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Chapitre 102 - Les transports et l'entreposage

GÉNÉRALITÉS

LaMont Byrd

Le secteur des transports comprend les activités de transport de voyageurs et de marchandises dans le monde entier. Il se caractérise par la complexité de sa structure et la place centrale qu’il occupe dans l’économie au plan local, national ou mondial.

L’importance économique

Le secteur des transports revêt une importance fondamentale pour la viabilité économique des pays et joue un rôle clé dans des domaines tels que l’emploi, la consommation de matières premières et de biens manufacturés, les investissements privés ou publics et la création de ressources fiscales.

Dans la plupart des pays industriels, le transport représente de 2 à 12% des emplois rémunérés (Bureau international du Travail (BIT), 1992). Pour les Etats-Unis seulement, selon le ministère des Transports (US Department of Transportation (USDOT)), les entreprises du secteur routier et assimilé employaient en 1993 quelque 7,8 millions de salariés (USDOT, 1995). La part du transport dans le produit national brut (PNB) et son incidence sur le marché de l’emploi en général ont tendance à diminuer avec l’augmentation du revenu national.

Le secteur des transports figure également parmi les principaux consommateurs de matières premières et de produits finis dans la plupart des pays industriels. Aux Etats-Unis, par exemple, il absorbe environ 71% de l’ensemble de la production de caoutchouc, 66% du pétrole raffiné, 24% du zinc, 23% du ciment, 23% des produits sidérurgiques, 11% du cuivre et 16% de l’aluminium (Sampson, Farris et Shrock, 1990).

Dans les pays industriels, les fonds privés ou publics investis dans l’acquisition de camions, navires, avions, terminaux, entrepôts et autres équipements et installations se chiffrent à des centaines de milliards de dollars E.-U.

Le secteur des transports est également une source très importante de recettes fiscales. Le transport de voyageurs et de marchandises est souvent lourdement taxé dans les pays industriels (Sampson, Farris et Shrock, 1990; Gentry, Semeijn et Vellenga, 1995). Il s’agit essentiellement de taxes sur les carburants perçues sur l’essence et le gazole, et d’impôts indirects frappant les contrats de transport de fret et les titres de transport de voyageurs, ce qui représente des centaines de milliards de dollars E.-U. par an.

L’évolution du secteur

Au début de l’ère des transports, le mode dominant était dicté dans une large mesure par la géographie. Puis, avec les progrès des techniques de construction, il est devenu possible de s’affranchir des obstacles naturels qui avaient entravé jusque-là le développement des transports. Les modes dominants ont donc évolué au rythme des progrès techniques.

Au départ, le transport maritime était le principal mode utilisé pour le fret et les passagers. Par la suite, la possibilité d’emprunter les grandes voies d’eau et la construction de canaux et d’écluses ont entraîné une forte augmentation des transports intérieurs par voie d’eau. Vers la fin du XIXe siècle, le chemin de fer devenait à son tour le mode de transport dominant. Son aptitude à franchir des obstacles naturels tels que monts et vallées, grâce aux tunnels et aux ponts, offrait une souplesse supérieure aux voies d’eau. En outre, le transport par rail était pratiquement insensible aux aléas météorologiques en période hivernale.

De nombreux gouvernements ont compris l’intérêt stratégique et économique du transport ferroviaire et décidé d’octroyer des aides financières aux compagnies de chemin de fer pour faciliter l’expansion des réseaux ferrés.

Au début du XXe siècle, le développement du moteur à explosion, conjugué à l’utilisation croissante des véhicules à moteur, a permis l’émergence et l’essor du transport routier. Cette croissance fut facilitée par l’extension du réseau routier, permettant de réaliser le transport de porte à porte. Il devint évident que la souplesse des transports routiers dépassait de loin celle du chemin de fer ou de la voie d’eau. En outre, les progrès enregistrés dans la construction des infrastructures routières et la conception des moteurs à explosion étaient tels que, dans de nombreuses parties du monde, les vitesses d’acheminement étaient meilleures par la route que par le rail. C’est ainsi que le transport routier devint le mode de transport le plus utilisé, tant pour le fret que pour les voyageurs.

L’évolution du secteur des transports s’est poursuivie avec l’avènement de l’aviation. Les avions furent utilisés pour la première fois pendant la deuxième guerre mondiale pour acheminer du fret et des passagers. Au départ, ils servaient essentiellement au transport de troupes et du courrier mais, avec les progrès de la construction aéronautique et l’augmentation du nombre de pilotes, le transport aérien devint de plus en plus populaire. Il s’agit aujourd’hui d’un mode extrêmement rapide et fiable. Toutefois, la part du fret transporté par avion, exprimée en tonnes, demeure très faible.

La structure du secteur

Les données sur la structure des réseaux ferrés des pays industriels sont en général fiables et comparables (BIT, 1992). En revanche, celles dont on dispose pour le mode routier le sont moins et n’ont guère évolué au cours des dernières décennies en ce qui concerne la voie d’eau, pour laquelle elles demeurent des sources sûres, abstraction faite des données émanant de pays émergents qui sont rares et peu fiables.

En Europe, la formation de blocs politiques et économiques a fortement marqué le secteur des transports. Celui-ci est dominé par la route pour les transports de voyageurs et de marchandises. Le secteur des transports routiers est essentiellement occupé par de petites entreprises à vocation nationale ou régionale exerçant une activité centrée sur le groupage. Ce secteur est fortement réglementé et très fragmenté. Depuis le début des années soixante-dix, le volume total du fret transporté par la route a augmenté de 240%, alors que le transport par rail subissait un déclin de l’ordre de 8% (Violland, 1996). Il convient toutefois de noter qu’un certain nombre de pays européens s’emploient activement à l’amélioration de la qualité des services ferroviaires et au développement du transport combiné.

La route reste le mode de transport dominant aux Etats-Unis, où le ministère des Transports signalait par le biais de son Bureau des transports routiers (Office of Motor Carriers) que, en 1993, plus de 335 000 entreprises utilisaient des camions de taille moyenne et au-delà (USDOT, 1995). Cette statistique englobait les grandes entreprises effectuant des transports pour leur propre compte, les petites entreprises privées et les entreprises de transport pour le compte d’autrui ou les entreprises sous-traitantes, dans le cadre de l’acheminement de lots complets ou de groupages. La plupart des parcs correspondants (58%) ne comptaient pas plus de six camions. Ces entreprises exploitent un parc comprenant 1,7 million d’ensembles routiers, 4,4 millions de poids lourds de catégorie moyenne ou élevée ne comportant qu’un élément et 3,8 millions de remorques. La taille du réseau routier des Etats-Unis a augmenté de 2% environ entre 1980 et 1989 (BIT, 1992).

Le déclin des compagnies ferroviaires aux Etats-Unis s’explique essentiellement par le fait que certaines lignes ont perdu leur statut de classe 1 (attribué en fonction du chiffre d’affaires) et que d’autres lignes peu rentables ont été abandonnées. En revanche, le Canada a vu la taille de son réseau ferré augmenter d’environ 40%, principalement par suite d’un réaménagement du classement des lignes, alors que son réseau routier a subi une contraction de 9% (BIT, 1992).

Les pays industriels de la zone Asie-Pacifique sont dotés de réseaux routiers et ferroviaires de niveaux très différents, ce qui s’explique notamment par leur degré d’industrialisation très contrasté. C’est ainsi que la République de Corée possède des réseaux routier et ferroviaire qui s’apparentent à ceux de l’Europe, alors que ceux de la Malaisie sont moins importants en superficie, mais enregistrent des taux de croissance exceptionnels (supérieurs à 53% pour la route depuis 1980) (BIT, 1992).

Au Japon, le secteur des transports est fortement dominé par la route qui achemine 90,5% du tonnage total du fret japonais, contre 8,2% pour la voie maritime et 1,2% pour le rail (Magnier, 1996).

Les pays en développement d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ont en général des réseaux de transport insuffisants. Des efforts importants sont déployés en vue de leur modernisation, mais la croissance reste freinée par la pénurie de devises fortes, de main-d’œuvre qualifiée et d’équipements. L’expansion des réseaux de transport est notable au Venezuela, au Mexique et au Brésil.

Le Moyen-Orient a également connu une expansion qui s’est avérée spécialement marquée au Koweït et en Iran. Il devrait être noté que ces pays sont aux prises avec des difficultés particulières qui limitent le développement de leurs transports, en raison de leur superficie, de leur faible densité de population et de leur climat aride.

Les figures 102.1 et 102.2 donnent un aperçu de la longueur des réseaux ferroviaires et routiers de certains pays ou régions du monde.

Figure 102.1 Longueur des réseaux routiers en kilomètres, dn 1988-89

Figure 102.1

Figure 102.2 Longueur des réseaux de voies ferrées en kilomètres, en 1988-89

Figure 102.2

Les caractéristiques de la main-d’œuvre

Le secteur des transports représente une source importante d’emplois dans la plupart des pays, tant dans le secteur privé que dans le secteur public. Toutefois, à mesure que le revenu par habitant augmente, on constate que l’incidence des transports sur l’ensemble de l’emploi diminue. Le nombre total des travailleurs de ce secteur ne cesse de baisser depuis les années quatre-vingt, cette tendance étant due à plusieurs facteurs, en particulier le progrès technique et l’automatisation accrue des tâches liées à la construction, à la maintenance et à l’exploitation des systèmes de transports. En outre, de nombreux pays se sont dotés de législations qui ont eu pour effet de déréglementer des pans entiers du secteur des transports, ce qui a entraîné une diminution du nombre d’emplois.

Les personnes qui travaillent actuellement dans le secteur des transports doivent être hautement qualifiées. Etant donné les progrès techniques qui le caractérisent, une formation continue et un recyclage sont indispensables.

Problèmes de sécurité et de santé au travail dans le secteur des transports
et de l’entreposage

Le secteur des transports et de l’entreposage pose d’importants problèmes pour la sécurité et la santé des travailleurs. Ceux d’entre eux qui chargent, déchargent, stockent, empilent et manipulent des marchandises font face à des risques de troubles musculo-squelettiques, de glissements ou de chutes sur des surfaces raboteuses, irrégulières ou glissantes, ou encore à celui de heurts par des objets (voir figure 102.3). Les travailleurs qui conduisent ou entretiennent des véhicules sont en outre exposés à l’action toxique des carburants, des lubrifiants et des gaz d’échappement. Les conducteurs de trains ou de véhicules à moteur (sur les routes comme dans les entrepôts) et les pilotes d’avions, pour leur part, sont non seulement sujets à des troubles musculo-squelettiques et à une fatigue accrue, mais ont aussi davantage tendance à commettre des erreurs pouvant causer des accidents lorsque les sièges, pédales et pupitres de bord ne sont pas conçus de façon ergonomique.

Figure 102.3 Le soulèvement de colis au-dessus du niveau des épaules implique
des risques de nature ergonomique

Figure 102.3

L’ensemble des travailleurs, de même que la population, peuvent être exposés à des substances toxiques en cas de fuites, de déversements accidentels ou d’incendies. Etant donné que la plupart des tâches s’effectuent à l’extérieur, les travailleurs du secteur des transports et de l’entreposage sont également soumis aux écarts de température et aux intempéries, ce qui rend leur travail plus pénible et surtout plus dangereux. Dans l’aviation, les équipages doivent s’adapter en outre aux variations de la pression barométrique. Enfin, le bruit est une nuisance omniprésente pour les conducteurs de véhicules ou d’engins ou pour les personnes qui se trouvent à proximité.

Le stress

Il s’agit sans doute du risque le plus insidieux en milieu de travail; il peut avoir de nombreuses origines.

L’adaptation aux horaires de travail. De nombreux travailleurs des transports ont des horaires de travail irréguliers et doivent en assumer les contraintes; les équipages qui parcourent de longues distances dans le sens Est-Ouest ou vice versa doivent s’adapter aux changements de leurs rythmes circadiens; ces deux facteurs peuvent provoquer somnolence ou fatigue. Le risque d’atteintes fonctionnelles liées à la fatigue a conduit à réglementer le nombre d’heures ou de périodes de travail consécutives qui peuvent s’enchaîner sans repos. Ces règles s’appliquent en général aux équipages des avions ou aux agents des trains et, dans la plupart des pays, aux conducteurs d’autocars et aux chauffeurs de camions. Un grand nombre de chauffeurs travaillent soit en qualité d’entrepreneurs de transport indépendants, soit pour de petites entreprises et sont ainsi souvent contraints à enfreindre la loi pour des raisons économiques. A cela s’ajoutent les inévitables aléas liés à la circulation, aux conditions météorologiques ou aux accidents qui entraînent un dépassement du nombre d’heures de travail autorisé. A la suite d’initiatives prises par les compagnies aériennes, de grandes entreprises de transport ont désormais recours à des moyens informatiques pour assurer le contrôle des horaires de travail de leurs salariés et vérifier qu’ils respectent les dispositions légales en vigueur en s’efforçant de limiter les pertes de temps, pour les travailleurs comme pour les équipements.

Les horaires. Le transport de voyageurs et, dans une certaine mesure, celui du fret sont régis par des horaires comportant une indication des heures de départ et d’arrivée. Le respect impératif des horaires restreint notablement la marge de manœuvre des personnels de conduite ou de pilotage, et constitue souvent en soi un facteur de stress important.

Les relations avec le public. Il peut être extrêmement stressant, pour les personnes qui travaillent au contact de voyageurs dans les terminaux, aux guichets ou le long de la chaîne de transport de devoir satisfaire à des exigences parfois excessives, tant sur le fond que sur la forme. Les conducteurs routiers doivent faire preuve de vigilance vis-à-vis des autres véhicules, des responsables de la sécurité routière et des règles du code de la route.

Les accidents . Qu’ils soient dus à des défaillances de matériels, à des erreurs humaines ou aux conditions environnementales, les accidents dans le secteur des transports figurent souvent en tête de liste des accidents du travail mortels, et cela dans de nombreux pays. Même en l’absence de lésion grave, le syndrome de stress post-traumatique peut entraîner une incapacité majeure et prolongée et motiver parfois la reconversion de la victime.

L’isolement. De nombreux travailleurs des transports sont isolés et n’ont que de rares contacts avec d’autres personnes. C’est le cas des chauffeurs de camions et des opérateurs des centres de contrôle ou des postes d’aiguillages. Dès lors qu’ils sont confrontés à des difficultés et qu’ils cherchent à se faire seconder, ils peuvent en outre rencontrer des problèmes ou devoir attendre longtemps. Si le niveau d’activité baisse fortement, la monotonie peut entraîner un fléchissement de leur vigilance et être alors à l’origine d’accidents. Le fait de travailler seul, notamment pour les chauffeurs de taxi, de voitures de maître ou de camions de livraison, expose davantage aux agressions et autres formes de violence.

L’éloignement du domicile. Les travailleurs du secteur des transports restent souvent loin de chez eux pendant des jours ou des semaines (voire des mois dans les transports maritimes). Au stress lié à la nécessité d’effectuer régulièrement de tels déplacements, aux changements d’alimentation et de logement s’ajoute celui dû à la séparation d’avec la famille et les amis.

Les problèmes de santé

Dans la plupart des pays industriels, les travailleurs du secteur des transports, notamment les conducteurs et les personnels navigants techniques sont tenus, en vertu de la réglementation, de se soumettre à des tests d’aptitudes physiques et mentales au cours d’examens médicaux réguliers. On vérifie à cette occasion leur acuité visuelle et auditive, leur perception des couleurs, leur résistance musculaire, leur mobilité et s’ils sont sujets aux malaises. Des dispositions particulières permettent toutefois aux personnes atteintes de troubles ou de handicaps chroniques de continuer à travailler sans s’exposer à des risques ni en faire courir à d’autres (aux Etats-Unis, les employeurs sont tenus de prendre des dispositions de ce type en vertu de la loi sur les Américains porteurs de handicap (Americans with Disabilities Act)).

Les drogues et l’alcool

Les médicaments, achetés sur ordonnance ou en vente libre et destinés à traiter certaines pathologies (hypertension, anxiété et autres états hyperkinétiques, allergies, diabète, épilepsie, céphalées, rhinites, etc.) peuvent provoquer un état de somnolence et avoir des effets sur la vigilance, la vitesse de réaction, la coordination des mouvements, notamment lorsqu’ils sont pris avec des boissons alcoolisées. La dépendance vis-à-vis de l’alcool ou de la drogue est suffisamment fréquente parmi les travailleurs des transports pour que des programmes de dépistage librement consentis ou imposés par la législation aient été mis en œuvre.

Résumé

Les enjeux de la sécurité et de la santé au travail dans ce secteur sont d’une importance capitale non seulement pour les travailleurs eux-mêmes, mais pour la population en général, que celle-ci soit transportée ou simplement présente sur les lieux. La responsabilité de la sauvegarde de la sécurité et de la santé dans ce secteur relève donc à la fois des employeurs, des travailleurs, des syndicats et des pouvoirs publics, tous niveaux confondus.

Leon J. Warshaw

LE TRANSPORT AÉRIEN

LES OPÉRATIONS AÉROPORTUAIRES ET LE CONTRÔLE DE LA CIRCULATION AÉRIENNE

Christine Proctor, Edward A. Olmsted et E. Evrard*

* Certaines parties du texte sont une adaptation de l'article «Aviation – Ground personnel», de E. Evrard, publié dans la 3e édition de l'Encyclopaedia of Occupational Health and Safety.

Le transport aérien commercial suppose l’action conjointe de plusieurs acteurs parmi lesquels on peut ranger les autorités de tutelle, les autorités aéroportuaires, les compagnies aériennes et les constructeurs d’avions. Les autorités de tutelle s’impliquent en général dans la réglementation du transport aérien et la surveillance des compagnies aériennes (y compris l’exploitation et la maintenance). Elles sont aussi chargées de la certification et du contrôle des appareils, du contrôle de la circulation aérienne, des infrastructures aéroportuaires et de la sécurité. Les autorités aéroportuaires sont soit des collectivités locales, soit des sociétés commerciales. Elles sont, en général, responsables du fonctionnement global de l’aéroport. Les opérateurs aériens se répartissent en compagnies d’aviation générale et en compagnies aériennes commerciales (de statut privé ou public), en compagnies de transport de marchandises et en propriétaires d’avions privés. Les opérateurs sont, d’une manière générale, chargés de l’exploitation et de la maintenance des appareils, de la formation du personnel, ainsi que de la politique tarifaire et des opérations d’embarquement et de débarquement des passagers. Les responsabilités en matière de sécurité peuvent varier; dans certains pays, elles incombent aux compagnies aériennes; dans d’autres, l’administration ou les autorités aéroportuaires en sont responsables. Les constructeurs sont chargés de la conception, de la construction, des essais, du soutien technique et de l’amélioration des appareils. En outre, les vols internationaux sont régis par des accords internationaux.

Le présent article traite du personnel concerné, à un titre ou à un autre, par le contrôle de la circulation aérienne (à savoir les personnels chargés du contrôle des avions civils depuis le décollage jusqu’à l’atterrissage, en passant par la maintenance des tours de contrôle, des radars et des autres infrastructures servant au contrôle aérien); il examine également la question des personnels au sol qui exécutent des tâches de maintenance sur les appareils, qui les chargent, qui manipulent les bagages et le fret aérien et qui assurent des services auprès des passagers. Ces personnels se répartissent dans les catégories suivantes:

Le contrôle de la circulation aérienne

Les autorités de tutelle, telles que l’Administration fédérale de l’aviation (Federal Aviation Administration (FAA)), aux Etats-Unis, se chargent du contrôle en vol des appareils commerciaux du décollage jusqu’à l’atterrissage. Leur mission première consiste à prendre en charge les avions à l’aide de radars et d’autres équipements de surveillance, afin de maintenir une distance de séparation suffisante entre eux sur leur trajectoire. Le personnel de contrôle de la circulation aérienne travaille dans les aéroports, les centres de contrôle radar en zone terminale (Terminal Radar Approach Control (TRACON)), ainsi que dans les centres de contrôle régionaux. Ce personnel comprend des contrôleurs aériens et des personnels de maintenance des installations, ces derniers étant chargés de la maintenance des tours de contrôle des aéroports, des centres de contrôle radar en zone terminale, des centres de contrôle régionaux, des radiophares et des équipements radar. Cette catégorie de personnel est constituée d’électroniciens, de techniciens, d’électriciens et d’agents de maintenance. Le guidage des avions à l’aide d’instruments s’effectue selon les règles de vol aux instruments (Instruments Flight Rules (IFR)). Les avions sont suivis en vol à l’aide d’un système de couverture radar (General National Airspace System (GNAS)) par des contrôleurs aériens placés dans les tours de contrôle des aéroports, dans les centres de contrôle radar en zone terminale et dans les centres de contrôle régionaux. Ces contrôleurs veillent au maintien de la trajectoire et de la distance de séparation correcte entre les avions. Lorsque l’avion passe d’un espace aérien à un autre, la responsabilité de l’avion passe d’un contrôleur à un autre.

