. Les dispositions et la pratique nationales devraient être comparées avec les réglementations, normes et systèmes internationaux, ainsi qu’avec les mesures et pratiques recommandées dans le présent recueil de directives pratiques, la convention (no 170), 1990, et la recommandation (no 177), 1990, de l’OIT.

Les principales mesures qui concernent la sécurité des travailleurs visent en particulier:

L’autorité compétente dispose de différents moyens pour atteindre ce but. Elle peut prendre des dispositions par voie législative ou réglementaire, adopter, approuver ou reconnaître des normes, codes ou directives pratiques ou, en leur absence, inciter un organisme compétent à en adopter. Elle peut également exiger des employeurs qu’ils justifient les critères qu’ils appliquent.

Selon le recueil de directives pratiques (paragr. 2.2.1), les employeurs devraient consigner par écrit la politique et les dispositions en matière de sécurité dans l’utilisation des produits chimiques qu’ils ont adoptées dans le cadre de leur politique et de leurs mesures générales, ainsi que les responsabilités exercées en vertu desdites dispositions, conformément aux objectifs et aux principes de la convention (no 155) et de la recommandation (no 164) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981. Ces informations devraient être portées à la connaissance des travailleurs dans une langue qu’ils puissent comprendre aisément.

Les travailleurs, de leur côté, devraient, dans toute la mesure possible et conformément à la formation et aux instructions qu’ils ont reçues de leur employeur, prendre soin de leur propre santé et de leur propre sécurité, ainsi que de la santé et de la sécurité des autres personnes susceptibles d’être affectées par leurs actes ou omissions au travail (paragr. 2.3.2).

Tout fournisseur de produits chimiques, qu’il s’agisse d’un fabricant, d’un importateur ou d’un distributeur, devrait s’assurer, conformément aux principes directeurs énoncés dans les paragraphes pertinents du recueil et en application des dispositions de la convention no 170 et de la recommandation no 177:

Les mesures de contrôle opérationnel

Le recueil de directives pratiques énonce quelques principes généraux concernant les mesures de contrôle opérationnel au travail. Ils sont traités au chapitre 6 qui prévoit qu’après avoir passé en revue les produits utilisés au travail, obtenu des renseignements sur leurs dangers et procédé à l’évaluation des risques qu’ils peuvent présenter, les employeurs devraient prendre des mesures pour limiter l’exposition des travailleurs à des produits chimiques dangereux (en se fondant sur les mesures énoncées aux sections 6.4 à 6.9 du recueil), afin de protéger les travailleurs contre les risques dus à l’utilisation des produits chimiques au travail. Les mesures prises devraient éliminer les risques ou les réduire au minimum, de préférence en remplaçant les produits dangereux par d’autres, sans danger ou moins dangereux, ou par le choix d’une meilleure technologie . Si cela se révèle impossible, d’autres mesures, telles que les systèmes et pratiques de travail sûrs, les équipements de protection individuelle, la fourniture d’informations et la formation contribueront à réduire encore les risques, et on peut avoir à y recourir dans le cas de certaines activités comportant l’utilisation de produits chimiques.

Lorsque des travailleurs sont potentiellement exposés à des produits chimiques dangereux pour la santé, ils devraient être protégés contre le risque de lésion ou de maladie imputable à ces produits. Il ne devrait pas y avoir d’exposition au-delà des limites d’exposition ou d’autres critères d’exposition établis pour l’évaluation et la surveillance du milieu de travail par l’autorité compétente, ou par un organisme approuvé ou reconnu par elle, conformément aux normes nationales ou internationales.

Les mesures propres à assurer la protection des travailleurs pourraient consister en une combinaison de ce qui suit:

  1. bonnes pratiques en matière de conception et d’installation:
  2. installations, procédés ou systèmes de travail qui réduisent au minimum, suppriment ou contiennent le dégagement de poussières, de vapeurs, etc. dangereuses, et qui limitent la surface de contamination en cas de déversement et de fuites:
  3. systèmes et pratiques de travail:
  4. protection individuelle (lorsque les mesures précitées ne suffisent pas, un équipement approprié de protection individuelle devrait être fourni jusqu’à ce que le risque soit éliminé ou réduit au point de ne plus présenter de menace d’atteinte à la santé);
  5. interdiction de manger, de mâcher, de boire et de fumer dans les zones contaminées;
  6. installations adéquates pour se laver, se changer et ranger ses vêtements, y compris des dispositions pour la lessive des vêtements contaminés;
  7. mise en place de panneaux de signalisation et d’avis;
  8. dispositions adéquates en prévision de situations d’urgence.

Les produits chimiques connus pour avoir des effets cancérogènes, mutagènes ou tératogènes devraient être maintenus sous un contrôle strict.

La tenue de registres

La tenue de registres est un élément essentiel des pratiques de travail offrant une sécurité dans l’utilisation des produits chimiques. L’employeur devrait consigner les résultats des mesurages de la concentration des produits chimiques dangereux. Les données enregistrées devraient indiquer clairement la date des mesurages, la zone de travail et l’emplacement des installations. On trouvera ci-après quelques dispositions de la section 12.4 du recueil de directives pratiques concernant la tenue de registres:

Outre les résultats numériques des mesurages, les données recueillies lors des contrôles devraient notamment comprendre:

Les registres devraient être conservés pendant la période pres-crite par l’autorité compétente. Si celle-ci n’a pas fixé de durée, il est recommandé à l’employeur de conserver les registres, ou un résumé approprié:

  1. durant au moins 30 ans si les données enregistrées sont représentatives de l’exposition individuelle de travailleurs pouvant être identifiés;
  2. durant au moins 5 ans dans tous les autres cas.

L’information et la formation

Des instructions correctes et une formation de qualité sont des éléments essentiels d’un programme de communication efficace en matière de risques. Le recueil de directives pratiques énonce les principes généraux suivants de la formation (sections 10.1 et 10.2):

Le réexamen des besoins de formation

L’étendue de la formation et des instructions à donner devrait être réexaminée et rectifiée à l’occasion du réexamen des procédures et pratiques de travail mentionné à la section 8.2 du recueil (Réexamen des systèmes et pratiques de travail).

Le réexamen devrait tendre:

Information en matière de sécurité: la fiche de données de sécurité sur
un produit chimique (FDS)

Une politique de sécurité systématique exige la diffusion efficace, vers les utilisateurs de produits chimiques, des informations provenant des fournisseurs au sujet des risques potentiels et des mesures de prévention appropriées. Répondant à la demande pour un programme d’informations écrites sur les risques, le recueil de directives pratiques du BIT intitulé Sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail (BIT, 1993) stipule que tout fournisseur de produits chimiques devrait fournir aux employeurs toutes informations essentielles sur les produits chimiques dangereux sous forme de fiches de données de sécurité. Ces fiches (FDS) devraient décrire les risques liés au produit considéré et fournir des instructions pour sa manipulation, son utilisation et son stockage sans danger. Les FDS sont préparées par le fabricant ou l’importateur du produit. Le fabricant devrait remettre des FDS aux distributeurs et aux autres clients lors du premier achat d’un produit dangereux et en cas de modification de la FDS. Les distributeurs de produits chimiques dangereux, quant à eux, sont tenus de fournir automatiquement des FDS à leurs clients. Selon le recueil de directives pratiques du BIT, les travailleurs et leurs représentants peuvent exiger une FDS et des informations écrites sous une forme et dans une langue qu’il leur est facile de comprendre. Etant donné qu’une partie des informations nécessaires peut être destinée à des spécialistes, l’employeur peut avoir à fournir des précisions. La FDS ne représente qu’une des sources d’information sur le produit; il est préférable dès lors de l’utiliser conjointement avec des bulletins techniques, des étiquettes, une formation et d’autres moyens de communication.

Les grandes lignes des exigences auxquelles devrait satisfaire un programme de communication écrite sur les risques figurent dans au moins trois directives internationales d’importance: la norme de communication sur les risques, publiée par l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)) des Etats-Unis, le Système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail (SIMDUT) du Canada et la directive 91/155/CEE de la Commission économique européenne (CEE, 1991). Ces trois directives définissent les critères d’élaboration d’une FDS complète. Les différentes rubriques de la fiche renseigneront sur l’identification du produit, son fournisseur, sa classification, les risques qu’il entraîne, les précautions et les mesures d’urgence qu’il appelle. L’analyse ci-après décrit en détail le type d’informations requises telles qu’elles figurent dans le recueil de directives pratiques du BIT, mentionné ci-dessus. Ce recueil n’est certes pas destiné à remplacer les lois, réglementations ou normes nationales, mais ses recommandations pratiques sont destinées à tous ceux qui ont une responsabilité pour l’utilisation sans danger des produits chimiques au travail.

La description ci-après du contenu d’une fiche de données de sécurité figure dans le paragraphe 5.3 dudit recueil:

Les fiches de données de sécurité relatives aux produits chimiques dangereux devraient comporter des informations sur l’identité du produit, son fournisseur, sa classification, les dangers qu’il présente, les précautions de sécurité et les procédures d’urgence à adopter.

Les informations figurant sur les fiches devraient être celles qui ont été spécifiées par l’autorité compétente dont relève l’employeur, ou par un organisme agréé ou reconnu par ladite autorité. Des détails sur la nature des renseignements à fournir sont indiqués ci-après.

a) Identification du produit chimique et de la société

Le nom devrait être le même que celui qui est utilisé sur l’étiquette du produit chimique dangereux, lequel peut être le nom courant du produit ou une dénomination commerciale communément employée. D’autres dénominations peuvent être ajoutées si elles contribuent à l’identification. Le nom complet, l’adresse et le numéro de téléphone du fournisseur devraient être indiqués. Un numéro de téléphone à appeler en cas d’urgence devrait aussi figurer sur la fiche. Ce numéro peut être soit celui de la société elle-même, soit celui d’un organisme consultatif agréé, pour autant que la liaison téléphonique avec l’un ou l’autre correspondant puisse être établie à tout moment.

b) Informations sur les composants (composition)

Les informations devraient permettre aux employeurs d’identifier clairement les dangers associés à un produit chimique particulier, de façon qu’ils puissent procéder à l’évaluation des risques, comme il est indiqué à la section 6.2 du recueil (Procédures d’évaluation). Normalement, la composition intégrale devrait être communiquée, mais cela peut ne pas être nécessaire s’il est possible d’évaluer convenablement les dangers. Sauf si le nom ou la concentration d’un composant dans un mélange constitue une information confidentielle qui peut être omise conformément aux dispositions de la section 2.6, les indications suivantes devraient être fournies:

  1. description des principaux composants du produit, avec indication de leur nature chimique;
  2. identité et concentration des composants qui sont dangereux pour la sécurité et la santé;
  3. identité — et concentration maximale pouvant être rencontrée — des composants qui atteignent ou dépassent la concentration pour laquelle ils sont classés comme dangereux pour la sécurité et la santé sur les listes agréées ou reconnues par l’autorité compétente, ou qui sont interdits à des concentrations supérieures par l’autorité compétente.

c) Identification des dangers

Les dangers les plus importants, y compris les dangers les plus graves pour la santé, l’intégrité physique et l’environnement, devraient être indiqués d’une façon claire et concise pour pouvoir être lus au premier coup d’œil en cas d’urgence. Ces informations devraient être compatibles avec les renseignements figurant sur l’étiquette.

d) Premiers secours

Les mesures de premiers secours et d’auto-assistance devraient être soigneusement expliquées. Les situations dans lesquelles des soins médicaux immédiats s’imposent devraient être décrites avec l’indication des mesures à prendre. Dans les cas appropriés, la nécessité de prévoir des dispositions particulières pour un traitement spécifique immédiat devrait être soulignée.

e) Mesures à prendre en cas d’incendie

Les moyens indispensables de lutte contre un incendie impliquant un produit chimique devraient être indiqués, par exemple:

  1. les agents extincteurs appropriés;
  2. les agents extincteurs qu’il ne faut pas utiliser pour des raisons de sécurité;
  3. l’équipement spécial de protection individuelle pour ceux qui combattent l’incendie.

Des informations devraient également être fournies sur les propriétés du produit chimique en cas de feu et sur les risques particuliers que fait courir l’exposition aux produits de combustion, ainsi que les précautions à prendre.

f) Mesures à prendre en cas de dégagements ou de déversements accidentels

Des renseignements devraient également être donnés en ce qui concerne les mesures à prendre en cas de fuite accidentelle du produit chimique, et notamment:

  1. sur les précautions à prendre en matière de sécurité et de santé: élimination des sources d’inflammation, ventilation suffisante, fourniture d’un équipement approprié de protection individuelle;
  2. sur les précautions concernant l’environnement: ne pas s’approcher des égouts, alerter les services d’intervention et, le cas échéant, donner l’alerte au voisinage immédiat en cas de danger imminent;
  3. sur les méthodes de sauvegarde et de nettoyage: utiliser des matériaux absorbants appropriés, empêcher la production de gaz ou de vapeurs due au contact de l’eau ou d’autres diluants, utiliser des agents neutralisants appropriés;
  4. sur les avertissements: mettre en garde contre les agissements dangereux raisonnablement prévisibles.

g) Manipulation et stockage

Des informations devraient être fournies au sujet des conditions recommandées par le fournisseur pour la sécurité du stockage et des manipulations, y compris:

  1. sur l’agencement et l’emplacement des locaux et récipients de stockage;
  2. sur la nécessité de séparer ces opérations des lieux de travail et des bâtiments occupés;
  3. sur les matériaux incompatibles;
  4. sur les conditions du stockage, par exemple le degré de température et d’humidité, la protection contre le rayonnement solaire;
  5. sur les précautions contre les sources d’inflammation, y compris les aménagements propres à prévenir l’accumulation d’électricité statique;
  6. sur la ventilation localisée et générale;
  7. sur les méthodes de travail recommandées et celles qui sont déconseillées.

h) Contrôle de l’exposition et protection individuelle

Des informations devraient être fournies sur la nécessité d’un équipement de protection individuelle lors de l’utilisation d’un produit chimique et sur le type d’équipement qui assure une protection adéquate et suffisante. Le cas échéant, il faudrait rappeler que ce sont la conception et l’installation des matériels ainsi que les autres mesures techniques qui constituent l’essentiel de la prévention, et des renseignements devraient être fournis sur les pratiques propres à réduire au minimum l’exposition des travailleurs. Les paramètres spécifiques de surveillance tels que les limites d’exposition ou les limites biologiques devraient être indiqués, en même temps que les méthodes de surveillance recommandées.

i) Propriétés physiques et chimiques

Une brève description de l’aspect du produit chimique — précisant s’il s’agit d’un solide, d’un liquide ou d’un gaz, sa couleur et son odeur — devrait être donnée. Certaines caractéristiques et propriétés, lorsqu’elles sont connues, seraient à préciser ainsi que la nature des tests permettant de les déterminer. Ces tests devraient être conformes à la législation et aux critères nationaux applicables au lieu de travail de l’employeur. En l’absence de législation ou de critères nationaux, les critères des tests du pays exportateur devraient servir de référence. L’abondance des informations fournies devrait être adaptée à l’utilisation du produit chimique. Quant aux autres données utiles, il y a lieu de retenir les suivantes:

  • la viscosité;
  • le point de congélation/la plage de congélation;
  • le point d’ébullition/la plage d’ébullition;
  • le point de fusion/la plage de fusion;
  • le point d’éclair;
  • la température d’inflammation spontanée;
  • les propriétés explosives;
  • les propriétés comburantes;
  • la tension de vapeur;
  • le poids moléculaire;
  • le poids ou la densité spécifique;
  • le pH;
  • la solubilité;
  • le coefficient de partage (eau/n-octane);
  • des paramètres tels que la densité de vapeur, la miscibilité, le taux d’évaporation et la conductibilité.

j) Stabilité et réactivité

La possibilité de réactions dangereuses dans certaines conditions devrait être signalée. Les conditions à proscrire devraient être indiquées, notamment:

  1. les conditions physiques, par exemple la température, la pression, la lumière, les chocs, l’humidité ou le contact avec l’air;
  2. la proximité d’autres produits chimiques, par exemple des acides, des bases, des comburants ou toute autre substance spécifique susceptible de causer une réaction dangereuse.

En cas d’émission de produits de décomposition dangereux, ceux-ci devraient être spécifiés avec l’indication des précautions nécessaires.

k) Données toxicologiques

Dans cette section devraient figurer des informations sur les effets exercés sur l’organisme et sur les voies possibles de pénétration. Elles feront état des effets aigus, immédiats ou tardifs, et des effets chroniques résultant d’une exposition de courte ou de longue durée. Mention devrait être faite aussi des dangers pour la santé découlant d’une éventuelle réaction avec d’autres produits chimiques, y compris toutes interactions connues, résultant, par exemple, de l’absorption de médicaments, de l’usage du tabac ou de la consommation d’alcool.

l) Données écologiques

Les caractéristiques les plus importantes susceptibles d’avoir un effet sur le milieu devraient être décrites. Les renseignements à fournir à ce sujet dépendront de la législation et de la pratique nationales s’appliquant au lieu de travail de l’employeur. Les informations qui devraient normalement être fournies sont, selon les cas, les voies possibles de dispersion du produit à prendre en considération, la persistance du produit et sa dégradabilité, son potentiel d’accumulation biologique et sa toxicité aquatique, ainsi que d’autres données en rapport avec l’écotoxicité, par exemple les effets sur les installations de traitement des eaux.

m) Données sur l’élimination du produit

Des méthodes sûres d’élimination du produit chimique et des emballages contaminés, qui peuvent contenir des résidus de produits dangereux, devraient être indiquées. Il conviendrait de rappeler à l’employeur qu’il peut exister des législations ou des pratiques nationales en la matière.

n) Informations sur le transport

Des informations devraient être fournies sur les précautions spéciales que l’employeur devrait connaître ou prendre pour le transport du produit chimique dans ses locaux ou au dehors. Les indications figurant à ce sujet dans les Recommandations des Nations Unies relatives au transport des marchandises dangereuses et dans d’autres instruments internationaux peuvent aussi être fournies.

o) Informations sur la réglementation

Les informations requises pour le marquage et l’étiquetage du produit chimique devraient figurer ici. La législation ou les pratiques nationales spécifiques applicables à l’utilisateur devraient être signalées. Il conviendrait de rappeler aux employeurs qu’ils doivent s’enquérir de ce que requièrent la législation et la pratique nationales.

p) Autres informations

Toute autre information importante pour la santé et la sécurité des travailleurs devrait être consignée. Des exemples en sont les conseils en matière de formation, les usages et les restrictions recommandés, les références, les sources de données de base pour l’élaboration de la fiche de données de sécurité, le point de contact auquel s’adresser pour des avis techniques, ainsi que la date de mise en circulation de la fiche de données.

