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Chapitre 41 - Les incendies

NOTIONS DE BASE

Dougal Drysdale

Les caractéristiques physico-chimiques du feu

Le feu est la manifestation d’une combustion non maîtrisée. Il implique les matières combustibles des bâtiments où nous vivons, travaillons et passons nos loisirs, ainsi que toute une série de gaz, liquides et solides, utilisés dans l’industrie et le commerce. Ces matières sont généralement à base de carbone, et nous nous y référerons dans le présent article sous le terme générique de combustibles . Malgré les importantes différences chimiques et physiques qui les distinguent lorsqu’ils brûlent, ces combustibles ont certaines caractéristiques qui leur sont communes. Leurs différences résident dans la facilité avec laquelle ils prennent feu (inflammation ou allumage ), la vitesse à laquelle le feu se développe (propagation de la flamme) et l’énergie que leur combustion peut dégager par unité de temps (débit calorifique) . A mesure que nous en apprenons davantage sur le feu et la combustion, nous sommes mieux en mesure de quantifier et de prévoir le comportement au feu des matériaux et d’appliquer nos connaissances au domaine général de la sécurité en cas d’incendie. Nous nous proposons, dans le présent article, d’examiner certains des principes qui sont à la base des phénomènes liés au feu, dans le but de pouvoir mieux les appréhender.

Notions de base

Les matières combustibles se trouvent partout autour de nous. Si les conditions s’y prêtent, ces matières peuvent prendre feu sous l’effet d’une source d’inflammation capable de déclencher une réaction auto-entretenue. Dans ce processus, le «combustible», en se combinant à l’oxygène de l’air, libère de l’énergie (chaleur) et se transforme en produits de combustion dont certains peuvent être nocifs. Il est important de bien comprendre les mécanismes de l’inflammation et de la combustion.

La plupart des incendies prennent naissance dans des solides (bois, produits du bois, polymères synthétiques), même si les combustibles gazeux et liquides ne sont pas rares. Il nous paraît utile, avant d’aborder les notions de base, d’examiner brièvement la combustion des gaz et des liquides.

Les flammes de diffusion et les flammes de prémélange

Un gaz inflammable (comme le propane C3H8) peut brûler de deux façons. On peut allumer un courant ou un jet de gaz sortant d’un tube (par exemple, d’un bec Bunsen dont l’arrivée d’air est fermée), qui brûle alors avec une flamme de diffusion , c’est-à-dire où la combustion se produit dans les régions où le combustible gazeux et l’air se mélangent par diffusion. Cette flamme émet une lumière jaune caractéristique indiquant la présence de minuscules particules de suie résultant d’une combustion incomplète. Certaines de ces particules brûlent dans la flamme, mais les autres se dégagent de la flamme pour former de la fumée .

Si le gaz et l’air sont bien mélangés au préalable, une flamme de prémélange se produira, à condition que le mélange se situe dans l’intervalle des concentrations défini par les limites inférieure et supérieure d’inflammabilité (voir tableau 41.1). En dehors de ces limites, le mélange n’est pas inflammable (à noter qu’une flamme de prémélange ou flamme bleue se stabilise à l’extrémité de la buse d’un bec Bunsen lorsque l’arrivée d’air est ouverte). Si un mélange est inflammable, une petite source d’énergie, comme une étincelle électrique, suffit pour l’enflammer. Le mélange stœchiométrique est le plus facile à enflammer parce qu’il contient juste assez d’oxygène pour brûler complètement le combustible et le transformer en gaz carbonique et en eau (voir la réaction dans l’équation ci-après, dans laquelle l’azote est présent dans la même proportion que dans l’air, mais n’intervient pas dans la combustion). Dans cette réaction, nous avons choisi le propane (C3H8) comme combustible:

C3H8 + 5O2 + 18,8N2 = 3CO2 + 4H2O + 18,8N2

Tableau 41.1 Représentation schématique d'une surface en combustion, montrant les
processus de transfert de chaleur et de masse

 

Limite inférieure d’inflammabilité
(% par volume)

Limite supérieure d’inflammabilité
(% par volume)

Acétone

   2,6

 13

Benzène

   1,3

   7,9

n -Décane

   0,75

   5,6

Ethanol

   3,3

 19

n -Hexane

   1,2

   7,4

Méthane

   5,0

 15

Méthanol

   6,7

 36

Monoxyde de carbone

 12,5

 74

Propane

   2,1

   9,5

Une très petite étincelle électrique n’ayant qu’une énergie de 0,3 mJ est suffisante pour enflammer un mélange stœchiométrique propane-air dans la réaction ci-dessus. Il peut s’agir d’une décharge d’électricité statique à peine perceptible, comme celle qui se produit lorsqu’on touche un objet mis à la terre après avoir fait quelques pas sur une moquette synthétique. Des quantités d’énergie plus petites encore suffisent pour enflammer certains gaz particulièrement réactifs, comme l’hydrogène, l’éthylène ou l’acétylène. Dans de l’oxygène pur (comme dans la réaction ci-dessus, mais sans l’effet de dilution de l’azote), des quantités d’énergie encore plus faibles peuvent amorcer la combustion.

La flamme de diffusion associée à un flux de combustible gazeux s’observe également lorsqu’un combustible liquide ou solide est en combustion vive. Dans ce cas toutefois, la flamme est alimentée par les vapeurs de combustible qui se dégagent à la surface du liquide ou du solide. Le débit de ces vapeurs est fonction de leur taux de combustion dans la flamme de diffusion, celle-ci transmettant à la surface l’énergie nécessaire à la production des vapeurs. Il s’agit là d’un simple mécanisme d’évaporation dans le cas des combustibles liquides, mais dans celui des solides, l’énergie transmise à la surface doit être suffisante pour décomposer le combustible, dont les macromolécules se divisent alors en fragments plus petits pouvant se vaporiser et s’échapper de la surface. Ce cycle thermique est indispensable au maintien d’un débit de vapeurs suffisant pour alimenter la flamme de diffusion (voir figure 41.1). Il est possible d’éteindre le feu en agissant sur ce processus par différents moyens (voir ci-après).

Figure 41.1 Représentation schématique d'une surface en combustion, montrant les
processus de transfert de chaleur et de masse

Figure 41.1

Les échanges thermiques

Il est essentiel de comprendre les échanges de chaleur (ou d’énergie) qui se produisent si l’on veut saisir le comportement au feu et les processus qui y sont reliés. Le sujet mérite une étude soigneuse. Il existe une documentation abondante sur la question (Welty, Wilson et Wicks, 1976; DiNenno, 1988), mais on se limitera ici à attirer l’attention sur trois mécanismes: la conduction, la convection et le rayonnement. Les équations de base de l’échange thermique l'&ecaute;change thermiques à l’équilibre sont:

Conduction: Conduction

Convection: Convection

Rayonnement: Rayonnement

La conduction intervient dans le transfert de chaleur à travers les solides: k est une propriété physique appelée conductivité thermique (exprimée en kW/mK) et l, la distance (en m) sur laquelle la température thermodynamique passe de T1 à T2 (en degrés Kelvin). La convection représente le transfert de chaleur entre un fluide (dans ce cas l’air, les flammes ou les produits de combustion) et une surface (solide ou liquide): h est le coefficient de transmission thermique par convection (exprimé en kW/m2K), qui dépend de la configuration de la surface et de la nature de l’écoulement du fluide le long de cette surface. Le rayonnement, semblable à la lumière visible (sauf qu’il a une plus grande longueur d’onde), se propage sans nécessiter de support matériel (même à travers le vide): ε est l’émissivité de la surface (c’est-à-dire son aptitude à émettre un rayonnement) et σ, la constante de Stefan-Boltzman (56,7 × 10-12 kW/m2K4). Le rayonnement thermique se déplace à la vitesse de la lumière (3 × 108 m/s) et tout objet qu’il rencontre projette une ombre.

La vitesse de combustion et le débit calorifique

Les échanges de chaleur entre les flammes et la surface d’un combustible liquide ou solide se font par convection et par rayonnement, mais ce dernier phénomène domine lorsque le diamètre effectif du feu dépasse 1 m. La vitesse de combustion (m, en g/s) peut être exprimée par la formule:

equation

QF est le flux thermique de la flamme vers la surface (kW/m2); QL, la perte de chaleur de la surface (par rayonnement et par conduction à travers le solide), exprimée sous forme d’un flux (kW/m2); Scomb, la superficie du combustible (m2); et LV, sa chaleur de gazéification (équivalent de la chaleur latente de vaporisation des liquides) en kJ/g. Si un incendie se déclare dans un espace confiné, les gaz fuligineux à haute température qui montent du feu (parce qu’ils sont plus légers que l’air ambiant) sont déviés sous le plafond, réchauffant les surfaces supérieures. Ces surfaces ainsi que la couche de fumée résultante rayonnent alors de la chaleur vers le bas, particulièrement en direction de la surface du combustible, augmentant la vitesse de combustion selon la formule:

equation

Qext est la chaleur supplémentaire rayonnée du plafond vers le bas (kW/m2). Cette rétroaction augmente sans cesse la vitesse de combustion provoquant le phénomène d’embrasement général, qui se produit dans les espaces clos s’il y a assez d’air et de combustible pour entretenir le feu (Drysdale, 1985).

La vitesse de combustion est limitée par LV, la chaleur de gazéification, dont la valeur est relativement basse dans le cas des liquides et assez élevée dans le cas des solides. C’est la raison pour laquelle les solides tendent à brûler beaucoup plus lentement que les liquides.

Selon certains experts, le débit calorifique serait le paramètre qui influe le plus sur le comportement d’un matériau (ou d’un ensemble de matériaux) dans un incendie. Le débit calorifique (DC) est relié au taux de combustion par la formule:

equation

dans laquelle ΔHC est la chaleur effective de combustion du combustible (kJ/g). De nouvelles techniques permettent maintenant de mesurer le débit calorifique à différentes valeurs du flux thermique (au moyen du calorimètre conique, par exemple). On peut également déterminer le débit calorifique d’articles encombrants, tels que les meubles capitonnés et les revêtements muraux, en en mesurant la consommation d’oxygène dans de grands calorimètres (Babrauskas et Grayson, 1992).

Il importe de noter que, lorsqu’un incendie s’étend, non seulement le débit calorifique augmente, mais la formation de «produits de combustion» s’accélère également. Ces derniers contiennent des substances toxiques et nocives ainsi que de la fumée chargée de particules, en quantités qui s’accroissent à mesure que l’oxygène présent devient insuffisant pour assurer une combustion complète.

L’inflammation

Pour faire brûler un liquide ou un solide, il faut élever sa température de surface jusqu’à ce qu’il produise assez de vapeurs pour entretenir une flamme, une fois que ces vapeurs ont pris feu. Les combustibles liquides peuvent être classés selon leur point d’éclair , c’est-à-dire selon la température la plus basse à laquelle il existe en surface un mélange inflammable de vapeurs et d’air (autrement dit, la tension de vapeur correspond à la limite inférieure d’inflammabilité). Le point d’éclair est mesuré à l’aide d’un appareil standard. Quelques valeurs caractéristiques sont présentées au tableau 41.2. Il faut dépasser légèrement le point d’éclair pour que la quantité de vapeurs émises suffise à l’entretien d’une flamme de diffusion. On atteint ainsi le point d’inflammation , également appelé point de feu. Dans le cas des combustibles solides, les mêmes principes s’appliquent, mais les températures en cause doivent être assez élevées pour produire une décomposition chimique. Le point d’inflammation est en général supérieur à 300 °C, selon le combustible. Les matériaux ignifuges ont d’ordinaire un point d’inflammation sensiblement plus élevé (voir tableau 41.2).

Tableau 41.2 Points d’éclair et d’inflammation de combustibles liquides et solides

 

Point d’éclair en vase clos1
(°C)

Point d’inflammation2
(°C)

n -Décane (l)

    46

    61,5

n -Dodécane (l)

    74

 103

Essence (indice d’octane 100) (l)

–38

 —

Poly(méthacrylate de méthyle) (s)

 —

~310

Poly(méthacrylate de méthyle) ignifugé (s)

 —

~377

Polypropylène (s)

 —

~330

Polypropylène ignifugé (s)

 —

~397

Polystyrène (s)

 —

~367

Polystyrène ignifugé (s)

 —

~445

l = liquide; s = solide.

1 Mesuré à l’aide de l’appareil à vase clos Pensky-Martens. 2 Liquides: mesuré à l’aide de l’appareil à vase ouvert Cleveland. Solides: Drysdale et Thomson (1994). (A noter: les résultats des produits ignifugés ont été obtenus en présence d’un flux thermique de 37 kW/m2.)

L’inflammabilité d’un solide dépend donc de la facilité avec laquelle on peut amener sa température de surface au point d’inflammation, par exemple en l’exposant à une chaleur rayonnée ou à un courant de gaz chauds. Cela dépend moins du processus de décomposition chimique que de l’épaisseur et des propriétés physiques du solide, autrement dit de sa conductivité thermique (k) , de sa masse volumique ( ρ) et de sa chaleur spécifique (c) . Les solides minces, comme les copeaux de bois (et toutes les sections minces), peuvent très facilement prendre feu parce que leur masse thermique est faible. Autrement dit, il suffit d’une quantité relativement faible de chaleur pour élever leur température au point d’inflammation. Par contre, lorsque la surface d’un solide d’une certaine épaisseur est chauffée, une partie de la chaleur transmise est dissipée par conduction dans la masse du solide, ce qui limite l’élévation de sa température de surface. Il est possible de prouver que le taux d’élévation de la température superficielle dépend directement de l’inertie thermique du solide, c’est-à-dire du produit kρc. On le constate d’ailleurs en pratique: un matériau épais doté d’une forte inertie thermique (planche de chêne ou bloc de polyuréthane) met plus de temps à prendre feu sous l’effet d’un flux thermique donné qu’un matériau de la même épaisseur, mais d’une inertie thermique moindre (par exemple, panneau isolant en fibre ou mousse de polyuréthane), qui s’enflammera plus rapidement dans les mêmes conditions (Drysdale, 1985).

Les sources d’inflammation

Le schéma de la figure 41.2 présente les étapes de la combustion (combustion amorcée) . Pour que la combustion puisse s’établir, la source d’inflammation doit pouvoir non seulement élever la température de surface au point d’inflammation ou au-dessus, mais aussi enflammer les vapeurs. Une flamme peut remplir les deux rôles, mais un flux de chaleur rayonnée provenant d’une source lointaine peut aussi élever la température au-delà du point d’inflammation et entraîner la formation de vapeurs, sans pour autant les enflammer. Toutefois, si les vapeurs produites sont assez chaudes (c’est-à-dire si la température de surface est beaucoup plus élevée que le point d’inflammation), elles peuvent s’enflammer spontanément lorsqu’elles se mélangent à l’air ambiant. Il s’agit alors d’une inflammation spontanée .

Figure 41.2 Scénario d'une combustion amorcée

Figure 41.2

Les sources d’énergie qui peuvent amorcer un incendie sont très nombreuses, mais elles ont toutes un point commun: elles résultent d’une forme ou d’une autre de négligence ou d’inaction. Ce sont par exemple les flammes nues, les cigarettes, cigares et autres produits pour fumeurs, l’échauffement par frottement, les appareils électriques (appareils de chauffage et de cuisson, fers à repasser, etc.) et ainsi de suite. On en trouvera un excellent relevé dans Cote (1991). Nous présentons quelques-unes de ces sources dans le tableau 41.3.

Tableau 41.3 Sources d’énergie pouvant amorcer une combustion

 

Exemples

Appareils électriques

Radiateur électrique, séchoir à cheveux, couverture électrique, etc.

Flamme nue

Allumette, briquet, lampe à souder, etc.

Appareils au gaz

Foyer au gaz, appareil de chauffage individuel, réchaud ou cuisinière à gaz, etc.

Autres appareils de chauffage

Poêle à bois, etc.

Tabac allumé

Cigare, pipe, etc.

Objet chaud

Tuyaux portés à haute température, étincelles d’origine mécanique, etc.

Exposition à une source de chaleur

Foyer proche, etc.

Combustion spontanée

Chiffons imbibés d’huile de lin, tas de charbon, etc.

Réaction chimique

Rare — par exemple, permanganate de potassium et glycérine

Il y a lieu de noter qu’une cigarette allumée ne peut pas directement déclencher une combustion vive (même dans les combustibles gazeux courants), mais elle peut amorcer un feu couvant dans les matériaux qui se prêtent à une combustion lente de ce genre. Il s’agit de matériaux qui carbonisent quand ils sont chauffés. Dans un feu couvant, la zone carbonisée s’oxyde en surface, ce qui dégage localement assez de chaleur pour carboniser les zones voisines du combustible. Le processus est très lent, mais peut dans certains cas produire des flammes qui déclencheront très rapidement un incendie.

Un matériau qui se prête à une combustion lente peut également manifester le phénomène d’auto-échauffement (Bowes, 1984). Ce phénomène se produit lorsque le matériau est entreposé en grande quantité d’une manière telle que la chaleur produite par une lente oxydation de surface ne peut s’échapper, entraînant une élévation de température dans la masse. Si les conditions s’y prêtent, une telle situation peut mener à une réaction non maîtrisée qui produit un feu couvant à l’intérieur même du matériau.

La propagation de la flamme

La vitesse à laquelle la flamme se propage aux surfaces combustibles voisines joue un rôle de premier plan dans le développement de tout incendie. La propagation de la flamme peut être représentée par la progression d’une onde de combustion: le front de flamme joue le rôle d’une source d’allumage qui amorce la combustion de la matière voisine qui n’a pas encore pris feu. La vitesse de propagation dépend, d’une part, des propriétés qui caractérisent l’inflammabilité et, de l’autre, de l’interaction entre la flamme existante et la surface qui se trouve devant le front de l’onde. La propagation verticale vers le haut est la plus rapide parce qu’elle est accélérée par la montée de l’air chaud, ce qui expose les surfaces qui se trouvent au-dessus de la zone de combustion à la chaleur directe des flammes. Il n’en est pas de même en cas de propagation le long d’une surface horizontale, puisque les flammes de la zone de combustion montent verticalement, s’écartant en fait de la surface. Il est notoire que la propagation verticale est la plus dangereuse (par exemple, le long de rideaux ou d’un vêtement ample, comme une robe ou une chemise de nuit).

La vitesse de propagation augmente également sous l’effet d’un flux imposé de chaleur rayonnante. Lorsqu’un incendie se développe dans une pièce, le feu s’étend plus rapidement par suite du rayonnement thermique, qui croît lui-même à mesure que les flammes progressent. Cela contribue à l’intensification de l’incendie jusqu’au stade de l’embrasement général.

Les aspects théoriques de l’extinction des incendies

L’extinction des incendies peut être examinée à partir des principes théoriques de base brièvement exposés ci-dessus. Les processus de combustion en phase gazeuse (c’est-à-dire les réactions liées aux flammes) sont très sensibles à l’action d’inhibiteurs chimiques. L’action de certains des ignifugeants utilisés pour améliorer le «comportement au feu» des matériaux part du principe que de petites quantités d’un inhibiteur produites en même temps que les vapeurs du combustible peuvent empêcher la formation d’une flamme. La présence d’un ignifugeant ne peut pas rendre incombustible une matière combustible, mais elle peut retarder ou même empêcher l’inflammation si la source d’énergie est faible. Cependant, dans un incendie déjà établi, un matériau ignifugé brûlera aussitôt que les flux thermiques présents auront surmonté les effets de l’ignifugeant.

Il y a différents moyens d’éteindre un incendie:

  1. Interrompre l’émission de vapeurs combustibles;
  2. Inhiber la flamme à l’aide d’agents extincteurs chimiques (inhibiteurs);
  3. Etouffer le feu en le privant d’air (ou d’oxygène);
  4. «Souffler» les flammes.

Interrompre l’émission de vapeurs combustibles

La première méthode d’extinction, consistant à interrompre l’émission de vapeurs combustibles, est de toute évidence celle qu’il convient d’adopter dans le cas d’un incendie dû à un jet de gaz, où il est possible de couper tout simplement l’arrivée du combustible. C’est aussi la méthode la plus courante et la plus sûre d’extinction des feux de liquides et de solides. Lorsqu’il s’agit d’un combustible solide, cette méthode nécessite d’abaisser la température de surface en deçà du point d’inflammation, c’est-à-dire jusqu’au point où l’émission de vapeurs est trop faible pour entretenir la flamme. La façon la plus efficace consiste à répandre de l’eau par des moyens manuels ou à l’aide d’un système automatique (sprinklers, eau pulvérisée, etc.). En général, il est impossible d’éteindre de cette manière les feux de liquides: pour les combustibles liquides à bas point d’inflammation, on ne peut tout simplement pas les refroidir suffisamment, et pour les liquides à point d’inflammation élevé, l’eau se vaporise instantanément au contact de la surface surchauffée du combustible, ce qui peut provoquer le débordement du liquide en feu et mettre gravement en danger les personnes qui luttent contre le feu (dans certains cas particuliers, on peut avoir recours à des systèmes d’extinction automatiques à eau pulvérisée sous haute pression, qui sont spécialement conçus pour ce type d’incendie, mais cela n’est pas courant).

En général, on éteint les feux de liquides à l’aide de mousses (Cote, 1991). Ces mousses sont produites par aspiration d’un émulseur dans un courant d’eau, qui est ensuite projeté sur les flammes à l’aide d’une lance spéciale qui permet l’introduction d’air dans le jet. On obtient ainsi une mousse qui flotte à la surface du liquide, freinant la production des vapeurs combustibles par effet de blocage et qui protège la surface contre la chaleur dégagée par les flammes. Cette mousse doit être appliquée soigneusement de façon à former une sorte de tapis qui recouvre progressivement toute la surface du liquide. Les flammes baissent à mesure que ce «tapis» s’étend. En même temps, la mousse se décompose progressivement, libérant de l’eau qui contribue au refroidissement de la surface. Le processus est en fait assez complexe, mais il permet finalement de maîtriser l’émission des vapeurs combustibles.