Les centres de contrôle régionaux, les centres de contrôle radar en zone terminale et les tours de contrôle des aéroports

Dès que les avions atteignent une certaine altitude, ils sont pris en charge par des centres de contrôle régionaux. Ces centres dépendent des autorités de tutelle. Ils prennent ou cèdent les avions aux centres de contrôle radar en zone terminale ou aux autres centres. Ils utilisent la radio ou le radar pour maintenir le contact avec les avions. Ainsi, un avion traversant l’espace aérien d’un pays est toujours sous la surveillance d’un centre de contrôle régional qui le transférera au suivant. Les zones contrôlées par les centres de contrôle régionaux se recoupent toujours; ces centres reçoivent des informations provenant d’installations radar à longue portée. Les informations radar sont envoyées à ces installations à la fois au moyen de liaisons par faisceau hertzien et par des lignes téléphoniques, assurant ainsi une redondance de ces informations: si l’un de ces canaux de communication fait défaut, l’autre prend le relais. La circulation aérienne transocéanique, qui ne peut être suivie par radar, est gérée par les centres de contrôle régionaux à l’aide de moyens de communication radio. Les techniciens et les ingénieurs assurent la maintenance de l’équipement de surveillance électronique et la marche ininterrompue des systèmes d’alimentation qui comprennent des générateurs et des batteries de secours.

Dans les centres de contrôle radar en zone terminale, les contrôleurs aériens gèrent les avions volant à basse altitude à l’intérieur d’un périmètre de 80 km autour des aéroports, par des moyens de communication radio et par radar. Ces centres reçoivent les informations de route provenant du radar de surveillance de l’aéroport (Airport Surveillance Radar (ASR)) (ou radar primaire d’approche). Le système de suivi par radar identifie le déplacement de l’avion en vol et interroge en même temps son transpondeur qu’il identifie et dont il reçoit les codes (radar secondaire). Dans les centres de contrôle radar en zone terminale et les centres de contrôle régionaux, le personnel, ainsi que les tâches qui lui incombent, sont similaires.

Le contrôle régional et le contrôle d’approche se présentent sous deux formes: les systèmes non automatisés ou systèmes manuels, d’une part, et les systèmes automatisés, de l’autre.

Avec le système manuel, les communications radio entre le contrôleur aérien et l’avion sont complétées par des informations provenant soit du radar primaire, soit du radar secondaire. La trace de l’avion est suivie sous forme d’un écho mobile sur des écrans cathodiques (voir figure 102.4). Dans la plupart des pays, les systèmes manuels ont été remplacés par des systèmes automatisés.

Figure 102.4 Contrôleur aérien face à l'écran d'un centre de contrôle radar manuel

Figure 102.4

Avec le système automatisé, l’information relative à l’appareil se réfère toujours au plan de vol, à un radar primaire et à un radar secondaire, mais les ordinateurs permettent de présenter, sur écran et sous forme alphanumérique, toutes les données concernant l’appareil et de suivre ainsi la trajectoire de l’avion. Les ordinateurs sont également utilisés pour prévenir, sur la base des plans de vol et des distances de séparation normales, le conflit entre deux ou plusieurs appareils situés sur des trajectoires identiques ou convergentes. Grâce à l’automatisation, le contrôleur aérien est soulagé d’un grand nombre des tâches qu’il devrait accomplir avec un système manuel. Il dispose ainsi de plus de temps pour la prise de décisions.

Les conditions de travail diffèrent selon le type de centre de contrôle. Dans un centre de contrôle manuel, en effet, l’écran est en position horizontale ou inclinée, obligeant le contrôleur à se pencher en avant dans une position inconfortable, la distance œil-écran étant comprise entre 30 et 50 cm. La perception d’échos mobiles sous la forme de points lumineux dépend de la luminosité et du contraste de l’écran. Certains échos mobiles ayant une intensité lumineuse réduite, l’éclairage ambiant doit être faible afin d’améliorer, dans la mesure du possible, le contraste.

En revanche, dans le système automatisé, les écrans de données électroniques sont disposés sur un plan vertical ou quasi vertical et l’opérateur peut travailler en position assise à plus grande distance. Il dispose de claviers placés à l’horizontale qui lui permettent de régler la présentation des caractères et des symboles correspondant aux différents types de messages. Il a la possibilité de modifier la taille et la luminosité des caractères. La perception des contrastes restant tout à fait satisfaisante à 160 lux, l’éclairage ambiant de la salle de travail peut être proche de l’intensité de la lumière du jour. Grâce aux caractéristiques du système automatisé, le contrôleur travaille dans des conditions bien meilleures, ce qui accroît son efficacité et réduit sa fatigue oculaire et mentale.

Le travail des contrôleurs aériens s’effectue à l’intérieur de vastes salles à l’éclairage artificiel où sont placés les écrans. Cet environnement clos, souvent éloigné des aéroports, n’autorise que peu d’échanges entre collègues et demande une intense concentration et une grande disponibilité pour la prise de décisions. L’isolement relatif est à la fois de nature physique et mentale et les moments de détente sont rares. L’ensemble de ces facteurs est considéré comme générateur de stress.

Chaque aéroport dispose de sa tour de contrôle. Les contrôleurs qui y travaillent guident les avions dans l’espace aérien concerné à l’aide de radars, de moyens de communication radio et de jumelles, afin d’assurer la liaison avec les appareils, à la fois lors des manœuvres au sol et lors des décollages et des atterrissages. Les contrôleurs prennent en charge les avions surveillés par les centres de contrôle radar en zone terminale. La plupart des systèmes radar et des autres systèmes de surveillance sont implantés dans les aéroports. La maintenance de ces systèmes est effectuée par des techniciens.

La salle de la tour de contrôle est entièrement entourée de baies vitrées, car la visibilité doit être parfaite. Le milieu de travail est donc tout à fait différent de celui d’un centre de contrôle d’approche ou régional. Les contrôleurs aériens observent directement les mouvements des appareils et surveillent les autres activités. Ils rencontrent parfois les pilotes et prennent part à la vie de l’aéroport. L’atmosphère n’est plus celle d’un environnement clos, elle offre une gamme d’intérêts plus variée.

Le personnel de maintenance des installations de contrôle de la circulation aérienne

Les personnels de maintenance des installations et des tours de contrôle sont, respectivement, des techniciens du matériel radar, de la circulation aérienne et des télécommunications, ainsi que des installations et des équipements au sol.

Les techniciens du matériel radar entretiennent et exploitent les systèmes radar, y compris les radars d’aéroport et les systèmes radar à longue portée. Leur travail comprend la maintenance d’équipements électroniques, l’étalonnage et le dépannage.

Les techniciens de la circulation aérienne et des télécommunications entretiennent et exploitent les équipements de radiocommunication et les autres équipements de communication associés au contrôle de la circulation aérienne. Leur travail inclut également la maintenance, l’étalonnage et le dépannage d’équipements électroniques.

Les techniciens des installations et des équipements au sol assurent l’exploitation et la maintenance des équipements et bâtiments dépendant de l’autorité de tutelle en matière d’aviation (centres de contrôle régionaux, centres de contrôle radar en zone terminale et installations aéroportuaires, y compris les tours de contrôle). Leur travail consiste à assurer le bon fonctionnement des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation, de même que des systèmes d’éclairage des aéroports, des batteries et des groupes d’alimentation permanente et des équipements d’alimentation électrique associés.

Pour ces trois catégories de personnel, les risques professionnels comprennent l’exposition au bruit, le travail sur ou à proximité de composants électriques actifs à haute tension, l’exposition aux rayons X provenant de tubes klystron et magnétron, les risques de chute au cours du travail sur des antennes radar ou des mâts d’antennes radio, ainsi que l’exposition aux biphényles polychlorés (BPC) lors de la manipulation de condensateurs de technologie ancienne et du travail sur des transformateurs du réseau public. Les travailleurs risquent, eux aussi, d’être exposés aux micro-ondes et aux radiofréquences. Selon une étude menée auprès d’un groupe de travailleurs radar en Australie (Joyner et Bangay, 1986), le personnel n’est généralement pas exposé à des niveaux de rayonnement supérieurs à 10 W/m2 s’il ne travaille pas sur des guides d’onde ouverts et des composants utilisant un guide d’onde, et s’il n’intervient pas sur les émetteurs dans des armoires techniques en cas de formation d’arcs à haute tension. Ces spécialistes sont aussi exposés aux produits chimiques liés à l’entretien des bâtiments (chaudières incluses), au traitement chimique de l’eau, à l’amiante, aux peintures, au carburant diesel et à l’acide des batteries. Un grand nombre de câbles électriques et de câbles de liaison avec le réseau public sont enterrés dans les zones aéroportuaires. Lors des interventions sur ces systèmes, les travailleurs sont souvent appelés à entrer dans des espaces confinés et sont exposés aux risques qui y sont liés, en particulier les atmosphères nocives ou asphyxiantes, les chutes et l’électrocution.

Les personnels de maintenance des installations de contrôle et les autres personnels au sol des aéroports sont souvent exposés aux gaz d’échappement des moteurs d’avions. Plusieurs études portant sur les gaz d’échappement des appareils dans les aéroports (Eisenhardt et Olmsted, 1996; Miyamoto, 1986; Decker, 1994) ont signalé la présence d’aldéhydes dont le butyraldéhyde, l’acétaldéhyde, l’acroléine, la méthacroléine, l’isobutyraldéhyde, le propionaldéhyde, le crotonaldéhyde et le formaldéhyde. Le formaldéhyde était présent aux concentrations les plus élevées; venaient ensuite les autres aldéhydes. Les auteurs de ces études ont conclu que le formaldéhyde présent dans les gaz d’échappement était probablement le principal facteur d’irritation oculaire et respiratoire dont faisaient état les personnes exposées. Les oxydes d’azote étaient soit indécelables, soit présents à des concentrations inférieures à une partie par million (ppm) dans le flux d’échappement; on en a déduit que ni les oxydes d’azote ni les autres oxydes ne jouaient un rôle de premier plan dans les symptômes d’irritation. En outre, les gaz d’échappement des appareils contenaient jusqu’à 70 hydrocarbures différents, dont 13 renfermant essentiellement des oléfines. Quant à l’exposition aux métaux lourds contenus dans les gaz d’échappement, il a été démontré qu’elle ne constituait pas une menace pour la santé aux abords des aéroports.

Les tours de contrôle radar devraient être équipées de garde-corps normalisés autour des escaliers et des plates-formes afin de prévenir les chutes. Elles devraient également être pourvues de dispositifs interdisant l’accès à l’antenne radar lorsqu’elle est en fonctionnement. Les travailleurs ayant accès aux tours de contrôle et aux antennes radio devraient, en principe, disposer d’équipements appropriés pour prévenir les chutes.

Le personnel travaille à la fois sur des systèmes électriques sous et hors tension. La protection vis-à-vis des risques d’électrocution devrait inclure l’apprentissage des gestes de sécurité, des procédures de consignation et de déconsignation et le port d’équipements de protection individuelle adaptés.

Les micro-ondes radar sont générées par des équipements haute tension comportant un tube klystron. Celui-ci génère des rayons X et peut être source d’exposition lorsque la porte de visite est ouverte et que le personnel s’en trouve alors trop près. Il faudrait que la porte soit toujours fermée, sauf s’il s’agit de travailler sur le tube klystron lui-même. La durée des interventions devrait être réduite au minimum.

Le personnel devrait se protéger du bruit (bouchons d’oreilles ou casque antibruit, par exemple) lorsqu’il travaille à proximité de sources telles que des réacteurs ou des générateurs de secours.

Les autres aspects de la surveillance comprennent la formation à la manutention, la sécurité des véhicules, le matériel d’intervention en cas d’urgence, les procédures d’évacuation et d’entrée dans les espaces confinés (y compris les stations de contrôle de l’air et les unités de ventilation).

Les contrôleurs aériens et le service d’information aéronautique

Les contrôleurs aériens travaillent dans les centres de contrôle régionaux, les centres de contrôle radar en zone terminale et les tours de contrôle des aéroports. Ils travaillent généralement sur une console pour assurer le suivi des avions par radar et la communication radio avec les pilotes. Les personnels du service d’information aéronautique se chargent de communiquer aux pilotes les informations relatives à la météorologie.

Les contrôleurs aériens peuvent être exposés à un certain nombre de risques: problèmes oculaires, bruit, stress et difficultés d’ordre ergonomique. Auparavant, les émissions de rayons X par les écrans radar étaient un sujet de préoccupation; aux tensions de service habituelles, toutefois, elles ne posent aucun problème.

Les normes générales d’aptitude physique applicables aux contrôleurs aériens sont établies par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI). Des dispositions plus détaillées sont fixées par les règlements nationaux civils et militaires; elles sont particulièrement sévères en ce qui concerne la vue et l’ouïe.

Les problèmes liés à la vision

Le soleil éblouit parfois à travers les larges baies vitrées des tours de contrôle des aéroports; le sable ou le béton environnants peuvent créer des réflexions qui accroissent encore la luminosité. Ces contraintes pèsent sur l’acuité visuelle et peuvent entraîner des céphalées de courte durée. Il est possible de prévenir la fatigue oculaire en gazonnant les alentours des tours de contrôle, en évitant les matériaux tels que béton, asphalte, gravier et en donnant une teinte verte aux baies vitrées. Si la teinte n’est pas trop prononcée, l’acuité visuelle et la perception des couleurs restent correctes, tandis que les rayonnements à l’origine des éblouissements sont absorbés.

Jusque dans les années soixante environ, il y avait divergence entre les spécialistes au sujet de la fatigue oculaire entraînée par la lecture des écrans radar. Depuis lors, l’attention apportée aux défauts de réfraction visuelle lors de la sélection des contrôleurs radar, la correction de ces défauts chez les contrôleurs en activité et l’amélioration constante des conditions de travail sur écran ont permis d’abaisser considérablement la fatigue oculaire. Il arrive cependant qu’elle apparaisse chez des contrôleurs ayant une excellente vue. Ce phénomène peut être dû à un niveau d’éclairage trop faible de la salle, à un éclairage irrégulier de l’écran, à la brillance des échos eux-mêmes et, surtout, au scintillement de l’image. Les progrès accomplis en matière de lisibilité et le renforcement des spécifications techniques applicables aux équipements nouveaux conduisent à une diminution de ce type de fatigue, voire à son élimination. Jusqu’à une période récente, l’accommodation oculaire a également été perçue comme une cause possible de tension oculaire chez les opérateurs ayant travaillé sans interruption pendant une heure devant un écran. D’une manière générale, les problèmes oculaires se font nettement plus rares. Ils sont susceptibles de disparaître ou de se présenter de manière très occasionnelle dans les systèmes radar automatisés, en cas de défaillance d’un écran ou de mauvais réglage du défilement des images.

Pour les personnes travaillant sur écran radar, la clef d’une bonne préparation réside principalement dans l’adaptation de l’intensité de l’éclairage ambiant. Dans une station radar non automatisée, l’adaptation à la semi-obscurité de la pièce réservée aux écrans radar est obtenue en séjournant au préalable 15 à 20 minutes dans une autre pièce faiblement éclairée. L’éclairage général de la salle de travail, l’intensité lumineuse des écrans et la brillance des points doivent avoir été étudiés avec soin. Dans un système automatisé, les écrans sont lus avec un niveau d’éclairage ambiant compris entre 160 et 200 lux, ce qui évite les inconvénients liés à l’obscurité qui règne dans le système non automatisé. Enfin, en dépit des techniques modernes d’insonorisation, le problème des nuisances sonores reste aigu dans les tours de contrôle construites à proximité des pistes.

Les personnes affectées à la lecture d’écrans radar et d’écrans électroniques sont sensibles aux changements d’éclairage ambiant. Dans un système non automatisé, les contrôleurs doivent porter des verres absorbant 80% de la lumière pendant une durée comprise entre 20 et 30 minutes avant qu’ils ne rejoignent leur poste de travail. Dans un système automatisé, le port de verres spéciaux pour l’adaptation n’est plus essentiel, mais les personnes particulièrement sensibles au contraste entre la luminosité de l’écran et celle de l’environnement de travail considèrent que des verres à pouvoir absorbant moyen améliorent leur confort visuel. La fatigue oculaire s’en trouve réduite. Le port de lunettes absorbant 80% de la lumière est fortement conseillé aux contrôleurs de tours lorsqu’ils sont exposés à un rayonnement solaire intense.

Le stress

C’est le risque le plus grave encouru par les contrôleurs aériens dans le cadre de leur travail. Leur principale mission consiste à prendre des décisions quant aux avions évoluant sous leur responsabilité: altitude, routes, changements de cap en cas de conflit survenant avec un autre appareil ou lorsque la congestion dans un secteur entraîne des retards ou encore quand des difficultés de gestion du trafic surviennent, etc. Dans les systèmes non automatisés, le contrôleur doit également préparer, classer et organiser les informations sur lesquelles repose sa décision. Les données disponibles sont des données brutes qui doivent d’abord être traitées. Dans les systèmes automatisés, les instruments aident à prendre des décisions, le contrôleur n’ayant alors qu’à analyser les données fournies et présentées sous forme rationnelle par ces instruments. Même si le travail peut s’en trouver grandement facilité, la responsabilité d’approuver la décision incombe entièrement au contrôleur, ce qui est toujours générateur de stress. Les responsabilités liées au travail, la charge de travail accrue à certaines heures, l’encombrement croissant de l’espace aérien, la concentration, le travail en équipe et la crainte de catastrophes consécutives à une erreur humaine sont susceptibles d’engendrer des réactions de stress. La fatigue du contrôleur aérien peut revêtir l’aspect de l’une des trois formes classiques: la fatigue aiguë, la fatigue chronique (ou surmenage) et l’épuisement nerveux (voir également l’encadré sur les études de cas portant sur les contrôleurs aériens aux Etats-Unis et en Italie).

Etudes de cas portant sur les contrôleurs aériens aux Etats-Unis et en Italie

Les Etats-Unis

En 1970, le rapport Corson (United States Senate, 1970) fut le premier à faire état de niveaux de stress élevés parmi les contrôleurs aériens aux Etats-Unis. Il portait principalement sur les conditions de travail: heures supplémentaires, pauses insuffisantes, augmentation du trafic, manque de congés, milieu de travail médiocre sur le plan matériel, mais aussi humain, et tensions entre la direction et le personnel. Ces conditions ont engendré des mouvements sociaux en 1968-69. Des recherches médicales, notamment une étude de vaste portée menée en 1975-1978 par l’Université de Boston (Rose, Jenkins et Hurst, 1978), tendaient à prouver que les contrôleurs aériens couraient un risque plus élevé de pathologies liées au stress, notamment d’hypertension.

A la suite de la grève des contrôleurs aériens aux Etats-Unis en 1981, dont l’enjeu majeur était le stress lié au travail, le ministère des Transports (United States Department of Transportation (USDOT)) a demandé à nouveau à un groupe d’experts d’étudier cette question et celle du bien-être psychique au travail dans cette catégorie professionnelle. Selon les principales conclusions publiées en 1982 dans le rapport Jones, des employés de l’Administration fédérale de l’aviation (Federal Aviation Administration (FAA)) occupant des postes très divers se montraient négatifs en ce qui concerne la conception et l’organisation du travail, les systèmes de communication, le rôle de l’encadrement, le soutien social et la satisfaction au travail. La forme classique de stress était liée à des incidents épisodiques graves (comme une collision en vol évitée de peu) allant de pair avec les tensions personnelles liées au type de gestion. Le rapport signalait que 6% de l’échantillon des contrôleurs aériens souffraient «d’épuisement professionnel», et avaient perdu confiance en eux vis-à-vis de l’exécution de leur travail. Ce groupe représentait 21% des contrôleurs aériens de 41 ans ou plus et 69% de ceux qui avaient au moins 19 années d’ancienneté.

Le groupe d’experts a fait le point en 1984 sur ses recommandations de 1981 et conclu que «les conditions étaient aussi mauvaises, sinon pires». Les préoccupations principales visaient l’augmentation du trafic, l’insuffisance des effectifs, l’augmentation du nombre de cas d’épuisement professionnel et le mauvais moral du personnel. Ces conditions ont entraîné une reprise du taux de syndicalisation des contrôleurs aériens en 1987, avec la désignation de l’Association nationale des contrôleurs aériens (National Air Traffic Controllers Association (NATCA)) comme association représentative principale.

Dans une enquête datant de 1994, les contrôleurs aériens de la région de New York se déclaraient préoccupés par l’insuffisance des effectifs, le stress, le travail posté et la qualité de l’air intérieur. Les recommandations pour améliorer leur moral et leur santé englobaient les possibilités de mutation, la préretraite, des horaires plus souples, la mise à disposition d’équipements sportifs sur le lieu de travail et l’augmentation des effectifs. En 1994, un plus grand nombre de contrôleurs aériens de niveau 3 et de niveau 5 faisait état d’un taux d’épuisement professionnel supérieur à celui révélé par les enquêtes menées en 1981 et 1984 (sauf pour ceux qui, en 1984, travaillaient dans des centres de contrôle régionaux). Les installations de niveau 5 enregistraient le niveau de trafic le plus élevé, celles de niveau 1 le plus faible (Landsbergis et coll., 1994). L’épuisement était lié au fait d’avoir évité de justesse une collision au cours des 3 années précédentes, à l’âge des sujets, aux années d’ancienneté dans des installations de niveau 5, à une mauvaise organisation du travail, au manque de solidarité entre collègues et de la part de l’encadrement.