LES SYSTÈMES DE CLASSIFICATION ET D’ÉTIQUETAGE DES PRODUITS CHIMIQUES

Konstantin K. Sidorov et Igor V. Sanotskiy

Les systèmes de classification et d’étiquetage, selon les dangers, sont inclus dans la législation portant sur la sécurité dans la production, le transport, l’utilisation et l’élimination des produits chimiques. Ces classifications sont destinées à assurer un transfert systématique et intelligible de l’information sanitaire. Il n’existe qu’un nombre limité de systèmes de classification et d’étiquetage de grande ampleur aux niveaux national, régional et international. Les critères de classement et les définitions de ces critères qu’appliquent ces systèmes varient par leur nombre, les échelles de degré de danger, la terminologie, les méthodes d’essai ainsi que par la méthode de classement des mélanges de produits chimiques. La mise en place d’une structure internationale chargée d’harmoniser les systèmes de classification et d’étiquetage des produits chimiques aurait un effet positif sur le commerce de ces produits, l’échange d’informations les concernant, le coût de l’évaluation et de la gestion des risques qui leur sont liés et, en définitive, sur la protection des travailleurs, de la population et de l’environnement.

La base principale de la classification des produits chimiques est l’évaluation des niveaux d’exposition et de l’impact sur l’environnement (eau, air et sol). La moitié environ des systèmes internationaux comportent des critères relatifs au volume de production d’un produit chimique ou aux effets des rejets de polluants. Les critères les plus largement retenus sont les valeurs de la dose létale moyenne (DL50) et de la concentration létale moyenne (CL50). Ces valeurs sont évaluées sur des animaux de laboratoire selon trois voies principales d’administration — orale, dermique et inhalation — pour une exposition unique. Les DL50 et CL50 sont évaluées chez la même espèce animale et à l’aide des mêmes voies d’exposition. La République de Corée prend également en compte la DL50 obtenue par administration par voie intraveineuse ou intradermique. En Suisse et en Yougoslavie, la législation sur la gestion des produits chimiques exige des critères quantitatifs pour la DL50 obtenue après administration orale et prévoit la possibilité de classifications différentes des dangers selon la voie d’exposition.

Il existe en outre des différences dans la définition des niveaux de danger comparables. Alors que le système de la Communauté européenne (CE) utilise une échelle de toxicité aiguë à trois niveaux («très toxique», «toxique» et «nocif»), la norme d’information sur les dangers de l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), aux Etats-Unis, en retient deux («fortement toxique» et «toxique»). La plupart des classifications comportent trois catégories (Organisation des Nations Unies (ONU), Banque mondiale, Organisation maritime internationale (OMI), CE et autres) ou quatre (ancien Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM), Fédération de Russie, Chine, Mexique et Yougoslavie).

Les systèmes internationaux

L’analyse ci-après des systèmes de classification et d’étiquetage existants porte sur les principaux systèmes déjà éprouvés. Il n’y a pas d’évaluation des dangers des pesticides dans les classements généraux des produits chimiques, mais il y en a dans la classification de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture/Organisation mondiale de la santé (FAO/OMS), ainsi que dans différentes législations nationales (Bangladesh, Bulgarie, Chine, République de Corée, Pologne, Fédération de Russie, Sri Lanka, Venezuela et Zimbabwe, par exemple).

L’encadré reprend les recommandations figurant au chapitre 3 du recueil de directives pratiques du Bureau international du Travail (BIT), Sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail, en ce qui concerne les critères et les méthodes de classification des produits chimiques.

3. Systèmes de classification

3.1. Dispositions générales

3.1.1. L’autorité compétente, ou un organisme agréé ou reconnu par elle, devrait établir des systèmes et des critères spécifiques pour la classification d’un produit dans la catégorie des produits chimiques dangereux et élargir progressivement ces systèmes et leur application. Les critères de classification existants, établis par d’autres autorités compétentes ou par voie d’accord international, peuvent être suivis s’ils sont compatibles avec les critères et les méthodes exposés dans le présent recueil et cette pratique est à encourager lorsqu’elle peut contribuer à l’uniformité des mesures prises. Dans les cas appropriés, les résultats des travaux du Groupe de travail international PNUE/OIT/OMS pour l’harmonisation des systèmes de classification des produits chimiques, créé dans le cadre du Programme international sur la sécurité des substances chimiques (PISSC), devraient être pris en considération. Les responsabilités et le rôle des autorités compétentes concernant les systèmes de classification sont indiqués aux paragraphes 2.1.8 (critères et prescriptions), 2.1.9 (liste consolidée) et 2.1.10 (évaluation des nouveaux produits chimiques).

3.1.2. Les fournisseurs devraient veiller à ce que les produits chimiques qu’ils fournissent aient été classés, ou à ce qu’ils aient été identifiés, et leurs propriétés évaluées (voir les paragraphes 2.4.3 (évaluation) et 2.4.4 (classification)).

3.1.3. A moins d’en être exemptés, les fabricants ou les importateurs devraient fournir à l’autorité compétente des informations sur les éléments et les composés chimiques qui ne sont pas encore inscrits sur la liste consolidée dressée par l’autorité compétente avant que ceux-ci ne soient utilisés au travail (voir le paragraphe 2.1.10 (évaluation des nouveaux produits chimiques)).

3.1.4. Les quantités restreintes d’un nouveau produit chimique requises aux fins de recherche et de développement peuvent être fabriquées et manipulées en laboratoire et en installation pilote et transportées entre les laboratoires et l’installation pilote avant que tous les dangers de ce produit ne soient connus, conformément à la législation nationale. Toutes les informations que peut receler la littérature ou dont l’employeur a connaissance par l’expérience qu’il a acquise de produits chimiques et d’applications similaires devraient être pleinement prises en compte, et des mesures de protection adéquates devraient être appliquées comme si le produit était dangereux. L’information concernant le danger réel du produit devrait être communiquée aux travailleurs concernés aussitôt qu’elle est connue.

3.2. Critères de classification

3.2.1. Les critères de classification des produits chimiques devraient se fonder sur leurs dangers intrinsèques pour la santé et l’intégrité physique, notamment:

  1. sur les propriétés toxiques, y compris les effets aigus et chroniques sur la santé affectant quelque partie du corps que ce soit;
  2. sur les caractéristiques chimiques ou physiques, y compris les propriétés inflammables, explosives, comburantes et celles qui sont susceptibles d’entraîner des réactions dangereuses;
  3. sur les propriétés corrosives et irritantes;
  4. sur les effets allergisants et sensibilisants;
  5. sur les effets cancérogènes;
  6. sur les effets tératogènes et mutagènes;
  7. sur les effets sur le système reproducteur.

3.3. Méthodes de classification

3.3.1. La classification des produits chimiques devrait se fonder sur les informations disponibles, à savoir par exemple:

  1. les résultats des tests;
  2. les informations fournies par le fabricant ou l’importateur, y compris les renseignements sur les recherches effectuées;
  3. les informations provenant des règlements des transports internationaux, par exemple les Recommandations des Nations Unies relatives au transport des marchandises dangereuses, dont il devrait être tenu compte pour classer les produits chimiques en vue du transport, et la Convention de Bâle du PNUE sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination (1989), dont il devrait être tenu compte à propos des déchets dangereux;
  4. les ouvrages et la documentation de référence;
  5. l’expérience pratique;
  6. s’il s’agit de mélanges, soit les résultats des tests effectués sur le mélange, soit les dangers connus de leurs composants;

les informations résultant des activités d’évaluation du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), du Programme international PNUE/OIT/OMS sur la sécurité des substances chimiques, des Communautés européennes et de diverses institutions nationales et internationales, ainsi que les informations pouvant être obtenues auprès de systèmes tels que le Registre international des substances chimiques potentiellement toxiques (RISCPT) du PNUE.

3.3.2. Certains systèmes de classification en usage peuvent se limiter à des catégories particulières de produits chimiques. C’est le cas, par exemple, de la Recommended classification of pesticides by hazard and guidelines to classification 1996-1997 de l’OMS1, où les pesticides sont classés uniquement d’après leur degré de toxicité, et notamment selon les risques d’effets aigus sur la santé qu’ils présentent. Les employeurs et les travailleurs devraient être conscients des limitations de tels systèmes. Ceux-ci peuvent compléter utilement un système d’application plus générale.

3.3.3. Les mélanges de produits chimiques devraient être classés par référence aux dangers qu’ils présentent en tant que mélanges. Ils ne devraient être classés d’après les dangers intrinsèques de leurs composants chimiques que s’ils n’ont pas été testés en tant que mélanges.

1 Publiée en anglais seulement.

Source: BIT, 1993 (chap. 3).

Les classifications pour le transport

Les classifications établies pour le transport, qui sont largement appliquées, servent de base aux dispositions qui régissent l’étiquetage, l’emballage et le transport des marchandises dangereuses. Parmi ces classifications, il faut mentionner les Recommandations relatives au transport des marchandises dangereuses de l’ONU, le Code maritime international des marchandises dangereuses, mis au point par l’OMI, la classification établie par le Groupe mixte d’experts OMI/FAO/UNESCO-COI/OMM/OMS/AIEA/ONU/PNUEch argé d’étudier les aspects scientifiques de la protection du milieu marin (GESAMP) pour les produits chimiques dangereux transportés par voie maritime, ainsi que les classifications nationales relatives au transport. D’une façon générale, les classifications nationales sont conformes à celles de l’ONU, de l’OMI et des autres classifications établies dans le cadre d’accords internationaux sur le transport des marchandises dangereuses par air, rail, route et navigation intérieure, harmonisées avec le système des Nations Unies.

Les Recommandations des Nations Unies et d’autres autorités s’intéressant au transport des marchandises dangereuses

Les Recommandations des Nations Unies relatives au transport des marchandises dangereuses constituent un système global largement accepté qui fournit un cadre aux règlements applicables au transport intermodal, international et régional. Elles servent de plus en plus de base aux réglementations nationales du transport intérieur. Elles sont assez générales en ce qui concerne des sujets tels que la notification, l’identification et l’information sur les dangers. Leur portée a été limitée aux substances dangereuses transportées en colis; elles ne s’appliquent pas aux produits chimiques dangereux exposés ou transportés en vrac. A l’origine, l’objectif était d’éviter que des marchandises dangereuses ne provoquent des lésions aiguës chez les travailleurs ou le public, ou n’endommagent d’autres marchandises ou les moyens de transport utilisés (aéronef, navire, wagon de chemin de fer ou véhicule routier). Le système a depuis été étendu à l’amiante et aux substances dangereuses pour l’environnement.

Ces recommandations mettent principalement l’accent sur l’information sur les dangers au moyen d’étiquettes portant une combinaison de symboles graphiques, de couleurs, de mises en garde et de codes de classement. Elles fournissent également des données clés pour les équipes d’intervention en cas d’urgence. Elles visent la protection des travailleurs des transports tels que les équipages des aéronefs, des navires, des trains et des véhicules routiers. Dans de nombreux pays, ces recommandations ont été incorporées à la législation portant sur la protection des dockers. Certaines parties du système, telles que les recommandations relatives aux explosifs, ont été adaptées aux réglementations régionales et nationales pour le lieu de travail, englobant généralement la fabrication et le stockage. D’autres organisations de l’ONU s’occupant de transport ont adopté ces recommandations. Les systèmes de classification pour le transport des marchandises dangereuses dans des pays comme l’Australie, le Canada, l’Inde, la Jordanie, le Koweït, la Malaisie et le Royaume-Uni sont conformes pour l’essentiel aux grands principes de ces recommandations.

La classification des Nations Unies répartit les produits chimiques en neuf classes de danger:

L’emballage des marchandises en vue du transport, domaine abordé dans les Recommandations, n’est pas traité de façon aussi détaillée dans les autres systèmes. A l’appui des Recommandations, des organisations telles que l’OMI et l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) ont de très importants programmes de formation des dockers et des personnels des aéroports portant sur la reconnaissance des informations fournies par l’étiquetage et les normes d’emballage.

L’Organisation maritime internationale (OMI)

L’OMI, mandatée par la Conférence internationale pour la sauvegarde de la vie en mer, 1960 (SOLAS), a élaboré le Code maritime international des marchandises dangereuses (IMDG) qui complète les obligations du chapitre VII (Transport des marchandises dangereuses) de la SOLAS 1974 et celles de l’Annexe III de la convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires, telle que modifiée par le protocole de 1978 y relatif (MARPOL 73/78). Le code IMDG a été élaboré et actualisé pendant plus de 30 ans en étroite coopération avec le Comité d’experts des Nations Unies en matière de transport des marchandises dangereuses; il est appliqué par 50 membres de l’OMI représentant 85% du tonnage marchand mondial.

L’harmonisation du code IMDG avec les Recommandations de l’ONU assure la compatibilité avec les règles nationales et internationales applicables au transport des marchandises dangereuses par d’autres modes — dans la mesure où ces autres règles modales sont également fondées sur les recommandations du Comité d’experts —, c’est-à-dire les instructions techniques pour la sécurité du transport aérien des marchandises dangereuses établies par l’OACI, le Règlement européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par route (ADR) et le Règlement européen relatif au transport international ferroviaire des marchandises dangereuses (RID).

En 1991, la dix-septième Assemblée de l’OMI a adopté une résolution sur la coordination des travaux concernant les marchandises et substances dangereuses, invitant instamment, entre autres, les organismes de l’ONU et les gouvernements à coordonner leurs efforts pour assurer la compatibilité de toutes les législations portant sur les produits chimiques, les marchandises et substances dangereuses avec les règles internationales en vigueur pour le transport.

La convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination (1989)

Les annexes de la convention définissent 47 catégories de déchets, y compris les déchets domestiques. Bien que la classification des dangers soit analogue à celle des Recommandations de l’ONU, il existe une différence notable du fait que trois catégories ont été ajoutées, précisant la nature des déchets toxiques: toxicité chronique, libération de gaz toxiques par suite de l’interaction des déchets avec l’air ou l’eau, et capacité des déchets à produire des matières toxiques secondaires après leur élimination.

Les pesticides

Les systèmes nationaux de classification se rapportant à l’évaluation des dangers des pesticides sont assez complets en raison de l’utilisation très répandue de ces produits et des dommages potentiels à long terme qu’ils peuvent causer à l’environnement. Ces systèmes peuvent comporter de deux à cinq classes de dangers. Les critères reposent sur les doses létales moyennes selon différentes voies d’exposition. Alors que le Venezuela et la Pologne reconnaissent une seule voie d’exposition, à savoir l’ingestion, l’OMS et divers pays considèrent à la fois l’ingestion et le contact avec la peau.

Les critères d’évaluation des dangers des pesticides dans les pays d’Europe orientale, à Chypre, au Zimbabwe, en Chine et dans d’autres pays sont fondés sur les doses létales moyennes par inhalation. Les critères appliqués en Bulgarie comprennent en outre l’irritation cutanée et oculaire, la sensibilisation, la capacité d’accumulation, la persistance dans le milieu environnant, les effets blastogéniques et tératogènes, l’embryotoxicité, la toxicité aiguë et le traitement médical. De nombreuses classifications des pesticides contiennent également des critères distincts reposant sur les doses létales moyennes pour différents états. Ainsi, ces critères sont généralement plus stricts pour les pesticides liquides que pour les pesticides solides.

La classification des pesticides recommandée par l’OMS en fonction des risques

Cette classification a été publiée pour la première fois en 1975 par l’OMS, puis mise à jour régulièrement par le Programme international sur la sécurité des substances chimiques (PISSC) du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et de l’OMS, avec une contribution de la FAO. Elle comprend une catégorie unique de risque ou critère de classement, la toxicité aiguë chez le rat, subdivisée en quatre niveaux fondés sur la DL50 (par voies orale et dermique pour des formes liquides et solides) et allant de extrêmement dangereux à légèrement dangereux. Hormis des considérations d’ordre général, elle ne fournit pas de règles d’étiquetage précises. Sa mise à jour en 1996-97 contient des directives pour la classification qui comprend une liste de pesticides et des mesures de sécurité complètes (voir chapitre no 62, «Les composés minéraux et les produits chimiques à usage agricole»).

Le Code international de conduite pour la distribution et l’utilisation des pesticides de la FAO

La classification de l’OMS est étayée par un autre document, le Code international de conduite pour la distribution et l’utilisation des pesticides de la FAO. Bien qu’il ne s’agisse que d’une recommandation, cette classification est très largement appliquée dans les pays en développement, où elle est souvent incluse dans la législation nationale. Pour l’étiquetage, la FAO a publié les Directives sur les bonnes pratiques d’étiquetage des pesticides sous la forme d’un additif au Code.

Les systèmes régionaux (Communauté européenne (CE), Association européenne de libre-échange (AELE), Commission permanente pour la coopération dans le domaine de la santé publique (CAEM))

Appliquée pendant deux décennies, la directive 67/548/CEE du Conseil des Communautés européennes (CCE, 1967) a harmonisé les législations pertinentes de 12 pays avant de se transformer en un système complet qui comprend un inventaire des produits chimiques existants, une procédure de notification des nouveaux produits chimiques avant leur mise sur le marché, un ensemble de catégories de dangers, des critères de classification pour chaque catégorie, des méthodes d’épreuve et un système de signalisation des dangers comprenant un étiquetage avec des phrases codifiées sur les risques et les conseils ainsi que des symboles et indications de danger. Les préparations chimiques (mélanges de produits chimiques) sont régies par la directive 88/379/CEE du Conseil (CCE, 1988). La définition des éléments de la fiche de données de sécurité concernant les produits chimiques est pratiquement identique à celle qui figure dans la recommandation no 177 de l’OIT, mentionnée plus haut. Un ensemble de critères de classification et un étiquetage pour les produits chimiques dangereux pour l’environnement sont proposés. Ces directives réglementent les produits chimiques mis sur le marché en vue de protéger la santé humaine et l’environnement. Quatorze catégories sont réparties en deux groupes en fonction respectivement des propriétés physico-chimiques (produit explosif, comburant, extrêmement inflammable, hautement inflammable ou inflammable) et toxicologiques (très toxique, toxique, nocif, corrosif, irritant, cancérogène, mutagène, toxique pour la reproduction, propriétés dangereuses pour la santé et l’environnement).

La Commission des Communautés européennes (CCE) a publié un supplément à ce système, spécialement destiné au lieu de travail. Les mesures concernant les produits chimiques devraient s’inscrire dans le cadre global de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs prévu par la directive 89/391/CEE (CCE, 1989).

A l’exception de la Suisse, les pays de l’AELE suivent dans une large mesure le système de la Communauté européenne.

L’ancien Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM)

Ce système a été élaboré sous l’égide de la Commission permanente pour la coopération dans le domaine de la santé publique du CAEM, qui comprenait la Pologne, la Hongrie, la Bulgarie, l’ex-URSS, la Mongolie, Cuba, la Roumanie, le Viet Nam et la Tchécoslovaquie. La Chine applique encore un système reposant sur un concept similaire qui comporte deux critères de classification, à savoir la toxicité et le danger, utilisant une échelle à quatre degrés. Le système du CAEM exige en outre l’élaboration d’un «passeport toxicologique pour les nouveaux composés chimiques susceptibles d’être introduits dans la vie économique et domestique». Il définit des critères d’irritation, d’effets allergiques, de sensibilisation, de pouvoir cancérogène, mutagène, tératogène, d’antifertilité et de risque écologique. Toutefois, la base scientifique et la méthodologie de test relatives aux critères de classification diffèrent nettement de celles utilisées dans les autres systèmes.