Il existe une grande variété d’émulseurs, et il est donc important d’en choisir un qui soit compatible avec le type de liquides à protéger. Les premiers appareils de ce genre, les «émulseurs protéiniques», ont été conçus pour combattre les feux d’hydrocarbures liquides, et ils se décomposent rapidement au contact des combustibles liquides solubles dans l’eau. Aujourd’hui, il existe des mousses synthétiques adaptées à toute la gamme envisageable de liquides combustibles. Parmi elles, la mousse AFFF (ou agent formant un film flottant) est un produit polyvalent qui, comme son nom l’indique, forme une pellicule d’eau à la surface du liquide enflammé, ce qui en accroît l’efficacité.

Inhiber la flamme

Cette méthode fait appel à des inhibiteurs chimiques. Les réactions qui se produisent dans la flamme font intervenir des radicaux libres, éléments hautement réactifs qui, bien qu’éphémères, se régénèrent constamment dans une réaction à chaînes ramifiées qui les maintient à une concentration assez élevée pour permettre à la réaction d’ensemble (par exemple, réaction de type R1) de se poursuivre à un rythme rapide. Appliqués en quantité suffisante, ces agents d’extinction chimiques provoquent une baisse considérable de la concentration de ces radicaux, ce qui inhibe la flamme. Les principaux produits qui agissent de la sorte sont les halons et les poudres extinctrices.

Les halons se décomposent dans la flamme, produisant des substances intermédiaires avec lesquelles les radicaux présents préfèrent réagir. Des quantités relativement faibles de halons suffisent pour éteindre un incendie. C’est pour cette raison qu’on les a toujours préférés, car les concentrations nécessaires à l’extinction permettent de maintenir une atmosphère «respirable» (bien que les produits de décomposition sous l’effet des flammes soient nocifs). Les poudres extinctrices agissent d’une manière similaire, mais peuvent être beaucoup plus efficaces dans certaines conditions. Les fines particules de ces poudres sont dispersées dans la flamme, inhibant les chaînes de radicaux. Les particules doivent être aussi fines et nombreuses que possible. De nombreux fabricants obtiennent cet effet en choisissant des poudres qui «décrépitent», c’est-à-dire dont les particules se fragmentent lorsqu’elles sont exposées aux températures élevées des flammes.

Il est reconnu que le meilleur moyen de porter secours à une personne dont les vêtements ont pris feu est d’utiliser un extincteur à poudre qui éteint les flammes et protège la victime. Une intervention rapide permet une «action de choc» pouvant minimiser les blessures. Il importe cependant d’éteindre complètement les flammes parce que les particules de poudre retombent vite au sol, laissant toute flamme résiduelle se rétablir très rapidement. Il en est de même des halons, qui ne demeurent efficaces que si on maintient leur concentration. A l’air libre, les vapeurs des halons se dispersent rapidement, permettant à l’incendie de reprendre s’il reste encore des flammes. Fait plus important, la dispersion de l’inhibiteur est suivie d’un réallumage du combustible si la température de surface est assez élevée. Il y a lieu de noter à cet égard que les halons et les poudres extinctrices n’ont pas d’effet notable de refroidissement de la surface du combustible.

Etouffer la flamme par privation d’air

La description de ce processus est ici très simplifiée. On peut, il est vrai, éteindre un incendie en le «privant de son alimentation en air», et il suffit à cet effet d’abaisser la teneur en oxygène de l’atmosphère ambiante en deçà d’un niveau critique. Le test bien connu de l’indice limite d’oxygène permet de classer les matières combustibles selon la concentration minimale d’oxygène qui permet tout juste d’entretenir une flamme dans un mélange oxygène-azote. Beaucoup de matériaux courants brûlent jusqu’à une concentration d’environ 14% d’oxygène à la température ambiante (environ 20 °C), en l’absence d’échanges thermiques imposés. Cette concentration critique varie en fonction inverse de la température. Ainsi, un feu qui brûle depuis un certain temps peut entretenir des flammes à des concentrations d’oxygène aussi faibles que 7%. Un incendie qui s’est déclaré dans une pièce peut être maîtrisé et même s’éteindre tout seul si l’alimentation en oxygène est réduite en tenant les portes et les fenêtres fermées. A de très faibles concentrations, il n’y a plus de flammes, mais le feu peut continuer à couver. En ouvrant une porte ou en brisant une vitre avant que la pièce ait eu le temps de refroidir suffisamment, on peut provoquer un retour de flamme , violente reprise de l’incendie sous l’effet de l’air frais admis.

Il est difficile de «retirer l’air» d’un local. Toutefois, on peut rendre un milieu «inerte» en le noyant complètement dans un gaz qui ne peut pas entretenir une combustion, comme l’azote, le gaz carbonique ou les gaz issus d’un processus de combustion (par exemple, les gaz d’échappement des moteurs d’un navire), qui contiennent peu d’oxygène et beaucoup de gaz carbonique. Cette technique ne peut servir que dans des espaces clos parce qu’il est nécessaire de maintenir la concentration du gaz inerte jusqu’à ce que le feu soit complètement éteint ou jusqu’à ce que les opérations d’extinction puissent commencer. Cette technique de noyage total a des applications particulières, par exemple pour protéger les cales de navires ou des collections de livres rares dans les bibliothèques. Les concentrations minimales requises de gaz inertes figurent au tableau 41.4. Ces concentrations se fondent sur l’hypothèse que l’incendie est détecté très tôt et que le noyage s’effectue avant que les flammes n’aient provoqué une trop grande accumulation de chaleur dans le local en cause.

Tableau 41.4 Concentration d’inertage de différents gaz

Agent

Concentration minimale
(volume %)

Halon 1301

   8,0

Halon 1211

   8,1

Azote

~58

Dioxyde de carbone

~35

Cette «privation d’air» peut être réalisée au voisinage immédiat d’un petit feu par application locale d’un inhibiteur contenu dans un extincteur. Le dioxyde de carbone, ou anhydride carbonique, est le seul gaz qui soit utilisé de cette façon. Mais comme il se disperse rapidement, il est essentiel de ne pas interrompre l’extinction avant d’avoir complètement éteint les flammes sous peine de voir l’incendie reprendre très vite. La réinflammation est également possible parce que le dioxyde de carbone n’a pratiquement pas d’effet de refroidissement. Il y a lieu de mentionner que de l’eau finement pulvérisée sur une flamme peut l’éteindre sous l’action combinée de l’évaporation des gouttelettes (qui refroidit la zone de combustion) et de la réduction de la concentration d’oxygène par dilution dans la vapeur d’eau (qui agit de la même façon que le dioxyde de carbone). On envisage en fait de remplacer les halons par des jets ou des brouillards d’eau finement pulvérisée. Notons ici qu’il est déconseillé d’éteindre un feu de gaz si l’on n’est pas en mesure de couper l’alimentation immédiatement après. Un important volume de gaz inflammable peut s’accumuler et prendre feu par la suite avec des conséquences graves.

Souffler les flammes

Nous mentionnons cette méthode afin de donner un aperçu complet des modes d’extinction. On peut facilement souffler la flamme d’une allumette en portant la vitesse de l’air au-delà d’une valeur critique au voisinage de la flamme, de façon à la déstabiliser à proximité du combustible. En théorie, on devrait pouvoir maîtriser un grand incendie de la même façon, mais il faudrait alors recourir à des charges explosives pour obtenir les vitesses nécessaires. Il est possible d’éteindre de cette manière les puits de pétrole en feu.

Il importe, enfin, de souligner un aspect commun à tous les incendies: la facilité d’extinction varie en raison inverse de l’étendue du feu. Une détection précoce permet d’éteindre l’incendie avec le moins possible de produits extincteurs et de dommages. Le choix du système d’extinction sera fonction de la vitesse potentielle d’évolution du feu et de la nature du système de détection installé.

Les explosions

Une explosion se caractérise par une libération soudaine d’énergie qui produit une onde de choc ou un souffle pouvant causer des dommages à une grande distance. Il y a deux sources possibles d’explosion: la détonation d’un explosif et l’éclatement par surpression. Le trinitrotoluène (TNT) et le cyclotriméthylènetrinitramine (RDX ou hexogène) sont des exemples d’explosifs détonants. Fortement exothermiques, ces composés libèrent d’énormes quantités d’énergie en se décomposant. Même s’il s’agit de composés thermiquement stables (en fait, certains le sont moins que d’autres et doivent être neutralisés avant de pouvoir être manipulés en toute sécurité), on peut les faire détoner, leur décomposition se propageant alors à travers leur masse à la vitesse du son. Si la quantité d’énergie libérée est assez élevée, une onde de choc partant de la source pourra causer des dommages importants à distance.

En évaluant ces dommages, on peut estimer l’«équivalence TNT» de l’explosion (généralement exprimée en tonnes de TNT). Cette technique se fonde sur la masse de données recueillies sur le potentiel destructif du TNT (surtout en temps de guerre), ainsi que sur des extrapolations empiriques développées à partir de l’étude des dommages provoqués par des quantités connues de TNT.

En temps de paix, les explosifs détonants sont utilisés dans différents secteurs (mines, carrières, construction de grands ouvrages d’art, etc.). Leur présence sur un chantier représente un danger particulier nécessitant des mesures précises de gestion. Toutefois, il est une autre source d’«explosions» qui peut être également dévastatrice, surtout si l’on n’a pas conscience de l’importance des risques encourus. Il s’agit des surpressions à l’origine d’éclatements qui peuvent résulter de réactions chimiques dans des installations industrielles ou d’effets purement physiques, comme lorsqu’un contenant est chauffé par des sources extérieures. Cela explique le sigle BLEVE (Boiling Liquid Expanding Vapour Explosion ou explosion due à l’expansion des vapeurs d’un liquide en ébullition) employé à l’origine pour désigner la rupture des chaudières à vapeur. Il est communément utilisé aujourd’hui lorsqu’une enceinte sous pression contenant un gaz liquéfié tel que le GPL (gaz de pétrole liquéfié) se rompt dans un incendie, libérant son contenu hautement inflammable qui s’allume et forme une immense «boule de feu».

La surpression peut aussi être due à une réaction chimique interne. Dans les industries de transformation, l’auto-échauffement peut provoquer une réaction non maîtrisée et engendrer des températures et des pressions assez élevées pour causer un éclatement. Toutefois, les explosions les plus courantes se produisent lorsqu’un mélange inflammable gaz-air prend feu dans une enceinte fermée d’une installation ou dans n’importe quel espace clos. Une explosion ne peut se produire sans la présence d’un mélange inflammable; c’est donc ce qu’il faut éviter par une bonne conception et une bonne gestion des lieux. En cas de dégagement accidentel, une atmosphère inflammable se forme si la concentration du gaz (ou des vapeurs combustibles) se situe entre les limites inférieure et supérieure d’inflammabilité (voir tableau 41.1). En présence d’une source d’inflammation, une flamme caractéristique des prémélanges gaz-air se propage rapidement à partir de la source, transformant le mélange gazeux en produits de combustion à haute température. La température peut grimper jusqu’à 2 100 K, ce qui revient à dire que dans un système complètement fermé se situant initialement à 300 K, une pression pouvant atteindre 7 bars est possible. Seuls des récipients spécialement conçus peuvent supporter une telle surpression. Des bâtiments ordinaires s’effondreront à moins d’être protégés par des limiteurs de pression (panneaux ou disques de rupture) ou par un système de suppression des explosions. Si un mélange inflammable se forme dans un bâtiment, l’explosion résultante peut endommager la charpente — ou même détruire tout le bâtiment — à moins que les gaz produits ne puissent s’échapper par les ouvertures (par exemple, les fenêtres brisées) percées par les premières étapes de l’explosion.

Les explosions de ce genre peuvent également se produire si des poussières combustibles en suspension dans l’air s’enflamment (Palmer, 1973). C’est le cas lorsqu’une importante accumulation de poussières «explosives» est délogée d’étagères, d’éléments de charpente ou des rebords d’un bâtiment pour former un nuage qui est ensuite exposé à une source d’inflammation (par exemple, dans une minoterie, un silo à céréales, etc.). Bien sûr, les poussières doivent être combustibles, mais toutes les poussières combustibles n’explosent pas nécessairement à la température ambiante. Des tests normalisés ont été mis au point pour mesurer cette caractéristique. Ils ont permis de constater que les poussières explosives ont des «limites d’explosibilité», semblables par leur principe aux «limites d’inflammabilité» des gaz et des vapeurs. En général, l’explosion de poussières peut causer beaucoup de dommages parce que les premiers stades du phénomène tendent à déloger encore plus de poussières qui épaississent le nuage, celui-ci finissant toujours par s’enflammer pour produire une plus grosse explosion.

Les évents de décharge et les évents de décompression ne peuvent remplir leur rôle que si l’explosion se développe relativement lentement, comme dans le cas de la propagation d’une flamme de prémélange à travers un mélange inflammable stationnaire ou un nuage de poussières explosives. Les évents ne sont d’aucune utilité en cas de détonation: les orifices de décompression doivent s’ouvrir dès les premiers stades du phénomène, lorsque la pression est encore relativement faible. Si une détonation se produit, la pression augmente trop rapidement pour que la décompression soit efficace et le contenant ou le local subit alors des pressions internes assez élevées pour causer une destruction massive. La détonation d’un mélange gazeux inflammable peut se produire si le mélange est contenu dans un long tuyau ou conduit. Dans certaines conditions, la propagation de la flamme pousse les gaz imbrûlés en avant du front de flamme à une vitesse qui accroît la turbulence, ce qui augmente la vitesse de propagation. Il se produit ainsi une rétroaction qui accélère suffisamment la progression des flammes pour former une onde de choc. S’ajoutant au processus de combustion, l’onde de détonation peut atteindre des vitesses dépassant largement 1 000 m/s. Signalons, pour fins de comparaison, que la vitesse fondamentale de combustion d’un mélange stœchiométrique propane-air est de 0,45 m/s (c’est la vitesse à laquelle la flamme se propage dans un mélange propane-air à l’état quiescent, c’est-à-dire en l’absence de turbulence).

On ne saurait sous-estimer l’importance de la turbulence dans l’évolution de ce type d’explosion. L’efficacité d’un système de protection contre les explosions dépend d’une décompression ou d’une suppression rapides. Si l’explosion se développe trop vite, le système de protection sera inefficace et les surpressions pourront être très élevées.

La suppression de l’explosion peut être substituée à la décompression. Ce type de protection nécessite une détection très précoce, aussi proche que possible de l’allumage. Le déclenchement du détecteur libère instantanément un inhibiteur dans la trajectoire de la flamme en propagation, arrêtant donc l’explosion avant que la pression n’atteigne un niveau pouvant menacer l’intégrité du local ou du récipient. Les halons ont été couramment utilisés à cette fin, mais comme on les élimine progressivement, l’attention se tourne maintenant vers des systèmes à eau pulvérisée sous haute pression. Cette forme de protection est très coûteuse et d’application assez limitée, car elle ne peut servir que dans des espaces relativement exigus où il est possible de répandre l’agent inhibiteur rapidement et uniformément (par exemple, dans des canalisations servant au transport de vapeurs inflammables ou de poussières explosives).

Analyse de l’information pour la protection contre l’incendie

D’une façon générale, ce n’est que récemment que l’étude des incendies a progressé suffisamment pour que ses résultats influent sur la conception des techniques, notamment des mesures de sécurité. Dans le passé, la sécurité incendie s’est développée au cas par cas: on réagissait à des incidents en imposant des règles ou des restrictions destinées à prévenir la répétition des sinistres. Beaucoup d’exemples viennent à l’esprit. En 1666, le grand incendie de Londres a été à l’origine du premier ensemble de règles (ou codes) applicables aux bâtiments et de l’assurance incendie. A notre époque, des incendies de gratte-ciel comme ceux de 1972 et de 1974 à São Paulo, au Brésil, ont conduit les autorités à modifier les codes du bâtiment afin de prévenir des sinistres aussi meurtriers à l’avenir. On s’est attaqué de la même manière à d’autres problèmes. En Californie, on a reconnu le danger que présentent certains meubles modernes capitonnés (particulièrement ceux qui contiennent de la mousse ordinaire de polyuréthane), ce qui s’est traduit par l’adoption d’une stricte réglementation sur l’utilisation des différents produits de rembourrage.

Il s’agit là de quelques cas simples dans lesquels l’étude des conséquences d’un incendie a amené les autorités à imposer des règles destinées à protéger les personnes et les collectivités en cas de feu. La décision de prendre action dans quelque domaine que ce soit doit se fonder sur une analyse des connaissances dont on dispose. Il faut démontrer que le problème perçu est réel. Dans certains cas évidents — comme les incendies de São Paulo —, cela n’est pas nécessaire, mais dans d’autres, il y a lieu de justifier les frais engagés (et «prouver», par exemple, que les meubles modernes peuvent être dangereux). Cela suppose que l’on dispose d’une bonne base de données sur les incendies s’étendant sur une période suffisante pour pouvoir dégager des tendances sur le nombre de sinistres et de victimes, l’incidence d’une cause particulière, etc. On peut ensuite recourir à des techniques statistiques pour déterminer si une tendance ou un changement sont assez significatifs pour nécessiter des mesures correctives.

Dans bon nombre de pays, les services d’incendie sont tenus de présenter un rapport sur chaque sinistre combattu. Au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, par exemple, l’officier pompier responsable remplit un formulaire qui est transmis à un organisme central (le ministère de l’Intérieur au Royaume-Uni et l’Association nationale de protection contre l’incendie (National Fire Protection Association (NFPA)) aux Etats-Unis), où les renseignements sont codés et traités d’une manière prescrite. Les données qui en résultent sont mises à la disposition des organismes gouvernementaux et d’autres parties intéressées. Ces bases de données sont extrêmement précieuses, par exemple pour mettre en évidence les principales causes d’incendie ou les articles qui sont les premiers à prendre feu. Ainsi, un examen de l’incidence des décès et de leur rapport avec les causes d’incendie a montré que le nombre de victimes d’incendies dus à des produits de tabac est très élevé par rapport au nombre des incendies ayant cette origine.

La fiabilité de ces bases de données dépend de la compétence des sapeurs-pompiers qui réalisent les enquêtes sur les lieux du sinistre. Les enquêtes sur les incendies sont loin d’être faciles. Elles exigent de grandes compétences et des connaissances étendues, notamment dans le domaine des phénomènes liés au feu. Le Service des incendies du Royaume-Uni a l’obligation de rendre compte de chaque sinistre combattu, ce qui impose une lourde responsabilité au sapeur-pompier responsable. La structure du formulaire revêt une importance capitale, car elle doit permettre de fournir l’information nécessaire avec un degré de précision suffisant. La NFPA présente un modèle de base, «Basic Incident Report Form», dans son manuel Fire Protection Handbook (Cote, 1991).

Les données peuvent servir de deux façons: soit pour reconnaître un risque d’incendie, soit pour trouver des arguments rationnels sur lesquels fonder une ligne de conduite particulière pouvant nécessiter des dépenses publiques ou privées. Une base de données établie de longue date permet en outre de déterminer les effets de mesures prises dans le passé. Nous avons relevé les dix points suivants dans les statistiques recueillies par la NFPA entre 1980 et 1989 (Cote, 1991):

  1. Les détecteurs de fumée à usage domestique sont très répandus et très efficaces (même s’il reste d’importantes lacunes dans la stratégie de détection).
  2. Les systèmes d’extinction automatique à eau réduisent considérablement les décès et les dommages matériels.
  3. La multiplication des appareils de chauffage portables et des systèmes de chauffage individuel a considérablement accru le nombre d’incendies domestiques attribuables au matériel de chauffage.
  4. Le nombre d’incendies criminels et suspects a continué à baisser depuis le sommet enregistré dans les années soixante-dix, mais les dommages matériels correspondants ont cessé de décroître.
  5. Une importante proportion des décès enregistrés chez les sapeurs-pompiers est attribuable à des crises cardiaques et à des activités autres que la lutte contre l’incendie.
  6. Les régions rurales ont les taux les plus élevés de décès dus à des incendies.
  7. Les incendies domestiques les plus mortels sont causés par des produits de tabac enflammés qui mettent le feu à des meubles capitonnés, à des matelas ou à d’autres articles de literie.
  8. Aux Etats-Unis et au Canada, les taux de décès dus aux incendies comptent parmi les plus élevés de tous les pays développés.
  9. Aux Etats-Unis, ce sont les Etats du «Grand Sud» qui ont les plus hauts taux de décès dus aux incendies.
  10. Ce sont les personnes âgées qui courent le plus de risques de mourir dans un incendie.

Ces conclusions sont évidemment propres au pays considéré, mais il y a des tendances communes. Un examen attentif des données peut aider à formuler des politiques rationnelles de sécurité incendie pour la collectivité. Il ne faut pas perdre de vue, cependant, que de telles politiques sont inévitablement «réactives» plutôt que «proactives». Il n’est possible d’envisager des mesures proactives qu’après une évaluation détaillée des risques d’incendie. Cette façon de procéder commence à se généraliser: appliquée d’abord dans l’industrie nucléaire, elle s’est étendue aux industries chimiques et pétrochimiques et aux installations pétrolières en mer, où les risques sont beaucoup plus faciles à définir que dans les autres industries. Son application dans les hôtels et les établissements ouverts au public est beaucoup plus difficile, car il faut recourir à des techniques de modélisation pour prédire le déroulement d’un incendie et la façon dont les produits de combustion se propageront dans l’immeuble et affecteront les occupants. On a réalisé de grands progrès dans ce type de modélisation, mais il reste beaucoup à faire pour en arriver à l’utiliser en toute confiance. Le domaine de la sécurité incendie a encore besoin de longues recherches fondamentales avant qu’il devienne possible d’employer couramment des outils sûrs d’évaluation des risques d’incendie.