Les recherches visant à définir les horaires optimaux pour le travail posté chez les contrôleurs aériens se poursuivent, notamment sur la base de postes de dix heures, quatre jours d’affilée. Les effets que l’alternance entre postes par roulement et semaines de travail comprimée peut avoir à long terme sur la santé ne sont pas encore connus.

Un programme de réduction du stress des contrôleurs aériens mis au point par négociation entre les partenaires sociaux en Italie

L’entreprise chargée de l’ensemble du trafic aérien civil en Italie, l’Azienda Autonoma di Assistenza al Volo per il Traffico Aereo Generale (AAAV) emploie quelque 1 540 contrôleurs aériens. L’AAAV et les représentants syndicaux ont signé plusieurs accords entre 1982 et 1991 afin d’améliorer les conditions de travail. Ces accords comprennent:

  1. La modernisation des systèmes de communication radio, de l’informatisation des données aéronautiques, du traitement des données et de la gestion de la circulation aérienne. En dehors d’une information rendue plus fiable, cette mesure donne davantage de temps pour la prise de décisions, élimine de nombreuses surcharges temporaires et leur cortège de dangers et permet ainsi une répartition mieux équilibrée de la charge de travail.
  2. La réduction du temps de travail . La semaine de travail de base est comprise entre 28 et 30 heures.
  3. Les dispositions pour le travail posté:
    • rotation rapide des postes: une journée par poste;
    • 2 jours de repos pour un poste de nuit;
    • adaptation de la durée du poste à la charge de travail: 5 à 6 heures le matin; 7 heures l’après-midi; 11 à 12 heures la nuit;
    • courtes siestes au cours du poste de nuit;
    • régularité maximale dans la rotation des postes, afin de permettre une meilleure organisation de la vie personnelle, familiale et sociale;
    • longue pause repas (45 à 60 minutes) au cours du poste de travail.
  4. La lutte contre les facteurs de stress liés à l’environnement . Des essais ont été faits pour lutter contre le bruit et assurer un meilleur éclairage des locaux.
  5. L’amélioration ergonomique des consoles, des écrans et des sièges.
  6. L’amélioration de la condition physique . Dans les installations les plus importantes, des salles de sport sont prévues.

Les recherches menées au cours de cette période montrent que le programme a été couronné de succès. Les contrôleurs aériens affectés à des postes de nuit ne souffraient pas beaucoup du stress; la dégradation de la performance à la fin du troisième poste n’était pas significative; en 7 ans, seuls 28 contrôleurs aériens ont été réformés pour raisons médicales et, en dépit d’une nette augmentation du trafic aérien, le nombre des quasi-collisions avait fortement diminué.

Paul A. Landsbergis

Le contrôle de la circulation aérienne exige un service ininterrompu, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, tout au long de l’année. Les conditions de travail des contrôleurs aériens supposent donc un travail en équipes tournantes, des rythmes de travail et de repos irréguliers, les temps de travail correspondant parfois aux périodes de repos de la plupart des autres catégories de salariés. Des plages de concentration et de relaxation pendant les heures de travail et des jours de repos au cours de la semaine sont indispensables pour éviter la fatigue professionnelle. Malheureusement, ce principe ne peut être retenu dans un règlement général. En effet, l’organisation du travail par équipes tournantes dépend de variables qui peuvent être de nature juridique (nombre maximal d’heures de travail consécutives autorisé) ou purement professionnelle (la charge de travail étant fonction de l’heure du jour ou de la nuit). Bien d’autres facteurs d’ordre social ou familial sont aussi à prendre en considération. Compte tenu de la durée idéale des périodes de concentration soutenue, l’expérience a montré que de courtes pauses étaient nécessaires et qu’elles devaient être de quelques minutes pour des plages de travail comprises entre une demi-heure et une heure et demie. Cependant, il n’est pas nécessaire d’adopter des schémas rigides pour atteindre l’objectif, c’est-à-dire le maintien du niveau de concentration et la prévention de la fatigue. Le plus important est d’être capable d’interrompre les périodes de travail à l’écran par des temps de repos ou des pauses, sans compromettre le régime des équipes tournantes. Pour établir la durée idéale des périodes de concentration et de relaxation au cours du travail, ainsi que le rythme idéal des congés hebdomadaires et annuels, des études plus poussées sont nécessaires dans le but d’établir des normes mieux harmonisées.

Les autres risques pour la santé

Des problèmes ergonomiques se posent également lors du travail sur des consoles analogues à celles des informaticiens. La qualité de l’air est parfois médiocre dans les espaces clos. Les contrôleurs aériens subissent parfois aussi l’effet Larsen lorsque des sons de forte puissance leur parviennent dans les casques d’écoute. Ces sons sont de courte durée (quelques secondes), mais leurs niveaux sonores peuvent atteindre 115 dBA.

Au cours de leur travail, les personnels des services du contrôle aérien sont également exposés à des risques liés aux lasers qui font partie de l’équipement météorologique utilisé pour mesurer la hauteur des nuages. Ils sont également soumis à des problèmes d’ergonomie et de qualité de l’air en espace clos.

Les autres personnels des services de contrôle aérien

Les activités de ces services portent sur les normes de circulation aérienne, la sécurité, la rénovation et la construction des installations aéroportuaires, les tâches administratives et la médecine du travail.

Les contrôleurs techniques d’exploitation sont des inspecteurs de l’aviation chargés de vérifier les normes de maintenance des appareils des compagnies aériennes et du contrôle en vol. Ils vérifient également la navigabilité des appareils. Ils inspectent parfois les hangars d’entretien et les autres installations aéroportuaires et prennent place dans les postes de pilotage des avions de ligne. Ils sont également chargés des enquêtes sur les accidents d’avion, les incidents et autres dysfonctionnements.

Les risques comprennent l’exposition au bruit produit par les appareils, aux vapeurs de carburant et aux gaz d’échappement des moteurs lors du travail dans les hangars et autres zones aéroportuaires, ainsi que l’exposition potentielle à des substances dangereuses et à des agents pathogènes véhiculés par le sang lors des enquêtes sur les accidents d’avion. Comme les personnels au sol, les contrôleurs techniques d’exploitation doivent faire face à des risques identiques, d’où la nécessité d’appliquer les mêmes mesures préventives.

Parmi les personnels responsables de la sûreté figurent les officiers de sûreté des vols. Ils assurent à la fois la sécurité à bord des appareils et sur les plates-formes d’embarquement. Ils remplissent essentiellement une fonction de police et enquêtent sur les actes délictueux ou criminels liés aux avions et aux aéroports.

Les personnels responsables de la rénovation et de la construction des installations sont chargés de l’approbation de tous les projets de modification ou de nouvelle construction d’aéroport. Il s’agit en général d’ingénieurs et leur travail est essentiellement un travail de bureau.

Les employés administratifs incluent les personnels chargés de la comptabilité, des systèmes de gestion et de la logistique. Le personnel médical placé sous la responsabilité d’un médecin aéronautique assure des services de médecine du travail au profit des travailleurs relevant des autorités de tutelle.

Les personnels de contrôle de la circulation aérienne, ainsi que les employés de bureau, devraient bénéficier d’une formation portant sur les postures assises optimales, les équipements d’intervention en cas d’urgence et les procédures d’évacuation.

L’exploitation des aéroports

Les personnels au sol des aéroports sont responsables de la maintenance et du chargement des appareils. Les bagagistes assurent la manutention des bagages et du fret, tandis que les agents des services commerciaux procèdent à l’enregistrement des passagers et au contrôle des bagages.

Toutes les opérations de chargement (passagers, bagages, fret, carburant, ravitaillement divers, etc.) sont gérées et intégrées par un cadre responsable qui prépare le plan de chargement. Ce plan est remis au pilote. Lorsque toutes les opérations sont achevées et que toutes les vérifications ou les inspections jugées nécessaires ont été effectuées, le pilote demande au contrôle l’autorisation de décollage.

Les personnels au sol

La maintenance et l’entretien courant des appareils

A chaque atterrissage, l’appareil est soumis à des opérations d’entretien courant. Les personnels au sol qui effectuent l’entretien en escale procèdent à des contrôles visuels, y compris le contrôle des niveaux; ils vérifient les équipements, effectuent des interventions mineures (ainsi que le nettoyage intérieur et extérieur), assurent l’approvisionnement en carburant (avitaillement) et le ravitaillement de l’appareil en produits divers. A l’arrivée de l’avion, après son immobilisation, une équipe de mécaniciens entreprend une série de contrôles et d’opérations qui varient selon le type d’appareil. Ces mécaniciens procèdent à l’avitaillement et vérifient un certain nombre de systèmes de sécurité qui doivent être inspectés après chaque atterrissage. Ils consultent le livre de bord à la recherche de rapports sur des défaillances susceptibles d’avoir été notées par l’équipage au cours du vol. En outre, ils assurent, si nécessaire, le remplacement de certaines pièces (voir également l’article «Les opérations de maintenance des appareils», dans ce même chapitre). Par temps froid, les mécaniciens peuvent avoir à exécuter des tâches supplémentaires, telles que le dégivrage des ailes, l’entretien du train d’atterrissage, celui des volets, etc. Dans les climats chauds, il est nécessaire d’apporter une attention particulière à l’état des roues et des freins. Ce travail une fois terminé, les mécaniciens peuvent déclarer que l’appareil est en état de voler.

Les visites plus approfondies et les révisions d’appareils sont conduites selon des échéances précises qui correspondent, pour chacun d’eux, à un certain nombre d’heures de vol et de cycles.

L’avitaillement est l’une des opérations courantes les plus délicates, aussi bien sur le plan de la décision de la quantité à emporter prise par le pilote que sur les risques d’incendie et d’écoulements. La quantité de carburant dans les réservoirs est déterminée par des facteurs tels que la durée de vol, le poids maximal au décollage et à l’atterrissage, la route empruntée, les conditions météorologiques, les déroutements éventuels, etc.

Une équipe de nettoyage assure l’entretien courant de la cabine de l’appareil en remplaçant les matériels salis ou endommagés (coussins, couvertures, etc.), en vidangeant les toilettes et en remplissant les réservoirs d’eau. En outre, cette équipe peut également désinfecter ou décontaminer l’appareil sous la surveillance des autorités responsables de la santé publique.

Une autre équipe charge la nourriture, les boissons et les autres produits nécessaires au confort des passagers. Les repas sont préparés dans le strict respect de normes d’hygiène sévères, afin d’écarter tout risque d’intoxication alimentaire, en particulier pour les membres de d’équipage. Certains repas sont congelés, stockés à basse température et réchauffés en vol.

Le travail des personnels au sol implique l’utilisation d’engins motorisés ou non.

Le chargement des bagages et du fret

Les bagagistes assurent la manutention des bagages des passagers et du fret. Ce dernier comprend des chargements fort divers: denrées périssables (fruits et légumes), animaux vivants, radio-isotopes ou encore pièces mécaniques. La manutention des bagages et du fret exigeant des efforts physiques et l’utilisation d’engins, les personnels encourent des risques d’accidents et des problèmes ergonomiques.

Les personnels au sol et les bagagistes sont à bien des égards exposés aux mêmes risques. Ces derniers sont liés au travail en plein air, quelles que soient les conditions météorologiques, à l’exposition à des substances polluantes en suspension dans l’air provenant des gaz d’échappement des moteurs et à l’exposition au souffle d’hélices ou à celui de réacteurs, susceptible de faire claquer les portes, de renverser des personnes ou des équipements non sécurisés, de faire tourner les hélices des turbopropulseurs et de souffler des débris dans les moteurs ou sur des personnes. Les personnels au sol sont également exposés au bruit. Une étude menée en Chine a montré qu’à proximité des moteurs ils étaient exposés à des niveaux sonores excédant 115 dBA (Wu et coll., 1989). Sur les aires de trafic et de mouvement des aéroports, la circulation est très dense et les risques de collision sont élevés. Les opérations d’avitaillement sont extrêmement dangereuses et les travailleurs peuvent être exposés à des écoulements intempestifs de carburant, à des incendies et à des explosions. Les travailleurs se trouvant sur des engins de levage, des nacelles, des plates-formes ou des passerelles mobiles encourent des risques de chute. Le travail par poste, effectué dans le cadre de contraintes horaires stressantes, implique également des risques.

La circulation des véhicules et la formation des conducteurs devraient être régies par des règles strictes. Dans le cadre de cette formation, on devrait insister sur le respect des limitations de vitesse et de la zone d’évolution contrôlée, ainsi que sur la notion d’espace nécessaire aux manœuvres des avions. La maintenance des aires et le contrôle du trafic au sol devraient être efficaces. Tous les véhicules autorisés à opérer sur l’aéroport devraient porter un marquage très visible afin de pouvoir être immédiatement identifiés par les contrôleurs aériens. Les équipements dont se servent les personnels au sol devraient être inspectés régulièrement et bien entretenus. Les personnels qui ont pris place sur des engins de levage, des nacelles, des plates-formes ou des passerelles d’accès devraient être protégés contre les chutes par des garde-corps ou par un équipement de protection individuelle antichute. Une protection de l’ouïe (bouchons d’oreille ou casque antibruit) devrait également être prévue. Les autres équipements de protection individuelle comprennent des vêtements de travail adéquats en fonction des intempéries, des chaussures de sécurité à semelles antidérapantes avec embouts d’acier, des équipements de protection des yeux et du visage, des gants et une protection du corps lors de l’utilisation de fluides dégivrants. Une prévention rigoureuse des incendies et des mesures de protection comportant la mise à la terre, la prévention des étincelles d’origine électrique, de fumées ou de flammes, ainsi que l’interdiction de tout autre véhicule à moins de 15 m de l’appareil sont de rigueur lors des opérations d’avitaillement. Le matériel de lutte contre le feu devrait se trouver sur place. Le rappel régulier des procédures à suivre en cas d’écoulement intempestif de carburant ou d’incendie devrait être assuré.

Les bagagistes devraient entreposer et amarrer le fret de manière sûre; ils devraient recevoir une formation spécifique aux techniques de levage et être informés des postures correctes. Il convient qu’ils soient particulièrement prudents lorsqu’ils entrent ou sortent de la zone de fret avec des chariots ou d’autres engins. Selon le type de fret ou la nature des bagages, le port de vêtements de protection appropriés (tels que des gants pour le maniement du fret animalier) est recommandé. Les engins de transport de bagages et de fret, les carrousels et les tapis à bagages devraient être pourvus d’arrêts d’urgence et de protections.

Les agents commerciaux

Les agents commerciaux émettent les billets et procèdent à l’enregistrement et au contrôle des passagers et de leurs bagages. Ils peuvent aussi orienter les passagers lors de l’embarquement. Ceux qui émettent les billets et enregistrent les passagers sont susceptibles de rester toute la journée debout face à un terminal à écran de visualisation. Il faut donc prévoir des tapis de sol élastiques et des sièges pour atténuer les effets de la station debout, des pauses et des mesures ergonomiques (dispositifs antiréfléchissants pour les écrans, etc.). De plus, le travail au contact des passagers peut être source de stress, en particulier en cas de retards, de problèmes de correspondances, de grèves, etc. Une panne du système informatique de réservations constitue une source de stress majeure.

Les installations d’enregistrement et de pesée des bagages devraient limiter le plus possible les opérations de manutention, aussi bien pour les agents que pour les passagers. Les carrousels et les tapis à bagages devraient être pourvus d’arrêts d’urgence et de protections. Les préposés devraient recevoir une formation spécifique aux gestes et postures et à la manutention.

Les systèmes d’inspection des bagages font appel à la fluoroscopie. Des blindages protègent les personnels et le public des rayonnements dangereux. Si ces blindages ne sont pas bien positionnés, le système ne peut fonctionner. Selon une étude menée par l’Institut national de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH)) et par l’Association des transporteurs aériens (Air Transport Association) dans cinq aéroports des Etats-Unis, les expositions maximales aux rayonnements étaient de loin inférieures aux niveaux maximaux établis par l’Administration fédérale de contrôle des denrées alimentaires et des produits pharmaceutiques (Food and Drug Administration (FDA)) et par l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration) (OSHA)) (NIOSH, 1976). Les personnels devraient porter des dosimètres pour déterminer la dose de rayonnements au corps entier. Le NIOSH a préconisé des programmes réguliers de maintenance afin de contrôler l’efficacité des blindages.

Les agents commerciaux et les autres personnels de l’aéroport devraient être parfaitement au courant du plan et des procédures d’évacuation d’urgence.

LA MAINTENANCE DES APPAREILS

Buck Cameron

Les opérations de maintenance des appareils sont effectuées à l’échelon national et international. Elles sont exécutées par des mécaniciens civils ou militaires. Ces mécaniciens travaillent sur les aéroports, les bases de maintenance, les aérodromes privés, les installations militaires ainsi qu’à bord de porte-avions. Ils sont employés par les transporteurs de passagers et de fret, par les sous-traitants d’opérations de maintenance, par les exploitants d’aérodromes privés, par les opérateurs agricoles et par les propriétaires de flottes publiques ou privées. Les petits aérodromes sont susceptibles d’offrir du travail à quelques mécaniciens, tandis que les grands aéroports et les bases de maintenance peuvent compter plusieurs milliers d’employés. Les opérations de maintenance se répartissent entre celles qui sont nécessaires au déroulement quotidien des activités (maintenance d’escale) et celles qui comportent des vérifications périodiques de contrôle, d’entretien et de remise en état de l’appareil (maintenance en atelier). La maintenance d’escale comprend la maintenance en ligne, ou en vol (entre le décollage et l’atterrissage) et celle de nuit. La maintenance en vol consiste en une série de contrôles fonctionnels et d’interventions indispensables pour remédier aux dysfonctionnements constatés en vol; ces interventions sont généralement mineures. Il peut s’agir du simple remplacement d’un voyant lumineux, de pneus ou d’avionique, ou encore du remplacement d’un moteur. La maintenance de nuit est plus étendue et comprend toutes les interventions reportées durant les vols de jour.

La programmation, la répartition et la nature de la maintenance aéronautique sont contrôlées par chaque compagnie aérienne et consignées dans les manuels de maintenance qui, dans beaucoup de pays, sont soumis à l’approbation des autorités de tutelle. La maintenance se fait lors d’inspections régulières (dénommées «A à D») qui sont spécifiées dans les manuels de maintenance. Ces opérations de maintenance programmées permettent à l’avion entier d’être inspecté, entretenu et reconditionné à intervalles réguliers. Les niveaux de maintenance inférieurs peuvent être assurés par la maintenance d’escale. Les travaux de plus grande envergure, en revanche, sont exécutés dans une base de maintenance. Les avaries survenues sur un appareil et les pièces défectueuses sont réparées ou remplacées conformément aux normes.

Les risques des opérations de maintenance d’escale

En règle générale, la maintenance en vol est effectuée selon des contraintes d’emploi du temps sévères, sur des lignes encombrées. Les mécaniciens sont exposés au bruit, aux intempéries, à la circulation et aux mouvements des véhicules et des avions. Chacune de ces contraintes est susceptible d’accroître les risques intrinsèques des opérations de maintenance. Les conditions climatiques peuvent inclure des pics de température extrêmes, des vents forts, des précipitations sous forme de pluie ou de neige et de la glace. Dans certaines zones, la foudre constitue un risque important.

Même si, dans l’aviation civile, les moteurs de la génération actuelle sont nettement plus silencieux qu’auparavant, ils peuvent néanmoins produire des niveaux sonores bien supérieurs à ceux fixés par l’autorité compétente, notamment si l’appareil doit avoir recours à la puissance du moteur pour quitter son point de stationnement. Les moteurs d’avions à réaction et à hélices plus anciens ont des niveaux de pression sonore parfois supérieurs à 115 dBA. Les groupes auxiliaires de bord (Auxiliary Power Unit (APU)), les groupes électrogènes de parc ou de piste, les installations de climatisation, les engins remorqueurs, les camions-citernes et les équipements de manutention des marchandises ajoutent encore au bruit de fond. Aux alentours du tarmac ou de l’aire de stationnement des appareils, les niveaux sonores sont rarement inférieurs à 80 dBA, d’où la nécessité de choisir judicieusement et de porter des protecteurs d’ouïe. Cette protection devrait permettre une très bonne atténuation du niveau sonore et garantir un confort raisonnable sans entraver les communications essentielles. Les bouchons d’oreilles et les casques antibruit assurent une protection optimale.