Les dispositions concernant l’étiquetage et les symboles de signalisation des risques sur le lieu de travail sont également différentes. Le système des Recommandations de l’ONU est utilisé pour l’étiquetage des marchandises à transporter, mais il ne semble y avoir aucun lien entre les deux systèmes. Il n’existe pas de recommandations particulières concernant les fiches de données de sécurité pour les produits chimiques. Le système est décrit en détail dans le Registre international des substances chimiques potentiellement toxiques (RISCPT) du PNUE dans le cadre de l’Etude internationale des systèmes de classification. Si le système du CAEM contient la plupart des éléments de base des autres systèmes de classification, il diffère sensiblement par sa méthodologie d’évaluation des dangers et inclut des normes d’exposition parmi ses critères de classification des risques.

Exemples de systèmes nationaux

Australie

L’Australie a adopté une loi et des règlements relatifs aux produits chimiques industriels en 1989 et, en 1992, une loi analogue pour les produits chimiques utilisés en agriculture et en médecine vétérinaire. Le système australien est comparable à celui de la Communauté européenne. Il en diffère essentiellement par le fait qu’il utilise en plus la classification des Recommandations de l’ONU pour les catégories des gaz comprimés, des matières radioactives et des matières et objets dangereux divers.

Canada

Le système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail (SIMDUT) a été institué en 1988 par des lois fédérales et provinciales qui visent la communication de renseignements concernant les matières dangereuses par les producteurs, les fournisseurs et les importateurs aux employeurs et, par ceux-ci, aux travailleurs. Il s’applique à toutes les activités industrielles et à tous les lieux de travail du pays. Le SIMDUT, qui est un système d’information visant essentiellement les produits chimiques industriels, comprend trois types d’informations sur les dangers: des étiquettes, des fiches signalétiques de sécurité des produits chimiques et des programmes de formation pour les travailleurs. Le système a bénéficié de l’existence et de la distribution commerciale, dans le monde entier, d’une base de données informatisées, aujourd’hui disponible sur CD-ROM, contenant plus de 70 000 fiches signalétiques soumises volontairement au Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST) par les fabricants et les fournisseurs.

Japon

Au Japon, le contrôle des produits chimiques est régi principalement par deux lois. La première — la loi sur le contrôle des substances chimiques, modifiée en 1987 — a pour objet de prévenir la contamination de l’environnement par des substances chimiques faiblement biodégradables et nocives pour la santé humaine. Elle définit une procédure de notification préalable à la mise sur le marché et trois classes de dangers:

Des mesures de contrôle sont définies et une liste des produits chimiques existants est fournie.

La seconde loi, qui porte sur la santé et la sécurité dans l’industrie, est un système parallèle, avec sa propre liste de substances chimiques spécifiées nécessitant un étiquetage. Ces substances chimiques sont classées en quatre groupes (plomb, tétraalkylplomb, solvants organiques, substances chimiques spécifiées). Les critères de classement sont: 1) la possibilité d’une grave détérioration de la santé; 2) la possibilité de détériorations fréquentes de la santé; et 3) une détérioration effective de la santé. Les autres textes législatifs ayant trait au contrôle des produits chimiques dangereux sont la loi sur le contrôle des matières explosives, la loi sur le contrôle des gaz haute pression, la loi sur la prévention des incendies, la loi sur l’hygiène des aliments et la loi sur les médicaments, cosmétiques et instruments médicaux.

Etats-Unis d’Amérique

La norme sur la communication de renseignements concernant des matières dangereuses (Hazard Communication Standard), norme contraignante publiée par l’OSHA, est un règlement applicable au lieu de travail qui renvoie à des lois existantes. Son objectif est de veiller à ce que tous les produits chimiques d’origine nationale ou importés soient évalués et à ce que les renseignements se rapportant aux dangers qu’ils comportent soient communiqués aux employeurs et aux travailleurs grâce à un programme détaillé conçu à cette fin. Ce programme comprend l’étiquetage et d’autres formes de mise en garde, des fiches signalétiques de sécurité et la formation. Le contenu minimal des étiquettes et des fiches signalétiques est défini, mais l’utilisation de symboles de danger n’est pas obligatoire.

Aux termes de la loi réglementant les substances toxiques (Toxic Substances Control Act (TSCA)), administrée par l’Agence américaine de protection de l’environnement (Environmental Protection Agency (EPA)), environ 70 000 produits chimiques existants sont inventoriés. Pour compléter la norme sur la communication de renseignements de l’OSHA, l’EPA élabore des règlements qui prévoient des obligations similaires d’évaluation des dangers et d’information des travailleurs sur les dangers de ces produits pour l’environnement. La loi fait également obligation aux fabricants, avant de fabriquer ou d’importer des produits chimiques qui ne sont pas inventoriés, de soumettre à l’EPA un préavis de fabrication. Après examen, celle-ci peut imposer des tests ou d’autres conditions avant d’accorder l’autorisation de fabrication. Lorsque de nouveaux produits chimiques sont mis sur le marché, ils sont ajoutés à la liste.

L’étiquetage

Les étiquettes apposées sur les récipients de produits chimiques dangereux constituent le premier avertissement qu’une substance chimique est dangereuse; elles devraient fournir des renseignements de base sur les dangers auxquels expose la substance en question, les procédures de manipulation sans danger, les mesures de protection et les premiers secours en cas d’urgence. Elles devraient également identifier le ou les produits chimiques dangereux ainsi que le nom et l’adresse de leur fabricant.

L’étiquetage comprend des phrases ainsi que des symboles graphiques et des codes de couleurs apposés directement sur le produit, l’emballage ou l’étiquette. Le marquage devrait être clair, facilement compréhensible et pouvoir résister à des conditions climatiques difficiles. Il devrait être placé sur un fond qui contraste avec la couleur de l’emballage ou de la fiche accompagnant le produit. Quant aux fiches de sécurité, elles fournissent des informations plus détaillées sur la nature des risques liés au produit ainsi que des consignes de sécurité appropriées.

Bien qu’il n’existe pas actuellement d’obligations d’étiquetage harmonisées au niveau mondial, des réglementations internationales, nationales et régionales pour l’étiquetage des substances dangereuses sont déjà bien établies. Ainsi, on trouve des règles d’étiquetage dans la loi finlandaise sur les produits chimiques, dans la loi canadienne sur les produits dangereux et dans la directive 67/548 du Conseil des Communautés européennes. Les prescriptions de l’Union européenne, des Etats-Unis et du Canada concernant le contenu minimal de l’étiquetage sont à peu près similaires.

Plusieurs organisations internationales ont établi des règles d’étiquetage pour la manipulation des produits chimiques sur le lieu de travail et pendant le transport. Les étiquettes, les symboles de danger, les termes définissant les risques et les consignes de sécurité ainsi que les codes de première urgence de l’Organisation internationale de normalisation (ISO), les Recommandations des Nations Unies, du BIT et de l’UE sont examinés ci-après.

La section du Guide 51 concernant l’étiquetage de l’ISO/CEI (1999) comprend des pictogrammes que l’on reconnaît aisément (dessins, couleurs, symboles). En complément, des phrases courtes et simples avertissent l’utilisateur des dangers potentiels et fournissent des informations sur les mesures de prévention.

Le guide recommande l’utilisation des termes suivants pour alerter l’utilisateur:

Les Recommandations de l’ONU établissent cinq symboles graphiques conventionnels permettant de reconnaître facilement les matières dangereuses et d’identifier un risque important:

Ces signes conventionnels principaux sont complétés par d’autres, qui se rapportent aux risques subsidiaires:

La convention (no 170) et la recommandation (no 177) sur les produits chimiques, 1990, ont été adoptées à la 77e session de la Conférence internationale du Travail. Elles fixent des prescriptions relatives à l’étiquetage des produits chimiques pour assurer la communication de renseignements de base sur les risques encourus. La convention dispose que l’étiquette doit être facilement compréhensible et indique les risques potentiels et les mesures de précaution à prendre par l’utilisateur. Pour ce qui est du transport des matières dangereuses, la convention renvoie aux Recommandations de l’ONU.

La recommandation contient des dispositions relatives à l’étiquetage conformément aux systèmes nationaux et internationaux existants et établit des critères de classification des produits chimiques portant sur les caractéristiques physiques et chimiques, la toxicité, les propriétés corrosives et irritantes, les effets allergènes, tératogènes et mutagènes ainsi que les effets sur l’appareil reproducteur.

La directive no 67/548 du Conseil des communautés européennes (CEE, 1967) spécifie la teneur de l’étiquetage: emblèmes de danger et pictogrammes comportant des phrases de risque et de conseil. Les dangers sont codés par la lettre R accompagnée de combinaisons de chiffres arabes allant de 1 à 59. Ainsi R10 correspond, par exemple, à «inflammable», R23 à «toxique par inhalation». Le danger est caractérisé par un code de sécurité constitué par la lettre S et des combinaisons de chiffres allant de 1 à 60. Par exemple, S39 signifie «Porter un appareil de protection des yeux/du visage». Les règles d’étiquetage de la CE servent de référence dans le monde entier pour les entreprises chimiques et pharmaceutiques.

Malgré les efforts déployés par différentes organisations internationales et régionales pour recueillir, évaluer et organiser des données sur les risques chimiques, il subsiste un manque de coordination, en particulier dans la normalisation des protocoles et des méthodes d’évaluation et pour l’interprétation des données. L’OIT, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le PISSC et d’autres instances concernées sont à l’origine d’un certain nombre d’activités visant à harmoniser au niveau mondial la classification et l’étiquetage des produits chimiques. La mise en place d’une structure internationale permettant de suivre les progrès accomplis en matière d’évaluation des risques chimiques serait extrêmement bénéfique pour les travailleurs, le grand public et l’environnement. L’idéal serait d’harmoniser les classifications et les systèmes d’étiquetage des matières dangereuses dans les domaines du transport, de la commercialisation et de l’utilisation sur le lieu de travail, répondant ainsi aux préoccupations des consommateurs et des travailleurs et au souci de protection de l’environnement.

4. Etiquetage et marquage

4.1. Dispositions générales

4.1.1. L’autorité compétente, ou un organisme agréé ou reconnu par elle, devrait établir des prescriptions en vue du marquage et de l’étiquetage des produits chimiques de manière à permettre aux personnes qui manipulent ou utilisent des produits chimiques de les reconnaître et de faire la distinction entre eux à la réception et lors de leur utilisation, afin qu’ils puissent être utilisés dans de bonnes conditions de sécurité (voir le paragraphe 2.1.8 (critères et prescriptions)). Des critères existants de marquage et d’étiquetage établis par d’autres autorités compétentes pourront être suivis dans la mesure où ils sont compatibles avec les dispositions du présent paragraphe, et une telle démarche est à encourager lorsqu’elle peut contribuer à l’harmonisation des pratiques.

4.1.2. Les fournisseurs de produits chimiques devraient veiller à ce que les produits chimiques soient marqués et les produits chimiques dangereux étiquetés, et à ce que des étiquettes révisées soient préparées et fournies aux employeurs chaque fois que de nouvelles informations pertinentes pour la sécurité et la santé sont disponibles (voir les paragraphes 2.4.1 (responsabilités des fournisseurs) et 2.4.4 (classification)).

4.1.3. Lorsque les employeurs reçoivent des produits chimiques qui n’ont pas été étiquetés ou marqués, ils ne devraient pas les utiliser avant d’avoir obtenu les informations pertinentes auprès du fournisseur ou d’une autre source raisonnablement accessible. Les informations devraient être obtenues principalement auprès du fournisseur, mais elles peuvent l’être également auprès d’autres sources telles que celles qui sont indiquées au paragraphe 3.3.1 (sources d’information), de façon qu’avant toute utilisation il puisse être procédé à l’étiquetage et au marquage conformément aux prescriptions de l’autorité compétente.

[...]

4.3.2. L’étiquette sert à donner les renseignements essentiels:

  1. sur la classification du produit chimique;
  2. sur les dangers qui lui sont propres;
  3. sur les précautions à prendre.

Ces renseignements devraient faire état des dangers de l’exposition aiguë et de l’exposition chronique.

4.3.3. Les prescriptions relatives à l’étiquetage, qui devrait être conforme aux prescriptions nationales, devraient porter:

  1. sur les informations requises, y compris lorsque cela est approprié:
    1. les dénominations commerciales;
    2. l’identification du produit chimique;
    3. le nom, l’adresse et le numéro de téléphone du fournisseur;
    4. les symboles de danger;
    5. la nature des risques particuliers liés à l’utilisation du produit chimique;
    6. les précautions de sécurité;
    7. l’identification du lot;
    8. l’indication qu’une fiche de données de sécurité fournissant des informations complémentaires est disponible auprès de l’employeur;
    9. la classification attribuée conformément au système établi par l’autorité compétente;
  2. sur la lisibilité, la durabilité et la taille de l’étiquette;
  3. sur l’uniformité des étiquettes et des symboles, y compris les couleurs utilisées.

Source: BIT, 1993 (chap. 4).

LA SÉCURITÉ DANS LA MANIPULATION ET LE STOCKAGE DES PRODUITS CHIMIQUES

A.E. Quinn*

* D'après la 3e édition de l'Encyclopaedia of Occupational Health and Safety.

Avant la réception d’une nouvelle substance dangereuse, tous les utilisateurs potentiels devraient être informés des méthodes de manipulation à appliquer. Une planification et une maintenance des locaux de stockage sont nécessaires pour éviter des pertes matérielles et des accidents, voire des catastrophes. L’ordre et la propreté des lieux sont essentiels. Il faut veiller particulièrement aux incompatibilités entre substances, au choix d’un emplacement convenable pour les produits et aux conditions climatiques.

Des instructions écrites concernant les pratiques de stockage devraient être fournies et les fiches de données de sécurité devraient être disponibles dans les zones d’entreposage. Les emplacements des différentes classes de produits chimiques devraient figurer sur un plan des stocks et dans un registre des produits chimiques. Les registres mentionneront les quantités maximales autorisées de chaque produit et les quantités maximales autorisées de tous les produits chimiques par classe. La réception de toutes les substances devrait se faire en un lieu central avant leur distribution vers les entrepôts, magasins et laboratoires. Une zone de réception centrale est également utile pour contrôler les substances dirigées vers le système d’élimination des déchets. Un inventaire des substances contenues dans les magasins et entrepôts fournira une indication sur la quantité et la nature des substances à éliminer par la suite.

Les produits chimiques en stock devraient être examinés périodiquement, au moins une fois par an. Ceux dont la date de péremption est dépassée ou dont les récipients sont détériorés ou présentent des fuites devraient être éliminés en toute sécurité. Il convient de gérer les stocks selon la règle du «premier entré, premier sorti».

Le contrôle de l’entreposage des substances dangereuses devrait dépendre d’une personne compétente, formée à cette tâche. Tous les travailleurs que leur occupation appelle sur les lieux de stoc-kage devraient avoir été parfaitement formés à des pratiques de travail et de sécurité appropriées; tous ces locaux de stockage devraient être inspectés périodiquement par un responsable de la sécurité. Une borne d’incendie devrait être placée à l’intérieur des locaux ou à proximité immédiate. Il est recommandé de ne laisser aucune personne travailler seule dans un lieu de stockage abritant des produits toxiques. Les zones d’entreposage de produits chimiques devraient être situées loin des zones de fabrication, des bâtiments occupés et des autres magasins, et ne pas se trouver à proximité de sources fixes d’ignition.

Les règles d’étiquetage et de réétiquetage

L’étiquetage est la clé de l’organisation du stockage des produits chimiques. Cuves et récipients devraient être identifiés par des inscriptions portant le nom du produit chimique qu’ils contiennent. Aucun récipient ou bouteille de gaz comprimé ne devrait être accepté sans les étiquettes d’identification suivantes:

L’étiquette peut également porter des indications de stockage appropriées, telles que «Conserver dans un endroit frais» ou «Conserver le récipient à l’abri de l’humidité». Lorsque certains produits dangereux sont livrés en cuves, fûts ou sacs, puis conditionnés sous une autre forme sur le lieu de travail, chaque nouveau récipient devrait être réétiqueté de façon que l’utilisateur puisse immédiatement identifier le produit chimique et reconnaître les risques qu’il peut présenter.

Les matières explosives

Les matières explosives comprennent tous les produits chimiques, pièces pyrotechniques et allumettes qui sont explosives en elles-mêmes, ainsi que les substances (telles que les sels métalliques sensibles) susceptibles soit par elles-mêmes ou dans un certain mélange, soit sous certaines conditions de température, de choc, de frottement ou d’effet chimique, de se transformer et d’entrer en réaction explosive. Pour ce qui est des explosifs proprement dits, la plupart des pays se sont dotés de réglementations sévères relatives à la sécurité de leur entreposage et aux précautions à prendre pour en prévenir le vol à des fins criminelles.

Les aires de stockage devraient être aménagées à l’écart des autres bâtiments ou constructions afin de limiter le plus possible les dégâts en cas d’explosion. Les fabricants d’explosifs fournissent des consignes qui renseignent sur les types de stockage les plus appropriés. Les locaux de stockage devraient être de construction solide et fermés à clé lorsqu’ils ne sont pas utilisés. Aucun dépôt d’explosifs ne devrait être situé à proximité d’un bâtiment abritant des huiles, des graisses, des déchets combustibles ou d’autres matières inflammables ou contenant des feux ou des flammes nus.

Dans certains pays, la réglementation dispose que les magasins d’explosifs doivent être situés à 60 m au moins de tout tunnel, centrale de production d’énergie, route, puits de mine, barrage ou bâtiment. Il convient de tirer parti dans toute la mesure possible de la protection naturelle qu’offrent les élévations et dépressions du terrain et les zones à boisement dense. On érige parfois des barrières artificielles telles que talus en terre ou murs de moellons autour des magasins d’explosifs.

Ces magasins devraient être bien ventilés et exempts d’humidité. Ils devraient être éclairés par la lumière naturelle ou au moyen de lampes électriques portatives ou d’un éclairage extérieur. Les planchers devraient être en bois ou en une autre matière non productrice d’étincelles. Il convient de veiller en permanence à l’absence d’herbe sèche, de débris ou d’autres matières combustibles à proximité. Il faut entreposer dans des magasins distincts la poudre noire et les explosifs et ne jamais garder de détonateurs, d’outils ou d’autres matières dans un magasin d’explosifs. Pour ouvrir des caisses d’explosifs, il faut employer des outils en métal non ferreux.

Les matières comburantes

Les matières comburantes dégageant de l’oxygène peuvent entretenir la combustion et accroître la violence de n’importe quel feu. Certaines libèrent de l’oxygène à la température ambiante du local de stockage, d’autres seulement sous l’effet de la chaleur. Si des récipients de matières comburantes sont endommagés, leur contenu peut se répandre et se mélanger à d’autres matières combustibles et prendre feu. On peut éviter ce risque en entreposant les comburants dans un local distinct. Cela n’est toutefois pas toujours possible, notamment dans les entrepôts de transit des installations portuaires.

Il est dangereux de stocker des comburants puissants au voisinage de liquides, même si ceux-ci ont un point d’éclair relativement bas ou s’il s’agit de matières peu inflammables. Il est plus prudent de conserver toutes les matières inflammables à l’écart du lieu où sont entreposés des comburants. Leur lieu de stockage devrait être frais, bien ventilé et construit en matériaux résistant au feu.