LES CAUSES D’INCENDIE

Tamás Bánky

Il existe diverses définitions des termes de feu et de combustion . Voici, aux fins du présent texte, les plus importants énoncés relatifs à la combustion, en tant que phénomène:

L’inflammation peut être considérée comme la première étape du processus auto-entretenu de combustion. Elle est provoquée si le phénomène est causé par une source extérieure. Il peut également s’agir d’une inflammation spontanée (ou d’auto-allumage ) si le phénomène résulte de réactions dans la masse même de la matière combustible qui produisent un dégagement de chaleur.

L’aptitude à prendre feu est caractérisée par un paramètre empirique, la température d’inflammation (c’est-à-dire la température minimale, déterminée par des essais, à laquelle la matière doit être portée pour brûler). On distingue la température d’inflammation provoquée et la température d’inflammation spontanée , selon que ce paramètre est déterminé — par des méthodes d’essai spéciales — en recourant ou non à une source d’énergie extérieure.

En cas d’inflammation provoquée, l’énergie nécessaire pour amorcer la réaction de combustion provient de sources extérieures. Toutefois, il n’y a pas de lien direct entre la quantité de chaleur nécessaire et la température d’inflammation. En effet, même si la composition chimique des combustibles considérés constitue un facteur essentiel de la température d’inflammation, cette dernière dépend dans une large mesure de la taille et de la forme des matières en présence, de la pression ambiante, des conditions de circulation de l’air, des caractéristiques de la source d’inflammation, des variables géométriques de l’appareil d’essai, etc. C’est la raison pour laquelle les données publiées relatives aux températures d’inflammation provoquée ou spontanée peuvent varier sensiblement d’un document à l’autre.

Le mécanisme d’inflammation de matières combustibles est facile à illustrer. Nous examinerons à cet effet des matières à l’état solide, liquide et gazeux.

La plupart des solides reçoivent l’énergie d’une source d’inflammation extérieure par conduction, convection ou rayonnement (le plus souvent par une combinaison des trois) ou s’échauffent par suite de processus exothermiques internes qui déclenchent une décomposition de surface.

Pour que des liquides s’enflamment, ils doivent émettre des vapeurs combustibles à leur surface. Les vapeurs libérées ainsi que les produits de décomposition gazeux se mélangent à l’air, à la surface du liquide ou du solide.

La diffusion ou la turbulence qui se produit dans le mélange aide l’oxygène à atteindre les molécules, les atomes et les radicaux libres qui, à la surface et au-dessus, peuvent entrer en réaction. Les particules réagissent, dégageant de la chaleur. Le processus s’accélère constamment et lorsque la réaction en chaîne s’amorce, la matière combustible prend feu et brûle.

On dit qu’il y a feu couvant lorsque la combustion se produit au-dessous de la surface d’une matière combustible solide. Le feu est dit incandescent quand la réaction de combustion se situe à l’interface d’un solide et d’un gaz. La combustion accompagnée de flammes est la manifestation d’un processus exothermique de combustion en phase gazeuse. Il se produit lors de la combustion tant des liquides que des solides.

Les gaz combustibles brûlent naturellement en phase gazeuse. On constate empiriquement que les mélanges gaz-air ne peuvent s’enflammer qu’à l’intérieur d’un intervalle défini de concentrations. Cela est vrai aussi pour les vapeurs émises par des liquides. Les limites inférieure et supérieure d’inflammabilité des gaz et des vapeurs dépendent de la température et de la pression du mélange, de la source d’inflammation et de la concentration du mélange en gaz inertes.

Les sources d’inflammation

Les phénomènes qui produisent de l’énergie thermique peuvent être répartis entre quatre catégories de base selon leur origine (Sax, 1979):

  1. L’énergie thermique résultant de réactions chimiques (chaleur d’oxydation, chaleur de combustion, chaleur de solution, auto-échauffement, chaleur de décomposition, etc.).
  2. L’énergie thermique d’origine électrique (chauffage par résistance, chauffage par induction, chaleur dégagée par un arc électrique, étincelles électriques, décharges électrostatiques, chaleur engendrée par la foudre, etc.).
  3. L’énergie thermique d’origine mécanique (chaleur de frottement, étincelles produites par frottement).
  4. La chaleur dégagée par une décomposition nucléaire.

Nous examinerons ci-dessous les sources d’inflammation les plus courantes.

Les flammes nues

Les flammes nues sont sans doute les sources d’inflammation les plus simples et les plus fréquentes. Nombreux sont les outils d’usage général et les différents types d’équipements techniques qui fonctionnent normalement avec des flammes nues ou permettent la formation de telles flammes. Les brûleurs, les allumettes, les chaudières, les systèmes de chauffage, les chalumeaux de soudage, les canalisations brisées de gaz et de pétrole, etc. peuvent tous en pratique être considérés comme des sources possibles d’inflammation. Comme une flamme nue représente en soi une combustion auto-entretenue qui existe déjà, le mécanisme d’inflammation revient en fait à une propagation de cette flamme à un autre élément. Si la source à flamme nue possède suffisamment d’énergie, cet élément commence à brûler.

L’inflammation spontanée

Les réactions chimiques exothermiques présentent un risque d’incendie comme s’il s’agissait de «sources internes d’inflammation». Les substances susceptibles d’auto-échauffement et d’inflammation spontanée peuvent toutefois devenir des sources d’inflammation secondaires en provoquant l’inflammation de combustibles se trouvant dans leur voisinage.

Même si certains gaz (par exemple, le phosphure d’hydrogène, l’hydrure de bore ou l’hydrure de silicium) et certains liquides (par exemple, les métaux carbonyle, ou les composés organométalliques) sont susceptibles d’inflammation spontanée, la plupart des combustions spontanées prennent la forme de réactions de surface dans des solides. L’inflammation spontanée, comme toute inflammation, dépend de la structure chimique de la matière et surtout de son degré de dispersion. Si la surface spécifique est importante, la chaleur de réaction peut s’accumuler localement et contribuer à faire monter la température de la matière au-delà de la température d’inflammation spontanée.

Certains liquides peuvent s’enflammer spontanément s’ils entrent en contact avec de l’air sur des matières solides d’une grande surface spécifique. Les graisses, et particulièrement les huiles insaturées contenant des liaisons doubles, sont susceptibles de s’enflammer spontanément dans des conditions atmosphériques normales lorsqu’elles sont absorbées par des matières fibreuses ou qu’elles imprègnent des textiles d’origine végétale ou animale. De très graves incendies ont été causés par l’inflammation spontanée de produits de laine de verre ou de laine minérale faits de fibres incombustibles ou de matières inorganiques ayant une grande surface spécifique, qui avaient été contaminés par une huile.

L’inflammation spontanée a été principalement observée dans le cas des poussières de matières solides. Un métal ayant une bonne conductivité thermique doit se présenter sous forme de particules assez fines pour prendre feu spontanément sous l’effet d’une accumulation locale de chaleur. La probabilité d’inflammation spontanée est d’autant plus élevée que les particules sont petites. Certaines poussières métalliques (par exemple, le fer pyrophorique) s’enflamment spontanément au simple contact de l’air. Il faut donc prendre des précautions particulières pour prévenir l’inflammation spontanée lors de la manipulation, de l’entreposage et du traitement industriel de la poussière de charbon, de suies à particules très fines et de poussières de laques et de résines synthétiques.

Les matières qui ont tendance à se décomposer spontanément sont particulièrement susceptibles de prendre feu sans source d’inflammation externe. L’hydrazine, par exemple, s’enflamme lorsqu’elle est versée sur n’importe quelle matière d’une grande superficie. Les peroxydes, d’utilisation courante dans l’industrie des plastiques, se décomposent facilement, se transformant en dangereuses sources d’inflammation pouvant à l’occasion amorcer une combustion explosive.

La violente réaction exothermique qui se produit lorsque certains produits chimiques entrent en contact les uns avec les autres peut être considérée comme un cas particulier d’inflammation spontanée. C’est le cas par exemple de l’acide sulfurique concentré avec n’importe quelle matière organique combustible, des chlorates avec des sels ou des acides de soufre ou d’ammonium, des composés organiques halogénés avec les métaux alcalins, etc. Le fait que ces produits soient incapables de se «supporter» les uns les autres (matières incompatibles) nécessite une attention particulière lorsqu’il faut les entreposer tant séparément qu’ensemble, ainsi que des règles spéciales de lutte contre l’incendie.

Il convient de mentionner en outre qu’un auto-échauffement dangereux peut dans certains cas résulter de mauvaises conditions matérielles (aération insuffisante, refroidissement déficient, manque d’entretien et de nettoyage, réactions provoquant un dégagement excessif de chaleur, etc.), ou être provoqué par celles-ci.

Certains produits agricoles peuvent également prendre feu spontanément: fourrages fibreux, semences huileuses, céréales germées, produits finis de l’industrie de transformation (tranches de betterave séchée, engrais, etc.). L’auto-échauffement de ces matières présente en outre une caractéristique particulière: les températures dangereuses qui en découlent sont aggravées par certains processus biologiques exothermiques difficiles à maîtriser.

Les sources électriques

Les moteurs, les instruments, les appareils de chauffage, les transformateurs et les appareils d’éclairage électrique ne présentent normalement pas de risque d’incendie s’ils ont été installés conformément aux normes et aux règles de sécurité applicables et si leur fonctionnement est régi par des directives techniques adéquates. Un entretien régulier et des inspections périodiques réduisent considérablement les risques d’incendie et d’explosion. Les causes les plus fréquentes de feu dans les appareils et les câbles électriques sont les surcharges , les courts-circuits , les étincelles électriques et les résistances de contact élevées .

Il y a surcharge lorsque le câblage ou un appareil électrique est parcouru par un courant supérieur à celui pour lequel il a été conçu. La surcharge imposée au câblage, aux dispositifs et au matériel peut entraîner une élévation de température telle que les éléments surchauffés sont endommagés ou se cassent, s’usent ou se carbonisent, faisant fondre le revêtement isolant des cordons et des câbles, portant les composants métalliques à l’incandescence, enflammant les éléments structurels combustibles et, si les conditions s’y prêtent, mettant le feu à des objets voisins. Les surcharges sont le plus souvent dues au branchement d’un nombre d’éléments supérieur à celui qui est permis ou à une consommation dépassant la puissance nominale de l’appareil.

Les courts-circuits compromettent souvent la sécurité des systèmes électriques. Ils résultent toujours d’un défaut provoquant le contact accidentel entre un élément de câblage ou un composant isolé sous tension et la terre ou une autre pièce sous tension. Le contact peut être direct (métal-métal) ou indirect, par suite de la formation d’un arc électrique. En cas de court-circuit, la résistance au passage du courant baisse considérablement (souvent de plusieurs ordres de grandeur), donnant lieu à un courant d’une intensité extrêmement élevée. Si le court-circuit est important, le dégagement de chaleur peut être suffisant pour mettre le feu à l’appareil touché et aux objets et matériels voisins, l’incendie se propageant parfois à tout le bâtiment.

Les étincelles électriques sont des sources d’énergie thermique de faible puissance, mais l’expérience montre qu’elles peuvent souvent être à l’origine d’un incendie. Normalement, la plupart des appareils électriques ne produisent pas d’étincelles, mais certains dispositifs le font en fonctionnement normal.

Les étincelles ne sont dangereuses qu’aux endroits où peuvent se former des concentrations explosives de gaz, de vapeurs ou de poussières. Par conséquent, les appareils qui en produisent dans des conditions normales de fonctionnement ne peuvent être installés que dans des lieux où les étincelles ne pourront pas déclencher un incendie. L’énergie contenue dans des étincelles ne suffit généralement pas, par elle-même, à mettre le feu à des objets ou à amorcer une explosion.

Si un circuit électrique comporte des points où le contact métallique entre des éléments traversés par le courant n’est pas parfait, ces points auront une résistance de contact élevée. Dans la plupart des cas, cela résulte de connexions défectueuses ou d’une installation mal faite. Le relâchement des connexions et l’usure normale peuvent également créer des points à haute résistance de contact. Une importante part du courant qui traverse ces points est convertie en chaleur. Si l’énergie thermique ainsi produite ne peut pas se dissiper (et si la source du problème ne peut pas être éliminée), la forte élévation de température qui en résulte peut créer un risque d’incendie.

Si un appareil électrique fonctionnant par induction (moteur, dynamo, transformateur, relais, etc.) est mal conçu, des courants de Foucault d’une intensité excessive peuvent circuler, échauffant certains éléments de l’appareil (bobines et noyaux de fer doux), ce qui peut mettre le feu aux isolants et à l’appareil. Des courants de Foucault, avec leurs effets nuisibles, peuvent également se développer dans les éléments métalliques du matériel haute tension.

Les décharges électrostatiques

La formation d’une charge électrostatique est un processus au cours duquel un corps électriquement neutre à l’origine (et indépendant de tout circuit électrique) acquiert une charge positive ou négative. Cela peut se produire de trois façons:

  1. Charges opposées: deux corps acquièrent simultanément, par séparation, des charges de polarité opposée.
  2. Charges de passage: des charges passant au voisinage d’un corps lui laissent une charge de polarité opposée.
  3. Charges acquises: charges qu’un corps reçoit de l’extérieur.

Différents processus physiques peuvent engendrer ces trois genres de charges: séparation après un contact, rupture, découpage, pulvérisation, déplacement, frottement, écoulement de poudres ou de fluides dans une canalisation, martelage, changement de pression, changement d’état, photo-ionisation, thermo-ionisation, distribution électrostatique ou décharge haute tension.

La formation de charges électrostatiques peut se produire tant sur des conducteurs que sur des isolants, par suite de n’importe lequel des processus mentionnés ci-dessus. Toutefois, l’accumulation de charges parasites est le plus souvent due à des processus mécaniques.

Les effets nuisibles attribuables aux charges électrostatiques et aux étincelles qui en résultent sont nombreux; cependant, nous en mentionnerons deux en particulier: le risque d’endommager le matériel électronique (par exemple, les ordinateurs servant à commander les processus industriels) et le danger d’incendie et d’explosion.

Le matériel électronique peut être gravement endommagé si l’énergie de la décharge électrostatique est suffisante pour griller le circuit d’entrée d’un semi-conducteur. La multiplication des dispositifs électroniques a considérablement augmenté ce risque au cours de la dernière décennie.

Pour qu’il y ait risque d’incendie ou d’explosion, deux conditions doivent être remplies simultanément: présence d’un combustible et décharge d’énergie suffisante. Ce risque se présente surtout dans l’industrie chimique. On peut l’évaluer d’après la sensibilité des matières dangereuses aux étincelles (énergie minimale d’inflammation) et l’importance des charges électrostatiques en cause.

Il est essentiel de réduire ce risque et les nombreuses conséquences qu’il implique, depuis les défaillances techniques jusqu’aux catastrophes occasionnant la perte de vies humaines. On peut recourir à deux moyens pour se prémunir contre les effets des charges électrostatiques:

  1. Empêcher la formation des charges électrostatiques (solution évidente, mais, en pratique, très difficile à réaliser).
  2. Réduire l’accumulation des charges afin d’empêcher les décharges dangereuses (et les risques qui y sont associés).

La foudre est un phénomène atmosphérique naturel de nature électrique, qui peut constituer une source d’inflammation. Les charges électrostatiques portées par les nuages peuvent donner lieu à des décharges à haute énergie en direction de la terre (foudre) . Ces décharges peuvent mettre le feu aux combustibles se trouvant à l’endroit frappé par la foudre et aux alentours. Il arrive également que la foudre produise des impulsions extrêmement puissantes dont l’énergie est dissipée en plusieurs étapes. Dans d’autres cas, des courants durables pouvant atteindre 10 A commencent à circuler.

L’énergie thermique d’origine mécanique

Dans toute opération mécanique, le frottement produit de la chaleur. Si, dans un système, les pertes sont réduites au point de permettre une accumulation de cette chaleur, la température du système peut s’élever suffisamment pour provoquer un incendie.

Certaines opérations d’usinage de métaux produisent des étincelles par suite d’un frottement intense (meulage, burinage, découpage, martelage). La chute d’une pièce ou d’un outil métallique sur un plancher dur peut également produire des étincelles, de même que le meulage d’un objet métallique, qui brûle les impuretés du métal. La température des étincelles est souvent supérieure à la température d’allumage des combustibles ordinaires (étincelles provenant de l’acier, 1 400 à 1 500 °C; étincelles provenant d’un alliage nickel-cuivre, 300 à 400 °C). Toutefois, la possibilité d’amorcer une combustion dépend de la chaleur totale de l’étincelle et de l’énergie minimale d’inflammation du combustible présent. Il est établi, en pratique, que les étincelles produites par frottement présentent un risque réel d’incendie dans les milieux contenant des concentrations élevées de gaz, de vapeurs ou de poussières combustibles. On devrait donc éviter, dans ces circonstances, d’utiliser des matériaux pouvant facilement produire des étincelles ou d’exécuter des opérations pouvant donner lieu à des étincelles d’origine mécanique. Dans ces cas, la sécurité dicte de se servir d’outils en bois, en cuir ou en plastique ne pouvant pas produire d’étincelles, ou encore d’outils en cuivre ou en bronze ne produisant que des étincelles de faible énergie.

Les surfaces chaudes

Les surfaces d’appareils et de matériels peuvent en pratique s’échauffer à un degré dangereux soit en fonctionnement normal, soit par suite de défaillances. Les fours, les chaudières, les dispositifs de séchage, les canalisations d’échappement de gaz de combustion, les conduites de vapeur, etc. causent souvent des incendies dans les atmosphères explosives. De plus, leurs surfaces chaudes peuvent amorcer la combustion des combustibles qui les touchent ou qui se trouvent à proximité. Il importe, pour prévenir l’incendie, de maintenir des distances suffisantes et de procéder régulièrement à des inspections et à des travaux d’entretien afin de réduire la probabilité de surchauffes dangereuses.

Les risques d’incendie liés à différents matériaux et produits

Pour qu’il y ait combustion, il faut de toute évidence que soient mis en présence une matière combustible et un comburant. Les phénomènes de combustion et leurs diverses phases dépendent essentiellement des propriétés physico-chimiques de la matière en cause. Il est donc utile de faire un relevé des propriétés et des caractéristiques de combustibilité des divers matériaux et produits. L’ordre dans lequel ces derniers sont regroupés relève davantage d’aspects techniques que de concepts théoriques (NFPA, 1991).

Le bois et les produits en bois

Le bois est l’un des matériaux les plus courants dans l’environnement humain. Maisons, charpentes, mobilier et d’innombrables biens de consommation sont faits de bois, qui constitue également une matière première largement utilisée dans l’industrie du papier et l’industrie chimique.

Le bois et les produits en bois sont combustibles. Mis en contact avec des surfaces chaudes ou exposés à un rayonnement thermique, à une flamme nue ou à toute autre source d’allumage, ils se carbonisent, deviennent incandescents, s’enflamment ou brûlent, selon les conditions auxquelles ils sont soumis. Pour élargir leur domaine d’utilisation, il faut «améliorer» leurs caractéristiques de combustion. On ignifuge généralement les pièces de charpente en bois (par saturation, imprégnation ou revêtement de surface) pour qu’elles résistent plus longtemps au feu.

La température d’inflammation est à cet égard la plus importante caractéristique des différents types de bois. Sa valeur dépend dans une large mesure de certaines propriétés du matériau et des conditions d’essai, notamment la densité, le degré d’humidité, la taille et la forme de l’échantillon de bois, ainsi que de la source d’inflammation, du temps et de l’intensité d’exposition et de l’atmosphère ambiante. Il est intéressant de noter que différentes méthodes d’essai aboutissent à des points d’inflammation différents. L’expérience montre que les produits en bois propres et secs sont peu susceptibles de s’enflammer d’eux-mêmes, mais en revanche d’innombrables incendies ont été causés par l’inflammation spontanée de déchets de bois imprégnés d’huile et poussiéreux entreposés dans des locaux mal aérés. On a établi empiriquement qu’un haut degré d’humidité élève la température d’inflammation et réduit la vitesse de combustion du bois. La décomposition thermique du bois est un processus complexe, dont les phases sont toutefois faciles à observer:

Les fibres et les textiles

Les textiles à base de matières fibreuses que l’on trouve dans l’environnement humain sont en majorité combustibles. Les vêtements, le mobilier et le milieu bâti se composent de textiles en totalité ou en partie. Ils présentent un danger d’incendie au cours de leur production, de leur transformation, de leur entreposage et de leur utilisation.

Les textiles sont faits de matières premières naturelles ou artificielles. Les fibres synthétiques sont utilisées soit seules, soit mélangées à des fibres naturelles. Les fibres d’origine végétale (coton, chanvre, jute, lin) se composent essentiellement de cellulose combustible, dont la température d’allumage est toutefois relativement élevée (~400 °C). Portées à haute température, elles ont l’avantage de carboniser sans fondre, causant donc aux personnes qui les portent des brûlures relativement moins graves que certaines fibres synthétiques.

Les propriétés de combustion des fibres à base de protéines animales (laine, soie, poils) sont, de ce point de vue, encore plus avantageuses que celles des fibres végétales, leur température d’inflammation étant plus élevée (500 à 600 °C) et leur combustion moins intense, dans des conditions semblables.

L’industrie des plastiques, tablant sur plusieurs excellentes propriétés mécaniques de certains polymères, joue également un rôle important dans la production de différents textiles. Toutefois, parmi les caractéristiques de l’acrylique, du polyester et des fibres thermoplastiques (nylon, polypropylène, polyéthylène), les propriétés de combustion sont les moins avantageuses. Malgré leur température d’allumage élevée (~400 à 600 °C), la plupart des fibres synthétiques fondent sous l’effet de la chaleur, prennent facilement feu, brûlent intensément, coulent en brûlant et dégagent des quantités considérables de fumée et de gaz toxiques. On peut améliorer ces propriétés par addition de fibres naturelles, et produire ainsi des textiles à fibres mixtes . Il est également possible de les ignifuger. Les textiles à usage industriel et les vêtements de protection contre la chaleur sont surtout fabriqués à partir de fibres minérales incombustibles (notamment de fibres de verre et de fibres métalliques).