L’équipement de piste, outre l’avion lui-même, peut comprendre des chariots à bagages, des navettes pour le personnel, des véhicules de ravitaillement, des matériels de servitude au sol et des passerelles mobiles d’embarquement pour les passagers. Pour assurer le respect des horaires de départ et la satisfaction de la clientèle, ces équipements doivent être déplacés rapidement dans des zones de trafic souvent encombrées, et cela dans des conditions souvent difficiles. Les moteurs d’avions font peser, sur tous les personnels au sol, le risque d’être aspirés par les réacteurs, d’être heurtés par une hélice ou soufflés. La visibilité réduite de nuit et les conditions météorologiques défavorables accroissent la probabilité pour les mécaniciens et les autres personnels de se faire renverser par des engins mobiles. Les bandes réfléchissantes sur les vêtements de travail contribuent certes à améliorer la sécurité, mais il est indispensable que tous les personnels aient reçu une bonne formation et se conforment strictement aux règles de circulation sur les pistes. Les chutes, qui sont la cause la plus fréquente de lésions graves chez les mécaniciens, sont traitées ailleurs dans l’Encyclopédie.

L’exposition aux produits chimiques sur le tarmac inclut l’exposition aux liquides de dégivrage (qui contiennent, en général, de l’éthylène ou du propylèneglycol), aux huiles et aux lubrifiants. Le kérosène est le carburant standard pour les avions à réaction (Jet A1). Les fluides hydrauliques contenant du phosphate de tributyle peuvent provoquer une irritation grave, mais temporaire, des yeux. L’entrée dans les citernes de ravitaillement, bien que rare, devrait avoir été prise en compte. Une exposition aux résines utilisées pour réparer des éléments composites tels que les parois de soutes est également possible.

La maintenance de nuit est en général effectuée dans des circonstances plus faciles soit dans des hangars d’entretien d’escale, soit sur des aires de stationnement peu encombrées. L’éclairage et les postes de travail sont de qualité supérieure à ceux trouvés en ligne, mais probablement inférieure à ceux dont disposent les bases de maintenance. Plusieurs mécaniciens sont susceptibles de travailler simultanément sur un appareil, ce qui exige une planification rigoureuse et une bonne coordination pour gérer les mouvements de personnes, l’activation des organes de l’avion et la mise en œuvre de produits chimiques. L’ordre et la propreté sont essentiels, qu’il s’agisse des canalisations d’air comprimé ou de l’outillage, ainsi que pour remédier aux écoulements et aux fuites pouvant survenir lors de ces travaux. Ces exigences revêtent une plus grande importance encore pour la maintenance en atelier.

Les risques des opérations de maintenance en atelier

Les hangars de maintenance sont d’importants ouvrages capables d’accueillir un grand nombre d’avions. Certains peuvent recevoir simultanément plusieurs gros porteurs, tels que le Boeing 747. Des aires de travail séparées, ou baies, sont attribuées à chaque appareil. Des ateliers spécialisés dans le remplacement et la remise en état des composants travaillent en liaison avec les hangars. On y stocke généralement des tôles, des éléments d’aménagement intérieur, des composants hydrauliques, des plastiques, des roues, des freins, des équipements électroniques et avioniques, ainsi que des équipements de secours. Il peut y avoir aussi des aires de soudage indépendantes, des ateliers de peinture et des zones d’essais non destructifs, tandis que le nettoyage des pièces s’effectue en divers endroits du hangar.

Une ventilation puissante pour la maîtrise des aérocontaminants et une protection contre la pollution environnementale devraient être assurées dans les hangars lorsqu’on procède à des travaux de peinture ou de décapage. Les agents décapants contiennent en effet souvent du chlorure de méthylène et des substances corrosives, dont l’acide fluorhydrique. Les apprêts renferment en général un composé chromaté pour la protection anticorrosion. Les primers (couches d’accrochage) peuvent être à base d’époxy ou de polyuréthane. Le diisocyanate de toluène (TDI) n’est plus guère utilisé, ayant été remplacé par des isocyanates à poids moléculaire plus élevé tels que le 4,4-diphénylméthane-diisocyanate (MDI) ou par des prépolymères. Ceux-ci présentent toujours un risque d’asthme en cas d’inhalation.

La maintenance des moteurs peut être effectuée dans le cadre de la maintenance en base, dans une installation spécialisée ou auprès d’un sous-traitant. La révision d’un moteur exige le recours à des techniques de travail des métaux telles que le meulage, le sablage, le nettoyage chimique, le dépôt de revêtements métalliques et la projection au plasma. Dans la plupart des cas, la silice a été remplacée par des substances moins dangereuses dans le sablage des pièces, mais le matériau de base ou les revêtements peuvent engendrer des poussières toxiques lorsqu’ils sont sablés. Un grand nombre de produits présentant un risque pour la santé des travailleurs ainsi qu’un risque écologique sont employés dans le nettoyage et le dépôt; on peut citer des substances corrosives, des solvants organiques et des métaux lourds. Le cyanure représente en général le plus important et fait l’objet d’une attention spéciale dans l’élaboration des procédures d’urgence. Les opérations de projection exigent également un soin particulier; de fines particules métalliques sont introduites dans un flux de plasma généré à l’aide de sources électriques haute tension avant d’être projetées sur les pièces à traiter, entraînant des niveaux de bruit très élevés et la production d’une énergie lumineuse intense. D’autres risques sont liés au travail en hauteur, au levage et aux postures inconfortables. Parmi les précautions à prendre figurent une ventilation efficace des locaux, le port d’un équipement de protection individuelle adapté, la protection contre les chutes, la formation aux techniques de levage, le recours à des engins de levage mécaniques et, parfois, une nouvelle conception ergonomique des équipements. Ainsi, le nombre élevé de gestes répétés que nécessite le câblage électrique peut être réduit si l’on dispose d’un outillage spécial.

Les applications militaires et agricoles

L’exploitation d’avions militaires présente parfois des risques uniques en leur genre. Le JP4, un carburant pour avions à réaction plus volatil que le kérosène ordinaire (Jet A), est parfois contaminé par du n-hexane. L’essence aviation (AVGAS), carburant utilisé par certains avions à hélices, est hautement inflammable. Les moteurs d’avions militaires, y compris ceux des appareils de transport, sont plus bruyants que ceux des avions civils, et leurs dispositifs de postcombustion augmentent encore les niveaux de bruit. A bord des porte-avions, les risques sont nettement plus élevés: au bruit des moteurs s’ajoute celui des catapultes et des dispositifs de postcombustion; la zone de travail est par ailleurs extrêmement réduite et est elle-même en mouvement. En raison des exigences des opérations, certains postes de pilotage et les zones soumises à des températures élevées sont isolés par de l’amiante.

La nécessité d’échapper à la détection radar (avions furtifs) a engendré une utilisation accrue de matériaux composites sur le fuselage, les ailes et la structure des commandes de vol. Ces parties risquent d’être endommagées en cours de combat ou dans des conditions climatiques extrêmes, ce qui entraîne des réparations importantes. Les interventions effectuées sur le terrain donnent parfois lieu à des expositions lourdes aux résines et aux poussières de matériaux composites. Le béryllium est, lui aussi, un matériau courant dans les applications militaires. L’hydrazide peut être présent dans les groupes auxiliaires de bord et l’armement antitank inclure de l’uranium de faible radioactivité. Les précautions à prendre portent sur les équipements de protection individuelle adaptés, y compris la protection respiratoire. Là où cela est possible, des systèmes d’aspiration portatifs devraient être utilisés.

Dans le domaine agricole, les opérations de maintenance effectuées sur les avions d’épandage peuvent donner lieu à une exposition aux pesticides sous la forme d’un produit unique ou, dans le cas le plus courant, d’un mélange de produits susceptibles de contaminer un ou plusieurs avions. Les produits de dégradation de certains pesticides sont plus dangereux que le pesticide lui-même. Les voies de contamination cutanée sont parfois importantes et peuvent être aggravées par la transpiration. Les avions utilisés dans l’agriculture et, en particulier, leurs parties extérieures, devraient être soigneusement nettoyés avant toute intervention et un équipement de protection individuelle visant la peau et l’appareil respiratoire devrait être porté.

LES OPÉRATIONS EN VOL

Nancy Garcia et H. Gartmann*

* Certaines parties du texte sont une adaptation de l'article «Aviation – Personnel navigant», de H. Gartmann, publié dans la 2e édition de l'Encyclopédie de médecine, d'hygiène et de sécurité du travail.

Le présent article traite de la sécurité et de la santé des membres d’équipage de l’aviation civile dans le cadre de leur travail. Pour plus d’informations, on se référera aux articles «Les opérations aéroportuaires et le contrôle de la circulation aérienne», «La maintenance des appareils» et «Les hélicoptères».

Le personnel navigant technique

Le personnel navigant technique, ou équipage, est responsable de la conduite de l’avion. Selon le type d’avion, ce personnel comprend le commandant de bord, le copilote (ou premier officier) et le mécanicien navigant (ou deuxième officier).

Le commandant de bord assume la responsabilité de la sécurité de l’appareil, des passagers et des autres membres d’équipage. Il est le représentant légal du transporteur aérien. Celui-ci et l’autorité de tutelle l’investissent des pouvoirs lui permettant d’exécuter toutes les tâches que comporte sa mission. Le commandant de bord coordonne toutes les activités du poste de pilotage et demeure en même temps responsable de l’ensemble de l’avion.

Le copilote prend ses ordres directement auprès du commandant de bord dont il assume les fonctions, par délégation, en l’absence de ce dernier. Il est le principal assistant du commandant de bord au sein de l’équipage. Dans les appareils de nouvelle génération avec poste de pilotage à deux et sur les bimoteurs plus anciens, le copilote est le seul assistant.

Beaucoup d’avions appartenant aux générations précédentes nécessitent un troisième membre d’équipage; ce peut être soit le mécanicien navigant (ou ingénieur de bord), soit un troisième pilote (souvent appelé deuxième officier). Lorsque sa présence a été prévue, le mécanicien navigant est responsable des installations mécaniques de l’appareil. Sur les appareils de nouvelle génération, un grand nombre de tâches qui incombaient au mécanicien navigant ont été automatisées. Dans les vols à deux, les pilotes accomplissent aussi des tâches qui n’ont pas été automatisées et qui incomberaient normalement à un mécanicien navigant.

Sur certains vols long-courriers, l’équipage est parfois complété par un pilote ayant les qualifications de commandant de bord, par un copilote supplémentaire et, en cas de nécessité, par un mécanicien navigant supplémentaire.

Les règlements nationaux et internationaux prévoient que pour exploiter un appareil immatriculé dans un pays donné, le personnel navigant technique doit être en possession d’une licence valide émise par l’autorité de ce pays. Afin de conserver leur licence, les membres du personnel navigant technique reçoivent chaque année une formation au sol. Ils doivent également être testés, deux fois par an, sur un simulateur de vol (un dispositif qui simule les conditions réelles du vol et les situations d’urgence) et, dans des conditions réelles, au moins une fois par an.

Pour obtenir le renouvellement de leur licence, les pilotes et les mécaniciens navigants doivent également se soumettre à un examen médical semestriel (dans le cas des pilotes de lignes commerciales âgés de plus de 40 ans), ou annuel (dans le cas des pilotes de lignes commerciales âgés de moins de 40 ans et des mécaniciens navigants). Les prescriptions minimales pour ces examens sont spécifiées par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et par les réglementations nationales. Les autorités de tutelle habilitent un certain nombre de médecins spécialisés dans la médecine aéronautique à procéder à de tels examens. Ces médecins comprennent des médecins dépendant du ministère des Transports, des médecins de l’armée de l’air, des médecins travaillant pour une compagnie aérienne ou des médecins privés désignés par les autorités de tutelle.

Le personnel navigant commercial

Le personnel navigant commercial (stewards et hôtesses) est essentiellement responsable de la sécurité et du confort des passagers. Il accomplit des tâches de routine, mais est aussi responsable de la gestion de la cabine de l’appareil en matière de sécurité et de sûreté. En cas d’urgence, il est responsable de l’organisation de l’évacuation des passagers. En vol, le personnel de cabine doit parfois réagir à des situations d’urgence telles que l’apparition de fumées ou de feu, les turbulences, les problèmes médicaux, la dépressurisation, les détournements et autres menaces terroristes. Outre ses responsabilités en matière de sécurité et de sûreté, le personnel navigant commercial assure également le service à bord.

L’effectif minimal du personnel de cabine varie entre 1 et 14, suivant le type d’appareil, sa capacité et les réglementations nationales. Les besoins en effectifs supplémentaires peuvent être fixés par le biais de conventions collectives. Le personnel navigant commercial est dirigé par un chef de cabine qui est responsable devant le commandant de bord à qui il rend directement compte.

D’une façon générale, les réglementations nationales ne précisent pas que le personnel navigant commercial doive être détenteur de licences au même titre que le personnel navigant technique. Néanmoins, toutes les réglementations nationales exigent que ce personnel ait reçu une formation et un entraînement adaptés aux procédures d’urgence, ainsi qu’un suivi médical régulier.

Les risques et leur prévention

Tous les personnels navigants sont exposés à de nombreux facteurs de stress, à la fois physique et psychologique, aux risques liés à un accident ou à un incident en vol, ainsi qu’à la possibilité de contracter un certain nombre de maladies.

Le stress physique

Le manque d’oxygène (hypoxie) — l’une des principales préoccupations de la médecine aéronautique aux premières heures de l’aviation — n’est plus, depuis une époque relativement récente, qu’un souci mineur dans l’aviation moderne. Dans le cas d’un avion à réaction volant à 12 000 m, l’altitude équivalente à l’intérieur de la cabine pressurisée n’est que de 2 300 m; par conséquent, les sujets en bonne santé ne présentent pas normalement de symptômes d’hypoxie. La tolérance à l’hypoxie varie d’un individu à l’autre; néanmoins, pour un sujet sain non entraîné, le seuil présumé d’altitude à partir duquel il peut souffrir d’hypoxie se situe à 3 000 m environ.

Toutefois, avec l’apparition d’une nouvelle génération d’avions, la qualité de l’air en cabine est revenue au cœur des préoccupations. L’air en cabine provient des compresseurs des moteurs et, parfois aussi, de la cabine elle-même dont une partie de l’air est recyclé. Le débit d’air peut varier entre 0,2 m3 par minute et par personne jusqu’à 1,42 m3 par minute par personne, selon le type et l’âge de l’appareil et selon la place occupée par le passager. Les avions récents utilisent l’air recyclé de la cabine en bien plus grande proportion que les modèles plus anciens. Dans le poste de pilotage, le débit d’air atteint souvent 4,25 m3 par minute et par membre d’équipage. Ce débit plus élevé est nécessaire pour assurer le refroidissement correct des équipements avioniques et électriques.

Au cours des dernières années, le nombre de plaintes formulées par le personnel navigant commercial et les passagers à propos de la mauvaise qualité de l’air s’est accru, poussant les autorités de tutelle à enquêter. Les réglementations nationales ne définissent pas de taux de ventilation minimal pour les cabines d’avions. Le débit d’air effectif n’est parfois mesuré qu’une fois l’avion en service, étant donné qu’il n’existe aucune norme à ce propos. Le débit d’air minimal et l’emploi d’air recyclé, associés à d’autres problèmes de qualité de l’air tels que la présence de polluants chimiques, de micro-organismes, d’allergènes, de fumée de tabac et d’ozone exigeraient des études et des évaluations plus poussées.

Le maintien d’une température agréable à l’intérieur de la cabine ne pose pas de difficulté dans l’aéronautique moderne, tandis que le taux d’humidité ne peut être porté à un niveau confortable en raison de l’important différentiel de température entre l’intérieur et l’extérieur de la cabine. Par conséquent, tant l’équipage que les passagers sont exposés à un air extrêmement sec, surtout durant les vols de longue durée. A l’heure actuelle, le taux d’humidité relative de l’air à l’intérieur d’un avion varie entre environ 25% et moins de 2%. Certains passagers et membres d’équipage ressentent un inconfort, sous forme de sécheresse des yeux, du nez et de la gorge, surtout lors de vols de plus de trois ou quatre heures. Il n’a cependant pas été prouvé que le faible taux d’humidité relative de l’air ait des effets indésirables graves sur la santé du personnel navigant. Des précautions devraient néanmoins être prises pour éviter la déshydratation; l’absorption de liquides (eau, jus de fruit) devrait suffire à prévenir l’inconfort.

Le mal de l’espace (vertiges, malaises et vomissements causés par les mouvements de l’avion et l’altitude) a été une source de gêne pour les équipages et les passagers pendant plusieurs décennies et ce problème subsiste dans le cas des petits avions de tourisme, ainsi que des avions militaires et de voltige. Dans le cas des avions à réaction modernes, les troubles ressentis sont beaucoup moins aigus et de plus en plus rares; cela s’explique par les poids supérieurs au décollage, les altitudes de croisière plus élevées (l’avion se trouve au-dessus des zones de turbulences) et par l’utilisation d’un radar embarqué qui permet de localiser et de contourner les orages. Par ailleurs, la régression des troubles peut aussi être attribuée à la conception plus spacieuse des cabines modernes, qui confère un sentiment accru de sécurité, de stabilité et de confort.

Autres risques physiques ou chimiques

Le bruit des moteurs, qui constitue un grave inconvénient pour le personnel au sol, est moins aigu pour le personnel navigant d’un avion à réaction moderne qu’il ne l’était dans un avion avec moteurs à pistons. L’efficacité des mesures prises, telles que l’insonorisation des cabines, a permis d’éliminer cette nuisance dans la plupart des phases de vol. De plus, les améliorations du matériel de communication ont considérablement abaissé le niveau du bruit de fond émis par ces sources.

L’exposition à l’ozone constitue, à la fois pour le personnel navigant et les passagers, un risque connu et pourtant mal maîtrisé. L’ozone présent dans la couche supérieure de l’atmosphère résulte de la conversion photochimique de l’oxygène sous l’effet du rayonnement solaire ultraviolet aux altitudes utilisées par les avions à réaction commerciaux. La concentration moyenne en ozone croît avec la latitude et est particulièrement importante au printemps. Elle peut également varier avec les conditions climatiques et augmenter dans les couches basses de l’atmosphère.

Les symptômes d’une exposition à l’ozone comprennent la toux, l’irritation des voies aériennes supérieures et de la gorge, une gêne thoracique, des douleurs (notamment respiratoires), l’essoufflement, une respiration sifflante, des céphalées, de la fatigue, une congestion nasale et l’irritation des yeux. La plupart des personnes sont sensibles à l’ozone à des concentrations de 0,02 partie par million (ppm), et des études ont montré que l’exposition à 0,5 ppm ou plus occasionnait une forte dégradation de la fonction pulmonaire. Les effets ressentis sont plus intenses pour les personnes ayant une activité modérée ou élevée que pour celles qui sont au repos ou qui n’ont qu’une faible activité. Par conséquent, en cas de contamination par l’ozone, le personnel navigant commercial (qui exerce une certaine activité physique durant le vol) ressent les effets de l’ozone de manière plus précoce et avec une plus grande fréquence que le personnel navigant technique ou les passagers du même vol.

Dans une étude conduite à la fin des années soixante-dix par l’autorité de tutelle de l’aviation aux Etats-Unis (Rogers, 1980), plusieurs vols (pour la plupart à une altitude comprise entre 9 150 et 12 200 m) ont été étudiés afin d’y mesurer la contamination par l’ozone. Dans 11% des cas, les concentrations étaient supérieures aux limites admissibles. Les méthodes permettant de diminuer l’exposition à l’ozone comprennent le choix de routes et d’altitudes plus favorables, ainsi que le traitement de l’air, généralement grâce à des convertisseurs catalytiques; toutefois, ces derniers sont eux-mêmes sujets au phénomène de contamination et peuvent perdre de leur efficacité. Les règlements existants ne prescrivent pas d’inspection régulière des convertisseurs et n’exigent pas non plus le monitorage des niveaux d’ozone dans les situations réelles de vol. Les personnels navigants, en particulier les personnels navigants commerciaux, ont exigé la mise en place d’une meilleure surveillance.

Le rayonnement cosmique constitue un autre sujet de préoccupation pour les personnels navigants, qu’ils soient techniques ou commerciaux. Ce rayonnement est transmis à travers l’espace par le soleil et d’autres sources extraterrestres. La majeure partie de ces rayons voyageant dans l’espace sont absorbés par l’atmosphère terrestre; cependant, à haute altitude, la protection n’est que très partielle. Le champ magnétique terrestre confère lui aussi une certaine protection qui est maximale à proximité de l’équateur et décroît aux latitudes supérieures. Les personnels navigants sont exposés en vol à des flux de particules supérieurs à ceux qui règnent au sol.