Les matières inflammables

Un gaz est dit inflammable s’il brûle en présence d’air ou d’oxygène. L’hydrogène, le propane, le butane, l’éthylène, l’acétylène, le sulfure d’hydrogène et le gaz de houille comptent au nombre des gaz inflammables les plus connus. D’autres gaz, comme le cyanure d’hydrogène et le cyanogène, sont à la fois inflammables et toxiques. Il faut stocker les matières inflammables dans des lieux assez frais pour prévenir l’ignition accidentelle des mélanges de vapeurs et d’air qui auraient pu se former.

Les vapeurs de solvants inflammables peuvent être plus lourdes que l’air et se déplacer au niveau du sol jusqu’à une source d’ignition éloignée. Il est arrivé que des vapeurs inflammables de produits chimiques répandus sur le sol descendent dans des cages d’escalier ou d’ascenseur et s’enflamment à un étage inférieur. Il est donc essentiel de ne pas fumer et d’éviter toute flamme nue dans les lieux où ces solvants sont stockés ou manipulés.

Les bidons de sécurité portables agréés sont les récipients les plus sûrs pour stocker les liquides inflammables. Les liquides inflammables en quantités supérieures à un litre devraient être conservés dans des récipients métalliques. Des fûts de 200 litres sont couramment utilisés pour le transport des produits inflammables, mais ils ne sont pas destinés à un stockage prolongé. Leur bouchon devrait être enlevé avec précaution et remplacé par un évent de surpression agréé pour éviter l’augmentation de la pression interne sous l’effet de la chaleur, du feu ou d’une exposition au soleil. Lors du transvasement de matière inflammable à partir d’un récipient métallique, on devrait utiliser un circuit fermé ou assurer une ventilation appropriée pour évacuer les vapeurs qui se forment.

Le lieu d’entreposage devrait être situé à l’abri de toute source de chaleur et de tout risque connu d’incendie. Il convient de conserver les matières très inflammables à l’écart des comburants puissants ou des matières sujettes à une combustion spontanée. Lorsque les matières stockées sont des liquides très volatils, l’installation d’éclairage devrait avoir été agréée comme étant de construction antidéflagrante. Aucune flamme nue ne devrait être tolérée à l’intérieur ou à proximité du lieu de stockage. Des extincteurs et des matériaux inertes absorbants, tels que du sable sec et de la terre, devraient être disponibles pour les situations d’urgence.

Les murs, plafonds et planchers du lieu de stockage devraient être en matériaux ayant une résistance au feu d’au moins deux heures. Le local devrait être équipé de portes coupe-feu à fermeture automatique. Les installations du local devraient être reliées à la terre et périodiquement inspectées, ou bien être dotées de détecteurs automatiques de fumée ou d’incendie. Les vannes des récipients de stockage contenant des liquides inflammables devraient être clairement étiquetées et les canalisations peintes de couleurs distinctives de sécurité, afin d’indiquer la nature du liquide qui y circule et le sens de l’écoulement. Les réservoirs devraient être érigés sur un terrain en déclivité. S’ils sont établis en terrain plat, la protection contre la propagation d’un incendie peut être assurée par un périmètre de sécurité suffisant et par la construction de cuvettes de rétention dont la capacité devrait être équivalente à une fois et demie celle du réservoir à protéger, car un liquide inflammable en ébullition peut «monter». Des évents et des pare-feu devraient être prévus pour parachever la protection. Enfin, des extincteurs appropriés, automatiques ou portatifs, devraient être disponibles. Il devrait être interdit de fumer.

Les matières toxiques

Les produits chimiques toxiques devraient être stockés dans des locaux frais et bien ventilés, à l’abri de tout contact avec la chaleur, les acides, l’humidité et les matières comburantes. Les composés volatils devraient être conservés à –20 °C dans des congélateurs ne produisant pas d’étincelles, de façon à éviter leur évaporation. Compte tenu des risques de fuites à partir des récipients, les locaux de stockage devraient être équipés de manchons d’extraction ou de dispositifs de ventilation équivalents. Après ouverture, il est nécessaire de refermer les récipients à l’aide de bandes ou d’autres éléments d’étanchéité avant de les renvoyer au local de stockage. Il convient d’entreposer dans des magasins séparés les substances susceptibles d’entrer en réaction chimique les unes avec les autres.

Les matières corrosives

Les matières corrosives sont les acides et alcalis forts, ainsi que les autres substances qui brûlent ou irritent fortement la peau, les muqueuses ou les yeux, ou qui attaquent la plupart des matériaux. Les acides fluorhydrique, chlorhydrique, sulfurique, nitrique, formique et perchlorique en sont des exemples typiques. Ces substances risquent d’endommager les récipients qui les contiennent et de se disperser dans l’atmosphère du local de stockage; certaines sont volatiles, tandis que d’autres réagissent violemment au contact de l’humidité, des substances organiques ou d’autres produits chimiques. Les vapeurs et brouillards d’acides risquent d’attaquer les matériaux de construction et les équipements et d’intoxiquer le personnel. Ces substances devraient être entreposées au frais, mais à une température néanmoins nettement supérieure à leur point de congélation car certaines, comme l’acide acétique, gèlent à une température relativement élevée, brisent leur récipient et s’échappent dès que la température s’élève de nouveau au-dessus de leur point de congélation.

Certaines matières corrosives ont encore d’autres propriétés dangereuses; l’acide perchlorique, par exemple, est non seulement très corrosif, mais c’est aussi un comburant puissant pouvant provoquer un incendie et des explosions. L’eau régale est triplement dangereuse: 1) elle cumule les propriétés corrosives de ses deux composants, l’acide chlorhydrique et l’acide nitrique; 2) c’est un comburant très puissant; et 3) un petit apport de chaleur suffit pour entraîner la formation de chlorure de nitrosyle, gaz extrêmement toxique.

Les locaux de stockage des substances corrosives devraient être isolés des autres locaux ou entrepôts par des parois et un plancher étanches; des aménagements devraient être prévus pour évacuer les débords éventuels. Les sols devraient être en briques de mâchefer, en béton traité (pour en réduire la solubilité) ou en un autre matériau résistant. Le local devrait être ventilé efficacement. On ne devrait jamais entreposer ensemble des mélanges contenant de l’acide nitrique et de l’acide sulfurique. Certains liquides à la fois corrosifs et toxiques devraient être conservés dans des récipients spéciaux. L’acide fluorhydrique, par exemple, devrait être stocké dans des bouteilles en plomb, en gutta-percha ou en cérésine; du fait qu’il réagit avec le verre, il ne devrait jamais être entreposé à proximité de touries de verre ou de grès contenant d’autres acides.

Les touries contenant des acides corrosifs devraient être garnies de kieselguhr (terre à diatomées) ou d’une autre matière inorganique constituant un isolant efficace. Des installations de premiers soins (douches d’urgence, flacons pour lavages oculaires) devraient être disponibles sur place ou à proximité immédiate.

Les produits chimiques réagissant avec l’eau

Certains produits chimiques, comme le sodium et le potassium, réagissent avec l’eau en dégageant de la chaleur et des gaz inflammables ou explosifs. Certains catalyseurs de polymérisation, tels que les composés d’aluminium-alkyle, réagissent et brûlent violemment au contact de l’eau. Il faut donc éviter la présence d’eau dans le local où sont stockés des produits chimiques ayant ce type de réaction et prévoir des sprinklers sans eau.

La législation

De nombreux pays ont une législation qui régit dans le détail les modalités d’entreposage des substances dangereuses et qui comporte en général des spécifications visant:

Dans de nombreux pays, aucune autorité centrale n’exerce en titre la surveillance des mesures de sécurité qui s’appliquent au stockage de l’ensemble des substances dangereuses, mais plusieurs administrations distinctes — telles que l’inspection du travail et des mines, les autorités portuaires, l’inspection des transports, la police, les sapeurs-pompiers, des commissions nationales et des autorités locales — ont chacune une part de responsabilité dans le contrôle de l’application de la législation relative aux substances dangereuses. Le stockage de certaines catégories de substances dangereuses, telles que le pétrole, les explosifs, la cellulose et les solutions cellulosiques, est généralement subordonné à l’obtention d’une autorisation délivrée par l’une ou l’autre de ces instances. Une autorisation n’est accordée que si les installations de stockage remplissent les conditions de sécurité imposées par les normes de sécurité en vigueur.

LES GAZ COMPRIMÉS: MANIPULATION, STOCKAGE ET TRANSPORT

A. Türkdogan et K.R. Mathisen*

* D'après la 3e édition de l'Encyclopaedia of Occupational Health and Safety.

Les gaz à l’état comprimé et, en particulier, l’air comprimé, sont indispensables à l’industrie moderne; ils sont aussi largement utilisés à des fins médicales, pour la fabrication d’eaux minérales, la plongée sous-marine et avec des véhicules à moteur.

Aux fins du présent article, on entend par gaz comprimé tout gaz soumis à une pression manométrique supérieure à 1,47 bar ou, s’il s’agit d’un gaz liquéfié, tout gaz dont la tension de vapeur dépasse 2,94 bars. On ne considérera donc pas le cas de la distribution de gaz naturel, traitée dans le chapitre no 78, «Le pétrole et le gaz naturel», de la présente Encyclopédie.

Le tableau 61.1 énumère les gaz que l’on conserve généralement à l’état comprimé.

Tableau 61.1 Gaz se trouvant souvent sous forme comprimée

Acétylène*

Dioxyde de soufre

Ammoniac*

Ethane*

Azote

Ethylène*

Butane*

Hélium

Chlore

Hydrogène*

Chlorodifluorométhane

Méthane*

Chloroéthane*

Méthylamine*

Chlorométhane*

Monoxyde de carbone*

Chlorotétrafluoroéthane

Néon

Chlorure d’hydrogène

Oxyde nitreux

Cyanure d’hydrogène*

Oxygène

Cyclopropane

Phosgène

Dichlorodifluorométhane

Propane*

Dioxyde d’azote

Propylène*

Dioxyde de carbone

 

*Gaz inflammables.

Tous ces gaz présentent pour l’appareil respiratoire un danger d’irritation, d’asphyxie ou de toxicité marquée; ils peuvent être également inflammables et explosifs à l’état comprimé. La plupart des pays ont défini des codes de couleur pour identifier les bouteilles contenant des gaz comprimés ou liquéfiés; celles-ci devraient porter un bandeau ou une étiquette de couleur distinctive signalant le type de danger à prévoir. Les gaz extrêmement toxiques, comme le cyanure d’hydrogène, sont identifiés par un marquage spécial.

Les récipients de gaz comprimés sont toujours construits de manière à offrir une garantie de sécurité totale dans les applications auxquelles ils sont destinés lors de leur première mise en service. Cependant, des erreurs d’utilisation, des abus ou des imprudences dans la manipulation peuvent causer des accidents graves; il faut donc s’entourer des plus grandes précautions lors de la manutention, du transport, du stockage et même de l’évacuation des bouteilles ou récipients de gaz comprimés.

Les caractéristiques et la production

Selon ses caractéristiques, le gaz peut être introduit à l’état liquide ou, plus simplement, à l’état gazeux sous haute pression, dans la bouteille ou le récipient destiné à le recevoir. Pour liquéfier un gaz, il faut le refroidir au-dessous de sa température critique et le soumettre à une pression appropriée. Plus la température est inférieure au point critique, plus la pression requise est faible.

Des précautions spéciales devraient êtres prises à l’égard de certains des gaz énumérés dans le tableau 61.1. Ainsi, l’acétylène peut réagir dangereusement avec le cuivre et ne devrait donc jamais entrer en contact avec des alliages qui contiennent plus de 66% de cuivre. Ce gaz est généralement distribué dans des bouteilles en acier, sous une pression d’environ 14,7 à 16,8 bars. L’ammoniac est un autre gaz dont l’action sur le cuivre est extrêmement corrosive et qui devrait de ce fait être tenu à l’écart de ce métal; pour son conditionnement, on emploie des bouteilles faites d’acier ou d’un alliage agréé. Quant au chlore, il ne provoque pas de réaction avec le cuivre ou l’acier, sauf en présence d’eau, d’où la nécessité de protéger en permanence les récipients de stockage de tout contact avec l’humidité. Le fluor gazeux, en revanche, réagit avec la plupart des métaux, mais tend à constituer une couche protectrice au cours de la réaction; c’est le cas avec le cuivre qui se trouve protégé de toute attaque ultérieure par ce gaz grâce à la couche de fluorure de cuivre qui se forme à sa surface.

Parmi les gaz énumérés, le dioxyde de carbone est l’un des gaz le plus facilement liquéfiable, le changement d’état intervenant à la température de 15 °C et à la pression de 14,7 bars. On lui connaît de multiples applications industrielles; il est distribué dans des bouteilles d’acier.

Les hydrocarbures gazeux — dont le gaz de pétrole liquéfié (GPL) qui est un mélange essentiellement constitué de butane (62% environ) et de propane (36% environ) — ne sont pas corrosifs et sont en général conditionnés dans des bouteilles d’acier ou dans d’autres récipients sous une pression de 14,7 à 19,6 bars. Autre gaz très inflammable, le méthane est également distribué dans des bouteilles d’acier sous une pression de 14,7 à 19,6 bars.

Les dangers

Le stockage et le transport

Lorsqu’il s’agit de déterminer l’emplacement d’un dépôt de remplissage, de stockage et d’expédition, il y a lieu de considérer la sûreté du site et celle de son voisinage. Les salles de pompage, les installations de remplissage et les autres équipements devraient impérativement être situés dans des bâtiments construits en matériaux ignifuges et à toiture légère. Les portes et autres éléments d’huisserie devraient ouvrir vers l’extérieur. Une bonne ventilation et des interrupteurs d’éclairage antidéflagrants sont indispensables. Il faut aménager les locaux de façon à assurer la plus grande liberté de mouvement pour les opérations de remplissage, de contrôle et d’expédition, et prévoir des issues de secours.

Les gaz comprimés peuvent être stockés à l’air libre, à condition d’être convenablement protégés contre les intempéries et le rayonnement solaire direct. Les zones de stockage devraient être situées à une distance suffisante des locaux occupés et des habitations du voisinage.

Pendant le transport et la distribution des bouteilles de gaz, il faut veiller à empêcher tout dommage aux robinets et aux raccords. De même, il faut prendre des précautions pour éviter les chutes des bouteilles d’un véhicule, les manipulations brutales, les chocs excessifs ou les contraintes localisées et, avec les grands réservoirs, prévenir tout mouvement excessif des liquides. Tout véhicule de transport devrait être pourvu d’un extincteur d’incendie et d’un ruban conducteur d’électricité pour le passage à la terre des charges d’électricité statique, et porter de façon visible l’inscription «liquides inflammables». Les pots d’échappement devraient comporter un dispositif pare-flammes, et le moteur devrait être coupé pendant les opérations de chargement et de déchargement. La vitesse de ces véhicules devrait être strictement limitée.

L’utilisation

Les principaux dangers liés à l’utilisation des gaz comprimés tiennent à leur compression, à leur toxicité et à leur inflammabilité. L’une des précautions essentielles consiste à s’assurer que l’équipement n’est employé qu’avec les gaz pour lesquels il a été conçu et qu’on ne se sert jamais de gaz comprimés à d’autres fins que celles pour lesquelles leur utilisation a été autorisée.

Tous les tuyaux souples et autres accessoires devraient être de bonne qualité et vérifiés fréquemment. Il faut prévoir des clapets de retenue partout où ils sont nécessaires. Il importe que tous les raccords de tuyaux souples soient en bon état et qu’aucun raccordement ne soit opéré en forçant des filetages dont les pas ne correspondent pas exactement. Pour l’acétylène et les gaz combus-tibles, le tuyau souple devrait être rouge; pour l’oxygène, noir. Pour tous les gaz inflammables, il est recommandé d’employer des raccords à pas gauche; pour tous les autres gaz, le pas devrait être à droite. Les tuyaux souples ne devraient jamais être intervertis.

L’oxygène et certains gaz d’anesthésie sont souvent transportés dans des bouteilles de grandes dimensions. Le transvasement de ces gaz comprimés dans des bouteilles plus petites est une opération dangereuse qui devrait être exécutée sous la surveillance d’une personne compétente et avec le matériel adéquat.

L’utilisation de l’air comprimé est largement répandue dans de nombreuses branches d’industrie. L’installation et la protection des réseaux de canalisations exige des précautions adéquates. Il faut maintenir les tuyaux souples et leurs accessoires en bon état et les vérifier régulièrement. Appliquer un tuyau ou une buse d’air comprimé sur une coupure ou une plaie ouverte par laquelle l’air peut pénétrer sous les tissus ou dans la circulation sanguine est un acte particulièrement dangereux; des mesures devraient être prises pour prévenir toutes les formes de comportements irresponsables consistant à introduire de l’air comprimé dans l’organisme par un orifice naturel, ce qui peut avoir des conséquences fatales. Il est également dangereux de nettoyer des objets ou un poste de travail à l’air comprimé; il est arrivé que des particules violemment entraînées par l’air aient provoqué des blessures ou la cécité de personnes se trouvant à proximité.

L’étiquetage et le marquage

L’étiquetage et le marquage devraient être conformes aux pratiques courantes dans le pays ou la région considérés. La substitution intempestive d’un gaz à un autre, ou le remplissage d’un récipient avec un gaz différent de celui qu’il contenait précédemment, en l’absence de purge ou de décontamination préalables, peuvent être la cause d’accidents graves. L’identification par l’application de couleurs conventionnelles semble être le meilleur moyen de parer à de telles méprises; elle consiste à peindre des parties déterminées des bouteilles et des réseaux de canalisations selon un code défini par les normes nationales de sécurité ou recommandé par l’organisme national compétent.

Les bouteilles de gaz

Pour la commodité de la manipulation, du transport et du stoc-kage, les gaz sont généralement comprimés dans des bouteilles à des pressions allant de quelques atmosphères à 200 bars, voire davantage. Ces bouteilles sont généralement fabriquées en alliage d’acier (acier spécial), mais l’usage de l’aluminium est également répandu, pour les extincteurs par exemple.

Les risques auxquels exposent la manipulation et l’utilisation de gaz comprimés sont:

Fabrication des bouteilles. Les bouteilles d’acier peuvent être sans soudure ou soudées. Les bouteilles sans soudure sont faites d’un acier allié de haute qualité; elles subissent un traitement thermique rigoureux qui leur confère à la fois la résistance et la solidité nécessaires pour supporter des pressions élevées. Elles peuvent aussi être forgées et étirées à chaud à partir de billettes d’acier, ou formées à chaud à partir de tubes sans soudure. Les bouteilles soudées sont fabriquées à partir de tôles, la partie supérieure et le fond emboutis étant soudés sur une section tubulaire cylindrique sans soudure ou soudée; elles subissent ensuite un traitement thermique de détente. Les bouteilles soudées sont largement utilisées pour les gaz liquéfiés maintenus sous faible pression ainsi que pour les gaz dissous tels que l’acétylène.