Du point de vue de la sécurité incendie, les principales caractéristiques des textiles sont leurs propriétés liées à l’inflammabilité, à la propagation de la flamme, à la production de chaleur et à la libération de produits de combustion toxiques. Des méthodes d’essai spéciales ont été mises au point pour déterminer ces propriétés. Les résultats des essais influent sur les champs d’application des textiles (tentes, literie, mobilier, sièges et revêtements intérieurs de véhicules, vêtements, tapis et moquettes, rideaux, vêtements spéciaux de protection contre la chaleur et les intempéries), ainsi que sur les directives à donner pour limiter les risques qu’ils présentent. Les chercheurs de l’industrie consacrent d’importants efforts à la mise au point de textiles ignifuges qui peuvent supporter des températures élevées (difficilement combustibles, temps d’inflammation assez long, propagation lente des flammes, faible débit thermique), libèrent peu de produits de combustion toxiques et produisent le moins possible de blessures et de dégâts s’ils prennent feu.

Les liquides combustibles et inflammables

En présence de sources d’inflammation, les liquides combustibles et inflammables présentent des dangers d’incendie. Tout d’abord, les vapeurs que ces liquides dégagent tant à l’air libre que dans des espaces clos créent un risque d’incendie et d’explosion. La combustion et, plus fréquemment, l’explosion, sont possibles si la concentration des vapeurs dans l’air ambiant se situe dans certaines limites. Autrement dit, on peut prévenir l’incendie et les explosions en présence de liquides combustibles et inflammables:

Figure 41.3 Types courants de réservoirs destinés à l'entreposage de liquides
inflammables et combustibles

Figure 41.3

En pratique, on évalue le danger des liquides combustibles et inflammables en mesurant différentes caractéristiques: point d’éclair en vase ouvert et en vase clos, point d’ébullition, température d’inflammation, vitesse d’évaporation, limites inférieure et supérieure de combustibilité (inflammabilité et explosivité), densité des vapeurs par rapport à l’air et énergie nécessaire pour enflammer les vapeurs. Ces paramètres donnent des renseignements complets sur la combustibilité et l’inflammabilité des liquides.

On se sert, presque partout dans le monde, du point d’éclair, paramètre déterminé par un essai standard dans des conditions atmosphériques normales, pour classer les liquides (ainsi que les matières qui se comportent comme des liquides à des températures relativement basses) en différentes catégories de risque. Pour chacune de ces catégories, on devrait établir les consignes de sécurité à observer pour entreposer les liquides, les manipuler, les utiliser, les traiter et installer du matériel électrique dans leur voisinage. Les zones de risque autour de l’équipement industriel devraient également être définies en fonction de ces catégories. L’expérience montre que, selon la température et la pression, des incendies et des explosions peuvent se produire dans l’intervalle de concentrations situé entre les deux limites d’inflammabilité.

Les gaz

Même si tous les corps peuvent passer à l’état gazeux dans des conditions données de température et de pression, en pratique on ne considère comme des gaz que les matières qui se trouvent dans cet état dans des conditions normales de température et de pression ambiantes (respectivement <20 °C et <100 kPa).

Du point de vue des risques d’incendie et d’explosion, les gaz peuvent être répartis entre deux grands groupes: les gaz combustibles et les gaz incombustibles . Selon la définition acceptée en pratique, les gaz combustibles sont ceux qui brûlent à l’air, avec une concentration normale d’oxygène, pourvu qu’existent les conditions nécessaires à la combustion. Ces gaz ne s’enflamment qu’au-dessus d’une certaine température (température d’inflammation) et dans un intervalle donné de concentration.

Les gaz incombustibles sont ceux qui ne brûlent à aucune concentration ni dans l’air, ni dans l’oxygène. Certains de ces gaz (comme l’oxygène) sont des comburants qui permettent la combustion sans brûler eux-mêmes, tandis que les autres inhibent la combustion. Les gaz incombustibles qui ne sont pas des comburants sont dits inertes (azote, gaz rares, dioxyde de carbone, etc.).

Par souci d’économie, les gaz sont ordinairement comprimés, liquéfiés ou réfrigérés et condensés (à l’état cryogénique) dans des réservoirs, des bouteilles ou des récipients pour être entreposés et transportés. Il y a essentiellement deux situations dangereuses: d’une part, lorsque les gaz se trouvent dans un contenant et, de l’autre, lorsqu’ils s’échappent de ce contenant.

Dans le cas des gaz comprimés entreposés dans des contenants, la chaleur extérieure peut considérablement accroître la pression intérieure et ainsi provoquer une explosion. Dans leur contenant, les gaz comportent ordinairement une phase liquide et une phase gazeuse. Les variations de température et de pression peuvent provoquer une expansion de la phase liquide qui comprime alors davantage la phase gazeuse, tandis que la tension de vapeur du liquide augmente avec la température. Ces processus peuvent provoquer des surpressions dangereuses. Les contenants d’entreposage doivent en général comporter des dispositifs de protection contre les surpressions permettant d’éviter les situations dangereuses dues à l’élévation de la température.

Si le contenant d’entreposage est endommagé ou n’est pas étanche, le gaz peut s’échapper dans l’atmosphère, se mélanger à l’air ambiant et, selon la quantité libérée et son mode d’écoulement, causer la formation d’une atmosphère explosive. Au voisinage d’un tel contenant, l’air peut devenir irrespirable et mettre donc en danger la vie des personnes qui se trouvent à proximité par suite soit des effets toxiques du gaz libéré, soit du manque d’oxygène.

Compte tenu des risques d’incendie, il importe de disposer de renseignements détaillés sur les caractéristiques suivantes des gaz entreposés ou utilisés, surtout dans les établissements industriels: propriétés physiques et chimiques, température d’inflammation, limites inférieure et supérieure d’inflammabilité, risques liés à l’entreposage, risques posés par la libération des gaz dans l’atmosphère, étendue des zones de sécurité nécessaires et mesures spéciales à prendre en cas d’incendie.

Les produits chimiques

Il est essentiel de connaître les caractéristiques dangereuses des produits chimiques pour les utiliser d’une façon sûre. En effet, on ne peut prévoir des mesures de prévention ou établir des exigences de protection contre l’incendie sans tenir compte des propriétés physiques et chimiques liées à la combustion. Parmi ces propriétés, les plus importantes sont la combustibilité, l’inflammabilité, les réactions avec d’autres produits, ainsi qu’avec l’air et l’eau, la corrosivité, la toxicité et la radioactivité.

On peut s’informer sur les propriétés des produits chimiques en consultant les notes techniques publiées par les fabricants, de même que les manuels portant sur les produits chimiques dangereux. Ces sources fournissent de l’information non seulement sur les caractéristiques techniques générales de ces produits, mais aussi sur la valeur de différents paramètres à considérer (température de décomposition, température d’inflammation, concentrations limites de combustibilité, etc.), sur leurs comportements particuliers et sur les exigences d’entreposage et de sécurité incendie, ainsi que des recommandations en matière de premiers soins et de traitement médical.

En rapport avec l’incendie, la toxicité des produits chimiques peut intéresser à deux titres. D’abord, la forte toxicité de certains produits peut en elle-même être dangereuse dans un incendie. Ensuite, leur présence dans la zone d’un sinistre peut en fait empêcher les opérations d’extinction.

Même s’ils ne sont pas eux-mêmes combustibles, les oxydants (nitrates, chlorates, peroxydes minéraux, permanganates, etc.) contribuent largement à l’inflammation des matériaux combustibles et peuvent intensifier leur combustion ou lui donner un caractère explosif.

Le groupe des produits chimiques dits instables (aldéhyde acétique, oxyde d’éthylène, peroxydes organiques, acide cyanhydrique, chlorure de vinyle) comprend les composés qui se polymérisent ou se décomposent spontanément ou très facilement, donnant lieu à de violentes réactions exothermiques.

Les produits sensibles à l’eau et à l’air (oxydes, hydroxydes, hydrures, anhydrides, métaux alcalins, phosphore, etc.) sont extrêmement dangereux. Ils réagissent à l’eau et à l’air toujours présents dans l’atmosphère normale en dégageant de très grandes quantités de chaleur. S’ils sont eux-mêmes combustibles, ils s’enflamment spontanément. Toutefois, les fractions combustibles qui déclenchent la combustion peuvent aussi exploser en mettant le feu aux matières combustibles qui se trouvent aux alentours.

La majorité des produits corrosifs (comme les acides minéraux — acide sulfurique, acide nitrique, acide perchlorique, etc.— et les halogènes — fluor, chlore, brome, iode) sont de puissants oxydants et ont d’intenses effets destructifs sur les tissus vivants. Ils imposent donc de prendre des mesures spéciales lorsqu’ils sont présents dans un incendie.

Le danger des éléments et des composés radioactifs est intensifié par le fait que les radiations qu’ils émettent agissent de différentes façons, sans compter qu’ils peuvent par eux-mêmes occasionner des incendies. Si un sinistre endommage l’enceinte de confinement de produits radioactifs, il peut libérer des matières émettant des rayonnements γ. Ces matières aux puissants effets ionisants peuvent détruire les organismes vivants. Les accidents nucléaires peuvent en outre être accompagnés d’incendies dont les produits de décomposition fixent alors par adsorption des contaminants radioactifs rayonnants α et β. Ces produits peuvent provoquer des lésions permanentes chez les personnes participant aux opérations de sauvetage. Leurs effets sont d’autant plus dangereux que les victimes ne ressentent aucun malaise dans un premier temps. Il est évident qu’en cas de combustion de matières radioactives, il faudra surveiller en permanence la radioactivité du site, des produits de décomposition et de l’eau d’extinction à l’aide de détecteurs de particules. La connaissance de ces facteurs doit être prise en considération dans la stratégie d’intervention et dans toutes les opérations complémentaires. Les bâtiments où des matières radioactives sont entreposées, manipulées ou utilisées dans des opérations ou processus doivent être construits en matériaux incombustibles et avoir une résistance au feu élevée. Il faut en même temps y prévoir des systèmes automatiques de détection, d’alerte et d’extinction de grande qualité.

Les explosifs

Les explosifs ont de nombreuses applications militaires et industrielles. Ce sont des produits chimiques et des composés qui, sous l’effet d’une importante force mécanique (coup, choc, frottement) ou d’une amorce de combustion, se transforment soudainement en un énorme volume de gaz par une réaction extrêmement rapide d’oxydation (vitesse de propagation de 1 000 à 10 000 m/s). Le volume des gaz dégagés étant très grand par rapport au volume des explosifs, ces gaz exercent de très hautes pressions sur les surfaces avoisinantes. Une explosion peut donner lieu à de très hautes températures (2 500 à 4 000 °C) qui favorisent la combustion des matières combustibles se trouvant dans la zone de l’explosion.

Des règles très strictes régissent la fabrication, le transport et l’entreposage des explosifs (par exemple, NFPA 495, Explosive Materials Code ).

A part les explosifs servant à des fins militaires et industrielles, les matières explosives inductives et les produits pyrotechniques présentent également des risques d’incendie. On se sert souvent de mélanges de matières explosives (acide picrique, nitroglycérine, hexogène), mais aussi de mélanges de matières susceptibles d’exploser (poudre noire, dynamite, nitrate d’ammonium, etc.). Les attentats terroristes ont fait connaître le plastic, qui est essentiellement un mélange d’explosif et de plastifiant (cire, vaseline, etc.).

Dans le cas des explosifs, la méthode la plus efficace de protection contre l’incendie consiste à éliminer des environs toute source d’inflammation. Un certain nombre d’explosifs sont sensibles à l’eau ou à divers composés organiques aux propriétés oxydantes. Dans leur cas, l’entreposage ainsi que la nature des substances entreposées à proximité devraient faire l’objet d’un examen soigneux.

Les métaux

L’expérience montre que presque tous les métaux peuvent, dans certaines conditions, brûler dans l’atmosphère normale. Bien sûr, l’acier et l’aluminium de construction, d’une certaine épaisseur, sont considérés comme incombustibles. Toutefois, les poussières d’aluminium, les fines particules de fer et les toiles métalliques faites de fil de métal fin peuvent facilement s’enflammer et brûlent alors avec une forte intensité. Les métaux alcalins (lithium, sodium, potassium), les métaux alcalino-terreux (calcium, magnésium, zinc) ainsi que le zirconium, le hafnium, le titane, etc. prennent feu facilement lorsqu’ils se présentent sous forme de poudre, de limaille ou de bandes minces. Certains métaux sont tellement sensibles qu’on les garde à l’abri de l’air, dans une atmosphère inerte ou dans un liquide avec lequel ils ne réagissent pas.

Les métaux combustibles et ceux qui sont traités pour brûler produisent des réactions de combustion extrêmement violentes. Il s’agit en fait de processus d’oxydation à grande vitesse qui libèrent considérablement plus d’énergie thermique que la combustion des liquides combustibles et inflammables. Après une phase préliminaire d’incandescence, la combustion des poussières de métal déposées peut devenir rapide et intense. Si les poussières se dispersent et forment un nuage, de graves explosions peuvent se produire. L’intensité de la combustion de certains métaux et leur affinité avec l’oxygène sont telles qu’après s’être enflammés, ils continuent à brûler dans des milieux (par exemple, atmosphère d’azote, de dioxyde de carbone ou de vapeur d’eau) qui servent ordinairement à éteindre les feux de liquides et de solides combustibles.

L’extinction des feux de métaux est une tâche particulièrement difficile pour les sapeurs-pompiers. Le choix du produit et celui du procédé d’extinction sont d’une importance capitale. Les feux de métaux peuvent être maîtrisés s’ils sont découverts très tôt, et font l’objet d’une intervention rapide et bien menée de sapeurs-pompiers utilisant les méthodes les plus efficaces. On a intérêt dans ces cas à retirer des lieux les métaux et toutes les autres matières combustibles ou, pour le moins, à en réduire le plus possible les quantités.

Il y a lieu d’accorder une attention particulière à la protection contre les rayonnements en cas de combustion de métaux radioactifs (plutonium, uranium). Il faut prendre des mesures préventives pour éviter que des organismes vivants n’absorbent des produits de décomposition toxiques. Parce qu’ils réagissent violemment à l’eau, les métaux alcalins en combustion ne peuvent être éteints qu’avec des poudres extinctrices. Par ailleurs, on ne peut pas éteindre un feu de magnésium avec de l’eau, du dioxyde de carbone, des halons ou de l’azote. En fait, l’utilisation de ces agents peut rendre un sinistre beaucoup plus dangereux. Les seuls agents efficaces sont les gaz rares et, dans certains cas, le trifluorure de bore.

Les plastiques et le caoutchouc

Les plastiques sont des composés organiques macromoléculaires produits synthétiquement ou par modification de substances naturelles. La structure et la forme de ces composés, issus de réactions de polymérisation, de polyaddition ou de polycondensation, influent fortement sur leurs propriétés. Les thermoplastiques (polyamides, polycarbonates, polyesters, polystyrène, poly(chlorure de vinyle), poly(méthacrylate de méthyle)) ont des chaînes moléculaires linéaires ou ramifiées. Les élastomères (néoprène, polysulfures, isoprène, etc.) présentent quelques liaisons transversales, tandis que les plastiques thermodurcissables (polyalkydes, résines époxy, polyuréthanes, etc.) ont de nombreuses liaisons transversales.

Le caoutchouc naturel sert de matière première dans l’industrie du caoutchouc. Il est vulcanisé pour produire le caoutchouc industriel. Les caoutchoucs artificiels, dont la structure est semblable, sont des polymères et des copolymères de butadiène.

La gamme des produits de plastique et de caoutchouc utilisés dans presque tous les domaines de la vie ne cesse de croître. Grâce à leur grande diversité et à leurs excellentes propriétés techniques, ces produits servent à la fabrication d’éléments de charpente, de mobilier, de vêtements, de biens de consommation, de pièces automobiles et de machines.

Comme il s’agit de matières organiques, les plastiques et le caoutchouc sont combustibles. Pour décrire leurs propriétés à cet égard, on se sert d’un certain nombre de paramètres que l’on peut mesurer par des méthodes spéciales. A partir de ces paramètres, il est possible de déterminer le champ d’application de chaque produit et les mesures de sécurité incendie correspondantes. Ces paramètres sont la combustibilité, l’inflammabilité et la tendance à produire de la fumée et des gaz toxiques et à couler en brûlant.

Même si, dans beaucoup de cas, la température d’inflammation des plastiques est plus élevée que celle du bois ou d’autres matériaux, la plupart sont quand même plus faciles à enflammer et ils brûlent plus rapidement et avec une plus grande intensité. Les feux de plastiques sont souvent accompagnés de phénomènes qui entravent l’extinction, comme la production de grandes quantités de fumée opaque pouvant considérablement réduire la visibilité et de divers gaz toxiques (acide chlorhydrique, phosgène, monoxyde de carbone, acide cyanhydrique, gaz nitreux). Les thermoplastiques fondent et coulent sous l’effet de la chaleur et, selon leur emplacement (par exemple, s’ils sont intégrés ou accrochés au plafond), forment des gouttes qui demeurent dans la zone de combustion et peuvent mettre le feu à des matières combustibles se trouvant au-dessous.

L’amélioration des propriétés de combustion est un problème complexe qui préoccupe beaucoup les spécialistes de la chimie des plastiques. Les ignifugeants réduisent la combustibilité, élèvent la température d’inflammation et font baisser la vitesse de combustion et de propagation des flammes. Malheureusement, ils augmentent en même temps la quantité et l’opacité de la fumée ainsi que la toxicité des gaz produits en cas de combustion.

Les poussières

Si l’on ne considère que leur état physique, les poussières relèvent de la catégorie des solides, mais leurs propriétés physiques et chimiques diffèrent de celles des mêmes matières sous forme compacte. Chacun sait que les explosions de poussières peuvent causer des catastrophes dans l’industrie. Des matières normalement incombustibles, comme les métaux, peuvent, sous forme de poussières mélangées à de l’air, exploser au contact d’une source d’inflammation de faible énergie. Bien sûr, le danger d’explosion existe aussi dans le cas des poussières de matières combustibles.

Les poussières peuvent exploser non seulement lorsqu’elles sont en suspension dans l’air, mais aussi lorsqu’elles se sont déposées. De la chaleur peut s’accumuler dans des couches de poussières, donnant lieu à une combustion lente par suite de la réactivité accrue des particules et de leur conductivité thermique réduite. Les poussières peuvent alors être dispersées par des éclairs, ce qui accroît la possibilité d’une explosion.

Les fines particules en suspension présentent un danger encore plus grave. Comme les gaz et les vapeurs combustibles, les poussières ont une plage de concentration dans l’air dans laquelle une explosion peut se produire. Les limites inférieure et supérieure d’explosibilité et l’intervalle entre les deux points dépendent de la taille et de la distribution des particules. Si la concentration des poussières dépasse la limite supérieure d’explosion, une certaine proportion des particules n’est pas détruite par le feu; elle absorbe de l’énergie, permettant à la pression de l’explosion de demeurer inférieure au maximum. Le degré d’humidité de l’air a également une influence: s’il est élevé, la température d’inflammation du nuage de poussières augmente en proportion de la quantité de chaleur nécessaire à l’évaporation de l’humidité. Si des poussières inertes sont mélangées au nuage combustible existant, l’explosibilité du mélange poussières-air diminue. On peut obtenir le même effet en diluant l’air du mélange au moyen d’un gaz inerte, ce qui réduit la concentration de l’oxygène nécessaire à la combustion.

L’expérience montre que toutes les sources d’inflammation qui possèdent un minimum d’énergie peuvent enflammer des nuages de poussières (flamme nue, arc électrique, étincelle d’origine mécanique ou électrostatique, surfaces chaudes, etc.). D’après les résultats obtenus en laboratoire, l’énergie nécessaire pour enflammer des nuages de poussières est de 20 à 40 fois supérieure à celle qu’il faut pour mettre le feu à des mélanges de vapeurs combustibles et d’air.

Les facteurs qui influent sur le risque d’explosion associé aux dépôts de poussières sont les propriétés physiques et thermiques de la couche, la température d’incandescence des poussières et les propriétés de combustion des produits de décomposition libérés par la couche de poussières.

LES MESURES DE PRÉVENTION CONTRE L’INCENDIE

Peter F. Johnson

L’histoire nous apprend que le feu a servi à l’être humain pour se chauffer et faire cuire ses aliments, mais qu’il a aussi fait d’énormes ravages. Des incendies ont détruit d’innombrables maisons, d’imposants bâtiments quand ce n’est pas des villes entières.

L’une des premières mesures de prévention contre l’incendie a consisté à imposer l’extinction de tous les feux avant la tombée de la nuit. Ainsi, en 872, les autorités d’Oxford, en Angleterre, faisaient sonner une cloche au crépuscule pour rappeler aux habitants de la ville d’éteindre tous les feux à l’intérieur des maisons en prévision de la nuit (Bugbee, 1978). C’est d’ailleurs de là que vient le mot français couvre-feu.

L’incendie est souvent le résultat d’une action humaine qui permet à une source d’inflammation d’entrer en contact avec une substance combustible (par exemple, déchets de papier laissés près d’appareils de chauffage ou liquides volatils inflammables utilisés à proximité de flammes nues).