L’exposition de chaque individu varie en fonction du type et de la fréquence des vols. C’est ainsi qu’un membre d’équipage qui passe un grand nombre d’heures à des altitudes et à des latitudes élevées (routes polaires, par exemple) recevra la dose de rayonnement la plus forte. L’Administration fédérale de l’aviation (Federal Administration Aviation (FAA)), l’autorité de tutelle pour l’aviation civile aux Etats-Unis, a estimé que la dose moyenne de rayonnement cosmique absorbée à long terme par le personnel navigant était comprise entre 0,025 et 0,93 millisieverts (mSv) pour 100 heures de vol (Friedberg et coll., 1992). Selon les estimations de la FAA, un membre d’équipage qui effectue 960 heures annuelles (soit 80 heures par mois en moyenne) recevrait une dose annuelle comprise entre 0,24 et 8,928 mSv. Ces niveaux d’exposition sont inférieurs à la limite d’exposition professionnelle recommandée de 20 millisieverts par an (exposition moyenne sur 5 ans) établie par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR).

La CIPR recommande toutefois que l’exposition aux rayonnements ionisants n’excède pas 2 mSv en cours de grossesse. De plus, le Conseil national sur la protection et la mesure des rayonnements (National Council on Radiation Protection and Measurements (NCRP)) recommande que l’exposition n’excède pas 0,5 mSv à compter du début d’une grossesse. Si un membre d’équipage a travaillé un mois entier sur des vols aux plus forts taux d’exposition, la dose mensuelle d’exposition est susceptible de dépasser la limite préconisée. Si un tel schéma de vol se prolonge sur cinq à six mois, il peut également en résulter une exposition dépassant la limite de 2 mSv recommandée pour les femmes enceintes.

Parmi les effets sur la santé d’une exposition à de faibles niveaux de rayonnement sur une période de plusieurs années, il faut citer le cancer, les anomalies génétiques et les malformations congénitales chez les enfants exposés dans l’utérus. La FAA estime que le risque supplémentaire de cancer entraînant la mort à la suite d’une exposition au rayonnement cosmique en vol est compris entre 1 sur 1 500 et 1 sur 94, selon le type de routes empruntées et le nombre d’heures de vol. Le niveau de risque supplémentaire d’anomalies génétiques graves résultant de l’exposition de l’un des deux parents au rayonnement cosmique est compris entre 1 pour 220 000 naissances et 1 pour 4 600 naissances. Le risque d’arriération mentale et de cancer se déclarant à l’enfance chez un fœtus ayant été exposé au rayonnement cosmique pendant sa vie in utero serait compris entre 1 pour 20 000 et 1 pour 680, selon le type et la quantité de vols effectués par la mère au cours de sa grossesse.

Le rapport de la FAA conclut que «pour un membre d’équipage de sexe féminin non gravide l’exposition au rayonnement cosmique n’est pas un facteur limitatif»; en effet, même dans le cas d’un rythme de travail annuel de 1 000 heures de vol, la dose absorbée demeure inférieure de moitié aux recommandations de la CIPR. Cependant, pour une femme enceinte, la situation est différente. La FAA estime, d’après ce qu’il ressort d’un tiers environ des vols étudiés (Friedberg et coll., 1992), que chez une femme enceinte travaillant 70 heures par mois la limite recommandée est dépassée au bout de 5 mois.

Il convient de souligner que ces estimations concernant les taux d’exposition et de risque ne font pas l’unanimité. Elles se fondent sur des hypothèses relatives au type et à la composition des particules radioactives rencontrées en altitude et sur leur masse pour estimer les doses absorbées. Certains scientifiques sont convaincus que le risque réel d’irradiation encouru par le personnel navigant est supérieur aux estimations. Pour déterminer de manière plus précise l’importance de l’exposition au rayonnement cosmique en vol, un suivi complémentaire de l’environnement de vol à l’aide d’instruments fiables apparaît indispensable.

Tant que les niveaux d’exposition ne seront pas mieux connus, il est dans l’intérêt des personnels navigants de maintenir le plus bas possible leur exposition aux rayonnements de toute nature. S’agissant de l’exposition en vol, la réduction des heures de vol et l’éloignement par rapport à la source de rayonnement ont un effet direct sur la dose reçue. La réduction de la durée mensuelle ou annuelle de vol ou la sélection de vols à basse altitude et à faibles latitudes diminueront le niveau d’exposition. Un membre d’équipage a la possibilité de formuler des souhaits concernant ses missions, de choisir de voler pendant un nombre d’heures réduit et de demander un panachage de missions sur des vols moyens et long-courriers ou encore d’exiger des congés périodiques. Une femme enceinte faisant partie du personnel navigant peut choisir de prendre ses congés pendant toute la durée de sa grossesse. Puisque le premier trimestre d’une grossesse correspond à la période la plus critique pour le fœtus, une femme membre d’équipage qui prévoit une grossesse pourra aussi envisager de prendre un congé, surtout si elle est régulièrement affectée aux vols long-courriers sur des routes polaires et n’est pas en mesure de modifier ses horaires de vol.

Les problèmes ergonomiques

Le principal problème ergonomique qui se pose au personnel navigant technique est la nécessité de travailler de longues heures d’affilée en position assise et dans une zone de travail exiguë. Il doit, dans une position de mobilité réduite par son harnais, exécuter une multitude de tâches incluant des mouvements de bras et de tête dans différentes directions, lire des instruments à une distance d’environ 1 m vers le haut, vers le bas, de face et latéralement, scruter l’horizon, étudier une carte ou un manuel à très courte distance (30 cm), écouter et communiquer par radio au moyen d’un casque et d’un micro. Les sièges, les instruments, l’éclairage, le microclimat du poste de pilotage et l’équipement de communication font l’objet d’améliorations continues. De nos jours, les postes d’équipage modernes, souvent appelés postes de pilotage «tout verre», représentent un nouveau défi aussi bien pour les concepteurs que pour les usagers, en raison du recours à une technologie de pointe et à une automatisation poussée. Dans ces conditions, maintenir la vigilance requise et une perception précise de la situation a engendré de nouvelles difficultés.

Les problèmes sont entièrement différents pour le personnel navigant commercial et concernent en premier lieu leurs déplacements dans la cabine en cours de vol. Pendant la montée, en descente et durant la traversée de zones de turbulences, les hôtesses et les stewards sont contraints de se déplacer sur un plan incliné. Dans certains avions, la pente de la cabine peut être d’environ 3% pendant toute la durée du vol. Par ailleurs, la conception de nombreux planchers est telle qu’un effet de rebond au cours de la marche amplifie le stress que subit le personnel appelé à se déplacer sans arrêt. Les chariots mobiles posent également un problème au personnel, car ils pèsent parfois jusqu’à 140 kg et doivent être poussés ou tirés sur toute la longueur de la cabine, le long de couloirs étroits. De plus, la mauvaise conception et la maintenance insuffisante des mécanismes de freinage de ces chariots ont engendré une augmentation des traumatismes dus à des efforts répétitifs. Les transporteurs aériens et les constructeurs se penchent maintenant d’un peu plus près sur ce type d’équipement, et des chariots de conception nouvelle comportent déjà certaines améliorations ergonomiques. D’autres difficultés tiennent à la nécessité de soulever et de transporter des objets lourds ou encombrants dans des espaces réduits et dans des postures inconfortables.

La charge de travail

La charge de travail du personnel navigant est fonction de la nature et de la conception ergonomique des tâches, des horaires de travail et de divers autres facteurs. Le personnel navigant technique est quant à lui particulièrement concerné par les aspects ci-après:

Certains de ces facteurs peuvent se révéler tout aussi importants pour le personnel navigant commercial. Ce personnel est de surcroît soumis à l’influence des facteurs suivants:

La direction des compagnies aériennes, ainsi que les administrations publiques prennent des mesures pour maintenir dans des limites raisonnables la charge de travail du personnel navigant en s’efforçant, notamment, d’améliorer le contrôle de la circulation aérienne, les temps de service et de repos, l’assistance à la préparation des vols, la qualité de la maintenance, du ravitaillement et du nettoyage, l’automatisation du poste de pilotage, la normalisation des procédures, l’effectif des équipages, et de mettre à disposition des équipements efficaces et simples à utiliser.

L’organisation du temps de travail

La fatigue liée au vol et la récupération sont des questions clefs en matière de sécurité et de santé des personnels navigants techniques et commerciaux. Ces sujets sont aussi parmi les plus fréquemment débattus et les plus controversés. Ils comportent des aspects multiples: horaires de travail et durée des temps de service, nombre d’heures de vol (par jour, par mois et par an), périodes de réserve, temps disponible pour le repos, à la fois en mission et à domicile. Les rythmes circadiens, en particulier les temps de sommeil, avec toutes leurs implications physiologiques et psychologiques, jouent un rôle notoirement important pour les membres d’équipage. Les décalages horaires variables induits soit par les vols de nuit, soit par les vols d’Est en Ouest ou d’Ouest en Est, posent les problèmes les plus sérieux. Les avions de nouvelle génération, qui peuvent voler pendant quinze à seize heures sans escale, ont encore amplifié les conflits entre les horaires des compagnies et les limites humaines.

Les réglementations relatives aux temps de service, aux périodes de vol et de repos minimal varient d’un pays à l’autre. Dans certains cas, elles n’ont pas suivi le rythme des progrès technologiques et scientifiques et ne garantissent pas nécessairement la sécurité des vols. Jusqu’à une date récente, les tentatives de normalisation de ces réglementations ont été peu nombreuses. En revanche, les efforts d’harmonisation en cours préoccupent le personnel navigant qui redoute que les pays bénéficiant d’une législation plus restrictive doivent s’adapter aux normes moins strictes de pays plus laxistes. En dehors des règlements nationaux, beaucoup de personnels navigants ont réussi à négocier, dans leurs conventions collectives, des dispositions plus restrictives en ce qui concerne leurs horaires. La plupart des équipages ont conscience de l’incidence que peuvent avoir ces dispositions sur leur sécurité et leur santé, ainsi que sur celles des passagers. Par conséquent, il est du devoir des autorités de tutelle de définir des normes minimales et d’en assurer l’application.

Le stress psychologique

Depuis quelques années, les équipages sont confrontés à un facteur de stress psychologique important, à savoir l’éventualité d’un détournement, d’une attaque à main armée ou d’un attentat à la bombe à bord de l’appareil. Dans le monde entier, les mesures de sécurité et de sûreté ont été renforcées et améliorées, mais les terroristes ont dans le même temps perfectionné leurs méthodes. Les pirates de l’air, les terroristes et autres auteurs d’actes criminels constituent une réelle menace pour l’ensemble du personnel navigant. L’engagement et la coopération des autorités de tutelle, ainsi que la pression de l’opinion publique, sont indispensables pour prévenir de tels actes. De plus, les membres d’équipage devraient recevoir une formation continue spécifique et être informés le plus rapidement possible d’éventuelles menaces de détournements ou d’actions terroristes.

Le personnel navigant sait qu’il est important de commencer un vol dans de bonnes dispositions mentales et physiques pour s’assurer que la fatigue et le stress occasionnés par le vol lui-même n’aient aucune incidence sur la sécurité. Le stress psychologique et physique altère parfois la santé du personnel et il est de la responsabilité de chaque membre d’équipage de savoir s’il est apte ou non à prendre son service. Dans certains cas, cependant, la personne concernée n’est pas à même d’évaluer immédiatement son état. C’est la raison pour laquelle la plupart des compagnies aériennes et des syndicats de personnels navigants ont recours à des spécialistes pour les aider dans ce domaine.

Les accidents

Fort heureusement, les catastrophes aériennes sont rares; elles n’en représentent pas moins un risque pour le personnel navigant. Les accidents d’avion n’ont pour ainsi dire jamais de cause unique bien définie; ils résultent d’une multiplicité de facteurs techniques et humains qui s’additionnent pour y concourir.

Parmi les causes d’origine mécanique figurent les défauts de conception et les pannes, dues notamment à un défaut de main-tenance. Quoique relativement rare, la mort d’un membre d’équipage est à prendre en compte (infarctus du myocarde, par exemple). Les autres défaillances humaines comprennent la perte de conscience (crise d’épilepsie, syncope, intoxication alimentaire, etc.) ou une lente dégradation de certaines fonctions telles que l’ouïe ou la vue. La prévention des accidents d’origine médicale est l’une des principales missions de la médecine aéronautique. Une sélection rigoureuse du personnel, des examens médicaux réguliers, le suivi des absences pour maladies et accidents, la continuité des contacts entre les professionnels de la médecine et le monde du travail, ainsi que les enquêtes d’hygiène industrielle peuvent considérablement diminuer le risque d’incapacité soudaine ou de détérioration lente des facultés du personnel navigant technique. Le personnel médical devrait aussi surveiller régulièrement les méthodes de programmation des vols afin de prévenir les incidents et accidents liés à la fatigue. Toute compagnie aérienne de grande envergure, moderne et bien gérée, devrait disposer de son propre service médical.

En matière de prévention des accidents, les progrès sont souvent le fruit d’enquêtes minutieuses. L’étude systématique des accidents et des incidents par une commission d’enquête comprenant des experts techniques, des spécialistes de l’exploitation et des experts médicaux est indispensable pour dresser l’inventaire de tous les facteurs contributifs et élaborer des recommandations en vue de la prévention d’accidents ou d’incidents futurs.

En aviation, un certain nombre de règles strictes visent la prévention d’accidents causés par l’abus d’alcool ou de drogues. Les membres d’équipage ne devraient pas consommer d’alcool en quantité supérieure à celle compatible avec l’exercice de leurs fonctions et, en tout cas, pas huit à douze heures au moins avant la prise de leur service, selon les législations. La consommation de drogues illicites est rigoureusement interdite; la prise de médicaments est strictement contrôlée et elle est en général interdite pendant ou immédiatement avant le vol, sauf si un médecin agréé autorise une dérogation.

Le transport de marchandises dangereuses est une autre cause d’accidents et d’incidents. Une enquête sur une période de deux ans (1992-93) a permis d’identifier plus d’un millier d’incidents impliquant des marchandises dangereuses transportées par des avions de ligne ou par des avions-cargos dans un seul et même pays. Plus récemment, un accident ayant fait 110 morts aux Etats-Unis a été imputé au transport de fret dangereux. Les incidents dus à des matières dangereuses se produisent pour toutes sortes de raisons. En effet, les transitaires et les passagers ne sont pas toujours conscients des risques inhérents aux matières qu’ils font transporter. Il arrive également que des personnes peu scrupuleuses choisissent d’expédier illégalement des matières dangereuses. Des restrictions supplémentaires en matière de transport de ce type de matières par avion et une formation plus poussée du personnel navigant et des transitaires peuvent aider à prévenir de tels incidents. D’autres dispositions concernent l’alimentation en oxygène, les repas de l’équipage et la conduite à tenir en cas de maladie.

Les pathologies

Pour les membres d’équipage, aucune maladie professionnelle spécifique n’est connue ou répertoriée. Toutefois, il est possible que, parmi le personnel navigant, la fréquence de certaines maladies soit supérieure à celle que l’on connaît dans les autres professions. Les rhinites et les infections des voies aériennes supérieures sont fréquentes, ce qui peut s’expliquer, en partie, par le faible taux d’humidité qui règne en cabine et par la présence d’un grand nombre de personnes dans un espace clos. Alors qu’elle est sans gravité pour un employé de bureau, une rhinite peut constituer un handicap sérieux pour un membre du personnel navigant, en particulier si elle s’accompagne d’une congestion des voies aériennes supérieures susceptible d’entraîner des problèmes d’équilibre de pression dans l’oreille interne durant la montée et, plus particulièrement, pendant la descente. Par ailleurs, les maladies qui exigent un traitement médicamenteux sont susceptibles de causer une incapacité de travail temporaire. Les déplacements fréquents dans les régions tropicales peuvent entraîner une exposition accrue aux maladies infectieuses et virales (paludisme, infections du système digestif, etc.).

Sur des périodes prolongées, l’atmosphère confinée des cabines d’avion augmente également le risque de contamination par une maladie infectieuse telle que la tuberculose, si un passager ou un membre d’équipage se trouvent à un stade contagieux de la maladie.

LA MÉDECINE AÉROSPATIALE: LES EFFETS DE LA PESANTEUR, DE L’ACCÉLÉRATION ET DE LA MICROPESANTEUR

Relford E. Patterson et Russell B. Rayman

Depuis le premier vol réel d’un appareil motorisé à Kitty Hawk, en Caroline du Nord (Etats-Unis), en 1903, l’aviation est devenue une activité internationale de premier plan. On estime qu’entre 1960 et 1989 le nombre de passagers empruntant des vols réguliers est passé de 20 millions à plus de 900 millions par an (Poitrast et deTreville, 1994). Par ailleurs, dans de nombreux pays, l’aviation militaire fait partie des forces armées. Les progrès technologiques de l’aviation, en particulier dans la conception des systèmes de survie, ont contribué au développement rapide des programmes spatiaux habités. Les vols spatiaux orbitaux sont relativement fréquents et les astronautes travaillent dans les navettes et les stations spatiales pendant de longues périodes.

Dans l’espace, les facteurs de stress physique susceptibles d’affecter la santé des personnels navigants, des passagers et des astronautes sont la faible concentration en oxygène, la pression barométrique réduite, la contrainte thermique, l’accélération, l’apesanteur et une série d’autres risques (DeHart, 1992). Le présent article décrit les conséquences médicales de la pesanteur et de l’accélération en vol dans l’atmosphère, d’une part, ainsi que les effets de la micropesanteur dans l’espace, d’autre part.

La pesanteur et l’accélération

L’association de la pesanteur et de l’accélération au cours des vols dans l’atmosphère induit une série d’effets physiologiques sur les personnels navigants et les passagers. Sur la Terre, l’activité humaine sous toutes ses formes est soumise à la gravitation terrestre. Le poids d’une personne correspond à la force exercée par le champ de gravité terrestre sur la masse du corps humain (loi de Newton). Le symbole utilisé pour exprimer l’accélération d’un corps en chute libre lorsqu’il est lâché à proximité du sol est g, ce qui correspond à une accélération d’environ 9,81 m/s2 (Glaister, 1988a; Leverett et Whinnery, 1985).

On appelle accélération toute variation de vitesse d’un corps. Le vecteur vitesse définit la variation de position instantanée d’un corps en amplitude et en direction. La décélération est une accélération négative, c’est-à-dire une diminution de la vitesse. L’accélération (tout comme la décélération) est quantifiable par un vecteur (en amplitude et en direction). Il existe trois types d’accélération: l’accélération linéaire, qui est un changement de vitesse sans changement de direction; l’accélération radiale, qui est un changement de direction sans changement de vitesse; et, enfin, l’accélération angulaire, qui correspond à la fois à un changement de vitesse et de direction. En vol, les avions sont en mesure d’effectuer des mouvements autour des trois axes cartésiens classiques (x, y, z) et de subir des accélérations linéaires, radiales ou angulaires. En aviation, les accélérations sont communément exprimées sous forme de multiples d’accélération due à la pesanteur (g = 9,81 m/s2) (Glaister, 1988a; Leverett et Whinnery, 1985).

La biodynamique

La biodynamique est une science qui traite des forces et de l’énergie des êtres vivants; elle revêt un intérêt majeur en médecine aérospatiale. Les avions modernes se manœuvrent aisément, volent à des vitesses élevées et engendrent des accélérations. L’influence de l’accélération sur le corps humain est fonction de son amplitude et de sa direction par référence à un système d’axes tridimensionnels, l’axe z correspondant à l’axe longitudinal du corps; l’axe y est transversal; et l’axe x est perpendiculaire aux deux autres (Glaister, 1988a). Ces accélérations peuvent être continues ou transitoires.

Les accélérations continues

Les occupants d’un avion (et ceux d’un engin spatial sous l’influence de la pesanteur lors du lancement et du retour dans l’atmosphère) ressentent habituellement des accélérations induites par les forces appliquées à l’appareil (aérodynamique, pesanteur, moteurs). Des accélérations de plus de deux secondes peuvent se produire à la suite de changements de vitesse ou de direction. Les effets physiologiques d’une accélération continue résultent de la distorsion de tissus et d’organes du corps humain, ainsi que des variations du flux sanguin et de la répartition des liquides physiologiques (Glaister, 1988a).

Une accélération positive (+Gz) le long de l’axe z (c’est-à-dire vers le haut) constitue le problème physiologique principal. Dans les transports aériens civils, les accélérations de type Gz sont rares; elles ne se produisent qu’occasionnellement, de façon atténuée, au cours de décollages ou d’atterrissages et lors de la traversée de zones de turbulences. Lorsque les avions subissent des turbulences, les passagers ressentent parfois de brèves sensations d’apesanteur (accélérations négatives –Gz). En cas d’accélération brusque et inopinée, le personnel et les passagers non attachés à leurs sièges risquent d’être projetés contre les parois de la cabine et de se blesser.

Contrairement à l’aviation civile, le pilotage d’avions, qu’ils soient militaires, d’acrobatie ou d’épandage agricole peut engendrer des accélérations linéaires, radiales ou angulaires plus élevées. Les accélérations importantes résultent d’un brusque changement de cap ou d’évolutions dans le plan vertical. Les performances des avions de combat actuels exposent parfois les pilotes à des accélérations positives Gz de 5 à 7 g pendant 10 à 40 secondes (Glaister, 1988a). Les personnels navigants ressentent une augmentation du poids de leurs tissus et des extrémités de leurs membres à des accélérations aussi faibles que + 2Gx. A titre d’exemple, un pilote de 70 kg effectuant une manœuvre engendrant une accélération de +2Gz ressentirait un doublement du poids de son corps, c’est-à-dire qu’il aurait la sensation de peser 140 kg.