Les bouteilles d’aluminium sont extrudées dans des presses de grande taille à partir d’alliages spéciaux soumis à un traitement thermique pour obtenir la résistance voulue.

Les bouteilles de gaz devraient être conçues, fabriquées et mises à l’épreuve conformément à des normes strictes. La qualité du matériau et du traitement thermique devrait être contrôlée sur chaque lot de bouteilles et la résistance mécanique testée sur un certain nombre de bouteilles. La vérification est souvent effectuée au moyen d’instruments perfectionnés, mais dans tous les cas par un inspecteur agréé qui contrôle les bouteilles et les soumet à une épreuve hydraulique à une pression donnée. Une inscription durable portant les données d’identification ainsi que le poinçon de l’inspecteur sont apposés sur le col de la bouteille ou à un autre emplacement approprié.

Inspection périodique. Au cours de leur utilisation, les bouteilles risquent de subir des détériorations du fait d’une manipulation brutale, d’une corrosion intérieure ou extérieure, d’un incendie ou d’une autre cause. Les codes nationaux ou internationaux exigent donc que leur remplissage ne puisse avoir lieu avant qu’elles n’aient été soumises à une vérification et à des épreuves périodiques à des intervalles généralement compris entre deux et dix ans, en fonction de l’usage. Une vérification visuelle interne et externe complétée par une épreuve hydraulique constitue la base de l’agrément d’une bouteille pour une nouvelle période. La date de l’épreuve (mois et année) est estampillée sur la bouteille.

Elimination. Chaque année, un grand nombre de bouteilles sont réformées pour différentes raisons. Il importe que la mise hors service de ces bouteilles soit effectuée de façon telle qu’elles ne soient pas remises en circulation par des voies détournées. Il convient donc de les rendre complètement inutilisables par découpage, écrasement ou tout autre moyen approprié.

Robinetterie. Les vannes et les accessoires de sécurité devraient être considérés comme parties intégrantes de la bouteille et maintenus en parfait ordre de marche. Le col et le filetage extérieur devraient être en excellent état: le robinet devrait fermer hermétiquement sans nécessiter un effort excessif. Les robinets d’arrêt sont souvent munis d’un dispositif de limitation de pression; celui-ci peut être une soupape de sûreté, un disque de rupture, un bouchon fusible (cartouche fusible) ou la combinaison d’un disque de rupture et d’un élément fusible. La pratique varie d’un pays à l’autre, mais les bouteilles pour gaz liquéfiés sous faible pression sont toujours munies de soupapes de sûreté reliées à la phase gazeuse.

Les risques

Différents codes de transport classent les gaz selon qu’ils sont comprimés, liquéfiés ou dissous sous pression. Aux fins du présent article, il est utile d’établir cette classification en fonction du type de risque rencontré.

Haute pression. En cas d’explosion d’une bouteille, des débris projetés ou la pression du gaz peuvent provoquer des dommages matériels et corporels. Plus le gaz est comprimé, plus l’énergie emmagasinée est élevée. Ce risque est toujours présent avec des gaz comprimés, et il augmente avec la température si la bouteille est chauffée. Il faut donc:

Basse température. La plupart des gaz liquéfiés s’évaporent rapidement à la pression atmosphérique et peuvent atteindre des températures très basses. Une personne dont la peau est exposée à un tel liquide risque de subir des lésions de type «brûlure froide» (le CO2 liquide forme des particules neigeuses lors de son expansion). Il faut donc porter un équipement de protection approprié (gants, lunettes de protection, par exemple).

Oxydation. C’est avec l’oxygène, l’un des gaz comprimés les plus importants, que le risque d’oxydation est le plus évident. L’oxygène ne brûle pas par lui-même, mais il est nécessaire à la combustion. L’air normal contient 21% d’oxygène en volume.

Toutes les matières combustibles s’enflamment plus facilement et brûlent plus vigoureusement quand la concentration d’oxygène augmente. Ce phénomène étant observable même pour une faible augmentation de la concentration d’oxygène, il faut prendre le plus grand soin à ne pas enrichir en oxygène l’atmosphère du lieu de travail. Dans un espace confiné, des fuites minimes d’oxygène peuvent conduire à une concentration dangereuse.

Le danger lié à l’oxygène croît avec l’augmentation de la pression jusqu’au point où de nombreux métaux brûlent vigoureusement. En présence d’oxygène, des matières finement divisées peuvent brûler avec une force explosive. Des vêtements saturés d’oxygène brûlent très rapidement et leur combustion est difficile à juguler.

On a toujours considéré que les huiles et les graisses étaient dangereuses en présence d’oxygène. En effet, elles réagissent facilement avec l’oxygène, leur présence est courante, leur température d’inflammation est peu élevée et la chaleur développée risque d’enflammer le métal sous-jacent. Dans un matériel à oxygène sous haute pression, la température d’inflammation peut être facilement atteinte par le choc de compression qui peut avoir été provoqué par l’ouverture rapide du robinet (compression adiabatique).

Il convient donc:

Inflammabilité. Les gaz inflammables ont un point d’éclair situé au-dessous de la température ambiante et forment des mélanges explosifs avec l’air (ou avec l’oxygène) entre certaines limites que l’on appelle limites inférieure et supérieure d’explosibilité.

Les gaz qui s’échappent (des soupapes de sûreté, par exemple) sont susceptibles de s’enflammer et de brûler avec une flamme plus ou moins longue selon la pression et la quantité de gaz. Ces flammes peuvent, à leur tour, chauffer un matériel situé à proximité et le faire brûler, fondre ou exploser. L’hydrogène brûle avec une flamme pratiquement invisible.

Dans des espaces confinés, même de petites fuites risquent de provoquer des mélanges explosifs. Certains gaz comme les gaz de pétrole liquéfiés (essentiellement le propane et le butane) sont plus lourds que l’air et sont donc difficiles à évacuer par ventilation, car ils vont s’accumuler dans les parties basses des bâtiments et «flotter» d’une pièce à l’autre. Tôt ou tard, ces gaz risquent de parvenir à une source d’inflammation et d’exploser.

L’inflammation peut être provoquée par une source de chaleur, mais aussi par une étincelle d’origine électrique, même très petite.

Du fait de ses propriétés et de son usage répandu, l’acétylène occupe une place particulière parmi les gaz combustibles. S’il est chauffé, ce gaz peut commencer à se décomposer avec dégagement de chaleur, même en l’absence d’air. Si la réaction n’est pas stoppée, elle risque d’entraîner l’explosion de la bouteille.

Par sécurité, les bouteilles d’acétylène sont donc remplies d’une masse fortement poreuse qui contient également un solvant pour le gaz. Un chauffage extérieur dû à l’action d’une flamme ou d’un chalumeau, ou dans certains cas une flamme intérieure provoquée par de violents retours de flamme provenant d’un matériel de soudage risquent d’entraîner une décomposition dans la bouteille. Dans ces cas, il convient:

Dans de nombreux pays, les bouteilles d’acétylène sont munies de cartouches fusibles. Lors de leur fusion (généralement aux environs de 100 °C), ces dispositifs diminuent la pression du gaz et permettent d’éviter l’explosion de la bouteille. Mais, dans le même temps, le gaz libéré risque de s’enflammer et d’exploser.

Les précautions normales à prendre à l’égard des gaz combus-tibles consistent donc:

Toxicité. Certains gaz, moins courants, peuvent être non seulement toxiques, mais avoir aussi des effets irritants ou corrosifs sur la peau et les yeux.

Il importe que les personnes qui manipulent des gaz toxiques aient reçu une formation appropriée, de façon à être conscientes du danger et de la nécessité de prendre les précautions nécessaires. Les bouteilles devraient être stockées dans un local bien ventilé. Aucune fuite ne peut être tolérée. Il y a lieu d’employer un matériel de protection approprié (masques à gaz ou appareils de protection respiratoire).

Gaz inertes. L’usage de gaz tels que l’argon, le dioxyde de carbone, l’hélium et l’azote est largement répandu pour créer une atmosphère protectrice et éviter des réactions indésirables dans les installations de soudage, l’industrie chimique et les aciéries, entre autres. Ces gaz ne sont pas étiquetés comme étant dangereux, ce qui n’exclut pas l’éventualité de graves accidents si la teneur vitale en oxygène n’est plus assurée. En effet, lorsqu’un gaz ou un mélange gazeux quelconque déplace l’air de telle façon que l’atmosphère que l’on respire devient pauvre en oxygène, il y a danger d’asphyxie. L’absence d’oxygène ou l’appauvrissement en oxygène sont susceptibles de provoquer très rapidement une perte de conscience, voire la mort, et cela sans le moindre signe avant-coureur.

Avant de pénétrer dans un espace confiné dont l’atmosphère peut être déficiente en oxygène, il faut impérativement aérer ce local. En cas de port d’un appareil de protection respiratoire, la personne qui entre doit absolument être surveillée. Il est impératif d’employer de tels appareils, même lors d’opérations de secours: les masques à gaz ordinaires ne constituent pas une protection contre le manque d’oxygène. Il convient d’observer les mêmes précautions dans les grandes installations permanentes de lutte contre le feu, souvent automatiques, et d’avertir de ce danger les personnes susceptibles de pénétrer dans ces zones.

Remplissage des bouteilles. Le remplissage des bouteilles fait appel à des compresseurs haute pression et à des pompes capables d’assurer le transvasement des liquides cryogéniques (à très basse température). Les postes de remplissage peuvent également comprendre de grands réservoirs de stockage de gaz liquides à l’état pressurisé ou fortement réfrigéré.

L’opérateur devrait vérifier que les bouteilles sont en bon état pour le remplissage et les remplir avec le gaz prévu, sans dépasser la quantité ni la pression autorisées. L’équipement devrait être conçu et testé pour la pression et le type de gaz donnés, et protégé par des soupapes de sécurité. Pour l’oxygène, il convient absolument de respecter rigoureusement les impératifs de propreté et de nature des matériaux. En cas de remplissage avec des gaz inflammables ou toxiques, il faut être particulièrement attentif à la sécurité des opérateurs. La condition essentielle est une bonne ventilation, associée à un matériel et à une technique appropriés.

Les bouteilles contaminées par d’autres gaz ou liquides représentent un danger particulier. Il est possible de purger ou de vider les bouteilles sans pression résiduelle avant de les remplir. Il convient de s’assurer avec un soin particulier que les bouteilles de gaz destinées aux applications médicales ne contiennent aucune substance dangereuse.

Transport . Le transport à faible distance tend à devenir plus mécanisé par l’emploi de chariots élévateurs et d’engins similaires. Lors du transport, les bouteilles devraient être munies d’un capuchon et arrimées pour ne pas tomber du véhicule. Il faut absolument s’abstenir de décharger les bouteilles du chariot en les laissant choir directement sur le sol. Pour le transport par un engin de levage, il est nécessaire d’employer des berceaux de levage appropriés. L’utilisation de dispositifs de levage magnétiques ou de capuchons à filetage incertain devrait être évitée.

Quand des bouteilles sont regroupées, il importe de veiller avec soin à ne pas créer de contrainte sur leurs raccords. L’importance des quantités de gaz en cause accroît évidemment les risques. Une bonne pratique consiste à subdiviser les grands ensembles en sections et à disposer des robinets d’arrêt dans des endroits facilement accessibles en cas d’urgence.

Lors de la manipulation et du transport de bouteilles, les accidents les plus fréquents sont les blessures provoquées par les bouteilles elles-mêmes, dures, lourdes et difficiles à manipuler. Il convient donc de porter des chaussures de sécurité et d’employer un chariot pour transporter même une seule bouteille sur un trajet relativement long.

Les codes applicables au transport international classent les gaz comprimés dans la catégorie des marchandises dangereuses. Ils indiquent de façon détaillée les gaz qui peuvent être transportés, les exigences concernant les bouteilles, la pression autorisée, le marquage, etc.

Identification du contenu . L’impératif le plus important pour la manipulation sans danger des gaz comprimés est l’identification correcte du gaz contenu; elle est réalisée par étiquetage, inscription au pochoir ou marquage au moyen de couleurs. Certaines conditions de marquage sont couvertes pas les normes de l’Organisation internationale de normalisation (ISO). Le marquage des bouteilles de gaz à usage médical suit les normes ISO dans la plupart des pays. On utilise également des couleurs standardisées pour d’autres gaz dans de nombreux pays, mais ce n’est pas là un moyen d’identification suffisant. En dernier ressort, seule une inscription spécifiant le contenu de la bouteille peut être considérée comme fiable.

Raccords de sortie normalisés . L’utilisation d’un raccord de sortie normalisé pour un certain gaz ou groupe de gaz réduit fortement les risques de raccorder des bouteilles et des accessoires prévus pour d’autres types de gaz. Il convient donc de s’abstenir d’employer des adaptateurs dont l’usage est contraire à la sécurité et de n’utiliser pour réaliser un raccordement que des outils habituels, manœuvrés sans force excessive.

Bonnes pratiques de sécurité lors de l’utilisation de gaz comprimés

L’utilisation sans danger des gaz comprimés impose la mise en œuvre des principes de sécurité esquissés dans le présent chapitre et précisés dans le recueil de directives pratiques du Bureau international du Travail pour les produits chimiques en général (BIT, 1993). Cela suppose que l’utilisateur possède quelques connaissances de base concernant les gaz et les matériels qu’il manipule. Tout utilisateur devrait observer en outre les précautions suivantes:

L’HYGIÈNE AU LABORATOIRE

Frank Miller

L’importance de la sécurité et de l’hygiène au laboratoire

Un laboratoire ne peut satisfaire aux conditions de sécurité et d’hygiène que si les méthodes de travail y satisfont elles aussi. Pour instaurer de telles méthodes, il faut en premier lieu confier la responsabilité et l’autorité en matière de sécurité et d’hygiène à un responsable qui, conjointement avec le comité de sécurité du laboratoire, décidera des tâches à accomplir et désignera une personne pour exécuter chacune d’elles.

L’une des tâches spécifiques du comité de sécurité consiste, à l’aide d’une liste de contrôle, à mener des inspections périodiques et à en récapituler les résultats dans un rapport qui sera soumis au responsable sécurité du laboratoire. Une autre tâche importante de la gestion de la sécurité consiste à inspecter périodiquement les équipements de sécurité pour s’assurer qu’ils fonctionnent bien et sont au bon endroit. Pour que les vérifications soient possibles, il faut dresser au préalable un inventaire complet des équipements de sécurité, avec une brève description, l’indication de la taille ou de la capacité et le nom du fabricant; cet inventaire devrait être répété chaque année. Il est tout aussi important de faire un inventaire semestriel de tous les produits chimiques du laboratoire, y compris les produits de marque déposée. Ces produits devraient être classés en groupes de substances chimiquement similaires selon le risque d’incendie qu’ils présentent. Une autre classification de sécurité essentielle est basée sur le niveau de danger associé à une substance, car la façon dont elle sera traitée dépend directement des dangers qu’elle est susceptible de provoquer et de la facilité avec laquelle ceux-ci risquent de se déclencher. Chaque produit chimique sera donc classé dans l’une des trois classes de danger choisies en fonction de la gravité du risque encouru, à savoir:

  1. les substances dangereuses ordinaires;
  2. les substances très dangereuses;
  3. les matières extrêmement dangereuses.

Les substances de la première classe sont celles qui sont relativement faciles à maîtriser, que le personnel du laboratoire connaît bien et qui ne présentent pas de risque inhabituel. Ces substances vont des plus inoffensives, comme le bicarbonate de soude et le saccharose, jusqu’à l’acide sulfurique concentré, l’éthylèneglycol et le pentane.

Les substances de la deuxième classe présentent un danger bien supérieur. Elles nécessitent une manipulation particulière et parfois une surveillance, et présentent des dangers importants d’inflammation ou d’explosion ou de graves risques pour la santé. Font partie de ce groupe les produits chimiques qui forment avec le temps des composés explosifs instables (hydroperoxydes formés par les éthers, par exemple) ou des substances qui ont une toxicité aiguë élevée (comme le fluorure de sodium, d’une toxicité orale de 57 mg/kg chez la souris), ou encore une toxicité chronique comme les substances cancérogènes, mutagènes ou tératogènes. Les substances de cette classe présentent souvent le même type de danger que celles de la troisième classe; la différence réside uniquement dans le degré de gravité. Quant aux substances de la troisième classe, soit les matières extrêmement dangereuses, elles sont associées à un danger extrême ou déclenchent beaucoup plus facilement des effets désastreux.

Quand elles ne sont pas manipulées correctement, les matières extrêmement dangereuses peuvent très facilement provoquer des accidents graves entraînant des lésions importantes, voire la mort, ou des dommages matériels considérables. Il faut faire preuve d’une très grande prudence lorsqu’on manipule des substances de ce type. A titre d’exemple, on peut citer le nickel-tétracarbonyle (un liquide volatil, extrêmement toxique, dont les vapeurs sont mortelles à une concentration de 1 ppm seulement) et le triéthyl-aluminium (un liquide qui s’enflamme spontanément au contact de l’air et qui réagit de façon explosive au contact de l’eau).

L’une des tâches les plus importantes du comité de sécurité est l’élaboration d’un plan de sécurité et d’hygiène complet pour le laboratoire qui expose en détail la politique de sécurité et définit des méthodes standards pour toutes les opérations de laboratoire en tenant compte des obligations légales. Il s’agit en l’occurrence de définir des directives pour la mise en œuvre des substances susceptibles de relever de l’une des trois classes de substances dangereuses, pour le contrôle des équipements de sécurité, pour la conduite à tenir en cas de déversement accidentel d’un produit chimique, ainsi que les règles à suivre pour le rejet des déchets chimiques, les normes à respecter pour la qualité de l’air du laboratoire et la tenue des registres exigés par la réglementation. Ce plan devrait être conservé au laboratoire ou pouvoir être consulté facilement par les travailleurs. Les autres sources d’informations imprimées comprennent les fiches sur les produits chimiques (fiches de données de sécurité), un manuel de sécurité des travaux en laboratoire ainsi que des données toxicologiques et sur les risques d’incendie. L’inventaire des produits chimiques du laboratoire et trois listes dérivées (classification des produits chimiques selon leur classe chimique, leur classe de sécurité incendie et les trois degrés de danger) devraient être conservés avec ces données.

Il faut également disposer d’un registre pour consigner les activités de sécurité. Il n’est pas nécessaire que ce registre soit conservé au laboratoire ou soit immédiatement accessible à ceux qui y travaillent. Les données qu’il contient sont essentiellement destinées au personnel chargé de superviser la sécurité et l’hygiène concernant les produits chimiques qui se trouvent au laboratoire ainsi qu’aux inspecteurs de l’autorité de surveillance. Elles doivent donc être facilement disponibles et tenues à jour. Il est préférable de conserver le registre hors du laboratoire afin d’éviter sa destruction en cas d’incendie. Les documents devant figurer dans le registre sont les comptes rendus des inspections effectuées par le comité de sécurité, les comptes rendus des inspections par les autorités locales de surveillance, y compris ceux des sapeurs-pompiers et des autorités fédérales et régionales, les comptes rendus relatifs à l’élimination des déchets dangereux, les relevés des taxes frappant les diverses classes de déchets dangereux et, éventuellement, une copie de l’inventaire des produits chimiques du laboratoire et de tout autre document pertinent concernant les installations et les personnes qui y travaillent (par exemple, feuilles de présence du personnel aux réunions annuelles de sécurité du laboratoire).