Pour qu’un feu prenne naissance, il faut un combustible, une source d’inflammation et un mécanisme quelconque pouvant mettre les deux en contact, en présence d’air ou d’un autre oxydant (comburant). Si l’on pouvait appliquer des stratégies capables de réduire la quantité de combustibles présents, d’éliminer les sources d’inflammation ou d’empêcher l’interaction entre le combustible et la source d’énergie, on réduirait d’autant le nombre d’incendies et, du même coup, le nombre des victimes et l’importance des dommages matériels. La prévention a pris de plus en plus d’importance, ces dernières années, en tant que moyen le plus rentable de faire face au problème des incendies. Il est souvent plus facile (et moins coûteux) d’empêcher un incendie d’éclater que de le maîtriser et de l’éteindre une fois qu’il s’est déclaré.

C’est ce qu’illustre le Fire Safety Concepts Tree (NFPA, 1991, 1995a), organigramme des concepts de sécurité incendie mis au point par l’Association nationale de protection contre l’incendie (National Fire Protection Association (NFPA)) aux Etats-Unis, qui montre que par une approche systématique des problèmes de sécurité incendie, il est possible d’atteindre des objectifs tels que la réduction du nombre de décès dus aux incendies en milieu de travail en prévenant l’incendie ou en maîtrisant ses effets.

La prévention des incendies requiert inévitablement de modifier le comportement humain. Elle implique une action de formation des travailleurs à la sécurité incendie, qui soit soutenue par la direction et s’appuie sur les manuels, les normes de formation et les matériels éducatifs les plus récents. Dans de nombreux pays, ces stratégies se fondent sur des mesures législatives qui imposent aux entreprises certains objectifs précis, dans le cadre de leurs obligations en matière de sécurité et de santé au travail.

Nous abordons plus loin la sensibilisation à la sécurité incendie. Pour leur part, les responsables du commerce et de l’industrie se rendent bien compte aujourd’hui de l’importance de la prévention. A cet égard, on utilise beaucoup, au niveau international, les sources documentaires suivantes: Loss Prevention in the Process Industries (Lees, 1980); Fire Prevention Code (NFPA, 1992); The Management of Health and Safety at Work Regulations (ECD, 1992); et Fire Protection Handbook de la NFPA (Cote, 1991). A ces documents s’ajoutent de nombreux règlements, normes et matériels de formation élaborés par les gouvernements nationaux, les entreprises et les compagnies d’assurances pour minimiser les pertes de vies et de biens.

La sensibilisation à la sécurité incendie

Si l’on veut que la sensibilisation à la sécurité incendie soit bien réelle, il faut que la sécurité fasse partie des politiques générales de l’entreprise et qu’un plan approprié soit mis en œuvre selon les étapes suivantes: a) phase de planification — définition des buts et objectifs; b) phase de conception et de mise en œuvre; et c) phase d’évaluation — contrôle de l’efficacité.

Les buts et les objectifs

Dans un important article consacré à la sensibilisation à la sécurité incendie, Gratton (1991) définit les différences entre les buts, les objectifs et les pratiques ou stratégies de mise en œuvre. Les buts sont des déclarations d’intention à caractère général qui peuvent être, par exemple, «de réduire le nombre d’incendies, donc de diminuer le nombre de victimes parmi les travailleurs, ainsi que les répercussions financières sur les entreprises».

Les deux aspects de cet objectif général concernant les personnes, d’une part, et les finances de l’entreprise, de l’autre, ne sont pas incompatibles. Les méthodes modernes de gestion des risques ont montré que le fait d’augmenter la sécurité des travailleurs par des mesures efficaces de contrôle des pertes peut être financièrement avantageux pour l’entreprise comme pour la collectivité.

Les buts ainsi définis doivent être traduits en objectifs précis de sécurité incendie pour une entreprise donnée et son personnel. Ces objectifs doivent être mesurables et consistent ordinairement en énoncés de ce genre:

Pour de nombreuses entreprises, il peut s’y ajouter des objectifs complémentaires, tels que de circonscrire les pertes d’exploitation dues à l’interruption des opérations ou de minimiser le risque d’être déclarées légalement responsables d’un accident.

Certaines entreprises ont tendance à considérer qu’il leur suffit de se conformer aux normes et aux codes locaux du bâtiment pour estimer qu’elles ont atteint leurs objectifs de sécurité incendie. Or, ces codes se limitent généralement aux mesures à prendre pour la sauvegarde de la vie humaine, en partant de l’hypothèse qu’il y aura toujours des incendies.

La conception moderne de la sécurité incendie admet qu’une sécurité absolue n’est pas un but réaliste, mais fixe en revanche un certain nombre d’objectifs mesurables visant à:

La conception et la mise en œuvre

La conception et la mise en œuvre de programmes de sensibilisation à la sécurité incendie dépendent dans une très large mesure de l’élaboration de stratégies bien planifiées et de mesures efficaces de gestion et de motivation des personnes. Ces programmes ne peuvent réussir sans un appui énergique et entier de la haute direction. Les stratégies susceptibles d’être adoptées à cet effet ont été définies par Koffel (1993) et par la NFPA, dans son Industrial Fire Hazards Handbook (Linville, 1990). Elles visent notamment à:

Voici quelques exemples internationaux de stratégies de mise en œuvre:

Il est absolument essentiel de mesurer l’efficacité des programmes de sensibilisation à la sécurité incendie. Les résultats de cette évaluation favorisent la poursuite du financement des programmes ainsi que leur développement et, le cas échéant, leur adaptation. C’est probablement aux Etats-Unis qu’on trouve le meilleur exemple de suivi et de succès dans la sensibilisation à la sécurité incendie. Le programme Learn Not to Burn® (Protégez-vous du feu), destiné à sensibiliser les jeunes Américains aux dangers des incendies, a été coordonné par la Division de l’éducation publique de la NFPA. Les travaux de suivi et d’analyse effectués en 1990 ont permis d’établir que 194 vies avaient été sauvées au total par suite de mesures de sauvegarde de la vie humaine apprises dans le cadre de programmes de sensibilisation à la sécurité incendie. Près de 30% des vies sauvées sont directement attribuables au programme Learn Not to Burn® susmentionné. Les experts estiment en outre que les détecteurs de fumée, dont l’usage tend à se généraliser dans les foyers, et les programmes de sensibilisation à la sécurité incendie développés aux Etats-Unis expliquent dans une large mesure la baisse du nombre de décès dus aux incendies domestiques, qui est tombé de 6 015 en 1978 à 4 050 en 1990 (NFPA, 1991).

L’ordre et la propreté dans l’industrie

Lees (1980) fait figure d’autorité internationale dans le domaine industriel. Selon lui, les risques d’accidents graves entraînant de nombreuses pertes de vies et de lourds dommages matériels sont aujourd’hui beaucoup plus importants qu’auparavant, dans un grand nombre de branches. Les incendies, les explosions et les dégagements de produits toxiques sont susceptibles de se produire sur une grande échelle, surtout dans les industries pétrochimique et nucléaire.

La prévention revêt donc une importance cruciale. Les installations industrielles modernes peuvent enregistrer de très bons résultats en matière de sécurité incendie grâce à des programmes bien gérés:

Higgins (1991) mentionne que le manuel Fire Protection Handbook de la NFPA est un guide utile traitant de l’importance de l’ordre et de la propreté pour la prévention des incendies dans les établissements commerciaux et industriels.

L’importance que revêt ce paramètre lorsqu’il s’agit de réduire la charge combustible (c’est-à-dire la quantité de combustibles présents dans les locaux) et de prévenir l’exposition aux sources d’inflammation est reconnue dans les outils informatiques modernes qui sont utilisés pour évaluer les risques d’incendie dans les locaux industriels. Le logiciel FREM (Fire Risk Evualuation Method, ou méthode d’évaluation des risques d’incendie) utilisé en Australie considère que l’ordre et la propreté sont un facteur clé pour la sécurité incendie (Keith, 1994).

Les appareils utilisant l’énergie thermique

Dans le commerce et dans l’industrie, les appareils qui emploient de l’énergie thermique sont notamment les fours, les chaudières, les séchoirs, les déshydrateurs, les dessiccateurs et les réservoirs de trempe.

Dans le manuel Industrial Fire Hazards Handbook de la NFPA, Simmons (1990) relève les risques suivants associés aux appareils de chauffage:

  1. Possibilité d’enflammer des matières combustibles entreposées à proximité.
  2. Risques associés à des combustibles imbrûlés ou à une combustion incomplète.
  3. Surchauffe occasionnant une défaillance du matériel.
  4. Inflammation de solvants, de solides ou d’autres matières combustibles en cours de traitement.

On peut réduire les risques d’incendie en veillant à assurer l’ordre et la propreté des installations tout en prévoyant des commandes et des verrouillages de sécurité, une formation et des tests pour les opérateurs et en effectuant les opérations de nettoyage et d’entretien prévues dans un programme efficace de prévention.

Des recommandations détaillées sont présentées dans le Fire Protection Handbook de la NFPA (Cote, 1991) pour les diverses catégories d’appareils utilisant de l’énergie thermique. Nous en présentons les grandes lignes dans les paragraphes suivants.

Les fours et les chaudières

Dans les fours et les chaudières, les incendies et les explosions sont souvent attribuables au combustible utilisé, aux substances volatiles libérées par le matériau traité ou à une combinaison des deux facteurs. Beaucoup de ces appareils fonctionnent à des températures comprises entre 500 et 1 000 °C, ce qui dépasse largement le point d’inflammation de la plupart des matières.

Les fours et les chaudières doivent être équipés de commandes et de verrouillages de sécurité empêchant l’accumulation et l’inflammation de gaz combustibles imbrûlés ou de produits résultant d’une combustion incomplète. En général, ces risques existent surtout au cours des opérations de mise en marche et d’arrêt. Une formation spéciale est donc essentielle pour que les opérateurs appliquent toujours les consignes de sécurité.

Un plan de sécurité incendie conçu pour prévenir la propagation du feu prévoit le plus souvent une construction incombustible des bâtiments, l’entreposage des matières combustibles à l’écart de l’équipement et un système quelconque d’extinction automatique.

Les fours de séchage et de cuisson

Ces appareils servent notamment au séchage du bois (Lataille, 1990) et à la cuisson des produits céramiques (Hrbacek, 1984).

Là encore, comme ce sont des appareils qui fonctionnent à haute température, ils constituent un danger pour tout ce qui les entoure. Une bonne conception prévoyant le maintien de distances de séparation adéquates et de bonnes pratiques de nettoyage et d’entretien sont essentielles pour prévenir les incendies.

Les séchoirs à bois présentent des risques supplémentaires parce que le bois constitue en soi une forte charge combustible et qu’il est souvent porté à des températures proches de sa température d’inflammation. Il est essentiel de nettoyer régulièrement les séchoirs pour éviter l’accumulation de déchets et de poussière de bois qui pourraient entrer en contact avec l’équipement de chauffage. On devrait de préférence utiliser des séchoirs de construction incombustible munis d’extincteurs automatiques et d’un bon circuit de ventilation.

Les déshydrateurs et les dessiccateurs

Ces appareils servent à réduire la teneur en humidité de produits agricoles tels que le lait, les œufs, les semences et le foin. Ils peuvent être à chauffage direct, c’est-à-dire que les produits de combustion entrent en contact avec les produits à sécher, ou à chauffage indirect. Dans les deux cas, ils doivent être munis de commandes permettant de couper l’arrivée de la chaleur en cas de hausse excessive de la température ou d’incendie dans l’appareil, dans le circuit d’échappement ou dans le convoyeur, ou encore en cas de défaillance du système de ventilation. Encore une fois, il est nécessaire de procéder à des nettoyages réguliers pour prévenir l’accumulation de substances pouvant prendre feu.

Les réservoirs de trempe

Les principes généraux de sécurité incendie applicables aux réservoirs de trempe ont été définis par Ostrowski (1991) et Watts (1990).

La trempe ou refroidissement contrôlé consiste à plonger un métal chauffé à haute température dans un réservoir rempli d’huile de trempe afin de le durcir ou de modifier autrement ses propriétés physiques.

Les réservoirs de trempe sont le plus souvent remplis d’une huile minérale combustible. L’huile doit être soigneusement choisie en fonction de chaque application, de façon que sa température d’inflammation soit sensiblement supérieure à la température que le réservoir peut atteindre lorsque les pièces métalliques chauffées y sont plongées.

Il est essentiel d’éviter le débordement de l’huile, ce qui impose de munir les réservoirs de régulateurs du niveau et de drains adéquats.

La cause la plus fréquente d’incendie dans les réservoirs de trempe est l’immersion partielle de pièces portées à haute température. Des convoyeurs ou autres dispositifs de transport appropriés permettent de prévenir ce risque.

Il faut en outre prévoir des moyens d’empêcher la température de l’huile de dépasser certaines limites et de prévenir toute pénétration d’eau à l’intérieur, pour éviter que l’huile ne déborde et cause ainsi d’importants incendies dans le réservoir et aux alentours.

Des installations spécialisées d’extinction automatique au dioxyde de carbone ou à poudre servent souvent à protéger la surface des réservoirs de trempe. On recommande aussi d’équiper le bâtiment d’un système d’extinction automatique à eau (sprinklers). Il est nécessaire, dans certains cas, de prévoir une protection spéciale des opérateurs qui travaillent à proximité des réservoirs. Cette protection consiste souvent en un système à eau pulvérisée.

Il est essentiel en tout premier lieu de donner aux travailleurs une formation adéquate leur permettant de réagir rapidement en cas d’urgence et surtout de se servir d’extincteurs portables.

Les équipements de l’industrie chimique

Les processus destinés à modifier chimiquement la nature de différentes substances ont souvent été la source de grandes catastrophes qui ont gravement endommagé des installations et causé de nombreuses victimes parmi les travailleurs et dans les localités voisines. Les risques associés aux usines de transformation chimique sont attribuables aux incendies, aux explosions et à la libération de produits chimiques toxiques. Les accidents sont souvent causés par des réactions chimiques non maîtrisées ou par l’inflammation de combustibles qui peuvent provoquer une onde de pression, libérer des rayonnements d’une grande intensité ou projeter des objets à de grandes distances.

Les opérations et les équipements des usines

La première étape de la conception consiste à comprendre les processus chimiques en cause et à en connaître le potentiel énergétique. Lees (1980) fait un exposé détaillé des étapes à entreprendre dans Loss Prevention in the Process Industries . Citons ici:

L’analyse des degrés de risque doit porter sur les points suivants:

Les lecteurs intéressés trouveront de plus amples renseignements sur les risques des transformations chimiques et sur leur prévention dans les ouvrages suivants: Plant Guidelines for Technical Management of Chemical Process Safety (AIChE, 1993); Sax’s Dangerous Properties of Industrial Materials (Lewis, 1992); et Industrial Fire Hazards Handbook de la NFPA (Linville, 1990).

Le choix de l’emplacement et la protection des installations

Une fois qu’on a précisé les risques d’incendie, d’explosion et de libération de produits toxiques et leurs conséquences possibles, on peut entreprendre de choisir l’emplacement des usines de transformation chimique.

Une fois de plus, Lees (1980) et Bradford (1991) proposent des lignes directrices sur le choix de l’emplacement des usines. Les installations doivent se trouver suffisamment à l’écart des localités voisines pour que ces dernières ne soient pas touchées par un éventuel accident industriel. La technique de l’évaluation quantitative des risques sert couramment à déterminer et réglementer les distances minimales à respecter dans le choix du site des usines de transformation chimique.

La catastrophe survenue en 1984 à Bhopal, en Inde, illustre bien les conséquences de l’implantation d’une usine de produits chimiques trop près d’une collectivité: les produits toxiques libérés par l’accident industriel ont fait plus d’un millier de victimes.

Le fait de prévoir des dégagements suffisants autour des usines de produits chimiques permet en outre de mieux combattre d’éventuels incendies, en les attaquant de tous les côtés, indépendamment de la direction du vent.

Les usines de produits chimiques doivent aussi être adéquatement protégées: salles de commande résistant aux explosions, refuges pour les travailleurs et suffisamment d’équipement de lutte contre l’incendie pour protéger les travailleurs et entreprendre sans délai des opérations efficaces d’extinction.

La maîtrise des déversements

Il importe de réduire le volume d’éventuels déversements de substances inflammables ou dangereuses grâce à une conception appropriée des procédés, à des vannes à sécurité intégrée et à un matériel efficace de détection et de contrôle. Si d’importants déversements se produisent quand même, il y a lieu de les limiter grâce à des espaces entourés de murs ou de terre dans lesquels les matières combustibles peuvent brûler sans danger si elles s’enflamment.

Il est courant que des incendies se déclarent dans des systèmes de drainage. Il faut donc porter une attention particulière aux drains et aux réseaux d’égout.

Les risques des échangeurs de chaleur

Les appareils qui transfèrent de la chaleur entre deux fluides à des températures différentes peuvent constituer une source d’incendie dans les usines de produits chimiques. Des températures locales excessives peuvent provoquer la décomposition et la combustion de nombreuses substances, ce qui peut entraîner la rupture de l’échangeur de chaleur et mettre en contact les deux fluides, déclenchant une violente réaction.

Des inspections et un entretien de haut niveau, ainsi que le nettoyage des échangeurs de chaleur sont essentiels à leur sécurité.

Les réacteurs

Un réacteur est un récipient dans lequel sont réalisées les réactions chimiques voulues. Il peut être de type continu ou discontinu, mais il nécessite dans les deux cas une conception spéciale. Les récipients doivent supporter les pressions pouvant résulter d’explosions ou de réactions non maîtrisées ou, à défaut, être munis de dispositifs de décharge et parfois d’un évent de détente d’urgence.

Parmi les mesures de sécurité à prendre dans le cas des réacteurs chimiques, il faut citer:

Le soudage et le découpage

Le document Loss Prevention Data Sheets de la Factory Mutual Engineering Corporation (FMEC, 1977) révèle que près de 10% des dommages matériels subis dans des installations industrielles découlent d’incidents faisant intervenir le soudage et le découpage de matériaux généralement métalliques. Il est clair que ces opérations présentent d’importants risques d’incendie du fait des étincelles produites et des températures élevées nécessaires pour faire fondre les métaux.

Le document susmentionné précise en outre que la plupart des incendies liés aux opérations de soudage et de découpage sont dus à l’allumage de liquides inflammables, de dépôts graisseux, de poussières combustibles et de bois. Les zones dans lesquelles ces incidents surviennent le plus souvent sont les locaux d’entreposage, les chantiers de construction, les installations en cours de réparation ou de modification et les systèmes d’évacuation de déchets.

Les étincelles produites par le soudage et le découpage peuvent être projetées à 10 m de distance et retomber sur des matières combustibles, déclenchant un feu couvant qui risque de donner lieu ultérieurement à des flammes et à un incendie.

Les opérations électriques

Le soudage et le découpage à l’arc sont des exemples d’opérations faisant appel à l’électricité pour produire un arc, qui constitue la source de chaleur utilisée pour faire fondre et se joindre des métaux. Les gerbes d’étincelles sont courantes. Il importe donc de protéger les travailleurs contre l’électrocution, les étincelles et le rayonnement intense dû à l’arc électrique.

Les opérations de soudage aux gaz et d’oxycoupage

Ces opérations utilisent la chaleur de combustion d’un gaz combustible mélangé à de l’oxygène pour produire une flamme à haute température pouvant faire fondre les métaux à joindre ou à couper. Selon Manz (1991), l’acétylène est le combustible le plus courant dans ces opérations à cause de la haute température de sa flamme (près de 3 000 °C).

La présence d’un gaz combustible et d’oxygène sous pression crée un important risque d’incendie, tant à cause des possibilités de combustion et d’explosion que parce que les bouteilles de gaz peuvent fuir. Il ne faut pas oublier, en effet, que des matières qui ne s’enflamment pas ou qui brûlent lentement à l’air peuvent brûler très intensément dans de l’oxygène pur.

Les précautions et les mesures de sécurité

Manz (1991) a relevé de bonnes pratiques de sécurité dans le manuel Fire Protection Handbook de la NFPA.

Ces pratiques comprennent les précautions et mesures de sécurité suivantes:

Des précautions particulières s’imposent lors du soudage ou du découpage de réservoirs ou de récipients ayant contenu des matières inflammables. Les lecteurs intéressés trouveront des renseignements utiles à cet égard dans le document Recommended Safe Practices for the Preparation for Welding and Cutting of Containers that have held Hazardous Substances de la Société américaine de soudage (American Welding Society (AWS)) (AWS, 1988).

Pour les travaux de construction et de réfection de bâtiments, un document britannique, Fire Prevention on Construction Sites (Loss Prevention Council, 1992), donne des renseignements utiles. On y trouvera un modèle de permis de travaux «par points chauds» permettant de contrôler les opérations de soudage et de découpage. Ce document peut servir à la direction de toute usine ou tout site industriel. Un modèle de permis du même genre figure dans la fiche signalétique sur le soudage et le découpage de la Factory Mutual Engineering Corporation (FMEC, 1977).

La protection contre la foudre

La foudre est une cause fréquente d’incendie et de décès dans beaucoup de pays. Aux Etats-Unis, par exemple, elle tue environ 240 personnes chaque année.

La foudre est une forme de décharge électrique entre des nuages chargés d’électricité statique et la terre. La fiche signalétique de la FMEC (1984) révèle qu’un coup de foudre peut donner lieu à un courant d’une intensité de 2 000 à 200 000 A sous l’effet d’une différence de potentiel de 5 à 50 millions de V entre les nuages et la terre.

La fréquence de la foudre varie selon le pays et la région en fonction du nombre annuel de jours d’orage de la localité. Les dégâts qu’elle cause dépendent dans une large mesure de l’état du sol, les dommages les plus graves se produisant dans les zones où la terre a une forte résistivité.