Le système cardio-vasculaire est le système le plus important de l’organisme en ce qui concerne la tolérance et la réaction au stress engendré par les accélérations autour de l’axe vertical z (Glaister, 1988a). Les effets d’une accélération positive sur la vue et les performances mentales sont dus à une diminution du flux sanguin et du débit d’oxygène acheminés aux yeux et au cerveau. L’amplitude du flux sanguin dans l’organisme est lié à la capacité du cœur de surmonter la pression hydrostatique sanguine, ainsi que les forces d’inertie générées par Gz en tout point du système circulatoire. L’exposition aux accélérations positives peut causer des pertes momentanées de la vision périphérique, voire une perte totale de conscience. Les pilotes d’avions militaires à hautes performances encourent le risque de perte de connaissance due à +Gz. Les arythmies bénignes sont fréquentes à la suite d’une exposition à des niveaux élevés d’accélération +Gz. En général, ces arythmies n’ont que peu de conséquences cliniques, sauf si la maladie était déjà déclarée. Des accélérations négatives Gz peuvent apparaître en cas de vol sur le dos, de loopings inverses ou d’autres manœuvres acrobatiques, ou encore en combat aérien. Les effets physiologiques associés à l’exposition à l’accélération –Gz comprennent surtout une augmentation des pressions vasculaires dans la partie supérieure du corps, la tête et le cou (Glaister, 1988a).

Les accélérations continues qui s’exercent à angle droit par rapport à l’axe du corps sont appelées accélérations transversales et sont relativement rares, à l’exception des décollages catapultés sur porte-avions, des décollages assistés par fusées, ainsi que pendant le lancement de fusées — notamment les navettes spatiales — et sur certains types d’avions expérimentaux. Ces accélérations Gy sont relativement faibles et n’affectent pas le corps de manière significative, beaucoup moins en tout cas que les accélérations Gz.

Les accélérations transitoires

Les réactions physiologiques aux accélérations transitoires constituent une question fondamentale pour la prévention des accidents d’avion et la protection des personnels et des passagers. Ces accélérations sont de si courte durée (nettement inférieure à une seconde) que le corps n’est pas en mesure d’atteindre un état stable. La cause la plus fréquente de dommages corporels en cas d’accident d’avion est la décélération brutale qui se produit au moment de l’impact sur le sol ou sur l’eau (Anton, 1988). Au moment de l’impact, en effet, une quantité impressionnante d’énergie cinétique se convertit en énergie potentielle destructrice pour l’appareil et ses occupants. Le corps humain réagit à ces forces par contraction. Les lésions résultent de la déformation des tissus et des organes et du traumatisme subi par collision avec les structures du poste de pilotage ou de la cabine.

L’être humain tolère plus ou moins bien les décélérations brusques. La nature des lésions dépend du type de forces appliquées (impact ou pénétration). Lors du choc, les forces engendrées sont fonction des décélérations latérales et longitudinales qui s’appliquent à l’objet considéré. Les forces de décélération brutales sont classées en trois catégories: les forces tolérables qui causent des lésions bénignes (telles qu’ecchymoses et lésions cutanées), les forces traumatisantes qui occasionnent des lésions modérées ou graves, et les forces létales qui entraînent la mort. On estime qu’une impulsion d’environ 25 g d’une durée de 0,1 seconde constitue la limite de la tolérance sur l’axe +Gz et qu’environ 15 g pour 0,1 seconde constitue la limite sur l’axe –Gz (Anton, 1988).

La tolérance de l’être humain vis-à-vis des accélérations de courte durée est fonction de nombreux facteurs, à savoir l’amplitude et la durée d’application des forces, leur direction et leur point d’application. Il est important de souligner que les êtres humains résistent bien mieux aux forces s’exerçant perpendiculairement à l’axe longitudinal du corps (axe z).

Les mesures palliatives

L’examen approfondi des membres d’équipage en vue d’identifier des maladies graves préexistantes pouvant présenter un danger dans l’espace est l’un des éléments essentiels des programmes médicaux aérospatiaux. Il est possible aux équipages d’avions à hautes performances de se protéger contre les effets indésirables des fortes accélérations. Ils doivent être entraînés à reconnaître les nombreux facteurs physiologiques susceptibles de diminuer leur résistance aux accélérations. Ces facteurs de risque incluent la fatigue, la déshydratation, la chaleur, l’hypoglycémie et l’hypoxie (Glaister, 1988b).

Trois types d’exercices permettent de combattre ou tout au moins de limiter les effets indésirables de l’accélération continue en vol: ce sont la contraction musculaire, l’expiration forcée avec la glotte fermée ou partiellement fermée et l’inspiration forcée (Glaister, 1988b; DeHart, 1992). Les contractions musculaires forcées exercent une plus grande pression sur les vaisseaux sanguins, diminuant la pression artérielle et accroissant le débit cardiaque, ce qui engendre une augmentation du flux sanguin vers le cœur et le haut du corps. Cet exercice est efficace, mais il exige des efforts volontaires et soutenus et peut rapidement se révéler fatigant. L’expiration avec fermeture de la glotte, appelée manœuvre de Valsalva (ou procédure M-1 ), permet d’augmenter la pression dans le haut du corps, ainsi que la pression intrathoracique; cependant, le résultat n’est que de courte durée et risque d’être préjudiciable si l’effort est prolongé, car il réduit le retour veineux et le débit cardiaque. L’expiration forcée avec la glotte partiellement fermée constitue un exercice anti-G plus efficace. L’inspiration forcée est une autre méthode permettant d’augmenter la pression intrathoracique. Les pressions positives sont transmises au système artériel supérieur et engendrent une augmentation du flux sanguin dans les yeux et le cerveau. La respiration avec pression positive doit s’accompagner du port de combinaisons anti-G pour lutter contre une pression artérielle trop forte dans les membres et la partie inférieure du corps.

Les navigants militaires pratiquent toutes sortes d’exercices pour améliorer la tolérance aux G. Les équipages s’entraînent souvent dans une centrifugeuse consistant en une nacelle reliée à un bras tournant. Les navigants se familiarisent ainsi avec l’ensemble des symptômes physiologiques et apprennent à les maîtriser. Les exercices physiques, en particulier les entraînements à la résistance du corps entier, se sont également révélés efficaces. Les combinaisons gonflables anti-G représentent l’un des équipements de protection les plus courants. Elles comportent des coussins pneumatiques placés sur l’abdomen, les cuisses et les mollets, et sont reliées au système de pressurisation de l’avion par un tuyau et une valve. La valve règle la pression en fonction de l’accélération de l’avion. En gonflant, la combinaison anti-G engendre une augmentation de pression sur les tissus, ce qui a pour effet de maintenir une résistance vasculaire périphérique et de réduire l’apport de sang à l’abdomen et aux membres inférieurs (Glaister, 1988b).

La survie aux accélérations transitoires liées aux catastrophes aériennes est conditionnée par des systèmes de maintien efficaces et par la préservation de l’intégrité de la cellule, afin de limiter l’intrusion d’éléments extérieurs ou propres à l’avion, dans la cabine ou le poste de pilotage. La fonction des sangles, des harnais et autres systèmes de retenue est de limiter les mouvements du personnel et des passagers et d’atténuer les effets d’une décélération soudaine au moment de l’impact. L’efficacité du système de retenue est fonction de la bonne transmission des efforts entre le corps humain et le siège ou la structure. Les sièges absorbant l’énergie et ceux tournés vers l’arrière constituent d’autres moyens de limiter les dommages corporels. Les mesures de prévention technique des accidents comportent également la conception d’éléments de cellule (fuselage et voilure) absorbant l’énergie, ainsi que l’amélioration de la structure des sièges (DeHart, 1992; DeHart et Beers, 1985).

La micropesanteur

Depuis les années soixante, les astronautes et les cosmonautes ont effectué de nombreuses missions dans l’espace, dont six alunissages par des équipages américains. La durée des missions variait de quelques jours à plusieurs mois, certains cosmonautes russes réussissant à séjourner dans l’espace pendant environ un an. Suite à ces vols, médecins et scientifiques ont rédigé de nombreux articles concernant les anomalies physiologiques en vol et consécutives à celui-ci. La plupart de ces anomalies étaient attribuées à l’apesanteur ou à la micropesanteur. Bien que ces effets soient transitoires et disparaissent totalement en quelques jours ou en quelques semaines après le retour sur la Terre, personne ne peut affirmer avec une absolue certitude qu’il en sera de même après des missions de deux à trois ans, comme celles envisagées pour un vol aller et retour Terre-Mars. Les anomalies importantes (et les mesures préventives qui s’y rapportent) relèvent des catégories cardio-vasculaires, musculo-squelettiques, neurovestibulaires, hématologiques et endocrinologiques (Nicogossian, Huntoon et Pool, 1994).

Les risques cardio-vasculaires

Jusqu’ici aucun problème cardiaque majeur, tel que crise ou arrêt cardiaque, ne s’est produit dans l’espace, mais certains astronautes ont développé transitoirement des rythmes cardiaques anormaux, en particulier durant les activités extravéhiculaires (EVA). Dans un cas, par mesure de précaution, un cosmonaute russe a dû revenir sur la Terre plus tôt que prévu.

D’autre part, il semble que la micropesanteur entraîne une instabilité de la pression sanguine et du pouls. Même si cela n’a pas d’effet sur la santé ou sur la performance des équipages en vol, un astronaute sur deux ressent d’importants vertiges et étourdissements immédiatement après le retour sur la Terre; certains d’entre eux perdent connaissance (syncope) ou présentent des symptômes de présyncope. L’origine de cette intolérance à la station debout semble liée à la chute de pression sanguine due au retour dans le champ gravitationnel terrestre et associée au dysfonctionnement des mécanismes compensateurs du corps. Si le corps ne réagit pas à ces anomalies physiologiques, il s’ensuit les symptômes décrits ci-dessus. Ces incidents de présyncope et de syncope sont transitoires et ne laissent pas de séquelles. Ils restent toutefois un grand sujet de préoccupation pour plusieurs raisons. Tout d’abord, dans l’éventualité d’un atterrissage d’urgence, par exemple en cas d’incendie, les astronautes ne pourraient pas s’extraire rapidement. En second lieu, les astronautes alunissant après un certain temps passé dans l’espace seraient sujets à des syncopes ou présyncopes malgré l’existence, sur la Lune, d’un champ gravitationnel d’intensité égale à un sixième de celui de la Terre. Enfin, ces problèmes cardio-vasculaires pourraient se révéler bien plus aigus et même mortels après des missions spatiales de très longue durée.

Pour toutes ces raisons, la recherche a été extrêmement active pour prévenir ou, du moins, atténuer les effets de la micropesanteur sur le système cardio-vasculaire. Bien que certaines des mesures actuellement envisagées soient assez prometteuses, aucune n’a pour le moment réellement fait la preuve de son efficacité. Les recherches se sont concentrées sur des exercices en vol ayant recours à un tapis roulant, une bicyclette ergométrique et un rameur. De plus, des études ont également été réalisées sous pression négative des membres inférieurs. On a constaté que l’abaissement de la pression autour de la partie inférieure du corps (à l’aide d’équipements spéciaux) améliore la capacité qu’a l’organisme de compenser la régulation de la pression sanguine et du pouls. Ce phénomène est encore plus efficace lorsque le sujet boit en quantité modérée une solution spéciale d’eau salée.

Pour parvenir à résoudre les problèmes cardio-vasculaires, il faudra, d’une part, pousser plus loin l’étude de ces résultats et, d’autre part, rechercher des solutions nouvelles.

Les risques musculo-squelettiques

Tous les astronautes qui reviennent de l’espace connaissent un certain degré d’atrophie musculaire, indépendamment de la durée de leur mission; les muscles les plus exposés sont ceux des bras et des jambes. Leur taille, leur résistance physique, ainsi que leur endurance s’en trouvent diminuées. Le mécanisme à la base de cette évolution reste mal connu, mais il semble que l’absence de sollicitation musculaire pendant des périodes prolongées explique en partie le phénomène: en micropesanteur, les tâches et les mouvements s’accomplissent presque sans effort, puisque tout est léger. Les astronautes peuvent s’en réjouir tant qu’ils travaillent dans l’espace, mais dès leur retour dans un champ gravitationnel, qu’il s’agisse de celui de la Lune ou de la Terre, les effets se font sentir. Un état d’affaiblissement physique gêne l’astronaute dans ses activités après un vol (y compris le travail à la surface de la Lune), mais compromet également ses capacités à s’échapper rapidement du véhicule en cas d’atterrissage d’urgence. Au cours d’activités extravéhiculaires, la nécessité d’intervenir sur le véhicule spatial peut se révéler très éprouvante. Les mesures envisagées comprennent des exercices en vol, des stimulations électriques et la prise d’anabolisants (testostérone ou stéroïdes). Malheureusement, ces mesures ne font au mieux que retarder le dysfonctionnement musculaire.

Outre l’atrophie musculaire, on constate aussi une perte lente, mais réelle, de la masse osseuse (environ 300 mg par jour, ou 0,5% du calcium total osseux en un mois). Cette évolution a été corroborée par l’examen aux rayons X de l’ossature des astronautes, en particulier des os porteurs (par exemple, la colonne vertébrale). Le phénomène est dû à une perte irrémédiable de calcium par les urines et les selles. La perte continue en calcium, quelle que soit la durée du vol, est un sujet de préoccupation important. Par conséquent, ces phénomènes pourraient constituer un facteur limitatif du nombre de vols, sauf en cas de découverte d’une mesure préventive efficace. Les conditions précises d’apparition de cette anomalie physiologique ne sont pas encore entièrement élucidées, mais il ne fait aucun doute qu’elle est due en partie à l’absence de forces gravitationnelles s’exerçant sur les os, ainsi qu’au défaut de sollicitation des os, un phénomène assez proche de l’atrophie musculaire. Si la perte de substance osseuse se poursuivait, en particulier au cours de missions de longue durée, les os deviendraient cassants, même à de faibles niveaux de sollicitation. De plus, le passage constant de calcium dans les urines comporte un risque de formation de lithiase, accompagnée de douleurs importantes, de saignements et d’infections. Il est clair que toute complication de ce type constituerait un sujet de préoccupation grave dans l’espace.

Il n’existe malheureusement aucun moyen efficace de lutte contre les pertes de calcium en cours de vol. Un certain nombre de solutions sont à l’étude, dont l’exercice physique (tapis roulant, bicyclette ergométrique et rameur), cette stimulation physique normalisant le métabolisme osseux pour limiter, sinon prévenir, le phénomène. Les autres mesures à l’étude sont un apport complémentaire en calcium et en vitamines et la prise de médicaments divers (tels que les diphosphonates, une classe de médicaments dont l’efficacité est reconnue dans la prévention de la perte osseuse chez les patients atteints d’ostéoporose). Si aucune de ces mesures préventives ne fait la preuve de son efficacité, la solution pourrait venir de la pesanteur artificielle obtenue par une rotation intermittente ou continue du véhicule spatial. Un tel mouvement est susceptible de créer des forces gravitationnelles similaires à celles rencontrées sur la Terre, mais du point de vue technique, ce système serait d’une complexité redoutable et d’un coût prohibitif.

Les risques neurovestibulaires

Plus de la moitié des astronautes et des cosmonautes sont victimes du mal de l’espace. Les symptômes varient d’un individu à l’autre, mais la majorité d’entre eux souffrent de gastrites, de nausées, de vomissements, de céphalées et de somnolence. Souvent, ces symptômes sont exacerbés par les mouvements rapides de la tête. Le cas échéant, le mal de l’espace survient dans un délai compris entre quelques minutes et quelques heures suivant le lancement, et le rétablissement intervient dans les trois jours. Il est intéressant de noter que les symptômes apparaissent parfois seulement après le retour sur la Terre.

Outre ces inconvénients, en particulier dans le cas de vomissements, le mal de l’espace nuit aux performances de l’astronaute. Par ailleurs, les vomissements présentent un risque lorsqu’il effectue des activités extravéhiculaires avec sa combinaison pressurisée et peuvent provoquer des dysfonctionnements de celle-ci. C’est la raison pour laquelle aucune activité extravéhiculaire n’est programmée pendant les trois premiers jours d’une mission spatiale. Si une telle activité est indispensable pour effectuer, par exemple, des interventions d’urgence sur le véhicule, l’équipage doit assumer ce risque.

Une grande partie de la recherche neurovestibulaire menée jusqu’ici vise à prévenir ou à guérir le mal de l’espace. Divers moyens ont été testés avec un succès très mitigé, comme la prise de comprimés ou l’utilisation de timbres (patches) et le recours à des dispositifs d’entraînement préalables au vol, tels que les chaises rotatives. Au cours des dernières années, cependant, il est apparu que l’injection de prométhazine, un antihistaminique, constitue un traitement très efficace. Ce médicament est donc systématiquement embarqué lors de vols spatiaux; son efficacité en tant que traitement préventif reste cependant à démontrer.

Parmi les autres symptômes neurovestibulaires, on note les vertiges, les déséquilibres, l’illusion de mouvement ou encore l’impression de déplacement du décor. Après un vol, ces symptômes peuvent rendre la marche difficile. Les mécanismes à la base de ces phénomènes sont extrêmement complexes et demeurent partiellement inexpliqués. Ils pourraient s’avérer problématiques, en particulier en cas d’alunissage après un séjour de quelques jours ou de quelques semaines dans l’espace. En l’état actuel des connaissances, il n’existe pas de mesure préventive efficace.

Ces phénomènes neurovestibulaires sont dus selon toute vraisemblance à un dysfonctionnement de l’oreille interne (canaux semi-circulaires) résultant de la micropesanteur. Des signaux er-ronés seraient envoyés au système nerveux central, ou certains signaux seraient mal interprétés. Des mesures préventives plus efficaces pourront être mises en œuvre dès que ces mécanismes seront mieux compris.

Les risques hématologiques

La micropesanteur a un effet sur les globules rouges et les globules blancs. Les globules rouges servent au transport de l’oxygène dans les tissus, et les globules blancs ont une fonction essentielle dans le système immunitaire. Tout dysfonctionnement de ces cellules pourrait donc avoir des effets désastreux. Pour des raisons non encore élucidées, les astronautes perdent approximativement de 7 à 17% en masse de leurs globules rouges au cours d’un vol. En quelques mois, cette perte se stabilise, puis le retour à la normale se fait entre quatre à huit semaines après le vol.

Ce phénomène ne revêt pas une grande importance clinique, mais représente plutôt une anecdote de laboratoire. Cependant, la perte de masse des globules rouges pourrait constituer à terme une anomalie assez grave. Au cours des missions de très longue durée prévues au XXIe siècle, les globules rouges disparaîtraient à un rythme accéléré et en quantité bien plus importante. Dans ce cas de figure, l’anémie pourrait évoluer à un point où les astronautes tomberaient gravement malades. Il faut espérer qu’il n’en sera rien, quelle que soit la durée de la mission.

Par ailleurs, la micropesanteur affecte aussi les globules blancs, sous la forme notamment d’une augmentation globale de leur nombre, en particulier des neutrophiles, et d’une diminution des lymphocytes. Il apparaît également que certains globules blancs présentent des anomalies de fonctionnement.

En dépit de ces constatations, aucune pathologie n’est attribuée à cette évolution du nombre de globules blancs. Nul ne sait si une mission de longue durée confirmerait ces faits; si c’était le cas, le système immunitaire serait affaibli, exposant ainsi davantage les astronautes aux maladies infectieuses. Ils ne pourraient plus résister à des affections mineures, habituellement combattues par un système immunitaire en bon état.

A l’instar des globules rouges, l’évolution des globules blancs a peu d’intérêt clinique, pour autant que la durée des missions n’excède pas un an. En raison du risque potentiel de maladies graves en vol ou après le vol, il est absolument indispensable de poursuivre les recherches dans ce domaine.

Les risques endocriniens

Des changements relatifs aux liquides physiologiques et aux minéraux du corps humain ont été constatés au cours des vols spatiaux; ils peuvent être expliqués en partie par le rôle du système endocrinien. Une diminution de la masse liquide corporelle, ainsi que des sels minéraux comme le calcium et le potassium, a été mise en évidence. Le mécanisme précis de ces phénomènes n’a pas encore pu être établi, mais des changements à divers niveaux du système hormonal en fournissent une explication partielle. La situation se complique du fait que les laboratoires ayant suivi les astronautes ont abouti à des résultats contradictoires: il est donc impossible d’élaborer une hypothèse unique quant à la cause de ces anomalies physiologiques. Il est à noter que ces phénomènes n’ont pas été préjudiciables à la santé des astronautes et n’ont pas nui à leurs performances en vol. A l’heure actuelle, il est impossible d’évaluer l’importance de ces déséquilibres endocriniens dans la perspective de vols de très longue durée, de même que l’on ne peut affirmer avec certitude qu’ils ne seront pas responsables de séquelles plus graves.