Les causes de maladies et de lésions au laboratoire

Les mesures destinées à prévenir les lésions, les maladies et le stress du personnel font partie intégrante des plans de fonctionnement au quotidien d’un laboratoire bien géré. Les personnes qui risquent de souffrir du manque de sécurité et d’hygiène dans un laboratoire sont non seulement celles qui y travaillent, mais aussi les personnes employées alentour et celles qui sont affectées à des travaux d’entretien ou au gardiennage. Etant donné que les lésions subies en laboratoire sont dues pour l’essentiel à un contact inopportun entre les produits chimiques et les personnes, à un mélange intempestif de produits chimiques ou à un apport non souhaité d’énergie à des produits chimiques, la préservation de la santé passe par la prévention de telles interactions indésirables. Cela appelle, entre autres choses, un confinement adapté des produits chimiques, une combinaison correcte de ces produits et une surveillance étroite des apports d’énergie. Les principaux types d’affections contractées en laboratoire sont des intoxications, des brûlures chimiques et des blessures causées par un incendie ou une explosion (brûlures thermiques, coupures, commotions et autres lésions corporelles graves).

Attaque chimique de l’organisme . Il y a attaque chimique lorsque des toxiques sont absorbés par l’organisme et altèrent son fonctionnement normal en perturbant le métabolisme ou d’autres mécanismes biologiques. Les brûlures chimiques, c’est-à-dire la destruction massive des tissus, se produisent généralement au contact d’acides forts ou d’alcalis concentrés. Les matières toxiques qui ont pénétré dans l’organisme par absorption à travers la peau, les yeux ou les muqueuses, par ingestion ou par inhalation, peuvent provoquer une intoxication générale du fait qu’elles sont transportées par la circulation sanguine.

On distingue généralement deux types d’intoxication: aiguë et chronique. L’intoxication aiguë se caractérise par des effets qui apparaissent pendant ou immédiatement après une exposition unique à une substance toxique. L’intoxication chronique n’est mise en évidence qu’avec le temps, ce qui peut prendre des semaines, des mois ou des années, voire des décennies. On considère qu’il y a intoxication chronique quand les deux conditions ci-après sont réunies: le sujet a été soumis à des expositions multiples sur de longues périodes et à des quantités significatives (du point de vue métabolique) du toxique.

Des brûlures chimiques, qui se produisent généralement lorsque des liquides corrosifs entrent en contact avec la peau ou les yeux, peuvent également être observées en présence de matières solides corrosives dont la taille peut varier du grain de poudre à des cristaux de taille relativement importante, ou de liquides corrosifs dispersés dans l’air sous forme de brouillards, ou encore de gaz corrosifs tels que le chlorure d’hydrogène. Les bronches, les poumons, la langue, la gorge et l’épiglotte peuvent également être attaqués par des produits chimiques corrosifs, qu’ils soient à l’état gazeux, liquide ou solide. Les produits chimiques toxiques peuvent naturellement s’introduire dans l’organisme sous l’un de ces trois états physiques, ou sous forme de poussières ou de brouillards.

Lésions provoquées par le feu ou par une explosion. Le feu et les explosions peuvent causer des brûlures thermiques. Toutefois, certaines lésions provoquées par les explosions sont particulièrement caractéristiques: il s’agit de blessures engendrées soit par le choc de la détonation proprement dite (qui peut provoquer la perte de doigts ou de membres), soit par la projection de débris de verre qui peuvent entraîner des lacérations ou la cécité.

Lésions provoquées par d’autres agents . Il existe une troisième catégorie de lésions qui ne sont imputables ni à une attaque chimique, ni à une combustion, mais à la combinaison d’autres causes: organes mécaniques, courant électrique, sources lumineuses à haute énergie (ultraviolets et lasers), surfaces chaudes occasionnant des brûlures, éclatement violent par explosion soudaine d’un récipient en verre à bouchon vissé sous l’effet de la formation inattendue d’une pression interne des gaz issus du produit chimique qu’il contenait, bords tranchants d’une éprouvette cassée, etc. Les blessures d’origine mécanique les plus graves sont sans doute causées par le renversement de lourdes bouteilles de gaz sur le sol. Ces accidents peuvent occasionner des blessures aux jambes et aux pieds; de plus, si le fût de la bouteille se brise lors de la chute, la bouteille elle-même, propulsée par la fuite rapide et massive de gaz, devient un missile incontrôlé qui peut présenter un danger mortel.

La prévention des lésions

Réunions consacrées à la sécurité et à la diffusion d’informations . La prévention des lésions repose sur l’exécution correcte et sans danger des opérations effectuées en laboratoire, laquelle dépend essentiellement de la bonne formation des travailleurs à des méthodes de travail appropriées. Leur formation initiale, acquise au cours des études secondaires ou supérieures, devrait être complétée et renforcée par des séances périodiques consacrées à la sécurité. Ces séances devraient mettre l’accent sur la compréhension des bases physiques et biologiques des bonnes pratiques de laboratoire, afin de permettre aux travailleurs de rejeter facilement des modes opératoires douteux et de choisir tout naturellement des méthodes techniquement sûres. Ces séances devraient également familiariser le personnel avec les données nécessaires pour adopter des méthodes sans danger et pour accéder aux sources de ces données.

Les travailleurs devraient pouvoir obtenir sans peine, à leur poste de travail, les informations techniques et de sécurité pertinentes: manuels de sécurité, fiches de données de sécurité relatives aux produits chimiques, informations toxicologiques ou relatives aux risques d’incendie, etc.

Prévention des intoxications et des brûlures chimiques . Les intoxications et les brûlures chimiques ont en commun les quatre mêmes sites de pénétration ou d’attaque: 1) la peau; 2) les yeux; 3) la bouche, qui mène à l’estomac et aux intestins; et 4) le nez, qui conduit aux bronches et aux poumons. La prévention consiste à rendre ces sites inaccessibles aux substances toxiques et corrosives, en installant une ou plusieurs barrières matérielles entre la substance dangereuse et la personne à protéger et en veillant à ce que l’air du laboratoire ne soit pas contaminé. On peut, par exemple, travailler à l’abri d’un écran de protection ou utiliser une hotte, ou les deux; l’emploi d’une boîte à gants assure naturellement une double protection. En cas de contamination des tissus, on peut limiter la gravité des lésions en éliminant aussi rapidement et aussi complètement que possible le contaminant toxique ou corrosif.

Prévention des intoxications aiguës, des brûlures chimiques et des intoxications chroniques . Bien que la démarche adoptée pour isoler la substance dangereuse de la personne à protéger soit fondamentalement la même dans la prévention des intoxications aiguës, des brûlures chimiques et des intoxications chroniques, il faut procéder un peu différemment dans le dernier cas. A titre de comparaison, on peut dire que si les intoxications aiguës et les brûlures chimiques peuvent être assimilées à une attaque massive, l’intoxication chronique ressemble plutôt à une guerre de siège. Provoqués généralement par des concentrations beaucoup plus faibles, exerçant leur influence par des expositions multiples au cours de périodes prolongées, les effets d’une intoxication chronique se manifestent progressivement et insidieusement par une action discrète et continue. L’action corrective consiste tout d’abord à détecter les produits chimiques susceptibles de provoquer une intoxication chronique (et cela avant même l’apparition des premiers symptômes) ou à reconnaître certains signes d’inconfort du travailleur comme étant les symptômes possibles d’une intoxication chronique. En cas de suspicion d’intoxication chronique, un examen médical devrait être pratiqué immédiatement dès lors que l’on a détecté un toxique à une concentration dépassant ou même approchant la concentration admissible. Il faut également prendre des mesures efficaces pour éliminer le toxique ou, à tout le moins, ramener sa concentration à un niveau ne présentant pas de danger. La protection contre l’intoxication chronique exige souvent l’utilisation d’un équipement de protection individuelle pendant la totalité ou la majeure partie de la journée de travail; pour des raisons de confort, l’utilisation d’une boîte à gants ou d’un appareil respiratoire autonome n’est cependant pas toujours possible.

Protection contre les intoxications et les brûlures chimiques . La meilleure protection contre la contamination de la peau par les éclaboussures d’un liquide corrosif ou par des particules solides toxiques en suspension dans l’air consiste à porter des gants et un tablier de laboratoire en caoutchouc naturel ou synthétique ou en un matériau polymère approprié, c’est-à-dire en un matériau qui, sous l’action de la substance vis-à-vis de laquelle il doit offrir une protection, ne se dissout pas, ne gonfle pas, ne subit aucune attaque d’aucune sorte par l’agent corrosif ou toxique et y est imperméable. L’emploi d’un écran protecteur interposé entre l’appareil dans lequel des produits chimiques sont chauffés, mis à réagir ou distillés et l’expérimentateur constitue une mesure de prévention supplémentaire contre les brûlures chimiques et les intoxications par contamination de la peau. La rapidité avec laquelle un produit corrosif ou toxique est éliminé de la peau par lavage revêt une importance cruciale dans la prévention ou la limitation des lésions que ce produit peut infliger; une douche déluge, bien placée, constitue dès lors un élément de sécurité indispensable.

Ce sont les lunettes de sécurité et les masques qui offrent la meilleure protection des yeux et du visage contre les projections de liquide. Les contaminants en suspension dans l’air comprennent non seulement des vapeurs et des gaz, mais aussi des solides et des liquides susceptibles d’être présents sous une forme finement divisée, à l’état de poussières ou de brouillards. Pour empêcher ces substances de pénétrer dans les yeux, le moyen le plus efficace consiste à travailler sous une hotte ou à utiliser une boîte à gants. Pour une meilleure protection, on peut porter des lunettes et travailler sous une hotte. La présence dans le laboratoire d’une installation de lavage oculaire facilement accessible permet souvent d’éviter, et en tous les cas de limiter, les lésions provoquées par des projections corrosives ou toxiques.

La voie d’absorption conduisant de la bouche à l’estomac, puis à l’intestin, est généralement associée à une intoxication plutôt qu’à une attaque par des produits corrosifs. L’ingestion d’une substance toxique se produit généralement de manière accidentelle par la contamination chimique d’aliments ou de produits cosmétiques. Les sources de ces contaminations peuvent être des aliments conservés au réfrigérateur avec des produits chimiques, des aliments et boissons consommés au laboratoire, ou des rouges à lèvres conservés ou appliqués au laboratoire. La prévention de ce type d’intoxication consiste à éviter des pratiques dont on sait qu’elles peuvent conduire à une contamination. Il convient donc de réserver les réfrigérateurs aux seules denrées alimentaires et de prendre ses repas en un lieu extérieur au laboratoire.

La voie allant du nez aux bronches et aux poumons — la voie respiratoire — est affectée uniquement par des substances véhiculées par l’air, qu’il s’agisse de gaz, de vapeurs, de poussières ou de brouillards. Il est possible d’empêcher ces substances en suspension dans l’air de pénétrer dans l’appareil respiratoire des personnes se trouvant à l’intérieur et à l’extérieur du laboratoire en conjuguant les mesures suivantes: 1) procéder sous hotte aux opérations qui mettent en œuvre ces substances; 2) régler le débit d’air entrant au laboratoire de façon à renouveler l’atmosphère dix à douze fois par heure; et 3) faire régner en permanence, à l’intérieur du laboratoire, une pression d’air négative par rapport à celle des couloirs et locaux environnants (en d’autres termes, à mettre le laboratoire en dépression). Les opérations dégageant des fumées ou de la poussière et mettant en œuvre des appareillages très volumineux ou des récipients de la taille d’un fût de grande capacité (218 litres, par exemple), c’est-à-dire trop encombrants pour être installés sous une hotte ordinaire, devraient être réalisées sous une hotte spéciale. D’une manière générale, l’emploi régulier d’appareils de protection respiratoire, isolants autonomes ou non, est déconseillé pour les opérations de laboratoire, sauf dans les situations d’urgence.

Des intoxications chroniques au mercure, provoquées par l’inhalation de vapeurs de mercure, peuvent survenir dans les laboratoires, en général lorsque du mercure s’est accumulé dans un endroit caché — sous le plancher, dans des tiroirs ou des placards — et a émis des vapeurs pendant une période suffisamment longue. Un maintien rigoureux de l’ordre et de la propreté devrait permettre de l’éviter. Si l’on suspecte une fuite de mercure, il convient de rechercher la présence de vapeurs de mercure dans l’atmosphère du laboratoire soit à l’aide d’un détecteur approprié, soit en envoyant un échantillon d’air à un laboratoire d’analyse.

Prévention des incendies et des explosions et lutte contre le feu . La principale cause des incendies de laboratoire est l’inflammation accidentelle de liquides inflammables. Il s’agit, au sens de la sécurité incendie, de liquides dont le point d’éclair est inférieur à 36,7 °C. Au nombre des sources d’inflammation connues pour avoir provoqué ce type d’incendie, on trouve des flammes nues, des surfaces chaudes, des étincelles électriques provenant de commutateurs ou de moteurs équipant des appareils tels qu’un agitateur, un réfrigérateur ou un ventilateur de type domestique, ou encore des étincelles produites par de l’électricité statique. Quand un liquide inflammable s’enflamme, l’inflammation ne se produit pas dans le liquide lui-même mais au-dessus, dans le mélange de ses vapeurs avec l’air, lorsque la concentration de ces vapeurs est comprise entre une limite inférieure et une limite supérieure données.

On peut prévenir les incendies de laboratoire en confinant les vapeurs de liquides inflammables à l’intérieur des récipients dans lesquels ces liquides sont conservés ou à l’intérieur des appareils dans lesquels ils sont mis en œuvre. S’il n’est pas possible d’emprisonner complètement ces vapeurs, il convient impérativement de limiter dans toute la mesure du possible leur vitesse d’échappement et d’assurer un courant d’air vigoureux et continu pour les chasser afin de maintenir à tout instant leur concentration nettement au-dessous de la limite inférieure d’inflammabilité. On y parvient en travaillant sous une hotte et en conservant les fûts de liquides inflammables dans des enceintes spéciales ventilées par extraction.

Une pratique particulièrement dangereuse consiste à entreposer des liquides inflammables comme l’éthanol dans un réfrigérateur de type domestique dans lequel les vapeurs émises par les liquides entreposés ne sont pas à l’abri des étincelles provenant des commutateurs, moteurs et relais de l’appareil. Il faut donc ne jamais entreposer des récipients contenant des produits inflammables dans des réfrigérateurs de ce type. Cela vaut tout particulièrement pour les récipients ouverts contenant des liquides inflammables. Des produits inflammables, conservés dans des flacons à capuchon vissé à l’intérieur d’un réfrigérateur, ont déjà causé des explosions, probablement en raison d’un joint défectueux ou du bris d’un flacon. Les liquides inflammables qu’il convient de réfrigérer devraient être conservés uniquement dans des réfrigérateurs à l’épreuve des explosions.

Les étincelles produites par l’accumulation de charges électriques générées par un fluide en mouvement constituent une importante source des incendies qui se déclarent lors du transvasement ou du siphonnage de grandes quantités de substances inflammables d’un récipient dans un autre; la formation d’étincelles peut être évitée par la mise à la terre des deux récipients.

La plupart des incendies de laboratoire impliquant des produits chimiques et des solvants, et qui ont une dimension maîtrisable, peuvent être éteints à l’aide d’un extincteur contenant du dioxyde de carbone ou un produit chimique sec pulvérulent. Tout laboratoire devrait posséder, selon la taille des locaux, un ou plusieurs extincteurs de 4,5 kg de chaque type. Certains types de feux spéciaux exigent d’autres agents extincteurs. Ainsi, on arrive à maîtriser de nombreux incendies impliquant des métaux en utilisant du sable ou du graphite. Pour éteindre la flamme des hydrures de métaux, il faut du graphite ou du carbonate de chaux pulvérulent.

Lorsque des vêtements ont pris feu, il faut réduire les flammes rapidement pour limiter le plus possible l’étendue et la gravité des lésions du type brûlure thermique. Une couverture antifeu accrochée au mur est efficace pour éteindre ce type de feu: la personne dont les vêtements se sont enflammés peut l’utiliser elle-même, sans assistance extérieure, pour étouffer les flammes. Des douches déluge peuvent également être employées dans de telles circonstances.

Il existe des limites définissant le volume total des liquides inflammables susceptible d’être entreposé sans danger dans un laboratoire. Cette limite, généralement spécifiée dans les consignes de sécurité incendie du local, dépend des matériaux de construction du laboratoire et de la présence ou non d’un système d’extinction automatique. Elle est généralement comprise entre 55 et 135 litres.

Dans la plupart des laboratoires, un certain nombre de robinets de gaz répartis dans les locaux permettent l’utilisation de gaz naturel. Ils constituent les sources les plus fréquentes de fuites de gaz, tout comme les tuyaux de caoutchouc et les brûleurs. Si elles ne sont pas détectées dès le début, ces fuites peuvent provoquer de graves explosions. Pour localiser rapidement la source d’une telle fuite, il est possible de recourir à des détecteurs de gaz qui indiquent le niveau de concentration gazeuse dans l’atmosphère.

Prévention des risques provenant de sources diverses . Les chutes de bouteilles de gaz haute pression — un accident qui n’est pas rare — peuvent facilement être évitées en arrimant solidement les bouteilles par des cordes, des courroies ou des chaînes au mur ou à la paillasse du laboratoire et en munissant de capuchons toutes les bouteilles vides ou inutilisées.

La plupart des blessures dues aux bords ébréchés des éprouvettes de verre se produisent lorsqu’on enfonce un bouchon de liège ou de caoutchouc sur le tube. On peut les éviter en lubrifiant l’éprouvette avec de la glycérine ou en portant des gants de cuir.

Les matières incompatibles

Les matières incompatibles sont des substances qui, par contact ou mélange, produisent une réaction dangereuse ou potentiellement dangereuse. Les deux membres d’un couple incompatible peuvent être soit deux produits chimiques, soit un produit chimique et un matériau de construction comme le bois ou l’acier. Le fait de mélanger ou de mettre en contact deux matières incompatibles conduit soit à une réaction chimique, soit à une interaction physique qui dégage une grande quantité d’énergie. Au nombre des conséquences spécifiques, dangereuses ou potentiellement dangereuses, de ces combinaisons susceptibles, en fin de compte, d’entraîner de graves lésions ou des atteintes à la santé, on trouve le dégagement de grandes quantités de chaleur, l’incendie, l’explosion et la production de gaz inflammables ou toxiques. Etant donné qu’un laboratoire contient généralement une assez grande variété de substances, l’existence d’incompatibilités entre elles n’est pas rare et représente une menace sérieuse, voire un danger de mort, si ces substances ne sont pas manipulées avec toutes les précautions requises.