La protection des bâtiments

La norme 780 de la NFPA, Standard for the Installation of Lightning Protection Systems (NFPA, 1995b), définit les caractéristiques de conception permettant de protéger les bâtiments. Même si les aspects théoriques des décharges que représente la foudre ne sont pas encore complètement élucidés, le principe de base de la protection consiste à donner à la foudre un moyen de transmettre son énergie à la terre sans endommager le bâtiment à protéger. Par conséquent, les systèmes de protection contre la foudre ont deux fonctions:

A cet effet, les bâtiments doivent être munis:

Davis (1991) donne plus de détails sur la conception des paratonnerres dans le manuel Fire Protection Handbook de la NFPA (Cote, 1991). On trouvera également des renseignements à ce sujet dans le British Standard Code of Practice de l’Institut britannique de normalisation (British Standards Institute (BSI)) (BSI, 1992).

La foudre peut directement endommager les lignes de transmission aériennes, les transformateurs, les sous-stations extérieures et d’autres installations électriques. Les réseaux de distribution électrique peuvent également transmettre des tensions et des surintensités induites à l’intérieur de bâtiments, ce qui peut provoquer des incendies, des dommages matériels et de graves perturbations des opérations. Des dispositifs de protection contre les surtensions sont nécessaires pour renvoyer ces pointes de tension à la masse par l’intermédiaire de bonnes prises de terre.

L’utilisation accrue de matériels informatiques sensibles dans le commerce et l’industrie a rendu les opérations plus vulnérables aux surtensions transitoires induites dans les câbles de communication et de transport d’énergie de nombreux immeubles. Il importe donc de prévoir une protection adéquate contre les pointes de courant transitoires. On trouvera des renseignements détaillés sur cette question dans la norme BS 6651, The Protection of Structures Against Lightning , du BSI (BSI, 1992).

L’entretien

Un entretien adéquat des systèmes de protection contre la foudre est essentiel pour en maintenir l’efficacité. Il faut à cet égard porter une attention particulière aux prises de terre. Toute défaillance de ces dernières peut gravement compromettre l’efficacité de l’ensemble du système de protection.

LA PROTECTION PASSIVE CONTRE L’INCENDIE

Yngve Anderberg

La circonscription de l’incendie par compartimentage

La planification du bâtiment et du terrain

L’étude des aspects techniques de la sécurité incendie devrait commencer au tout début de la phase de conception, car c’est là un élément essentiel de la planification du bâtiment et de l’aménagement des lieux. Le concepteur sera ainsi en mesure d’incorporer dans ses plans les divers aspects de la protection contre l’incendie de façon beaucoup plus efficace et économique. Il devra tenir compte dans son projet aussi bien des fonctions et de l’aménagement intérieur du bâtiment que de son implantation sur le terrain. Or, les exigences fonctionnelles tendent à prendre de plus en plus le pas sur les exigences normatives des codes, ce qui nécessite le recours à divers experts dans ce domaine. Aussi, le concepteur du bâtiment devra-t-il prendre contact, dès le début du projet de construction, avec des spécialistes en sécurité incendie afin de:

Lorsqu’il doit élaborer le plan d’un bâtiment, tout architecte doit partir des caractéristiques du terrain pour adapter, en fonction de celles-ci, les aspects fonctionnels et techniques du bâtiment projeté. De la même manière, il lui incombe d’étudier les caractéristiques du site avant de prendre les décisions relatives à la sécurité incendie. L’ensemble des caractéristiques propres au site peut déterminer dans une large mesure le type de protection active et passive que peut recommander le spécialiste de la sécurité incendie. Il convient en effet de tenir compte des moyens de lutte contre le feu disponibles localement et du temps nécessaire aux sapeurs-pompiers pour atteindre le bâtiment. Le service d’incendie ne peut pas, à lui seul, assurer la protection complète du bâtiment et de ses occupants. Il doit pouvoir compter sur divers systèmes aussi bien actifs que passifs de sécurité incendie installés sur place pour assurer un degré raisonnable de protection contre les effets d’un incendie. D’une façon générale, ces opérations peuvent être regroupées sous les trois catégories suivantes: sauvetage, lutte contre l’incendie et protection des biens, la première priorité de n’importe quelle opération de lutte contre l’incendie étant évidemment d’évacuer tous les occupants avant que la situation ne devienne critique.

La conception de la structure des bâtiments à partir d’un classement ou de calculs

L’un des moyens courants de codifier les prescriptions en matière de protection contre le feu et de sécurité incendie consiste à effectuer un classement des bâtiments selon leur mode de construction, en fonction des matériaux utilisés pour la charpente ou la structure du bâtiment et du degré de résistance au feu de chacun de ces matériaux. Ce classement peut se faire sur la base d’essais effectués dans des fours conformément à la norme ISO 834 (l’action du feu étant caractérisée par la courbe standard température-temps), d’une combinaison d’essais et de calculs ou uniquement de calculs. On peut déterminer ainsi la résistance standard au feu des éléments porteurs ou des cloisons (c’est-à-dire leur aptitude à remplir certaines fonctions pendant 30, 60, 90 minutes, etc.). Ce classement (surtout s’il est fondé sur des essais) est une méthode simplifiée et prudente à laquelle on tend à substituer de plus en plus des méthodes de calcul reposant sur la fonction et tenant compte des effets d’incendies naturels pleinement établis. Toutefois, les essais de résistance au feu seront toujours nécessaires, mais ils peuvent être conçus d’une façon plus optimale et être combinés à des simulations sur ordinateur, ce qui permet d’en réduire considérablement le nombre. Au cours des essais de résistance au feu, les éléments porteurs sont généralement soumis à leur pleine charge nominale, même si, en pratique, leur facteur de charge est sensiblement inférieur la plupart du temps. Les critères d’acceptation dépendent de l’ensemble ou de l’élément testé. La résistance standard au feu est égale à l’intervalle de temps pendant lequel l’élément peut supporter le feu sans défaillance.

Dans les codes modernes basés sur la performance, l’objectif recherché pour ce qui est des structures et de la sécurité incendie est qu’elles soient optimales du point de vue de la protection contre le feu, en fonction de la gravité anticipée d’éventuels sinistres. Ces codes ont ouvert la voie à une conception basée sur des calculs grâce auxquels il est possible de prédire les températures et les effets structurels d’un cycle complet d’exposition au feu dans un compartiment (comprenant tant la période d’échauffement que la période de refroidissement qui suit). Ces calculs, qui sont fondés sur des incendies naturels, permettent de s’assurer que les éléments porteurs (essentiels à la stabilité du bâtiment) ainsi que l’ensemble de la structure ne céderont à aucun moment du cycle, y compris pendant la période de refroidissement.

Les recherches approfondies réalisées ces trente dernières années ont permis de développer différents modèles informatiques faisant appel aux propriétés mécaniques et thermiques des matériaux portés à haute température. Quelques modèles ont été validés au moyen de très nombreuses données expérimentales, ce qui permet de prédire assez exactement la résistance au feu des éléments de construction.

Le compartimentage

Dans un bâtiment, un compartiment à l’épreuve du feu est un espace s’étendant sur un ou plusieurs étages, qui est isolé du reste du bâtiment par des éléments séparatifs conçus pour empêcher la propagation du feu à l’extérieur du compartiment dans des conditions données d’exposition au feu. Ce compartimentage est important pour empêcher un incendie de s’étendre à d’autres locaux ou à l’ensemble du bâtiment. Les personnes et les biens qui se trouvent à l’extérieur du compartiment où l’incendie s’est déclaré sont à l’abri parce que le feu aura été éteint ou se sera éteint tout seul avant de les atteindre, ou parce que les éléments séparatifs du compartiment auront suffisamment retardé la propagation des flammes et de la fumée pour permettre d’évacuer tous les occupants.

La résistance au feu requise d’un compartiment dépend de l’usage auquel on le destine et de la gravité anticipée d’un incendie éventuel. Les éléments délimitant le compartiment sont conçus pour supporter sans défaillance l’incendie le plus grave que l’on aura anticipé ou pour retarder la propagation du feu jusqu’à ce que l’on ait eu le temps d’évacuer tous les occupants. Les éléments porteurs à l’intérieur du compartiment doivent résister au cycle complet du feu ou avoir une résistance nominale (exprimée en unités de temps) égale ou supérieure à celle des éléments délimitant le compartiment.

L’intégrité structurale pendant un incendie

Le maintien de l’intégrité structurale d’un compartiment pendant un incendie signifie que la structure de ce compartiment ne s’effondrera pas et que les éléments séparatifs empêcheront le feu et les flammes de se propager à l’extérieur. Il existe différents moyens d’évaluer la résistance au feu: classement basé sur l’essai normalisé de résistance au feu selon la norme ISO 834, combinaison d’essais et de calculs ou calculs seulement avec extrapolations informatiques basées sur les performances d’une structure après exposition réelle au feu.

Le revêtement intérieur

Le revêtement intérieur est constitué des matériaux qui forment la surface intérieure des murs, des plafonds et des planchers. On se sert de nombreux matériaux de revêtement (plâtre, gypse, bois, plastiques), qui jouent différents rôles: acoustique, isolation et protection contre l’usure et l’abrasion. Le revêtement intérieur intervient de quatre façons différentes dans un incendie: il peut modifier le rythme d’intensification du feu et, par conséquent, le temps nécessaire pour atteindre le stade de l’embrasement général, accélérer la propagation des flammes, accroître la quantité de chaleur produite en brûlant lui-même et dégager de la fumée et des gaz toxiques. Il est bien sûr préférable d’éviter les matériaux qui accélèrent la propagation du feu, augmentent la charge combustible ou produisent des quantités dangereuses de fumée et de gaz toxiques.

Le mouvement de la fumée

Au cours d’un incendie, il arrive fréquemment que la fumée aille bien au-delà des locaux qui brûlent. Elle peut envahir les cages d’escalier et d’ascenseur, empêchant l’évacuation des occupants et compromettant les opérations d’extinction. On admet aujourd’hui que la fumée est la principale cause de décès en cas d’incendie (voir figure 41.4).

Figure 41.4 Production de fumée au cours d'un incendie

Figure 41.4

Le mouvement de la fumée est influencé par l’effet naturel de cheminée, la force ascensionnelle des gaz de combustion, l’action du vent, les systèmes de ventilation à air pulsé et l’effet de piston des ascenseurs.

Par temps froid, l’air est animé d’un mouvement ascendant dans les conduits verticaux des bâtiments. Plus chaud que l’air extérieur et donc plus léger, l’air intérieur a tendance à monter dans les gaines et conduits verticaux. Ce phénomène est connu sous le nom d’effet cheminée . La différence de pression entre le conduit ou la gaine et l’extérieur, qui agit sur le mouvement de la fumée, est exprimée par l’équation:

equation

dans laquelle

ΔPSO = la différence de pression entre le conduit ou la gaine et l’extérieur

g = l’accélération de la pesanteur

Patm = la pression atmosphérique absolue

R = la constante universelle des gaz pour l’air

TO = la température absolue de l’air extérieur

TS = la température absolue de l’air à l’intérieur du conduit ou de la gaine

Z = l’altitude

La fumée à haute température qui se dégage d’un incendie est animée d’un mouvement ascendant parce qu’elle est plus légère que l’air ambiant. L’équation régissant la force ascensionnelle des gaz de combustion est semblable à celle de l’effet cheminée.

En plus de cette force ascensionnelle, l’énergie produite par un incendie peut déplacer la fumée sous l’effet de la dilatation. Comme l’air circule dans le compartiment à l’épreuve du feu, la fumée chaude y est distribuée. En négligeant la masse supplémentaire de combustible, on peut exprimer le rapport des débits volumétriques simplement par le rapport des températures absolues.

Le vent a un effet prononcé sur le mouvement de la fumée. Il ne faut pas non plus négliger l’effet de piston des ascenseurs: le déplacement de la cabine dans sa cage produit des pressions transitoires. Le système de chauffage, de ventilation et de climatisation (CVC) déplace aussi la fumée en cas d’incendie. Lorsqu’un feu se déclare dans une partie inoccupée d’un bâtiment, le système CVC peut transporter la fumée dans des locaux occupés. Il devrait par conséquent être conçu pour couper la ventilation ou passer à un mode spécial de désenfumage en cas d’incendie.

On peut maîtriser le mouvement de la fumée en recourant à l’un des moyens suivants: compartimentage, dilution, courant d’air, pressurisation ou contrôle de la force ascensionnelle.

L’évacuation des occupants

La conception des sorties

La conception des sorties devrait se fonder sur une évaluation globale de la protection contre l’incendie du bâtiment (voir figure 41.5).

Figure 41.5 Conception des moyens d'évacuation

Figure 41.5

Les occupants qui quittent un bâtiment en feu sont influencés par un certain nombre d’impressions au cours de l’évacuation. Ils ont à prendre plusieurs décisions dont peut dépendre leur vie. Bien sûr, les réactions peuvent être très différentes, selon les aptitudes physiques et mentales des occupants et les conditions dans lesquelles ils se trouvent.

Le bâtiment influe également sur les décisions prises en fonction des voies d’évacuation qu’il offre, de la clarté du balisage et de l’efficacité des systèmes de sécurité installés. En fait, c’est la propagation des flammes et de la fumée qui agit le plus sur les décisions des occupants. La fumée limite la visibilité et rend l’atmosphère irrespirable. De plus, le rayonnement thermique de l’incendie et des flammes crée de grands espaces que les personnes ne peuvent pas traverser pour quitter les lieux, ce qui augmente les risques.

Pour concevoir les moyens d’évacuation, il importe de se familiariser d’abord avec les réactions des gens face à un incendie et de comprendre leurs schémas de déplacement.

Le temps d’évacuation se subdivise en trois parties: temps d’avertissement, temps de réaction et temps de sortie. Le temps d’avertissement dépend de l’existence d’un système d’alarme incendie dans le bâtiment, de l’aptitude des occupants à comprendre la situation ou du mode de compartimentage des locaux. Le temps de réaction est déterminé par l’aptitude des occupants à prendre des décisions, les caractéristiques de l’incendie (comme la quantité de chaleur et de fumée) et la conception des moyens d’évacuation. Enfin, le temps de sortie dépend des endroits du bâtiment où se forment des foules et de la façon dont les gens agissent dans diverses situations.

Des études réalisées dans des immeubles particuliers dont les occupants n’avaient pas de difficultés à se déplacer ont révélé que le flux des gens qui quittent un bâtiment présente certaines caractéristiques d’écoulement reproductibles. L’existence de telles caractéristiques a favorisé le recours à la simulation et à la modélisation sur ordinateur dans la conception des sorties.

Les distances à parcourir pour l’évacuation d’un bâtiment dépendent des risques d’incendie que présente son contenu. Plus les risques sont grands, plus la distance à franchir pour quitter le bâtiment doit être courte.

L’évacuation d’un bâtiment nécessite l’existence d’un trajet de sortie sûr. Il faut donc prévoir un certain nombre de trajets d’évacuation bien conçus et d’une capacité suffisante. A chaque endroit du bâtiment, il faudrait que les occupants puissent emprunter au moins deux trajets de sortie, compte tenu du fait que l’incendie, la fumée, les caractéristiques des occupants et bien d’autres facteurs peuvent empêcher d’emprunter l’un d’eux. Ceux-ci doivent être protégés contre l’incendie, la chaleur et la fumée pendant la durée de l’évacuation. Par conséquent, il est nécessaire que les codes de construction tiennent compte de la protection passive en fonction de l’évacuation et, bien sûr, de la protection contre l’incendie. Un bâtiment doit pouvoir supporter les situations critiques mentionnées dans les codes au sujet de l’évacuation. Ainsi, le code suédois du bâtiment interdit que la couche de fumée aille au-dessous de 1,6 + 0,1H (H étant la hauteur totale du compartiment), et établit le rayonnement maximal à 10 kW/m2 pendant une courte durée et la température maximale de l’air respiré à 80 °C.

On peut procéder à une évacuation sûre si l’incendie est découvert assez tôt et si les occupants sont rapidement avertis grâce à un bon système de détection et d’alarme. Des sorties bien balisées facilitent sûrement l’évacuation. Il est également nécessaire d’établir une procédure d’évacuation et d’organiser des exercices d’incendie.

Le comportement humain en cas d’incendie

La réaction d’une personne lors d’un incendie dépend du rôle qu’elle joue, de son expérience antérieure, de son éducation et de sa personnalité. Elle dépend aussi de la façon dont elle perçoit la menace que représente l’incendie, des caractéristiques physiques et des moyens d’évacuation prévus dans le bâtiment et de la réaction des autres personnes qui se trouvent dans la même situation. Des études et des interviews détaillées, réalisées sur une période de trente ans, ont permis de prouver que les réactions de panique et de manque d’adaptation à la situation sont rares et ne se produisent que dans des circonstances particulières. Le comportement le plus courant en cas d’incendie se fonde sur une analyse de l’information disponible, qui aboutit le plus souvent à la coopération et à l’altruisme.

On a constaté que le comportement humain passe par un certain nombre de phases connues, mais peut emprunter différents chemins entre deux étapes données. En bref, un incendie fait passer par trois grandes phases:

  1. La personne capte des indications initiales, essaie de les confirmer ou les interprète mal.
  2. Une fois que l’incendie est visible, la personne tente d’obtenir plus de renseignements, de contacter d’autres personnes ou de s’en aller.
  3. Par la suite, la personne affronte l’incendie, agit avec d’autres personnes ou s’enfuit.

L’activité pratiquée avant l’incendie joue un rôle important. Ainsi, le fait de se livrer à une activité courante (par exemple, prendre un repas dans un restaurant) a des effets considérables sur le comportement.

La réception des signaux d’avertissement est souvent fonction de l’activité pratiquée avant l’incendie. A cet égard, il y a probablement des différences entre les deux sexes, les femmes étant plus susceptibles de capter des bruits et des odeurs, même faibles. Il y a également des différences dues au rôle dans la réaction initiale aux signaux d’avertissement. Ainsi, dans un incendie domestique, si c’est la femme qui a capté les premiers signaux et est allée aux renseignements, l’homme, une fois averti, aura tendance à vouloir «jeter un coup d’œil», ce qui retardera les décisions suivantes. Dans de grands établissements, le signal peut consister en une alarme incendie. L’information peut aussi provenir d’autres personnes et on a pu constater, dans ce cas, qu’elle ne favorise pas un comportement adéquat.

Certaines personnes peuvent ne pas s’être rendu compte qu’il y avait un incendie. Pour comprendre leur comportement, il faut savoir si elles ont ou non évalué correctement la situation.

Une fois que l’on a pris conscience du sinistre, la phase de «préparation» se déclenche. La destination particulière du bâtiment a probablement une grande influence sur le développement de cette phase, qui comprend, dans l’ordre chronologique, les étapes d’avertissement, d’exploration et de retrait.

La phase d’«action», qui est la dernière, dépend du rôle, de la destination du bâtiment ainsi que du comportement et de l’expérience antérieurs. Elle peut comporter une évacuation rapide ou des mesures efficaces de lutte contre l’incendie.

Les systèmes de transport à l’intérieur d’un bâtiment

Les systèmes de transport d’un bâtiment doivent être considérés dès l’étape de la conception et, dans la mesure du possible, être intégrés dans l’ensemble de la conception de la sécurité incendie. Les risques qu’ils présentent doivent être inclus dans toute étude préalable de planification et de protection contre l’incendie.

Les systèmes de transport tels que les ascenseurs et les escaliers mécaniques rendent possible la construction d’immeubles de grande hauteur. Dans ce type d’immeubles, les cages d’ascenseur peuvent favoriser la propagation des flammes et de la fumée. En revanche, les ascenseurs peuvent être utiles pour y lutter contre l’incendie.

Les systèmes de transport peuvent créer des problèmes dangereux et compliqués de sécurité incendie. Une cage d’ascenseur joue en effet le rôle de cheminée ou de conduit de fumée parce que les gaz chauds ont tendance à monter. L’effet cheminée permet en général à la fumée et aux produits de combustion de passer des étages inférieurs aux étages supérieurs.

Les immeubles de grande hauteur posent des problèmes nouveaux et différents aux services d’incendie, surtout en ce qui concerne l’utilisation des ascenseurs en cas d’urgence. Les ascenseurs sont dangereux pendant un incendie pour plusieurs raisons:

  1. Des occupants peuvent pousser le bouton d’appel des ascenseurs dans un corridor et attendre l’arrivée d’une cabine qui ne viendra peut-être jamais, perdant ainsi un temps précieux.
  2. Les ascenseurs ne font pas de différence entre les cabines ou entre les étages d’où provient un appel et peuvent s’arrêter à un étage déjà envahi par les flammes.
  3. Les ascenseurs ne se mettent pas en marche tant que la porte de la cabine et celle de l’étage ne sont pas fermées. La panique peut amener un nombre excessif de passagers à entrer dans une cabine, bloquant ainsi les portes et par conséquent tout mouvement de l’ascenseur.
  4. Si l’incendie coupe l’alimentation en électricité, les passagers de l’ascenseur seront pris au piège (voir figure 41.6).

Figure 41.6 Pictogramme avec mise en garde concernant l'utilisation des ascenseurs

Figure 41.6

Les exercices d’évacuation et la formation des occupants

Un bon balisage des trajets de sortie facilite l’évacuation, mais ne garantit pas la sécurité des occupants en cas de sinistre. Des exercices d’incendie sont nécessaires pour assurer une évacuation ordonnée. Ils sont essentiels dans les écoles, les établissements de soins, les établissements où vivent des pensionnaires et les industries où les risques d’incendie sont élevés. Ainsi, des exercices doivent être organisés à l’intention des employés des hôtels et des grandes entreprises. Les exercices d’évacuation permettent d’éviter la confusion et de faire sortir tous les occupants.

On devrait désigner les employés chargés de contrôler la sûreté des trajets de sortie, de compter les occupants une fois qu’ils ont quitté la zone de l’incendie, de chercher les retardataires et d’interdire aux gens de retourner à l’intérieur du bâtiment. Ils devraient également pouvoir reconnaître le signal d’évacuation et connaître les trajets de sortie à emprunter. Le trajet principal et le trajet secondaire devraient être établis et tous les employés devraient recevoir la formation nécessaire pour emprunter l’un ou l’autre. Après chaque exercice, les cadres compétents devraient tenir une réunion pour évaluer le succès de l’opération et résoudre tout problème qui se serait posé.