Remerciements: les auteurs souhaitent souligner l’importance du travail accompli par l’Association de médecine aérospatiale dans ce domaine (Aerospace Medical Association), Alexandria, Virginie.

LES HÉLICOPTÈRES

David L. Huntzinger

L’hélicoptère est un aéronef d’un type bien particulier. Il est utilisé partout dans le monde pour des missions très diverses. Sa taille est très variable; on trouve aussi bien de petits hélicoptères monoplaces que des hélicoptères de transport dont le poids dépasse 100 tonnes. Le présent article traite de certains des problèmes que pose l’hélicoptère en matière de sécurité et de santé, des différentes missions pour lesquelles il est utilisé, à la fois dans les domaines civil et militaire, ainsi que de l’environnement dans lequel il évolue.

Ce type d’appareil présente des risques spécifiques pour la sécurité et la santé. Tous les hélicoptères ont un rotor principal qui assure la portance et la propulsion de l’appareil et a la même fonction que les ailes d’un avion conventionnel. En raison de leurs dimensions, de leur masse et de leur vitesse de rotation, les pales du rotor constituent une menace sérieuse pour les personnes et les biens.

Le rotor anticouple (rotor de queue) présente également un risque. Il est beaucoup plus petit que le rotor principal, tourne à une vitesse très élevée et est difficile à entrevoir sous certains angles. A la différence du rotor principal placé au sommet de l’hélicoptère, le rotor anticouple se trouve souvent proche du sol. Pour ces raisons, l’approche d’un hélicoptère devrait se faire de face, bien en vue du pilote. Sur un héliport temporaire ou non aménagé, on devrait veiller particulièrement à l’élimination des obstacles (tels que buissons et barrières). Le contact avec le rotor anticouple peut provoquer des blessures ou la mort et endommager les biens, voire l’hélicoptère lui-même.

La plupart des personnes reconnaissent le bruit de battement caractéristique que font les pales d’un hélicoptère. Ce bruit n’est émis que lorsque l’hélicoptère est en translation et n’est pas considéré comme un risque potentiel pour la santé. Les compresseurs du moteur produisent un bruit important, souvent supérieur à 140 dBA, et il faut éviter d’y être exposé sans protection. Lorsqu’on travaille à l’intérieur ou aux alentours d’un hélicoptère, il faudrait porter des dispositifs de protection auditive (bouchons d’oreille et casque antibruit).

Certains autres risques sont à prendre en compte lors de l’utilisation d’hélicoptères. L’un d’entre eux concerne les liquides inflammables ou combustibles. Tous les hélicoptères ont besoin de carburant (AVGAS ou jet A1) pour leur(s) moteur(s). Le(s) moteur(s) ainsi que les transmissions du rotor principal et du rotor anticouple sont lubrifiés et refroidis. Certains hélicoptères sont pourvus d’un ou de plusieurs systèmes hydrauliques qui utilisent des fluides hydrauliques.

Les hélicoptères accumulent des charges électriques statiques pendant que le rotor tourne ou lorsque l’appareil est en vol. Ces charges se dissipent au moment où l’appareil touche le sol. Si l’on doit saisir une corde accrochée à un hélicoptère en vol stationnaire, il est conseillé d’attendre que la corde ait touché le sol afin de ne pas subir de choc électrique.

L’hélicoptère et son environnement opérationnel

Dans le monde entier, l’hélicoptère assume des missions variées (voir figures 102.5 et 102.6) qui l’obligent à évoluer à proximité du sol et d’obstacles. Cela exige une vigilance extrême de la part des pilotes, vigilance de nature très différente de celle requise, par exemple, dans le poste de pilotage d’un avion de ligne. En effet, l’environnement des appareils à voilure fixe est plus prévisible puisqu’ils opèrent surtout à partir d’aéroports où l’espace aérien est strictement contrôlé. C’est particulièrement le cas des avions commerciaux.

Figure 102.5 Hélicoptère H-46 atterrissant dans le désert de l'Arizona

Figure 102.5

Figure 102.6 Hélicoptère 5-76A Cougar atterrissant en pleine campagne sur le
site d'un accident

Figure 102.6

L’opération de l’hélicoptère en combat aérien présente des dangers spécifiques. Les hélicoptères militaires opèrent également à très basse altitude et la prolifération de missiles bon marché portatifs, à tête chercheuse, constitue un danger supplémentaire. L’hélicoptère militaire utilise le terrain pour se dissimuler ou camoufler sa signature thermique, mais découvert, il est vulnérable et peut facilement être atteint par des armes à feu et des missiles.

Les forces armées utilisent des lunettes de vision nocturne pour améliorer la vision dans les faibles conditions d’éclairement. Ces équipements possèdent toutefois des limitations opérationnelles, notamment une vision périphérique dégradée, qui a déjà été à l’origine d’un certain nombre de collisions en vol.

La prévention des accidents

Les mesures préventives peuvent être classées en plusieurs catégories, dont aucune ne se suffit à elle-même; ces mesures doivent donc être prises de concert pour maximiser leur efficacité.

Les règles d’exploitation

Les règles d’exploitation (ou consignes de vol) sont formulées par l’entreprise qui possède le certificat d’exploitation de l’appareil et qui les a élaborées à partir de la réglementation gouvernementale, des orientations recommandées par le constructeur, des normes industrielles, ainsi que de la pratique et du bon sens. Ces règles ont généralement fait la preuve de leur efficacité dans la prévention d’incidents et d’accidents et comprennent les mesures ci-après:

Les procédures d’équipage

Les règles de conduite

Les règles nécessaires à l’utilisation des hélicoptères dans de bonnes conditions de sécurité sont énumérées ci-après:

Les opérations des hélicoptères

Les applications de l’hélicoptère sont nombreuses et peuvent être classées en deux catégories: civiles et militaires.

Les applications civiles

Le sauvetage/ambulance aérienne. A l’origine, l’hélicoptère était conçu avec pour objectif le sauvetage et l’un de ses usages les plus répandus était celui d’ambulance. Les hélicoptères interviennent souvent sur les lieux d’accidents ou en cas de catastrophe naturelle (voir figure 102.6). Ils ont la possibilité d’atterrir sur des emplacements exigus avec à leur bord des équipes médicales qualifiées et de transporter les blessés vers un centre de soins. Les hélicoptères sont également employés lorsque la rapidité de déplacement ou le confort du patient sont exigés.

Les plates-formes pétrolières. Les hélicoptères fournissent un soutien logistique aux plates-formes pétrolières en mer. Ils transportent les personnes et assurent le ravitaillement entre la terre et les plates-formes ainsi qu’entre les plates-formes elles-mêmes.

Le transport d’hommes et de femmes d’affaires et de personnel. L’hélicoptère permet le transport d’un point à un autre, généralement sur de courtes distances, lorsque la géographie ou des problèmes de circulation empêchent un déplacement rapide au sol. Les entreprises construisent des héliports au sommet de leurs immeubles pour assurer la liaison avec les aéroports ou entre différents sites.

Le tourisme. L’utilisation de l’hélicoptère connaît un développement dans le secteur du tourisme. Le point de vue exceptionnel dont on jouit depuis un hélicoptère et la facilité qu’il a de rejoindre des endroits inaccessibles le rendent très attrayant.

Les opérations de police. Beaucoup d’unités de police et d’organismes gouvernementaux ont recours aux hélicoptères. La mobilité de ces appareils dans les zones urbaines denses et dans les régions rurales reculées en fait un mode de transport irremplaçable. Le plus grand héliport au monde situé au sommet d’un immeuble est celui du service de police de Los Angeles (Los Angeles Police Department).

Le tournages de films. Dans les films d’action, mais aussi dans d’autres types de productions cinématographiques et dans les émissions télévisées, on fait couramment appel aux hélicoptères.

La collecte d’informations. Les stations de télévision et de radio utilisent des hélicoptères pour surveiller la circulation routière et recueillir des informations. Leur aptitude à atterrir sur le lieu même des événements leur confère un avantage inestimable. Ces hélicoptères sont équipés d’émetteurs-récepteurs haute fréquence qui leur permettent d’envoyer des images et des commentaires en direct sur des distances assez importantes.

Le transport de charges. Certains hélicoptères sont conçus pour soulever des charges lourdes ou encombrantes à l’aide de câbles. Le génie civil et la prospection pétrolière en font un large usage.

Autres applications. Les hélicoptères peuvent être équipés de matériel d’épandage permettant de pulvériser herbicides, pesticides et engrais. Ils peuvent aussi emporter des équipements leur permettant de lutter contre le feu par largage d’eau ou de retardateurs de combustion chimiques.

Les applications militaires

Le sauvetage/ambulance aérienne. L’hélicoptère est très employé lors des missions humanitaires. Dans beaucoup de pays, les garde-côtes assurent des missions de sauvetage maritime. Les hélicoptères servent à l’évacuation des blessés et des malades ou pour secourir ou récupérer des personnes au-delà des lignes ennemies.

L’attaque. Les hélicoptères peuvent être armés et utilisés pour l’attaque sur terre ou en mer. L’armement comprend des mitrailleuses, des missiles et des torpilles. Des systèmes de visée et de guidage sophistiqués servent à repérer et à détruire des cibles à longue distance.

Le transport. Les hélicoptères de toutes dimensions servent au transport de personnes et au ravitaillement sur terre et en mer. Beaucoup de bateaux sont équipés d’héliports pour faciliter les opérations en mer.

LES TRANSPORTS ROUTIERS

LA CONDUITE DES CAMIONS, DES AUTOBUS ET DES AUTOCARS

Bruce Arthur Millies

Le transport routier recouvre l’acheminement des personnes, des animaux et du fret en tous genres. Le fret et le bétail sont en général transportés par camion, même si des autocars peuvent également servir au transport de colis, de bagages de passagers et de petits animaux. Les passagers sont en général transportés par autocar, bien que des camions de types divers soient utilisés à cet effet dans de nombreux pays.

Les chauffeurs routiers peuvent conduire différentes catégories de véhicules, notamment des semi-remorques, camions-citernes, camions-bennes, ensembles routiers à deux ou trois remorques, grues mobiles, camions de livraison, camionnettes ou pick-up. Le poids brut autorisé des véhicules (variable selon les pays) est compris entre 2 et 80 tonnes. Le fret transporté est très diversifié et inclut, par exemple, les petits et gros colis, les machines, les produits de carrière, les produits sidérurgiques, le bois, les liquides inflammables, les gaz comprimés, les explosifs, les matières radioactives, les produits chimiques corrosifs ou réactifs, les liquides cryogéniques, les produits alimentaires, les aliments surgelés, les céréales en vrac, les animaux vivants, etc.

Outre la conduite, les chauffeurs routiers doivent procéder à la visite de leur véhicule avant utilisation, vérifier les documents de transport, ainsi que l’apposition de panneaux et d’étiquettes et tenir un carnet de bord. Ils peuvent aussi avoir à assurer les interventions simples de dépannage et d’entretien, de chargement et de déchargement de marchandises (manuellement ou à l’aide de chariots élévateurs à fourche, de grues ou d’autres matériels) et à encaisser le prix des marchandises auprès des destinataires. En cas d’accident, il incombe au chauffeur d’arrimer la marchandise et de demander des secours. Si l’incident implique des matières dangereuses, le chauffeur essaiera vraisemblablement de maîtriser les déversements, d’arrêter les fuites ou d’éteindre l’incendie, sans forcément avoir reçu la formation ou posséder les équipements nécessaires à cet effet.

Les conducteurs d’autocar transportent quelquefois un nombre limité de personnes dans une camionnette ou conduisent des véhicules de plus ou moins grande capacité, pouvant parfois accueillir jusqu’à une centaine de voyageurs. Ils sont chargés de veiller à la sécurité des personnes lors de la montée et de la descente, de dispenser des informations, voire d’encaisser le prix du transport et de faire respecter l’ordre. Ils assurent également à l’occasion des interventions simples de dépannage et de maintenance de l’autocar, ainsi que des opérations de chargement et déchargement du fret et des bagages.

Les accidents de véhicules à moteur comptent parmi les plus graves que peuvent connaître les chauffeurs routiers et les conducteurs d’autocars. Les risques sont d’autant plus importants que le véhicule est mal entretenu, notamment en raison de l’usure des pneumatiques ou de la défaillance du système de freinage. La probabilité d’accident est accrue par la fatigue due à de longues heures de travail, à des horaires irréguliers ou à d’autres formes de stress. Les cas de vitesse excessive ou de circulation en surcharge amplifient les risques, au même titre que les conditions de circulation dense ou les conditions météorologiques susceptibles de nuire à la traction ou à la visibilité. Un accident impliquant des matières dangereuses peut occasionner au conducteur et aux passagers des dommages supplémentaires (exposition aux produits toxiques, brûlures, etc.) et avoir de larges répercussions autour du lieu du sinistre.

Les chauffeurs routiers et les conducteurs d’autocars sont exposés à un certain nombre de risques de nature ergonomique, à commencer par les dorsalgies et autres pathologies liées au soulèvement de charges lourdes, ou à l’utilisation de techniques de levage mal adaptées. Le port de ceintures lombaires est très répandu, même si leur efficacité a parfois été contestée, leur utilisation pouvant donner une fausse impression de sécurité. Le risque de lésions consécutives au soulèvement de charges est aggravé par la nécessité de transborder des marchandises dans des lieux non équipés de chariots élévateurs à fourche, de grues ni même de plateaux roulants, et il s’accroît en raison de la grande disparité des charges et des configurations de chargements.

Les sièges des conducteurs sont souvent mal conçus et ne peuvent pas être réglés afin d’assurer un bon soutien et un confort durable aux occupants, rendus ainsi sujets à des dorsalgies et à des troubles musculo-squelettiques. Les chauffeurs et conducteurs peuvent également souffrir de lésions scapulaires dues aux vibrations liées à la position légèrement relevée du coude en appui sur la fenêtre ouverte. Les vibrations transmises au corps entier peuvent causer des atteintes rénales et dorsales. Dès lors qu’ils utilisent fréquemment des commandes ou des dispositifs d’encaissement des tickets dotés de clavier, ils peuvent subir des lésions de nature ergonomique en raison de la mauvaise conception de ces équipements.

L’exposition prolongée au bruit des moteurs peut être à l’origine de déficits auditifs. Une maintenance insuffisante, des silencieux défectueux ou une mauvaise insonorisation de la cabine ne font qu’accentuer ce risque. La perte d’audition peut être plus sensible pour l’oreille située le plus près de la fenêtre.

Les chauffeurs routiers, notamment ceux qui réalisent de longs parcours, conduisent parfois pendant des durées excessives avant de pouvoir bénéficier de périodes de repos convenables. La convention (no 153) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la durée du travail et les périodes de repos (transports routiers), 1979, exige une pause après 4 heures de conduite; elle limite le temps de conduite à 9 heures par jour et à 48 heures par semaine et requiert un minimum de 10 heures de repos par tranche de 24 heures. La plupart des pays disposent désormais de législations régissant les temps de conduite et de repos et imposent aux chauffeurs routiers la tenue d’un carnet de bord dans lequel ils consignent ces durées effectives. Force est néanmoins de constater que les chauffeurs sont très fortement incités à dépasser les temps de conduite et à porter des annotations falsifiées sur le carnet de bord; cela s’explique par les attentes des directions d’entreprise, les pressions économiques ou les modalités de rémunération qui peuvent varier en fonction du chargement ou entraîner l’absence de rémunération lorsque les chauffeurs n’ont pas de fret de retour. Le nombre important d’heures de conduite est à l’origine de stress psychologique; il accentue les problèmes de nature ergonomique et c’est un élément causal dans les accidents (notamment consécutifs à l’endormissement au volant). Un tel rythme de travail peut amener le conducteur à faire usage d’amphétamines.

Outre les problèmes d’ergonomie, de durée du travail, de bruit et de craintes pour leur emploi, les conducteurs connaissent d’autres difficultés telles que le stress et la fatigue dus aux conditions météorologiques et de circulation difficiles, au mauvais état des routes, à la conduite nocturne, à l’insécurité (risques d’agressions et de vols), aux équipements défectueux et à la nécessité permanente d’exercer une très grande vigilance.

Les chauffeurs routiers sont potentiellement exposés à toutes sortes de risques chimiques, radioactifs et biologiques du fait des chargements qu’ils transportent. Ils peuvent être exposés à des produits chimiques toxiques en raison des fuites de récipients, de défectuosités de clapets de citernes ou du dégagement d’émissions nocives au cours des opérations de chargement ou de déchargement. Les conditionnements défectueux, l’insuffisance des écrans de protection et la non-conformité de l’agencement des matières radioactives transportées peuvent être à l’origine d’une radioexposition. Les employés chargés du transport d’animaux vivants peuvent contracter des maladies infectieuses, telles que la brucellose. Les conducteurs d’autobus et d’autocars sont exposés aux maladies infectieuses dont souffrent les passagers voyageant à bord de leurs véhicules. Les chauffeurs routiers sont également soumis aux vapeurs d’essence et aux gaz d’échappement, notamment en cas de fuites affectant la conduite de carburant ou le dispositif d’échappement; de telles expositions peuvent également se produire s’ils effectuent des interventions sur leur véhicule ou manipulent du fret alors que le moteur n’est pas à l’arrêt.

En cas d’accident impliquant des matières dangereuses, les chauffeurs routiers peuvent être fortement exposés à des risques de nature chimique ou à des rayonnements; ils peuvent également être victimes d’accident en cas d’incendie, d’explosion ou de réaction chimique. Les chauffeurs routiers n’ont en général pas reçu la formation ou les équipements nécessaires à la prise en charge des accidents impliquant des matières dangereuses. Leur responsabilité doit être limitée à assurer leur propre protection et à faire appel aux services de la protection civile. Ils encourent des risques supplémentaires s’ils agissent en lieu et place de ces services, sans avoir reçu la formation et les équipements nécessaires à cet effet.

Les chauffeurs routiers peuvent se blesser alors qu’ils effectuent des interventions mécaniques sur leur véhicule. Ils peuvent être heurtés par un autre véhicule quand ils interviennent sur un camion ou un autocar en bord de route. Les roues à jantes démontables présentent des risques de lésions particuliers et les vérins improvisés ou inadaptés peuvent être à l’origine d’écrasements.

Les chauffeurs routiers sont soumis à des risques d’agressions et de vols, notamment si leur véhicule transporte du fret de valeur ou s’ils sont responsables de l’encaissement, auprès des destinataires, du prix des marchandises. Les conducteurs d’autobus et d’autocars risquent de se faire voler leur recette, de se faire agresser verbalement ou physiquement par des voyageurs impatients ou en état d’ébriété.

A de nombreux égards, la vie que mènent les chauffeurs routiers n’est pas de nature à améliorer leur état de santé. En effet, leur régime de travail et la nécessité de prendre de nombreux repas à l’extérieur expliquent pourquoi ils ne peuvent pas toujours s’alimenter correctement. Le stress et la pression des collègues peuvent conduire à la consommation d’alcool et de drogues. La fréquentation de prostituées augmente le risque d’infection par le virus du sida et d’autres maladies sexuellement transmissibles. Dans certains pays, la profession de chauffeur routier est un des principaux vecteurs de propagation de cette pandémie.

Les risques susmentionnés peuvent être prévenus ou, du moins, maîtrisés. Comme dans la plupart des questions de sécurité et de santé, les chefs d’entreprise devraient veiller tant aux niveaux de rémunération et à la formation du personnel qu’à la bonne application de la politique contractuelle et de la réglementation en vigueur. En effet, si les chauffeurs sont correctement rémunérés en contrepartie d’un travail effectué dans le cadre d’un régime horaire approprié, ils sont moins enclins à rouler vite, à dépasser le nombre d’heures, à conduire des véhicules ne répondant pas aux normes de sécurité, à circuler en surcharge, à absorber des drogues ou à falsifier les informations portées sur le carnet de bord. Les entreprises sont tenues d’exiger de leurs chauffeurs qu’ils respectent les règles de sécurité et, notamment, que ces informations ne travestissent pas la réalité.

Dans les entreprises qui acquièrent des véhicules bien conçus et les soumettent régulièrement à des opérations de maintenance, dépannage et visites, le taux de pannes et d’accidents diminue sensiblement. Il est aussi possible de faire baisser le nombre de lésions de nature ergonomique dès lors que l’entreprise est prête à assumer le coût lié aux innovations: conception ergonomique des cabines, sièges de conduite entièrement réglables, ou encore commandes du véhicule aménagées judicieusement. La qualité de la maintenance, des systèmes d’échappement notamment, permet de réduire les nuisances sonores.

L’exposition aux risques toxiques peut diminuer si l’entreprise veille au respect des règles applicables au conditionnement, à l’étiquetage, au chargement et au marquage des matières dangereuses. Les mesures visant à protéger le véhicule lui-même contre les risques d’accidents contribuent à réduire la probabilité d’un accident impliquant des matières dangereuses.