Le mélange de matières incompatibles est rarement intentionnel. Il résulte le plus souvent du bris accidentel et simultané de deux récipients voisins. Ce peut être aussi la conséquence d’une fuite ou d’un débord ou encore d’un mélange des vapeurs s’échappant de bouteilles contiguës. Bien que la situation dangereuse soit souvent facilement observable lors du mélange de deux matières incompatibles, il existe au moins un cas où il se forme un mélange qui présente une toxicité chronique qui n’est pas facilement détectable. C’est ce qui se produit lorsque du formaldéhyde gazeux provenant de formol à 37% réagit avec le chlorure d’hydrogène émis par de l’acide chlorhydrique concentré pour former du bis(chlorométhyl)éther, puissant produit cancérogène. Il existe également d’autres possibilités de formation de gaz inflammables et inodores qui ne sont pas détectables immédiatement.

Il est pourtant très simple d’empêcher le mélange de matières incompatibles par suite du bris simultané de récipients adjacents ou de l’échappement de vapeurs de bouteilles contiguës: il suffit d’éloigner les récipients l’un de l’autre. Pour ce faire, il convient toutefois d’identifier d’abord le couple incompatible, ce qui n’est pas toujours simple ni évident. Afin d’écarter autant que possible l’éventualité de passer à côté d’un tel couple, il convient de consulter un compendium d’incompatibilités et de le revoir de temps en temps pour se familiariser avec des exemples moins usuels. Pour éviter qu’un produit chimique n’entre en contact avec la matière d’une étagère, du fait d’un débordement ou d’un bris de flacon, il suffit de poser le flacon sur un plateau en verre offrant une capacité suffisante pour recueillir tout le contenu du flacon en cas de casse.

Exposition professionnelle à des produits chimiques dangereux en laboratoire

Norme sur les laboratoires publiée par l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration) des Etats-Unis (OSHA, 1990, 29 CFR 1910.1450)

La description ci-après d’un plan d’hygiène en matière de produits chimiques au laboratoire correspond à la section (e:1-4), Plan d’hygiène en matière de produits chimiques — Généralités, de la norme sur les laboratoires publiée par l’OSHA en 1990. Ce plan doit être tenu à la disposition des employés et de leurs représentants.

Le plan d’hygiène en matière de produits chimiques doit comprendre chacun des éléments ci-après et indiquer les mesures précises que l’employeur va prendre pour assurer la protection des employés du laboratoire:

  1. procédures de travail standards, fondées sur des considérations de sécurité et de santé, à suivre quand le travail de laboratoire implique l’emploi de produits chimiques dangereux;
  2. critères que l’employeur va appliquer pour déterminer et mettre en œuvre des mesures en vue de réduire l’exposition des employés à des produits chimiques dangereux, y compris des mesures techniques, l’utilisation d’équipement de protection individuelle et l’application de pratiques d’hygiène. Il convient d’accorder une attention particulière au choix des mesures de contrôle pour les produits chimiques réputés extrêmement dangereux;
  3. fonctionnement correct des hottes et autres équipements de protection, et mesures spécifiques à prendre pour assurer le fonctionnement correct et approprié de ces équipements;
  4. dispositions pour l’information et la formation des employés comme indiqué [figurant ailleurs dans ce plan];
  5. circonstances dans lesquelles une opération, procédure ou activité de laboratoire exige l’approbation préalable de l’employeur ou de son représentant avant sa mise en œuvre;
  6. prise de dispositions pour une consultation médicale et des examens médicaux...;
  7. désignation du personnel responsable de la mise en œuvre du plan d’hygiène en matière de produits chimiques, y compris la nomination d’un responsable d’hygiène en matière de produits chimiques et, le cas échéant, la constitution d’un comité d’hygiène en matière de produits chimiques; et
  8. dispositions pour une protection supplémentaire des employés lorsqu’ils travaillent avec des substances dangereuses au nombre desquelles figurent des «cancérogènes notoires», des toxiques pour la reproduction et des substances présentant un degré élevé de toxicité aiguë. Il convient de prendre particulièrement en compte les dispositions additionnelles ci-après qui seront applicables si nécessaire:
    1. désignation d’un emplacement approprié;
    2. emploi de dispositifs de confinement tels que des hottes ou des boîtes à gants;
    3. procédures de sécurité pour le rejet sans danger de déchets contaminés; et
    4. procédures de décontamination.

    L’employeur doit examiner et évaluer l’efficacité du plan d’hygiène en matière de produits chimiques au moins une fois par an et le mettre à jour si nécessaire.

Recommandations du Conseil national américain de la recherche (National Research
Council (NRC)) concernant l’hygiène en matière de produits chimiques au laboratoire*

Ventilation

a) Ventilation générale du laboratoire. Le système de ventilation devrait être conçu pour fournir une alimentation en air pour la respiration et pour la mise en œuvre de dispositifs de ventilation; il ne devrait pas être considéré comme un moyen de protection contre les substances toxiques émises dans le laboratoire, mais assurer le renouvellement de l’air du laboratoire en continu, et empêcher l’augmentation des concentrations dans l’air des substances toxiques pendant la journée de travail. Il devrait assurer l’afflux direct d’air dans le laboratoire à partir de zones autres que des laboratoires et son évacuation vers l’extérieur du local.

b) Hottes . Une hotte de laboratoire pour deux travailleurs de 76 cm linéaires par personne devrait être prévue s’ils travaillent principalement avec des produits chimiques; chaque hotte devrait comporter un dispositif de réglage continu permettant de vérifier le fonctionnement correct de la hotte avant son utilisation. En cas d’impossibilité, on évitera de travailler avec des substances dont la toxicité n’est pas connue ou fournira d’autres types de dispositifs de ventilation localisée.

c) Autres types de dispositifs de ventilation localisée . Des armoires de stockage aérées, des hottes d’aspiration, des schnorkels, etc. devraient être fournis si nécessaire. Hottes et schnorkels devraient être munis de leur propre conduit d’évacuation.

d) Zones de ventilation spéciales . L’air extrait des boîtes à gants et des enceintes isolées devrait passer par des épurateurs ou subir d’autres traitements avant d’être évacué par le système d’évacuation général. Les chambres froides et les chambres chaudes devraient être équipées de manière à permettre une évacuation rapide même en cas de panne électrique.

e) Modifications . Toute modification du système de ventilation devrait être précédée d’une vérification approfondie indiquant que la protection des travailleurs vis-à-vis des substances présentes dans l’air continuera d’être assurée.

f) Efficacité . Un taux de renouvellement d’air compris entre 4 et 12 fois par heure est acceptable si l’on utilise des systèmes localisés tels que des hottes en tant que principaux moyens de prévention technique.

g) Qualité . La circulation d’air générale devrait être exempte de turbulences et relativement uniforme dans l’ensemble du laboratoire, sans zones mortes ou dans lesquelles la vitesse de l’air est excessive. La circulation vers et à l’intérieur de la hotte ne devrait pas être trop turbulente; la vitesse frontale de la hotte devrait être appropriée (généralement comprise entre 30 et 50 cm/s).

h) Evaluation . La qualité et le débit de ventilation devraient être évalués lors de l’installation, contrôlés ensuite régulièrement (au moins tous les trois mois) et réévalués chaque fois que l’on apporte une modification à la ventilation localisée.

* Ces directives correspondent aux informations figurant dans la section C de l’Annexe à la norme 29 CFR 1910.1450 de l’OSHA.

LES MÉTHODES DE LUTTE LOCALISÉE CONTRE LES CONTAMINANTS DE L’AIR

Louis DiBerardinis

Pour éliminer ou réduire le plus possible l’exposition des travailleurs aux polluants atmosphériques, les professionnels de la santé au travail s’en remettent généralement, dans l’ordre où elles sont citées, aux techniques ci-après: substitution, isolement, ventilation générale, ventilation par aspiration localisée, méthodes de travail, équipements et vêtements de protection individuelle. Le plus souvent, on applique simultanément plusieurs de ces techniques.

Les médecins et les hygiénistes du travail devraient toujours avoir présent à l’esprit le concept séquentiel «source-voie-cible». Leurs efforts devraient porter en premier sur la source, ensuite sur la voie et, en dernier ressort seulement, sur la cible. Que ce soit pendant les phases de conception ou de démarrage d’un procédé nouveau, ou pendant l’évaluation d’un procédé existant, il faut toujours aller de la source vers la cible. Il est probable que l’on devra faire appel, dans la plupart des cas, à la majorité, sinon à la totalité, des stratégies passées en revue.

La substitution

Le principe de substitution consiste à éliminer ou à réduire le risque en remplaçant les matières incriminées par des matières non toxiques ou moins toxiques, ou en modifiant la conception du procédé de façon à éviter que des contaminants ne puissent pénétrer dans les lieux de travail. L’idéal serait de disposer de produits chimiques de substitution non toxiques ou de pouvoir modifier le procédé utilisé de façon à éliminer l’exposition dangereuse. Cela n’est malheureusement pas toujours possible.

Il faut veiller avec le plus grand soin à ce qu’une opération de substitution n’aboutisse pas à une situation plus dangereuse. Bien que l’accent soit mis sur la toxicité, il faut également tenir compte, dans l’examen des possibilités de substitution et l’évaluation comparative des risques, de l’inflammabilité et de la réactivité chimique des produits de remplacement.

L’isolement

Cette technique consiste à éliminer ou à limiter le risque en séparant les opérateurs des processus qui émettent des contaminants. A cette fin, on enferme complètement le processus dans une enceinte (encoffrement ou mise en vase clos) ou on le place à une distance de sécurité. Il peut être nécessaire dans ce cas de le faire fonctionner ou de le commander à distance. L’isolement est particulièrement utile pour les opérations qui n’exigent qu’un effectif réduit et lorsque d’autres techniques sont difficiles à mettre en œuvre. Une autre formule consiste à planifier les opérations dangereuses en dehors des postes de jour, ce qui permet en général de réduire le nombre des travailleurs exposés. L’exposition au risque ne s’en trouve pas éliminée, mais les personnes exposées sont moins nombreuses.

La ventilation générale

On utilise couramment deux types de ventilation par extraction pour réduire les concentrations de contaminants dans l’air des lieux de travail. Le premier est appelé ventilation générale ou par dilution. C’est le second — captage au point d’émission, aspiration localisée ou ventilation par aspiration à la source — qui sera examiné de façon plus détaillée dans le présent article.

Il importe de ne pas confondre ces deux types de ventilation par extraction avec la ventilation dite de confort, dont le rôle principal consiste à fournir des quantités déterminées d’air extérieur pour assurer la respiration et maintenir la température et l’humidité voulues. Divers types de ventilation sont étudiés dans d’autres chapitres de cette Encyclopédie, notamment au chapitre no 45, «La régulation des environnements intérieurs».

La ventilation par aspiration localisée

La forme la plus efficace et la plus rentable de lutte contre les contaminants est la ventilation par aspiration localisée, qui consiste à capter le produit chimique polluant à son point d’émission. Il en existe trois types:

  1. à encoffrement (total ou partiel);
  2. à hotte de captage suspendue;
  3. à fente d’aspiration latérale (horizontale).

L’encoffrement, conçu essentiellement pour contenir les matières qui se trouvent à l’intérieur d’une enceinte, représente la solution optimale. Il sera d’autant plus efficace qu’il sera intégral, c’est-à-dire sans ouverture aucune. C’est le cas, par exemple, des boîtes à gants, des cabines de sablage et des armoires de stockage de gaz toxiques (voir figures 61.1, 61.2 et 61.3). Les enceintes partielles comportent une ouverture sur un ou plusieurs côtés, mais la source se trouve toujours à l’intérieur. A titre d’exemple, citons les cabines de peinture au pistolet (voir figure 61.4) et les hottes de laboratoire. La conception d’une enceinte donne souvent l’impression de relever de l’art plus que de la science. Il s’agit essentiellement de concevoir une hotte offrant la plus petite ouverture possible. Le débit d’air requis est généralement fonction de la superficie totale des ouvertures et de la nécessité de maintenir une vitesse de l’air de 0,25 à 1,0 m/s. La vitesse choisie dépendra des caractéristiques de l’opération, notamment de la température et du taux auxquels le polluant va être généré. Dans le cas d’enceintes de forme complexe, il faut veiller avec le plus grand soin à ce que le flux d’extraction soit distribué de façon uniforme dans l’ensemble de l’enceinte, en particulier si les ouvertures sont multiples. De nombreux modèles d’enceinte ont fait l’objet d’études expérimentales sur modèle; si elles s’avèrent efficaces, elles sont mentionnées dans le manuel de ventilation industrielle de la Conférence américaine des hygiénistes gouvernementaux du travail (American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH, 1992)).

Figure 61.1 Enceinte entièrement fermée: boîte à gants

Figure 61.1

Figure 61.2 Enceinte entièrement fermée: armoire de stockage de gaz toxiques

Figure 61.2

Figure 61.3 Enceinte entièrement fermée: cabine de décapage au jet d'abrasifs

Figure 61.3

Figure 61.4 Enceinte parteillement fermée: cabine de peinture au pistolet

Figure 61.4

Souvent, le confinement intégral de la source est impossible ou superflu. Dans ces cas, on peut utiliser une autre forme d’aspiration à la source, c’est-à-dire une hotte de captage. Une telle hotte empêche le rejet du polluant dans l’atmosphère du lieu de travail en le capturant à son point d’émission ou à proximité. On peut alors se contenter en général d’un débit de ventilation beaucoup moins important que dans le cas d’un encoffrement partiel. Toutefois, comme le contaminant est émis à l’extérieur de la hotte, celle-ci doit être conçue et utilisée correctement pour être aussi efficace qu’une enceinte partielle. La solution la meilleure est toujours fournie par un encoffrement intégral.

Pour être efficace, l’ouverture d’une hotte de captage doit avoir une forme géométrique appropriée et être placée à une certaine distance du point d’émission du polluant. Cette distance dépendra des dimensions et de la forme de la hotte ainsi que de la vitesse de l’air nécessaire pour capter le contaminant à la source et l’entraîner dans la hotte. Il est préférable, en général, que l’air soit extrait le plus près possible de la source. Les vitesses d’aspiration frontale ou par fente sont en général de l’ordre de 0,25 à 1,0 m/s et de 5,0 à 10,0 m/s, respectivement. On trouvera de nombreuses indications pour la conception de ce type de hotte au chapitre 3 du manuel de l’ACGIH (ACGIH, 1992) ou dans l’ouvrage de Burgess, Ellenbecker et Treitman (1989). Les deux types de hotte de captage les plus fréquemment utilisés sont les hottes suspendues et les hottes à fente d’aspiration horizontale.

Les hottes suspendues sont employées principalement pour capter des gaz, des vapeurs ou des aérosols émis dans une direction et un sens donnés et à une vitesse qui peut être exploitée pour favoriser leur captage. On les utilise en général lorsque l’opération à maîtriser se déroule à température élevée, afin de tirer parti du courant thermique ascendant qui se crée ou lorsque les émissions sont dirigées vers le haut, comme c’est le cas, par exemple, dans les étuves, les fours de fusion ou les autoclaves. De nombreux fabricants recommandent des configurations de hottes spécifiques, adaptées à leurs matériels; il est vivement conseillé de prendre conseil auprès d’eux. On trouvera également des indications utiles dans le chapitre 3 du manuel de l’ACGIH déjà cité (ACGIH, 1992). Ainsi, pour un autoclave ou un four — lorsque la distance entre le bas de la hotte et la source de chaleur ne dépasse pas le diamètre de la source ou 1 m environ, selon celle de ces deux valeurs qui est la plus faible — la hotte peut être considérée comme une hotte de captage basse. Dans ces conditions, le diamètre (ou la section) de la colonne d’air chaud sera approximativement égal à celui de la source. Il suffira donc que le diamètre ou les bords de la hotte débordent de 30 cm le pourtour de la source.

Le débit d’une hotte basse circulaire est donné par la formule:

Qt = 45,2 (Df)2,33 (Dt)0,42

dans laquelle:

Q t = débit d’air de la hotte en litre/s

Df = diamètre de la hotte, en m

Dt = différence entre la température de la source d’émission et la température ambiante, en °C.

Il existe une relation similaire pour les hottes rectangulaires et les hottes de captage hautes. Une hotte de captage haute est représentée à la figure 61.5.

Figure 61.5 Hotte de captage haute

Figure 61.5

Les hottes aspirantes à fente sont utilisées pour les opérations qui ne peuvent être réalisées à l’intérieur d’une enceinte de confinement ou sous une hotte de captage suspendue, comme le remplissage de fûts, la galvanoplastie, le soudage ou le dégraissage. On en trouvera des exemples aux figures 61.6 et 61.7. Le calcul du débit nécessaire peut s’effectuer à partir d’une série d’équations déterminées empiriquement par les dimensions et la forme de la hotte et la distance entre la hotte et la source. Ainsi, pour une hotte à fente d’aspiration horizontale, le débit requis est donné par la formule:

Q = 0,0743 LVX

où:

Q = débit d’air en m3/min

L = longueur de la fente en m

V = vitesse de captage requise à la source en m/min

X = distance de la source à la fente, en m

Figure 61.6 Hotte aspirante à évacuation par fente: soudage

Figure 61.6

Figure 61.7 Hotte aspirante à fente: remplissage d'un fût

Figure 61.7

La vitesse à la source est parfois appelée «vitesse de captage»; elle est généralement comprise entre 0,25 et 2,5 m/s. Le manuel de l’ACGIH fournit des indications pour le choix de la vitesse de captage appropriée. Dans les locaux à fort courant d’air transversal ou pour des matières très toxiques, il convient de retenir l’extrémité supérieure de la fourchette. Des vitesses supérieures seront nécessaires pour le captage des particules.

Certaines installations peuvent combiner encoffrement, hotte de captage suspendue et hotte aspirante à fente. Ainsi, la cabine de peinture au pistolet représentée à la figure 61.4 est une enceinte partiellement fermée, équipée d’un système d’extraction. Elle est conçue pour assurer un captage efficace des particules en suspension dans l’air en tirant parti de l’énergie cinétique conférée aux particules par l’air comprimé dirigé vers le dispositif d’extraction.

Les installations d’aspiration localisée devraient être conçues avec soin. Il importe de considérer notamment: 1) la possibilité d’encoffrer l’opération; 2) les caractéristiques de la source (source ponctuelle ou diffuse) et le mode d’émission du contaminant; 3) la capacité du système de ventilation existant; 4) la place dont on dispose; et 5) la toxicité et l’inflammabilité du ou des polluants émis.

Une fois l’installation en place, il faut instaurer un programme de contrôle et de maintenance pour garantir l’efficacité de son fonctionnement (OSHA, 1993). Le contrôle d’une hotte de laboratoire de type standard pour produits chimiques est devenu pratique courante dans les années soixante-dix. Ce n’est pas le cas pour les autres installations d’aspiration localisée; c’est donc à l’utilisateur qu’il appartient de choisir une procédure appropriée. La plus efficace serait un contrôle continu du débit au moyen, par exemple, d’un simple manomètre magnétique ou hydraulique mesurant la pression statique au niveau de la hotte (ANSI/AIHA, 1993). La pression statique nécessaire (en cm d’eau) est donnée par les calculs effectués au stade de l’étude; les mesures de débit peuvent être effectuées au moment de l’installation, à titre de vérification. Qu’il existe ou non un débitmètre permanent, des tests périodiques de la performance de l’installation demeurent indispensables. Ces essais peuvent être réalisés avec de la fumée pour visualiser le captage en mesurant le débit total du système et en le comparant à sa valeur théorique. Dans le cas d’un encoffrement, on a généralement intérêt à mesurer la vitesse frontale au droit des orifices d’extraction.