LA PROTECTION ACTIVE CONTRE L’INCENDIE

Gary Taylor

La protection des personnes et des biens

Le rôle premier de toute mesure de protection contre l’incendie est d’assurer un degré de sécurité adéquat aux occupants d’un bâtiment. C’est pour cette raison que, dans la plupart des pays, les prescriptions légales de sécurité incendie se fondent sur la sauvegarde de la vie humaine. Les caractéristiques de protection des biens sont destinées à limiter les dommages matériels. Dans beaucoup de cas, les deux objectifs sont complémentaires. En fait, un propriétaire qui craint de perdre des biens, des fonctions opérationnelles ou le contenu d’un bâtiment peut décider de mettre en œuvre des mesures allant au-delà du minimum nécessaire pour protéger la vie des occupants.

Les systèmes de détection et d’alarme incendie

Un système de détection et d’alarme incendie a pour but de déceler automatiquement un incendie et d’avertir les occupants du danger. C’est l’avertissement sonore ou visuel produit par le système qui donne le signal d’évacuation. Cela est particulièrement important dans les grands bâtiments et les immeubles à étages multiples dont les occupants pourraient ne pas être conscients du danger et là où il est peu probable ou difficile qu’un occupant donne l’alerte aux autres.

Les éléments de base d’un système de détection et d’alarme

Un système de détection et d’alarme incendie comprend quelques-uns ou la totalité des éléments suivants:

  1. Une commande centrale du système.
  2. Une alimentation primaire ou principale en courant électrique.
  3. Une alimentation secondaire (de secours) en courant électrique: piles, batterie d’accumulateurs ou groupe électrogène de secours.
  4. Des dispositifs de déclenchement d’alarme (détecteurs automatiques d’incendie, postes manuels ou extincteurs automatiques) branchés sur les «circuits déclencheurs» de la commande centrale du système.
  5. Des dispositifs de signalisation d’alarme, comme des sonneries ou des lampes, branchés sur les «circuits de signalisation» de la commande centrale du système.
  6. Des commandes auxiliaires d’asservissement permettant, par exemple, de couper la ventilation, branchées sur les circuits de sortie de la commande centrale du système.
  7. Une téléalarme branchée sur un service extérieur, comme le service local d’incendie ou une centrale de télésurveillance.
  8. Des circuits de commande permettant d’activer un système de protection contre l’incendie ou un système de désenfumage.

Les systèmes de désenfumage

Les systèmes de désenfumage permettent de réduire le risque de voir la fumée d’un incendie envahir les trajets de sortie pendant l’évacuation des occupants du bâtiment. En général, des systèmes de ventilation forcée servent à envoyer de l’air frais dans les trajets de sortie. On recourt le plus souvent à cette méthode pour pressuriser les cages d’escalier et les grandes cours intérieures.

Les extincteurs portatifs et les robinets d’incendie armés

Des extincteurs portatifs et des robinets d’incendie armés sont mis à la disposition des occupants pour leur permettre de combattre les feux naissants (voir figure 41.7). Il ne faudrait cependant pas encourager les occupants à s’en servir à moins qu’ils n’aient reçu une formation spéciale. Dans tous les cas, les opérateurs devraient prendre garde à ne pas se placer dans une situation qui bloquerait l’accès aux trajets de sortie. Même si un feu semble tout petit, la première mesure à prendre est toujours d’avertir les autres occupants du danger et de demander l’aide du service officiel d’incendie.

Figure 41.7 Extincteurs portatifs

Figure 41.7

Les extincteurs automatiques à eau

Les extincteurs automatiques à eau comprennent une source d’alimentation en eau, des vannes et des canalisations de distribution aboutissant à des diffuseurs (sprinklers ou gicleurs) automatiques (voir figure 41.8). Même si les systèmes actuels sont essentiellement conçus pour s’opposer à la propagation du feu, l’expérience montre que dans de nombreux cas ils peuvent éteindre complètement l’incendie.

Figure 41.8 Installation type d'extinction automatique avec sources d'eau, bouches
d'incendie extérieures et canalisations souterraines

Figure 41.8

On croit souvent à tort que tous les diffuseurs d’un système d’extinction automatique s’ouvrent simultanément en cas d’incendie. En fait, chaque diffuseur est conçu pour ne s’ouvrir que si la température monte suffisamment pour indiquer la présence d’un feu à proximité. L’eau ne s’écoule alors que par le ou les diffuseurs qui se sont ouverts. Cela assure une utilisation efficace de l’eau d’extinction et limite les dégâts qu’elle peut occasionner.

L’alimentation en eau

L’eau destinée à un système d’extinction automatique doit avoir en tout temps une pression et un débit suffisants pour assurer un fonctionnement sûr en cas d’incendie. Si les réseaux d’eau publics ne satisfont pas à cette exigence, il faut disposer d’un réservoir ou de pompes pouvant fournir de l’eau en quantité et à une pression suffisantes.

Les vannes d’arrêt

Les vannes d’arrêt doivent être maintenues en position d’ouverture. On peut souvent en surveiller la position au moyen d’interrupteurs de surveillance qui déclenchent un signal de dérangement ou de surveillance sur le panneau de commande d’alarme incendie en cas de fermeture de la vanne. S’il est impossible d’installer un dispositif de surveillance de ce genre, il faut sceller les vannes en position ouverte.

Les canalisations

L’eau s’écoule à travers un réseau de canalisations, généralement suspendu au plafond et muni à intervalles réguliers de diffuseurs d’extinction. Les canalisations utilisées devraient être d’un type pouvant supporter une pression de fonctionnement d’au moins 1 200 kPa. Si elles risquent d’être exposées au feu, leurs raccords devraient consister en joints mécaniques vissés à bride ou être brasés.

Les diffuseurs d’extinction (sprinklers ou gicleurs)

Un diffuseur d’extinction consiste en un orifice obturé par un élément déclencheur thermosensible et surmonté d’un déflecteur de pulvérisation. La forme du jet d’eau et la distance entre les diffuseurs successifs doivent assurer une couverture complète du local protégé.

Les installations d’extinction spéciales

On se sert d’installations d’extinction spéciales si les systèmes à eau classiques ne peuvent pas assurer une protection adéquate ou lorsqu’on juge inacceptable le risque de dégâts dus à l’eau. Dans beaucoup de cas où les dégâts constituent la première préoccupation, les installations spéciales s’ajoutent aux extincteurs automatiques à eau, mais sont conçues pour se déclencher très rapidement avant que l’incendie ne se soit trop étendu.

Les installations spéciales à eau et à additifs

Les systèmes à eau pulvérisée

Les systèmes d’extinction à eau pulvérisée augmentent l’efficacité de l’eau en la subdivisant en très fines gouttelettes. Ainsi, la superficie de l’eau en contact avec le feu est plus grande, ce qui accroît sa capacité relative d’absorption thermique. Ce type de système sert souvent à refroidir de grands récipients sous pression, comme les sphères de butane, pour les protéger contre l’exposition à un incendie qui a pris naissance dans une zone voisine. Le système est semblable à un système d’extinction automatique à eau classique, sauf que les diffuseurs sont ouverts en permanence et qu’un dispositif de détection distinct ou à manœuvre manuelle ouvre les vannes de commande, ce qui amène l’eau à tous les diffuseurs montés le long des canalisations.

Les systèmes d’extinction à mousse

Dans les systèmes à mousse, un émulseur liquide est injecté dans l’alimentation en eau en amont de la vanne de commande. L’émulseur est mélangé à de l’air soit par l’action mécanique de l’éjection, soit par aspiration d’air dans le dispositif d’éjection. L’air entraîné dans l’émulseur crée une mousse moins dense que la plupart des hydrocarbures, qui forme donc une couche isolante au-dessus des liquides inflammables, réduisant la propagation des vapeurs combustibles. L’eau qu’elle contient (teneur pouvant atteindre 97%) refroidit le combustible liquide, ce qui contribue à réduire l’émission de vapeurs combustibles et abaisse la température des objets assez chauds pour réamorcer la combustion.

Les systèmes d’extinction à agent gazeux

Les systèmes à dioxyde de carbone

Les systèmes à dioxyde de carbone consistent en une source de CO2, ordinairement constituée par un récipient à pression contenant du gaz carbonique liquéfié (voir figures 41.9 et 41.10). Le dioxyde de carbone est retenu dans le récipient par une vanne automatique qui s’ouvre en cas d’incendie sous l’action d’un système de détection distinct ou par manœuvre manuelle. Une fois libéré, le CO2 est projeté sur le feu par un tuyau et un diffuseur de décharge. Le CO2 éteint le feu en l’isolant de l’oxygène qui l’alimente. Les systèmes à dioxyde de carbone peuvent être conçus pour protéger des zones ouvertes comme la salle des presses d’une imprimerie ou, au contraire, des espaces clos comme la salle des machines d’un navire. Aux concentrations nécessaires à l’extinction d’un incendie, le CO2 est toxique. Il est donc indispensable de prendre des mesures particulières pour assurer l’évacuation de tous les occupants du local protégé avant la libération du gaz. Des signaux d’alarme et d’autres dispositifs de sécurité doivent être prévus au stade initial de conception du système pour assurer la sécurité des personnes travaillant dans le local. On considère le CO2 comme un agent d’extinction propre qui ne cause pas de dégâts accessoires et ne conduit pas l’électricité.

Figure 41.9 Schéma d'une installation d'extinction par noyage total au dioxyde de
carbone sous haute pression

Figure 41.9

Figure 41.10 Système d'extinction par noyage total installé dans un local à plancher surélevé

Figure 41.10

Les systèmes d’extinction par gaz inertes

Les systèmes d’extinction par gaz inertes contiennent en général un mélange d’azote et d’argon auquel on ajoute parfois un faible pourcentage de dioxyde de carbone. Les mélanges de gaz inertes éteignent l’incendie en réduisant la teneur en oxygène de l’espace protégé. On ne peut donc les utiliser que dans des espaces clos. Leur caractéristique très particulière est de réduire suffisamment la concentration en oxygène pour éteindre différents types d’incendies, sans pour autant créer un danger immédiat pour les occupants. Les gaz inertes sont comprimés et conservés dans des récipients à pression. Le système d’extinction fonctionne sur le même principe que les systèmes à dioxyde de carbone, sauf que, pour protéger un local donné, il faut un plus grand nombre de récipients de gaz inertes parce qu’on ne peut pas liquéfier ces gaz par compression.

Les systèmes d’extinction aux halons

Les halons 1301, 1211 et 2402 sont considérés comme des substances qui appauvrissent la couche d’ozone. On a donc cessé de produire ces agents extincteurs depuis 1994, conformément au Protocole de Montréal, accord international destiné à protéger la couche d’ozone. Le halon 1301 était le plus souvent utilisé dans les installations d’extinction fixes. Il était conservé sous pression à l’état liquide, de façon similaire au CO2. L’avantage du halon 1301 était que la pression d’entreposage était inférieure et que de très faibles concentrations dans l’air suffisaient pour éteindre un incendie. Les systèmes à halon 1301 ont servi avec succès dans des espaces entièrement clos où il était possible de maintenir une concentration d’extinction pendant une période suffisante pour éteindre un incendie. Pour la plupart des risques, les concentrations d’extinction ne mettaient pas immédiatement en danger les occupants. Des systèmes au halon 1301 ont encore beaucoup d’importantes applications pour lesquelles on n’a pas réussi à trouver d’autres agents efficaces. Il en est ainsi, par exemple, des aéronefs commerciaux et militaires et de certains endroits spéciaux où, pour prévenir des explosions, il faut établir des concentrations d’inertage pour protéger d’éventuels occupants. Le halon des systèmes d’extinction qui ne sont plus utilisés devrait être mis à la disposition des personnes qui doivent s’en servir pour des applications critiques. On contribuerait ainsi à éliminer le besoin de produire ces agents nuisibles à l’environnement et à protéger la couche d’ozone.

Les systèmes aux halocarbures

Les agents halocarbonés ont été mis au point à cause des préoccupations environnementales causées par les halons. Ces agents varient considérablement entre eux par leur toxicité, leur impact environnemental, leur masse et leur volume, leur prix et l’existence d’installations d’extinction agréées pour les utiliser. Ils peuvent tous être conservés dans des récipients à pression sous forme de gaz liquéfiés par compression. Les installations ont une configuration semblable à celle des systèmes à dioxyde de carbone.

La conception, l’installation et l’entretien des systèmes actifs de sécurité incendie

La conception, l’installation et l’entretien de ces systèmes doivent être confiés à des spécialistes. Les responsables de l’achat, de l’installation, de l’inspection, de la mise à l’épreuve, de l’approbation et de l’entretien de ce type d’équipement doivent souvent consulter des experts en sécurité incendie pour bien s’acquitter de leurs fonctions.

Autres renseignements

Cette partie de l’Encyclopédie présente un aperçu très bref et limité des choix qui existent en matière de protection active contre l’incendie. Il est conseillé aux lecteurs désireux d’obtenir de plus amples renseignements sur la question de s’adresser à leur association nationale de sécurité incendie, à leur assureur ou au bureau de prévention du service local d’incendie.

L’ORGANISATION DE LA PROTECTION CONTRE L’INCENDIE

S.K. Dheri

Le service privé d’intervention d’urgence

Le profit étant l’objectif premier de toute entreprise, une gestion efficace et dynamique et la continuité de la production sont à cette fin deux objectifs essentiels. Toute interruption de la production, quelle qu’en soit la raison, ne peut que diminuer les bénéfices. Si elle résulte d’un incendie ou d’une explosion, cette interruption peut être suffisamment longue pour paralyser toute l’entreprise.

On fait très souvent valoir que les biens sont assurés et que les pertes éventuelles dues à l’incendie seront remboursées par la compagnie d’assurances. Il ne faut pas perdre de vue que l’assurance est uniquement un moyen de répartir les effets destructeurs des sinistres sur autant d’assurés que possible. Elle ne peut compenser les pertes subies à l’échelle nationale. De plus, elle ne peut ni garantir la continuité de la production ni éliminer ou minimiser les pertes indirectes.

Il est donc utile que la direction de l’entreprise réunisse une information complète sur les risques d’incendie et d’explosion qui peuvent survenir, qu’elle évalue les pertes potentielles et mette en œuvre des mesures adéquates de protection destinées à prévenir les sinistres. Il est nécessaire à cet effet d’organiser l’intervention d’urgence à l’interne.

La planification de l’urgence

Il convient, autant que faire se peut, de prévoir l’éventualité d’une intervention d’urgence dès le stade de la planification, de la gérer progressivement depuis le choix du site jusqu’au lancement de la production et d’en poursuivre l’organisation par la suite.

Le succès de ces mesures d’urgence dépend beaucoup de la participation de tous les travailleurs et des différents échelons de la direction. C’est un fait à ne pas sous-estimer au moment de la planification.

Nous présentons ci-après les divers aspects de l’élaboration d’un plan d’urgence. Pour de plus amples renseignements, le lecteur est invité à consulter le manuel Fire Protection Handbook de l’Association nationale de protection contre l’incendie (National Fire Protection Association (NFPA)) aux Etats-Unis, ou tout autre ouvrage faisant autorité dans ce domaine (Cote, 1991).

Première étape

Entreprendre la mise au point du plan d’urgence en prenant les mesures suivantes:

  1. Déterminer et évaluer les risques d’incendie et d’explosion qu’impliquent le transport, la manutention et l’entreposage de chacune des matières premières, de chaque produit intermédiaire et produit fini et de chaque procédé industriel, puis établir des mesures préventives détaillées de nature à supprimer ou à minimiser les risques ainsi définis.
  2. Déterminer les spécifications auxquelles doivent se conformer les installations et les matériels de sécurité incendie, ainsi que les étapes au cours desquelles chaque élément sera mis en place.
  3. Rédiger les cahiers des charges auxquels les installations et le matériel de sécurité incendie doivent satisfaire.

Deuxième étape

Evaluer ce qui suit:

  1. La disponibilité d’un approvisionnement en eau suffisant pour répondre aux besoins de la sécurité incendie, en plus de ceux de la production industrielle et de la consommation domestique.
  2. L’exposition du site à des catastrophes naturelles (inondations, séismes, pluies torrentielles, etc.).
  3. L’environnement, c’est-à-dire la nature et les biens environnants, ainsi que les risques qui les menacent en cas d’incendie ou d’explosion.
  4. L’existence de services d’incendie privés et publics, la distance à laquelle ils se trouvent, l’adaptation de leurs systèmes d’extinction aux risques à couvrir et la possibilité d’y recourir en cas d’urgence.
  5. L’aide sur laquelle on pourrait compter de la part des services d’incendie se trouvant à proximité, compte tenu des obstacles existants: passages à niveau, étendues d’eau à traverser, capacité et largeur des ponts à franchir par rapport aux caractéristiques des engins de lutte contre l’incendie, densité de la circulation, etc.
  6. L’environnement sociopolitique, c’est-à-dire le taux de criminalité et les activités politiques qui pourraient troubler l’ordre public.

Troisième étape

Dresser le plan d’ensemble et le plan d’exécution et déterminer les spécifications des matériaux de construction. Exécuter ensuite les tâches suivantes:

  1. Circonscrire chaque atelier, lieu de travail, etc., par des murs résistants au feu, des portes coupe-feu, etc.
  2. Déterminer les éléments du bâtiment ou de la charpente qui doivent être résistants au feu.
  3. Veiller à ce que les colonnes porteuses en acier et les autres éléments de charpente ne soient pas exposés.
  4. Assurer une séparation suffisante du bâtiment, des structures et de l’équipement.
  5. Prévoir l’installation de prises d’incendie, d’extincteurs automatiques, etc., aux endroits voulus.
  6. Ménager un nombre suffisant de trajets d’accès sur le plan d’ensemble pour permettre aux engins de lutte contre l’incendie d’atteindre toutes les zones du bâtiment et toutes les sources d’eau pouvant servir à l’extinction.

Quatrième étape

Au cours de la construction, prendre les mesures suivantes:

  1. Informer le chef d’entreprise et son personnel sur les politiques de gestion des risques d’incendie et vérifier qu’ils s’y conforment.
  2. Soumettre à des essais complets toutes les installations et le matériel de sécurité incendie avant de les réceptionner.

Cinquième étape

Si la taille de l’établissement, ses risques ou son éloignement imposent la présence sur place d’un service d’incendie à plein temps, engager, équiper et former le personnel permanent nécessaire. Désigner également un officier pompier à temps plein.

Sixième étape

Pour obtenir la pleine collaboration de tous les employés, prendre les mesures suivantes:

  1. Former les membres du personnel à observer des précautions dans leur travail quotidien et à réagir d’une façon systématique en cas d’incendie ou d’explosion. Cette formation doit comprendre le maniement du matériel de lutte contre l’incendie.
  2. Veiller à l’observation stricte des mesures de sécurité incendie par tous les membres du personnel concernés grâce à des inspections périodiques.
  3. Faire inspecter et entretenir régulièrement tous les systèmes et matériels de protection contre l’incendie. Toute panne doit être réparée dans les plus brefs délais.

Gérer l’urgence

Pour éviter la confusion en cas d’urgence véritable, il est essentiel que chacun des membres de l’entreprise comprenne bien son rôle et celui des autres en cas de sinistre. A cet effet, il convient de préparer et de mettre en œuvre un plan d’urgence bien conçu et de veiller à ce que le personnel concerné le connaisse bien. Le plan doit énoncer avec clarté et précision les responsabilités de tous les intéressés et établir la chaîne de commandement. Le plan d’urgence doit comporter au minimum les mentions suivantes:

  1. Le nom de l’établissement industriel.
  2. L’adresse et le numéro de téléphone de l’établissement et le plan du site.
  3. Le but et l’objectif du plan d’urgence et sa date de mise en œuvre.
  4. La zone couverte.
  5. L’organisme d’intervention d’urgence et la chaîne de commandement, depuis le chef de l’établissement jusqu’aux échelons les plus bas.
  6. La liste des systèmes de protection contre l’incendie, appareils mobiles et appareils portatifs, avec les détails appropriés.
  7. Des renseignements détaillés sur l’aide à laquelle il peut être fait appel.
  8. Les dispositifs d’alarme et de communications en cas d’incendie.
  9. Les mesures à mettre en œuvre en cas d’urgence, en précisant à chaque fois et sans ambiguïté les mesures que doivent prendre:
  10. La chaîne de commandement sur les lieux du sinistre. Toutes les situations possibles devront être envisagées et il devra être indiqué clairement qui doit prendre le commandement dans chaque cas, en précisant ceux où il y a lieu de demander l’aide d’un autre organisme.
  11. Les mesures à prendre après un incendie, en précisant qui est responsable:

S’il existe un plan d’assistance mutuelle, des copies du plan d’urgence devront être transmises à tous les organismes participants en échange de leur propre plan d’urgence.

Les plans d’évacuation

Il peut s’avérer nécessaire de mettre en œuvre le plan d’urgence en raison soit d’un incendie, soit d’une explosion.

Une explosion peut ou non être suivie d’un incendie, mais, dans presque tous les cas, elle a un effet destructif qui peut, selon les circonstances, tuer ou blesser les personnes se trouvant à proximité ou causer des dommages matériels. Elle peut également provoquer un choc et de la confusion, imposant d’interrompre partiellement ou totalement les opérations de fabrication et d’évacuer un grand nombre de personnes. Si la situation n’est pas immédiatement maîtrisée et menée d’une manière ordonnée, elle peut dégénérer en panique et occasionner des pertes de vies et des dégâts matériels supplémentaires.

La fumée produite par l’incendie peut atteindre d’autres zones du bâtiment ou bloquer la sortie d’autres occupants, ce qui nécessitera une vaste opération de sauvetage et d’évacuation. Dans certains cas, une évacuation de ce genre sera à envisager si des personnes risquent d’être prises au piège de l’incendie.

Chaque fois qu’un grand nombre de personnes doivent se déplacer soudainement, des problèmes de circulation se posent, surtout si des routes, des rues ou d’autres lieux publics doivent être empruntés. Si ces problèmes n’ont pas été prévus et si l’on ne sait pas d’avance ce qu’il convient de faire, on risque de voir se développer des embouteillages qui vont entraver les efforts de sauvetage et de lutte contre l’incendie.

L’évacuation d’un grand nombre de personnes, surtout dans des immeubles de grande hauteur, peut aussi poser des problèmes. Pour que l’évacuation se fasse en bon ordre, il faut non seulement avoir prévu des trajets de sortie adéquats, mais également être en mesure d’évacuer les gens assez rapidement. Il importe d’accorder une attention particulière à l’évacuation des personnes handicapées.

Le plan d’urgence doit par conséquent comprendre des procédures détaillées d’évacuation qu’il convient de tester fréquemment dans le cadre d’exercices d’incendie et d’évacuation. Ces exercices sont aussi l’occasion de résoudre les problèmes de circulation. Tous les organismes et services participants et concernés doivent y prendre part, au moins de temps en temps. Après chaque exercice, une réunion doit être organisée pour faire le bilan, signaler et expliquer toutes les erreurs commises. Il faut également prendre des mesures pour prévenir la répétition des mêmes erreurs au cours des exercices suivants et lors d’incidents réels, le cas échéant en éliminant les difficultés et en modifiant le plan d’urgence.

Des dossiers complets sur tous les exercices d’incendie et d’évacuation devront être établis et tenus à jour.

Les services médicaux d’urgence

Les victimes d’un incendie ou d’une explosion doivent immédiatement recevoir les soins nécessaires ou être rapidement transportées à l’hôpital après avoir reçu les premiers soins.

La direction de l’entreprise doit créer un ou plusieurs postes de premiers soins et, le cas échéant, en fonction de la taille de l’établissement considéré et de ses risques particuliers, une ou plusieurs unités paramédicales mobiles. Les postes de premiers soins et les unités paramédicales doivent être dotés en permanence d’un personnel paramédical pleinement compétent.

Selon la taille de l’établissement et le nombre de travailleurs, il y aura également lieu de prévoir sur les lieux une ou plusieurs ambulances, avec le personnel nécessaire pour transporter les victimes éventuelles à l’hôpital. De plus, des dispositions doivent être prises pour pouvoir, au besoin, disposer rapidement d’autres ambulances.

Par ailleurs, si la taille de l’entreprise ou de l’établissement le justifie, un médecin devrait être présent en permanence pour répondre aux situations d’urgence.

Il convient en outre de conclure des arrangements préalables avec un ou plusieurs hôpitaux vers lesquels seront dirigées en priorité les victimes d’un éventuel sinistre. Les noms et numéros de téléphone de ces hôpitaux doivent figurer sur le plan d’urgence, qui doit en outre désigner une personne chargée de les avertir, afin qu’ils soient prêts à accueillir les victimes dès qu’un sinistre se produit.

Le rétablissement des systèmes

Il importe de rétablir tous les systèmes de sécurité incendie et d’urgence pour qu’ils soient toujours prêts à fonctionner, dès la fin de la situation d’urgence. A cet effet, un employé ou un service de l’entreprise doit être spécialement chargé de cette tâche et son nom doit figurer dans le plan d’urgence. Il faut également prévoir des vérifications systématiques permettant de s’assurer que tous les systèmes ont été convenablement rétablis.

Les relations avec le service public d’incendie

On ne peut pas s’attendre à ce que la direction d’une entreprise industrielle prévoie tous les cas d’urgence possibles et se prémunisse contre chacun d’entre eux. De toute façon, les considérations financières l’interdiraient. Même si les méthodes les plus modernes de gestion des risques d’incendie ont été mises en place, il y a toujours des situations dans lesquelles ces installations ne suffisent pas. Pour de tels cas, il est utile de prévoir des mesures d’assistance mutuelle avec le service public d’incendie. Une bonne liaison avec ce service est nécessaire pour que la direction sache sur quelle aide elle peut compter si un sinistre se déclare. De plus, le service public d’incendie doit se familiariser avec les risques particuliers de l’entreprise considérée pour savoir à quoi s’attendre en cas d’urgence. Des échanges fréquents avec ce service public sont utiles à cet effet.

Les produits dangereux

En cas de déversement, les sapeurs-pompiers appelés sur les lieux pourraient ne pas connaître les risques des produits dangereux utilisés dans l’établissement. Un déversement accidentel de ces produits ou des imprudences commises en les manipulant ou en les entreposant pourraient créer des situations dangereuses pour la santé des personnes présentes ou occasionner de graves incendies ou explosions. Comme il est difficile de se souvenir des risques associés à tous les produits, on a donc conçu des moyens faciles d’identification des différents produits au moyen d’étiquettes ou d’inscriptions faciles à reconnaître.

L’identification des produits dangereux

Chaque pays a ses propres règles d’étiquetage des produits dangereux pour fins d’entreposage, de manipulation et de transport, différents services étant en général chargés de l’application de ces règles. Il est bien sûr essentiel de respecter la réglementation locale, mais il est également souhaitable de mettre au point un système reconnu et appliqué à l’échelle internationale pour l’identification des produits dangereux. La NFPA, aux Etats-Unis, a mis au point un système de ce genre qui impose de fixer ou d’apposer bien en vue sur les contenants de produits dangereux des étiquettes distinctives indiquant clairement la nature et l’importance du risque par rapport à la santé, à l’inflammabilité et à la réactivité. Il est également possible de mentionner sur ces étiquettes d’éventuels dangers particuliers auxquels le produit peut exposer les sapeurs-pompiers. La norme 704 de la NFPA, intitulée Standard System for the Identification of the Fire Hazards of Materials (NFPA, 1991), explique les différents degrés de risque. Dans le système de la NFPA, les risques sont répartis entre les catégories suivantes: les risques pour la santé , l’inflammabilité et la réactivité (instabilité) .

Les risques pour la santé

Les risques pour la santé comprennent toutes les blessures et lésions qu’une substance peut causer par contact ou par absorption dans l’organisme. Ces risques peuvent découler des propriétés inhérentes à la substance ou des produits toxiques qu’engendre sa combustion ou sa décomposition. Le degré de risque est attribué d’après le risque le plus important qui peut résulter d’un incendie ou d’une autre situation d’urgence. Il indique aux sapeurs-pompiers s’ils peuvent faire leur travail dans des vêtements ordinaires ou s’ils doivent porter une tenue de protection spéciale ou un appareil de protection respiratoire.

Le degré de risque se mesure sur une échelle de 4 à 0, le 4 désignant un risque grave et le 0, peu ou pas de risque.

L’inflammabilité

L’inflammabilité se mesure à la facilité avec laquelle une substance peut prendre feu et brûler. On reconnaît que les produits ont, à cet égard, des propriétés qui varient selon les conditions. Autrement dit, certaines substances peuvent être inflammables dans des conditions données et ne plus l’être dans d’autres. La forme et les propriétés inhérentes au produit influent sur le degré de risque, qui est attribué sur la même base que le risque pour la santé.

La réactivité (instabilité)

Les substances qui peuvent par elles-mêmes libérer de l’énergie (par réaction spontanée ou par polymérisation, par exemple) ou qui réagissent violemment ou explosent au contact de l’eau, d’autres agents extincteurs ou d’autres substances présentent un risque de réactivité.

La violence de la réaction peut augmenter en cas d’élévation de la température ou de la pression ou lorsque la substance entre en contact avec certaines autres substances pour former un mélange combustible-comburant ou encore qu’elle se trouve en présence d’une substance incompatible, d’un contaminant sensibilisateur ou d’un catalyseur.

Le degré de risque associé à la réactivité dépend de la facilité avec laquelle la réaction se déclenche, du taux de production de l’énergie et de la quantité d’énergie libérée. On peut, dans le cadre de cette catégorie de risque, donner des renseignements complémentaires, par exemple au sujet de la radioactivité ou de l’incompatibilité avec l’eau ou d’autres agents extincteurs.

L’étiquette d’avertissement d’un produit dangereux porte un losange dans lequel s’inscrivent quatre losanges plus petits (voir figure 41.11).

Figure 41.11 Panneau d'avertissement prévu dans la norme NFPA 704

Figure 41.11

Le losange supérieur correspond au risque pour la santé, celui de gauche à l’inflammabilité, celui de droite à la réactivité et celui du bas à d’autres risques particuliers, comme la radioactivité ou une incompatibilité particulière avec l’eau.

A cette disposition peut s’ajouter un code de couleurs. Il peut s’agir de la couleur de fond de chaque losange ou de la couleur du chiffre identifiant chaque catégorie de risque. Le bleu correspond au risque pour la santé, le rouge à l’inflammabilité, le jaune à la réactivité et le blanc aux risques particuliers.

Les précautions contre les risques des produits dangereux

Selon la nature des produits dangereux employés dans l’établissement industriel, il est nécessaire de se procurer l’équipement de protection et les agents extincteurs spéciaux appropriés, y compris l’équipement de protection à utiliser lors de l’application de ces agents extincteurs.

Il faut également former tous les travailleurs à prendre les précautions nécessaires et à suivre les procédures prescrites pour affronter tout incident qui se produirait lors de la manipulation des différents types de produits dangereux utilisés. Les travailleurs doivent en outre connaître le sens des panneaux et étiquettes d’identification.

Les sapeurs-pompiers et les travailleurs doivent par ailleurs avoir reçu la formation voulue pour se servir correctement des vêtements de protection et des appareils de protection respiratoire et appliquer d’éventuelles techniques spéciales de lutte contre l’incendie. Il faut maintenir la vigilance de tout le personnel concerné afin qu’il soit prêt à affronter toute urgence grâce à de fréquents exercices dont le compte rendu devrait être conservé.

Pour faire face aux urgences graves et à leurs effets sur les sapeurs-pompiers, il devrait être possible de faire appel à un médecin pour prendre immédiatement les mesures nécessaires lorsqu’une personne s’expose à une contamination dangereuse parce qu’elle ne peut pas faire autrement. Toutes les personnes touchées doivent recevoir sur-le-champ les soins nécessaires.

Des dispositions adéquates doivent également être prises pour établir au besoin un centre de décontamination sur les lieux. Il faut alors se conformer aux procédures appropriées de décontamination.

La gestion des déchets

L’industrie produit une grande quantité de déchets dans le cadre de ses opérations courantes ou par suite d’accidents qui surviennent lors de la manipulation, du transport et de l’entreposage de marchandises. Ces déchets peuvent être inflammables, toxiques, corrosifs, pyrophoriques, radioactifs ou susceptibles de donner lieu à des réactions chimiques, selon l’industrie et la nature des marchandises en question. Dans la plupart des cas, si on ne prend pas les mesures nécessaires pour éliminer ces déchets dans des conditions sûres, ils peuvent mettre en danger la vie d’humains et d’animaux, polluer l’environnement ou provoquer des incendies et des explosions entraînant des dégâts matériels. Par conséquent, une connaissance approfondie des propriétés physiques et chimiques des déchets, ainsi que des avantages et inconvénients des différentes méthodes d’élimination est importante du double point de vue de l’économie et de la sécurité.

Nous présentons ci-dessous un bref résumé des caractéristiques des déchets industriels:

  1. La plupart des déchets industriels sont dangereux et peuvent avoir des effets inattendus aussi bien pendant qu’après leur élimination. Il faut par conséquent examiner soigneusement leur nature et leurs caractéristiques pour en connaître les incidences à court et à long terme et pour choisir en conséquence la méthode d’élimination.
  2. Le fait de mélanger les déchets de deux produits apparemment inoffensifs peut créer des risques imprévus par suite d’interactions chimiques ou physiques.
  3. On peut évaluer les risques que posent des liquides inflammables en considérant leur point d’éclair, leur température d’inflammation, leurs limites d’inflammabilité et l’énergie nécessaire pour amorcer leur combustion. Dans le cas des solides, la taille des particules est un autre facteur important à considérer.
  4. La plupart des vapeurs inflammables sont plus lourdes que l’air. Ces vapeurs, ainsi que les gaz inflammables plus lourds que l’air qui peuvent être libérés accidentellement durant la collecte et l’élimination ou pendant la manutention et le transport, peuvent franchir des distances considérables sous l’effet du vent ou s’accumuler dans des zones basses sous l’effet de la gravité. Au contact d’une source d’inflammation, les vapeurs et les gaz prennent feu, provoquant un retour de flamme vers la source. Les grands déversements de liquides inflammables, particulièrement dangereux à cet égard, peuvent nécessiter l’évacuation de la population locale.
  5. Les substances pyrophoriques, telles que les alkyles d’aluminium, s’enflamment spontanément au contact de l’air. Il est donc nécessaire de prendre des précautions particulières au cours de la manipulation, du transport, de l’entreposage et de l’élimination de telles substances, ces opérations devant de préférence être exécutées dans une atmosphère d’azote.
  6. Certaines substances, telles que le potassium, le sodium et les alkyles d’aluminium, réagissent violemment au contact de l’eau ou d’une atmosphère humide et brûlent alors très intensément. La poudre de bronze dégage également une chaleur considérable en présence d’humidité.
  7. La présence d’agents oxydants puissants peut provoquer une combustion rapide ou même l’explosion de substances organiques. Des chiffons ou d’autres matières imbibés d’huiles végétales ou de terpènes présentent un risque de combustion spontanée par suite de l’oxydation des huiles et d’une accumulation de chaleur pouvant porter la température au point d’inflammation.
  8. Bon nombre de substances sont corrosives et peuvent brûler la peau ou d’autres tissus vivants et endommager des matériaux de construction, surtout les métaux, affaiblissant les charpentes et les bâtiments qu’elles soutiennent.
  9. Certaines substances toxiques peuvent empoisonner les humains et les animaux par contact avec la peau, par inhalation ou par contamination des aliments ou de l’eau. La toxicité de ces substances peut être très brève ou durer très longtemps. Enfouies ou brûlées, elles peuvent contaminer des cours d’eau ou affecter des animaux ou des travailleurs.
  10. Les substances toxiques déversées en cours de traitement, de transport (y compris lors d’accidents), de manutention ou d’entreposage, ainsi que les gaz toxiques libérés dans l’atmosphère peuvent toucher le personnel d’urgence et d’autres membres du public. Les risques sont encore plus graves si la substance déversée peut se vaporiser à la température ambiante, parce que les vapeurs produites peuvent être emportées à de grandes distances sous l’effet du vent ou de la gravité.
  11. Certaines substances peuvent dégager une odeur forte, âcre, piquante ou désagréable soit par elles-mêmes, soit lorsqu’elles brûlent à l’air. Dans les deux cas, ces substances constituent une nuisance, même si elles ne sont pas toxiques. Il faut alors les éliminer par incinération s’il est impossible de les recueillir pour recyclage. Tout comme les substances odorantes ne sont pas nécessairement toxiques, des substances inodores ou à odeur agréable peuvent être nocives.
  12. Certaines substances, comme les explosifs, les feux d’artifice, les peroxydes organiques et quelques autres produits chimiques, sont sensibles à la température ou aux chocs et peuvent causer des explosions dévastatrices si elles ne sont pas manipulées avec le soin nécessaire ou si elles sont mélangées à d’autres produits. Ces substances doivent par conséquent être soigneusement tenues à l’écart et détruites dans des conditions contrôlées.
  13. Les déchets contaminés par la radioactivité peuvent être aussi dangereux que des produits radioactifs. Leur élimination nécessite des connaissances spécialisées. On peut obtenir des conseils pour l’élimination de tels déchets en s’adressant à l’organisme national responsable de l’énergie nucléaire.

Les méthodes employées pour éliminer les déchets industriels et les déchets découlant de situations d’urgence comprennent la biodégradation , l’enfouissement , l’incinération , la mise en décharge contrôlée , la transformation en paillis , la combustion à l’air libre , la pyrolyse et le recours à un entrepreneur en élimination de déchets industriels . Nous expliquons brièvement ces méthodes dans les paragraphes qui suivent.

La biodégradation

De nombreux produits chimiques sont complètement détruits en 6 à 24 mois lorsqu’ils sont mélangés à de la terre végétale prise dans les 15 cm de la couche supérieure du sol. Le phénomène de la biodégradation est dû à l’action des bactéries du sol. Ces dernières ne peuvent cependant pas s’attaquer ainsi à toutes les substances.

L’enfouissement

On se débarrasse souvent des déchets, notamment des déchets chimiques, par enfouissement. C’est là une pratique dangereuse lorsqu’il s’agit de produits chimiques actifs parce que, avec le temps, la substance enfouie peut finir par se retrouver à la surface ou par atteindre la nappe phréatique ou des cours d’eau en raison du ruissellement des eaux de pluie. Elle peut alors avoir des effets nocifs si elle contamine de l’eau qui est ensuite consommée par des humains ou des animaux. On a enregistré des cas de contamination 40 ans après l’enfouissement de produits chimiques nocifs.

L’incinération

L’incinération compte parmi les méthodes les plus sûres et les plus efficaces d’élimination des déchets, pourvu qu’elle se fasse dans des conditions contrôlées dans un incinérateur bien conçu. Toutefois, il faut s’assurer que les substances contenues dans les déchets sont propres à l’incinération et qu’elles ne causent aucun problème de fonctionnement ni ne présentent aucun risque particulier. Presque tous les incinérateurs industriels doivent être munis d’un équipement antiémission bien choisi et installé après considération de la composition des effluents de l’incinérateur pendant la combustion des déchets industriels.

Il convient de surveiller attentivement la température de fonctionnement de l’incinérateur, pour éviter les hausses excessives dues à la présence d’importantes quantités d’éléments volatils et à la nature des déchets incinérés. La structure de l’incinérateur risque de souffrir de températures trop élevées et de la corrosion qui finit par se produire avec le temps. Le système d’épuration de l’effluent devra, lui aussi, faire l’objet d’inspections périodiques afin de détecter les signes de corrosion dus au contact avec des acides et d’un entretien régulier pour assurer son bon fonctionnement.

La mise en décharge contrôlée

On se sert souvent de terres basses et de dépressions pour y accumuler des déchets jusqu’à ce que le site atteigne le niveau du terrain environnant. On nivelle alors l’emplacement, on le couvre de terre et on le tasse fortement. On peut ensuite l’utiliser pour construire des bâtiments ou à d’autres fins.

Pour obtenir des résultats satisfaisants, il faut soigneusement choisir le site en tenant compte de la proximité de pipelines, de tuyaux d’égout, de lignes électriques, de puits de pétrole ou de gaz, de mines et d’autres obstacles. On mélange ensuite les déchets à de la terre et on procède à un épandage régulier dans la dépression ou dans une large tranchée. Chaque couche doit être compactée par des moyens mécaniques avant l’addition d’une nouvelle couche.

D’ordinaire, on recouvre les déchets d’une couche de terre de 50 cm que l’on compacte en laissant suffisamment d’ouvertures pour éviter l’accumulation des gaz produits par l’activité biologique dans les déchets. Il faut également prévoir un drainage adéquat de la décharge.

Selon la composition des déchets, il peut y avoir un risque de combustion spontanée. Dans ce cas, la décharge doit être clôturée et gardée jusqu’à ce que les probabilités d’inflammation deviennent très faibles. On doit également prendre des dispositions pour éteindre tout incendie qui se déclarerait dans les déchets.

La transformation en paillis

On a fait quelques tentatives de recyclage de polymères sous forme de paillis (matières en vrac destinées à protéger les racines des plantes) en déchiquetant les déchets en petits fragments ou en granules. Sous cette forme, les polymères se dégradent très lentement. Leurs effets sur le sol sont donc purement physiques. Cette méthode d’élimination des déchets n’a cependant pas été utilisée sur une grande échelle.

La combustion à l’air libre

Le brûlage des déchets à l’air libre est une source de pollution atmosphérique. Il présente également des risques d’incendie, les flammes pouvant s’étendre à des biens ou à des terrains voisins. Les contenants peuvent également exploser et, si les déchets contiennent des substances radioactives, l’opération peut avoir des effets physiologiques nocifs. C’est la raison pour laquelle cette méthode d’élimination a été interdite dans certains pays. En fait, ses inconvénients en font une méthode à déconseiller.

La pyrolyse

Il est possible de récupérer certains composés par distillation des produits obtenus par pyrolyse (décomposition chimique sous l’action de la chaleur) de polymères et de substances organiques. Toutefois, cette méthode n’est pas encore très répandue.

Le recours à un entrepreneur en élimination de déchets industriels

C’est probablement la méthode la plus commode. Il importe de ne choisir que des entrepreneurs compétents ayant l’expérience de l’élimination des déchets industriels et des produits dangereux. Ces derniers doivent être soigneusement séparés du reste des déchets et être éliminés par des moyens distincts.

Les catégories particulières de substances

Voici quelques exemples des produits dangereux que l’on retrouve souvent aujourd’hui dans l’industrie: 1) métaux combustibles et réactifs (magnésium, potassium, lithium, sodium, titane et zirconium); 2) déchets combustibles; 3) huiles siccatives; 4) liquides inflammables et solvants dérivés de déchets; 5) comburants (liquides et solides); 6) matières radioactives. Ces produits nécessitent une manutention et des précautions spéciales devant faire l’objet d’un examen soigneux. Pour de plus amples renseignements sur l’identification des produits dangereux et les risques de différentes substances utilisées dans l’industrie, les lecteurs intéressés peuvent consulter les ouvrages suivants: Fire Protection Handbook (Cote, 1991) et Sax’s Dangerous Properties of Industrial Materials (Lewis, 1992).

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