Le personnel devrait recevoir une formation lui permettant d’utiliser correctement une hotte d’aspiration, en particulier lorsque la distance entre le point d’émission du polluant et la hotte peut être facilement modifiée par l’opérateur.

Etudiées, installées et employées comme il se doit, les installations d’aspiration localisée peuvent être un moyen économique et très efficace de prévenir l’exposition à des matières toxiques.

Les méthodes de travail

Il s’agit des méthodes qu’appliquent les travailleurs pour exécuter correctement les opérations qui leur sont confiées. De nombreux exemples en sont donnés dans la présente Encyclopédie. Par ailleurs, lorsqu’il est question d’éducation, de formation, de principes de gestion ou de systèmes de soutien social, l’importance de méthodes de travail éprouvées dans la lutte contre les risques professionnels est fréquemment relevée.

Les équipements et vêtements de protection individuelle

L’équipement de protection individuelle devrait être considéré comme la dernière ligne de défense. Il est souvent associé à d’autres moyens, par exemple s’il s’agit de minimiser les effets de rejets imprévus. Le sujet est traité de manière détaillée dans le chapitre no 31, «La protection individuelle».

LE SYSTÈME D’INFORMATION CHIMIQUE GESTIS: ÉTUDE DE CAS

Karlheinz Meffert et Roger Stamm

Le GESTIS, système d’information sur les substances dangereuses des Berufsgenossenschaften (BG, caisses mutuelles professionnelles d’assurance contre les accidents du travail), en Allemagne, est présenté ici en tant que système d’information intégré pour la prévention des risques liés aux substances et produits chimiques sur les lieux de travail.

Avec la promulgation et l’entrée en vigueur en Allemagne, vers le milieu des années quatre-vingt, de la réglementation relative aux matières dangereuses, les demandes d’informations ont connu une très forte augmentation. Ce sont les BG qui ont dû répondre à ces demandes dans le cadre de leurs activités statutaires de conseil et de surveillance dans l’industrie.

Les spécialistes — c’est-à-dire notamment les personnes travaillant avec les services d’inspection technique des BG, les ingénieurs de sécurité des entreprises, les médecins du travail et ceux qui participent à des comités d’experts — doivent pouvoir disposer de données précises et fiables. En outre, les informations sur les dangers liés aux produits chimiques et les mesures de sécurité nécessaires sont aussi importantes pour les profanes appelés à utiliser des produits dangereux. Ce qui compte en définitive sur le terrain, c’est l’efficacité des précautions mises en œuvre; il est donc essentiel que les informations pertinentes soient facilement accessibles aux exploitants, aux personnels de sécurité et d’hygiène, aux travailleurs eux-mêmes et, le cas échéant, aux comités d’entreprise et aux organismes internes de sécurité et d’hygiène du travail.

C’est dans ce contexte que le GESTIS a été crée en 1987. Les institutions des BG avaient, pour la plupart, constitué des bases de données depuis plus de vingt ans. Ces bases ont été réunies et complétées dans le cadre du GESTIS par de nouveaux éléments, y compris une base de données factuelles sur les substances et les produits, et par des systèmes d’information propres aux différentes branches d’industrie. Le GESTIS est un système à la fois centralisé et local; il contient de nombreuses données concernant l’industrie allemande, classées selon les branches d’industrie.

Le GESTIS est constitué de quatre bases de données centrales formant le cœur du système; celles-ci se trouvent au siège des BG et de leur Institut pour la sécurité du travail (BIA). Des systèmes d’information par branches existent à l’échelon local, complétés par une documentation sur la surveillance assumée par les médecins du travail. Des interfaces sont également assurées avec des bases de données extérieures.

Les groupes cibles, en ce qui concerne les données relatives aux substances dangereuses (tels que les ingénieurs de sécurité et les médecins du travail) ont besoin de données spécifiques en fonction de leurs besoins particuliers. Les inspecteurs techniques peuvent avoir besoin d’autres informations encore. Les informations destinées aux travailleurs devraient être intelligibles et viser la mise en œuvre correcte des produits chimiques. Enfin, le grand public a le droit, lui aussi, d’être informé, qu’il s’agisse des risques auxquels il peut être exposé ou des précautions à observer.

Le GESTIS doit être capable de satisfaire aux besoins d’information des divers groupes cibles en fournissant des renseignements précis axés sur la pratique.

Quelles sont les données et informations indispensables?

Informations de base sur les substances et les produits chimiques

Il faut en premier lieu disposer de données concrètes portant sur les substances chimiques pures, fondées sur les connaissances scientifiques et les prescriptions légales. Les rubriques et les informations figurant dans les fiches de données de sécurité, telles qu’elles sont définies par exemple par l’Union européenne dans la directive 91/155/CEE (CEE, 1991), correspondent aux obligations légales des entreprises en matière de sécurité au travail et fournissent un cadre approprié.

Ces données sont accessibles en ligne à partir de la base de données centrale du GESTIS sur les substances et les produits (ZeSP), constituée dès 1987 avec le concours des services officiels d’inspection du travail (en l’occurrence les banques de données relatives aux substances dangereuses des Länder). Ces données, qui visent les substances chimiques et leurs mélanges, sont établies à partir d’informations concrètes vérifiées. Dans la pratique, il se pose un problème important; en effet, les auteurs des fiches de données de sécurité n’identifient pas toujours les substances qui entrent dans les préparations. La directive européenne mentionnée plus haut prévoit des améliorations dans ce domaine et demande des indications plus précises quant au listage des divers composants.

L’établissement de fiches de données de sécurité par le GESTIS est indispensable si l’on veut combiner les données fournies par les fabricants et celles provenant de sources indépendantes. Ce résultat peut être atteint grâce aux informations recueillies par les diverses BG et à un projet mené en coopération avec les fabricants. On possède ainsi l’assurance que les fiches de données de sécurité sont tenues à jour et qu’elles sont aisément accessibles (voir figure 61.8). Elles sont en grande partie incorporées dans la base de données ISI.

Figure 61.8 Centre de collecte et d'information pour les fiches de données de
sécurité: structure de base

Figure 61.8

Du fait que les fiches de données de sécurité ne prennent pas toujours suffisamment en compte certaines utilisations particulières d’un produit, les spécialistes des différentes branches d’industrie réunissent des données sur des groupes de produits (les lubrifiants de refroidissement dans le cadre de l’hygiène au travail, par exemple) à partir des informations fournies par les fabricants et des données sur les composants de ces produits. Les groupes de produits sont définis en fonction de leurs utilisations et de leur potentiel de risque. Les informations fournies sur les groupes de produits sont indépendantes de celles données par les fabricants quant à la composition de leurs différents produits, car elles se fondent sur les formules générales de composition. Ainsi, l’utilisateur peut accéder, non seulement aux fiches de données de sécurité, mais encore à une source d’information supplémentaire indépendante.

La base de données ZeSP fournit des informations sur la sécurité dans la mise en œuvre des substances dangereuses au travail, y compris sur les mesures spécifiques de prévention et d’urgence; elle contient en outre de nombreuses informations détaillées destinées aux médecins du travail, et cela sous une forme intelligible et concrète (Engelhard et coll., 1994).

En plus des informations pratiques mentionnées ci-dessus, les comités d’experts nationaux et internationaux ont besoin d’autres données encore pour évaluer les risques liés aux substances chimiques (par exemple, la réglementation des produits chimiques de l’Union européenne).

Pour évaluer convenablement le risque, il faut disposer en particulier de données intéressant: 1) la catégorie d’utilisation des substances ou des produits; 2) les quantités mises en œuvre et le nombre de personnes exposées; et 3) des données sur l’exposition. Celles-ci peuvent être obtenues à partir des registres de substances dangereuses des entreprises, dont la tenue est obligatoire en vertu de la législation européenne sur les substances dangereuses. Elles peuvent être regroupées à un niveau supérieur pour constituer des registres par branches ou pour évaluer l’importance du commerce des produits considérés. Ces registres revêtent une importance croissante dès lors qu’ils constituent une base de décision pour les responsables politiques.

Données sur l’exposition

Les données sur l’exposition — c’est-à-dire les valeurs mesurées des concentrations de substances dangereuses — sont obtenues par l’intermédiaire des BG dans le cadre de leur programme de mesurage des substances dangereuses (BGMG, 1995); ce programme a pour objet de vérifier que les valeurs seuils autorisées sur le lieu de travail sont respectées. Il est nécessaire de prendre en compte le niveau technologique lors de l’établissement des valeurs seuils et pour les analyses de risque, de même que pour des études épidémiologiques et pour l’étude des maladies professionnelles.

Les résultats des mesurages effectués dans le cadre de la surveillance des lieux de travail sont consignés dans la documentation concernant les substances dangereuses au travail (DOK-MEGA). Depuis 1972, plus de 800 000 résultats de mesurage ont été fournis par plus de 30 000 entreprises, et quelque 60 000 nouveaux mesurages s’y ajoutent chaque année. Les caractéristiques particulières du programme BGMG comprennent un système d’assurance qualité, des composantes éducation et formation, des procédures normalisées pour l’échantillonnage et l’analyse, une stratégie de mesurage harmonisée s’appuyant sur une base légale ainsi que des outils de traitement de données pour la collecte de l’information, l’assurance qualité et l’évaluation (voir figure 61.9).

Figure 61.9 Système de mesurage des BG1 allemandes pour les substances
dangereuses (BGMG): coopération entre le BIA2 et les BG

Figure 61.9

Les valeurs d’exposition mesurées doivent être représentatives, reproductibles et compatibles. Les données fournies par le programme BGMG sont considérées comme étant représentatives de la seule entreprise en cause. Les sites de mesurage sont choisis dans chaque cas selon des critères techniques, et non selon des critères statistiques. La question de la représentativité se pose toutefois lorsque les valeurs mesurées pour le même lieu de travail, ou un lieu de travail similaire, ou même pour toute une branche d’industrie, sont regroupées à des fins statistiques. Les mesurages effectués dans le cadre de l’activité de surveillance fournissent en général des valeurs moyennes plus élevées que les données initialement recueillies en vue de constituer un échantillon représentatif d’une branche d’industrie.

Lors de chaque mesurage, il est indispensable d’enregistrer et de documenter séparément les caractéristiques de l’entreprise et du procédé considérés, ainsi que les paramètres de l’échantillonnage si l’on veut pouvoir regrouper les valeurs mesurées de manière statistiquement correcte et les interpréter de manière techniquement satisfaisante.

Le programme DOK-MEGA permet d’atteindre ces objectifs grâce à l’application des principes ci-après pour l’enregistrement et la documentation des données:

Le BIA met à profit l’expérience qu’il a acquise avec la documentation DOK-MEGA dans le cadre d’un projet de recherche de l’Union européenne mené avec des représentants d’autres bases de données nationales sur les expositions, en vue d’améliorer la comparabilité des résultats. Le projet tente en particulier de définir les critères de base qui pourraient servir de référence en matière de comparabilité et de mettre au point un protocole pour la documentation des données.

Les données sur la santé

En plus des données concrètes sur les substances et les produits chimiques et des résultats des mesurages d’exposition, il est nécessaire de disposer d’informations quant aux effets sur la santé d’expositions réelles à des substances dangereuses sur les lieux de travail. On ne peut tirer de conclusions satisfaisantes sur la sécurité au travail au niveau d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises que si l’on a une vue d’ensemble des risques potentiels, des risques réels et de leurs conséquences.

Le GESTIS a retenu par conséquent une autre composante: c’est la documentation sur les maladies professionnelles (BK-DOK), qui rassemble des données sur tous les cas de maladies professionnelles enregistrés depuis 1975.

Pour l’étude des maladies professionnelles liées à des substances dangereuses, il est essentiel de connaître exactement les substances incriminées dans chaque cas. En général, cette connaissance peut demander beaucoup de temps, mais elle est indispensable. Une prévention efficace est impossible sans une identification précise des substances et des produits en cause.

Les données bibliographiques

La quatrième composante proposée pour le GESTIS vise les informations générales fournies par les publications courantes. A cet effet, une liaison a été établie avec une banque de données documentaires (ZIGUV-DOK), qui contient actuellement 50 000 références, dont 8 000 portent sur des substances dangereuses.

Les liaisons et la préparation des données axée sur les problèmes

Les liaisons

Si l’on veut que le système GESTIS fonctionne efficacement, il faut que ses diverses composantes soient coordonnées de manière satisfaisante. Il faut donc pouvoir coupler, par exemple, des données relatives à l’exposition et des données concernant les cas de maladies professionnelles. Un tel couplage devrait permettre de créer un système d’information véritablement intégré à partir des informations de base disponibles, codées selon le système normalisé du GESTIS (voir tableau 61.2).

Tableau 61.2 Système de codage normalisé du GESTIS

Objet

Individuel

Groupe

 

Code

Code

Substance, préparation

ZVG, numéro central d’affectation (BG)

SGS/PGS, code du groupe de la substance/ préparation (BG)

Lieu de travail

BIA, branche d’activité d’une usine individuelle (BG)

AB, branche d’activité (BIA)

Personne exposée

 

Activité (BIA) basée sur la liste des professions de l’Office fédéral des statistiques

L’origine des codes est indiquée entre parenthèses.

Grâce aux codes du GESTIS, il est possible à la fois de coupler deux éléments d’information (par exemple, des mesurages provenant d’un lieu de travail donné et un cas de maladie professionnelle observé sur le même lieu de travail ou dans un lieu de travail similaire) et d’obtenir une information statistiquement condensée et caractéristique (par exemple, maladies liées à des procédés spécifiques et données d’exposition moyennes correspondantes). En cas de couplage de données personnelles à l’aide, par exemple, du matricule de la sécurité sociale, il faut naturellement respecter rigoureusement les prescriptions sur la protection des données.

Il est évident que seul un codage systématique sera à même de satisfaire ces diverses exigences à l’intérieur du système d’information. Il ne faut pas négliger pour autant les possibilités de couplage entre les différents systèmes d’information d’un même pays et entre les systèmes de différents pays. Ces possibilités de couplage et de comparaison dépendent essentiellement de l’application de normes de codage unifiées au niveau national et, si possible, à l’échelon international.

L’élaboration des informations en fonction des problèmes et des usagers

Au centre de la structure du GESTIS se trouvent des bases de données concrètes sur les substances et les produits, les expositions, les maladies professionnelles, avec des références bibliographiques et des données compilées par les spécialistes travaillant au GESTIS et celles qui proviennent des activités périphériques des BG. Pour que ces données puissent être exploitées, il est indispensable d’atteindre les utilisateurs de façon globale en publiant des articles dans la presse spécialisée (sur l’incidence des maladies professionnelles, par exemple), mais aussi de manière plus ciblée par le biais des activités de conseil des BG auprès de leurs membres.

Les perspectives

Les développements futurs vont porter en priorité sur la prévention. En collaboration avec les fabricants, divers projets prévoient la préparation de données, complètes et à jour, concernant les produits chimiques, l’établissement de valeurs caractéristiques sur le lieu de travail (déterminées statistiquement à partir des résultats des mesurages d’exposition et de la documentation spécifique aux produits), ainsi que l’évaluation des données intéressant les maladies professionnelles.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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American National Standards Institute (ANSI) et American Industrial Hygiene Association (AIHA), 1993: Laboratory Ventilation, Standard Z9.5 (Fairfax, Virginie).

BGMG, 1995: Berufsgenossenschaftliches Meßsystem «Gefahrstoffe» der Berufsgenossenschaften (Hauptverband der gewerblichen Berufsgenossenschaften (HVBG), Sankt Augustin).

Bureau international du Travail (BIT), 1993: Sécurité dans l’utilisation des produits chimiques au travail, Recueil de directives pratiques (Genève).

Burgess, W.A., Ellenbecker, M.J. et Treitman, R.D., 1989: Ventilation for Control of the Work Environment (New York, John Wiley and Sons).

Commission économique européenne (CEE), 1991: «Directive 91/155/CEE de la Commission, du 5 mars 1991, définissant et fixant, en application de l’article 10 de la directive 88/379/CEE du Conseil, les modalités du système d’information spécifique relatif aux préparations dangereuses», Journal officiel des Communautés européennes , 22 mars 1991, no L 076, pp. 35-41.

Conseil des Communautés européennes, 1967: «Directive du Conseil, du 27 juin 1967, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances dangereuses [CCE] (67/548/CEE)», ibid. , 16 août 1967, vol. 10, no 196, pp. 1-98.

—. 1988: «Directive du Conseil, du 7 juin 1988, concernant le rapprochement des dispositions législatives réglementaires et administratives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances dangereuses [CEE] (88/379/CEE)», ibid ., 16 juillet 1988, vol. 31, no L.187, pp. 14-30.

—. 1989: «Directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail», ibid., 29 juin 1989, no L 183, pp. 1-8.

Engelhard, H., Heberer, H., Kersting, H. et Stamm, R., 1994: «Arbeitsmedizinische Informationen aus der Zentralen Stoff- und Produktdatenbank ZeSP der gewerblichen Berufsgenossenschaften», Arbeitsmedizin, Sozialmedizin, Umweltmedizin, vol. 29, 3S, pp. 136-142.

Occupational Safety and Health Administration (OSHA), 1993: Health and Safety Standard; Occupational exposure to hazardous substances in laboratories (1910. 1450), Federal Register, vol. 51, no 42, pp. 22660-22684.

Organisation internationale de normalisation/Commission électrotechnique internationale (ISO/CEI), 1999: Guide 51. Aspects liés à la sécurité — Principes directeurs pour les inclure dans les normes (Genève).

RÉFÉRENCES COMPLÉMENTAIRES

Bureau international du Travail (BIT), 1993: Rapport sur l’ampleur de la tâche d’harmonisation des systèmes existants de classification et d’étiquetage des produits chimiques dangereux, document du Conseil d’administration GB.255/IO/ 4/4, 255e session, fév.-mars (Genève).

Commission des Communautés européennes (CCE), 1992: Travailler avec des produits dangereux — Année européenne pour la sécurité, l’hygiène et la santé sur le lieu de travail (Luxembourg, Office des publications officielles des Communautés européennes).

Programme international sur la sécurité des substances chimiques (PISSC) et International Union of Pure and Applied Chemistry (IUPAC), 1992: Chemical Safety Matters (Cambridge, Cambridge University Press).

Stückrath, M., 1992: «Documentation MEGA: Measurement data on hazardous substances at the workplace», dans R.H. Brown (directeur de publication): Clean Air at Work: New Trends in Assessment and Measurement for the 1990s (Londres, Royal Society of Chemistry).

Vinzents, P., Carton, B., Fjeldstad, P., Rajan, B. et Stamm, R., 1994: Exposure Registers in Europe. Extraction of Core Information and Possibilities for Comparison between European Databases for Occupational Air Pollutant Measurements (Luxembourg, Office des publications officielles des Communautés européennes).