Les chauffeurs routiers doivent disposer du temps nécessaire à la visite minutieuse de leurs véhicules avant utilisation et ne doivent pas être pénalisés d’une manière quelconque pour refus de conduire un véhicule qui ne serait pas en état de circuler. Ils doivent être correctement formés à la conduite, à la visite de leur véhicule, à la reconnaissance des risques et aux mesures de première intervention.

Dans la mesure où les chauffeurs routiers sont responsables des opérations de chargement et de déchargement, ils doivent être formés aux techniques de levage et disposer de diables, de chariots élévateurs à fourche, de grues ou de tout autre appareil destiné à la manutention des marchandises, sans avoir à déployer des efforts physiques intenses. Si les chauffeurs sont censés effectuer des interventions sur leur véhicule, il faut leur fournir les bons outils et leur dispenser la formation nécessaire. Des mesures de sécurité appropriées doivent être prises pour protéger les chauffeurs qui transportent des produits de valeur, encaissent le prix du transport auprès des voyageurs ou le prix des marchandises transportées auprès des destinataires. Les conducteurs d’autobus et d’autocars devraient également disposer d’accessoires utiles lors de la présence de voyageurs malades ou blessés.

Il est impératif que les chauffeurs routiers, ainsi que les conducteurs d’autobus et d’autocars, bénéficient de services médicaux, afin de vérifier qu’ils sont effectivement aptes à l’exercice de leurs fonctions et que leur état de santé est satisfaisant. Ceux d’entre eux qui manipulent des matières dangereuses ou sont impliqués dans un incident comportant une exposition soit à des éléments pathogènes transmis par le sang, soit à des matières dangereuses, doivent faire l’objet d’une surveillance médicale. Les entreprises et leurs personnels de conduite doivent se soumettre à la réglementation applicable aux aptitudes médicales.

L’ERGONOMIE DE LA CONDUITE DES AUTOBUS

Alfons Grösbrink et Andreas Mahr

Le conducteur d’autobus est soumis à un stress de nature psychologique et physique essentiellement dû à la densité de la circulation dans les grandes agglomérations et à la fréquence des arrêts. La plupart des entreprises de transport urbain demandent à leurs personnels non seulement de conduire, mais aussi de vendre des tickets, d’observer les mouvements de montée et de descente des voyageurs et de leur donner des informations.

Du point de vue psychologique, le stress est lié à la responsabilité qui leur incombe d’assurer le transport des personnes en sécurité, à la rareté des échanges avec leurs collègues, ainsi qu’à la nécessité de respecter en permanence des horaires précis. Le travail posté par roulement est également source de stress physique et psychologique. Le stress physique est amplifié par les insuffisances ergonomiques du poste de travail du conducteur.

De nombreuses études menées au sujet de l’activité des conducteurs d’autobus montrent que les différents types de contraintes ne suffisent pas, individuellement, à créer un risque immédiat pour la santé. Mais leur accumulation et les astreintes physiologiques qui en découlent entraînent des problèmes de santé plus fréquents parmi les conducteurs que chez les autres travailleurs. Les affections de l’estomac et de l’appareil digestif, de l’appareil locomoteur (notamment la colonne vertébrale) et du système cardio-vasculaire sont assez importantes. Souvent les conducteurs ne travaillent pas jusqu’à l’âge de la retraite, mais doivent cesser leur activité prématurément pour raison de santé (Beiler et Tränkle, 1993; Giesser-Weigt et Schmidt, 1989; Haas, Petry et Schühlein, 1989; Meifort, Reiners et Schuh, 1983; Reimann, 1981).

L’amélioration de la sécurité du travail des conducteurs professionnels nécessite l’instauration de mesures techniques et organisationnelles. L’aménagement des horaires de travail influe largement sur la réduction du stress et tient compte autant que possible des souhaits des intéressés. L’amélioration de la santé passe par l’information et la sensibilisation du personnel aux questions de santé (par exemple, régime alimentaire à observer, mouvements recommandés à l’intérieur et à l’extérieur du poste de conduite). La conception optimale du poste de conduite du point de vue ergonomique est l’un des aspects techniques essentiels. Dans le passé, les exigences afférentes au poste de conduite étaient secondaires par rapport à la conception de l’espace voyageurs, alors que la conception ergonomique de ce poste contribue sans aucun doute à la sécurité et à la préservation de la santé du conducteur. Au cours des dernières années, des travaux de recherche ont été menés sur le poste de conduite optimal du point de vue de l’ergonomie, dans divers pays — Canada, Suède, Allemagne et Pays-Bas — (Canadian Urban Transit Association, 1992; Peters et coll., 1992; Wallentowitz et coll., 1996; Streekvervoer Nederland, 1991). Le travail multidisciplinaire réalisé en Allemagne a débouché sur l’élaboration d’un nouveau poste de conduite unifié (Verband Deutscher Verkehrsunternehmen, 1996).

Dans un autobus, le poste de conduite est normalement conçu comme une cabine semi-ouverte. Les dimensions de la cabine et les modulations réalisables sur le siège et le volant doivent répondre à des normes de dimensionnement applicables à l’ensemble des conducteurs. En Europe centrale, par exemple, le siège doit être compatible avec des tailles comprises entre 1,58 et 2,00 m. Les caractéristiques particulières en raison de la surcharge pondérale ou de la longueur des membres doivent être prises en compte dès le stade de la conception.

Les possibilités de moduler les conditions d’assise et la position du volant doivent être étudiées globalement, de sorte que tous les conducteurs répondant aux critères de taille prédéfinis lors de la conception puissent placer leurs bras et leurs jambes confortablement et adopter une position ergonomiquement satisfaisante.

De ce point de vue, le dossier du siège en position optimale présente une inclinaison de 20 degrés, c’est-à-dire plus prononcée par rapport à la verticale que cela n’a été la règle pour les véhicules utilitaires. Par ailleurs, le tableau de bord doit être aménagé pour faciliter l’accès aux leviers de réglage et améliorer la visibilité et la lisibilité des instruments. Cela peut être étudié en fonction du positionnement du volant. L’utilisation d’un petit volant facilite également la gestion de l’espace. Le diamètre du volant largement répandu aujourd’hui date de l’époque à laquelle les autobus n’étaient généralement pas équipés de la direction assistée (voir figure 102.7).

Figure 102.7 Poste de travail standard et ergonomiquement optimisé, utilisé par les
conducteurs d'autobus en Allemagne

Figure 102.7

Le tableau de bord et les commandes peuvent être réglés en fonction de la position du volant.

Sachant que les trébuchements et les chutes sont les types d’accidents les plus fréquents chez les conducteurs, il convient d’être particulièrement attentif à la conception de la zone d’accès au poste de conduite et d’éviter tout obstacle pouvant faire trébucher. Les marches d’accès doivent être de hauteur égale et de la bonne profondeur.

Le siège du conducteur devrait pouvoir être réglé selon cinq critères: profondeur de l’assise, positions en hauteur, angle du bas de dossier, angle de l’assise et profondeur du siège. Il est fortement conseillé de prévoir un maintien lombaire réglable. Il est également recommandé de proposer une ceinture à trois points de fixation et un appui-tête dans la mesure où cela n’est pas déjà une obligation légale. L’expérience montre que l’opération de réglage manuel visant à atteindre la position correcte du point de vue ergonomique peut prendre du temps; il faudrait donc prévoir à l’avenir la possibilité de mémoriser électroniquement les divers réglages repris au tableau 102.1, ce qui permettrait de retrouver aisément et rapidement les positions du siège correspondant à chaque occupant (en les consignant, par exemple, sur une carte électronique).

Tableau 102.1 Caractéristiques dimensionnelles et plages de réglage des sièges
de conducteurs d'autobus

Partie

Mesure/plage de réglage

Valeur habituelle (mm)

Plage de réglage (mm)

Mémorisation possible

Siège complet

Horizontal

≥ 200

Oui

 

Vertical

≥ 100

Oui

Assise

Profondeur de l’assise

390-450

Oui

 

Largeur de l’assise (totale)

Minimum 495

 

Largeur de l’assise (surface utile)

430

 

Garnissage latéral (transversalement)

40-70

 

Partie incurvée du siège (épaisseur)

10-20

 

Inclinaison de l’assise

0-10° (augmentation vers l’avant)

Oui

Dossier

Hauteur du dossier

     
 

Hauteur minimale

495

 

Hauteur maximale

640

 

Largeur du dossier (totale)*

Minimum 475

 

Largeur du dossier (partie plane)

     
 

– zone lombaire (basse)

340

 

– zone des épaules (haute)

385

 

Rembourrage des bords** (épaisseur)

     
 

– zone lombaire (basse)

50

 

– zone des épaules (haute)

25

 

Inclinaison du dossier (par rapport à la verticale)

0-25°

Oui

Appui-tête

Hauteur du bord supérieur de l’appui-tête au-dessus de l’assise

Minimum 840

 

Hauteur de l’appui-tête

Minimum 120

 

Largeur de l’appui-tête

Minimum 250

Maintien lombaire

Incurvation vers l’avant du maintien lombaire par rapport au dossier

10-50

 

Hauteur de la partie inférieure du maintien lombaire par rapport à la surface de l’assise

180-250

— Non applicable.

* La largeur de la partie inférieure du dossier doit correspondre approximativement à la largeur du siège au niveau de l’assise et se rétrécir en direction du haut du siège. ** Le garnissage latéral de l’assise ne s’applique qu’à la zone incurvée.

La contrainte vibratoire due aux vibrations transmises au corps entier demeure faible dans le poste de conduite des autobus modernes par rapport à d’autres véhicules utilitaires, et les valeurs restent largement en deçà des prescriptions normatives internationales. L’expérience montre que, bien souvent, les sièges des conducteurs d’autobus ne sont pas réglés de façon optimale par rapport aux vibrations propres du véhicule, d’où la nécessité de prendre des dispositions permettant d’éviter certaines plages de fréquences, dans la mesure où elles conduisent à une augmentation des vibrations transmises au corps entier pour le conducteur, et sont de nature à entraîner une baisse de productivité.

Les nuisances sonores du poste de travail du conducteur ne sont pas a priori à même de présenter un risque pour l’audition. Les bruits émis dans les fréquences élevées peuvent provoquer une gêne et devraient être supprimés, car ils risquent de nuire à la concentration du conducteur.

Tous les éléments du poste de conduite devraient être d’un accès aisé, qu’ils servent au réglage ou au service voyageurs. Un grand nombre d’instruments est souvent nécessaire compte tenu du nombre d’équipements supplémentaires à régler. C’est pourquoi il convient de regrouper, voire de fusionner, les éléments en fonction de leur utilisation. Les commandes des dispositifs les plus fréquemment utilisés, par exemple pour l’ouverture des portes, l’immobilisation du véhicule lors des arrêts et le maniement des essuie-glaces, devraient être implantées dans la zone d’accès direct, alors que celles des dispositifs employés moins souvent peuvent être logées en dehors de ladite zone (c’est-à-dire sur une console latérale).

L’analyse des mouvements oculaires montre que la conduite d’un véhicule dans la circulation urbaine et l’observation des mouvements de montée et de descente des voyageurs aux arrêts requièrent une grande concentration de la part des conducteurs; par conséquent, les informations transmises par les instruments et les voyants devraient être limitées au strict nécessaire. L’électronique embarquée, pilotée par calculateur, permet d’éliminer de nombreux instruments et voyants et de les remplacer par un afficheur à cristaux liquides placé en évidence et destiné à transmettre des informations comme le montre le tableau de bord des figures 102.8 et 102.9.

Figure 102.8 Présentation du tableau de bord

Figure 102.8

Figure 102.9 Présentation du tableau de bord (schéma légendé)

Figure 102.9

Un logiciel spécifique pourra permettre à l’afficheur de sélectionner les informations requises pour traiter un cas particulier. En cas de dysfonctionnement, une description du problème et l’affichage en clair d’instructions succinctes apporteront une aide précieuse au conducteur et seront préférables à des pictogrammes difficiles à décrypter. Il est également possible de hiérarchiser les messages de défauts (qui seront, par exemple, «indicatifs» pour les défauts mineurs, ou «d’alarme» lorsque le véhicule devra s’arrêter immédiatement).

Les systèmes de chauffage des autobus se bornent souvent à fournir de l’air chaud à l’intérieur du véhicule. Afin d’améliorer le confort, il convient de prévoir une plus grande part de chaleur rayonnante (en chauffant, par exemple, les parois latérales dont la température superficielle est souvent bien inférieure à la température ambiante intérieure). La chose est possible en faisant circuler de l’air chaud au travers de surfaces latérales perforées qui seront ainsi à la bonne température. De grandes baies vitrées sont prévues à proximité du conducteur afin d’améliorer la visibilité et l’esthétique générale du véhicule. C’est ainsi que le rayonnement solaire peut entraîner un réchauffement important de l’espace voyageurs, d’où l’intérêt de la climatisation.

La qualité de l’air du poste de conduite est étroitement liée à celle de l’air extérieur. En fonction de la circulation, on peut noter de fortes concentrations de substances nocives, telles que le monoxyde de carbone ou les gaz d’échappement des moteurs diesel. L’entrée d’air neuf par des zones plus préservées, situées en toiture plutôt qu’à l’avant du véhicule, contribue à atténuer ce phénomène. Il convient d’utiliser des filtres qui absorbent les particules fines.

Dans la plupart des entreprises de transport urbain, une grande partie de l’activité du personnel de conduite consiste à vendre des tickets, à faire fonctionner les systèmes d’information aux voyageurs et à communiquer avec l’entreprise. A cet effet, les conducteurs ont jusqu’à présent utilisé des dispositifs différents, logés dans le périmètre du poste de travail, mais souvent hors de leur zone d’atteinte. Il convient de veiller à une conception intégrée en amont, c’est-à-dire se traduisant par une disposition ergonomiquement optimale des éléments dans la zone de travail du conducteur, notamment pour les touches servant à introduire des informations, d’une part, et les ensembles d’afficheurs, d’autre part.

Cela montre combien il est important que les conducteurs puissent exprimer un avis personnel sur leur espace de travail, car ils attachent une grande importance à des aspects à première vue secondaires tels que le lieu de rangement de leur sacoche ou le casier destiné à mettre leurs effets personnels en lieu sûr.

LES OPÉRATIONS D’APPROVISIONNEMENT EN CARBURANT ET DE PETIT ENTRETIEN DES VÉHICULES À MOTEUR

Richard S. Kraus

Les carburants à base de pétrole et les lubrifiants sont vendus directement aux consommateurs dans des stations-service dotées ou non d’ateliers de réparation; les clients sont servis par du personnel ou se servent eux-mêmes. Les carburants sont également en vente dans des aires de lavage de voitures, des stations offrant des services aux automobilistes, des agences de location de voitures, des établissements de réparation ou de vente d’accessoires et des magasins de proximité. Les employés de stations-service, mécaniciens et autres personnes chargées d’approvisionner les véhicules en carburant et d’assurer la lubrification et le dépannage devraient être conscients des risques physiques et chimiques liés aux carburants à base de pétrole et aux autres lubrifiants, additifs et résidus au contact desquels ils travaillent, et devraient respecter les procédures de sécurité prévues, ainsi que les mesures de protection individuelle. Les mêmes risques physiques et chimiques et les expositions correspondantes existent dans les installations commerciales d’exploitation de parcs de camions, de location de voitures ou d’exploitation d’autobus, dès lors qu’il s’agit pour elles d’assurer l’approvisionnement en carburant et le petit entretien de leurs propres parcs de véhicules.

Du fait que les stations-service et, notamment, les stations en libre-service, représentent les points de livraison de carburant aux véhicules des consommateurs, il s’agit de lieux dans lesquels les employés et les usagers sont le plus susceptibles d’être exposés à des produits pétroliers dangereux. Hormis ceux qui procèdent eux-mêmes à la vidange et à la lubrification de leur véhicule, les automobilistes ne sont guère susceptibles d’être exposés à des lubrifiants ou à des huiles usées, sauf en cas de contact accidentel lors de la vérification du niveau d’huile.

Les activités des stations-service

Les modalités de distribution et les pompes implantées sur îlots

Les travailleurs devraient être conscients des risques potentiels d’incendie et, en matière de sécurité et de santé, de ceux associés à l’essence, au kérosène, au gazole, etc. distribués en station-service. Il conviendrait qu’ils soient informés des précautions à prendre, notamment en matière de sécurité, lors du transvasement de carburants dans les véhicules ou dans des récipients, du nettoyage et de l’élimination des déversements de liquides ou de carburants, ainsi que de la lutte contre les feux naissants. Les stations-service devraient être équipées de pompes distributrices fonctionnant uniquement lorsque les pistolets sont retirés de la borne de remplissage et que les dispositifs d’arrêt d’urgence sont actionnés manuellement ou automatiquement. Les appareils de distribution devraient être implantés sur des îlots et protégés contre les risques de collision par des barrières ou des butoirs de roues. Les appareils de distribution, les flexibles et les pistolets devraient faire l’objet d’inspection pour déceler les fuites, les avaries ou les dysfonctionnements. Des dispositifs de sécurité peuvent être prévus sur les pompes afin d’arrêter, en cas d’urgence, le transvasement par l’intermédiaire du flexible et de retenir le liquide de part et d’autre du point de rupture; cela englobe également les valves à élément fusible placées à la base des bornes qui se ferment automatiquement en cas de choc violent ou d’incendie.

Les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise peuvent exiger l’utilisation de signalétique dans les zones de distribution, à l’instar des écriteaux mis en place aux Etats-Unis:

Le ravitaillement en carburant des véhicules

Les employés de stations-service devraient connaître l’emplacement des dispositifs d’arrêt d’urgence des pompes distributrices d’essence, ainsi que leurs modes opératoires et être informés des risques potentiels et des procédures permettant d’assurer le ravitaillement des véhicules en sécurité. Ainsi:

Le remplissage des récipients de carburant

Les stations-service devraient mettre au point des procédures en vue du remplissage de récipients en sécurité:

Les réservoirs de stockage, les tuyauteries de remplissage, les bouchons de réservoirs et les évents

Dans les stations-service, les bouchons de jaugeage et de remplissage de réservoirs enterrés et aériens devraient être maintenus en position de fermeture, sauf lors des opérations de remplissage et de jaugeage, afin de limiter le dégagement de vapeurs d’essence. Lorsque les orifices de jaugeage sont placés à l’intérieur de bâtiments, il convient de doter chacun d’eux d’un dispositif de type clapet de retenue à ressort pour éviter les débordements de liquide et les risques de dégagements de vapeurs. Les évents des réservoirs de stockage devraient être disposés conformément aux prescriptions en vigueur et à la politique interne de l’entreprise. Si l’évacuation à l’atmosphère est autorisée, la tuyauterie d’évents reliée aux réservoirs de stockage enterrés et aériens devrait être placée en hauteur, de telle sorte que les vapeurs inflammables s’orientent dans le sens opposé aux sources potentielles d’inflammation et ne pénètrent pas par les fenêtres, les prises d’air ou les portes ou ne se trouvent pas piégées sous les avancées ou les auvents.

L’absence de signalétique et le marquage erroné par code couleur des réservoirs de stockage peuvent conduire à des erreurs dans les mélanges de produits. Les bouchons de réservoirs de stockage, les tuyauteries de remplissage et les bouches de jaugeage devraient être soigneusement identifiés quant à la nature des produits et à leurs propriétés afin de limiter le risque de confusion. Les symboles d’identification et les codes couleur devraient être conformes aux prescriptions en vigueur, à la politique interne de l’entreprise ou aux règles de la profession, telles que la recommandation 1637 de l’Institut américain du pétrole (American Petroleum Institute (API), 1995). Un tableau récapitulatif des symboles et des codes couleur utilisés devrait être affiché dans les stations-service lors des livraisons.

La livraison de carburant aux stations-service

Les stations-service devraient élaborer et mettre en œuvre des procédures de remplissage en sécurité des réservoirs enterrés ou aériens.

Avant la livraison
En cours de livraison
Après la livraison

Les autres fonctions des stations-service

Le stockage des liquides combustibles et inflammables

Les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise peuvent s’appliquer au stockage, à la manutention et à la distribution en station-service de liquides combustibles et inflammables et de produits chimiques destinés à l’automobile tels que peintures, fluides de démarrage, solutions antigel, acides pour accumulateurs, liquides lave-glaces, solvants et lubrifiants. Les stations-service devraient stocker les aérosols et les liquides inflammables dans des récipients fermés, qui seront entreposés dans des locaux agréés et bien ventilés, loin des sources de chaleur et d’inflammation. Il peut également s’agir de casiers ou d’armoires prévus pour les liquides inflammables ou de bâtiments entièrement séparés.

La sécurité électrique et l’éclairage

Les employés des stations-service devraient être informés des principes fondamentaux de la sécurité électrique qui s’appliquent aux stations-service et avoir notamment connaissance des aspects ci-après:

Un niveau d’éclairement correct devrait être assuré là où cela est nécessaire dans la station-service pour limiter les risques d’accidents et de lésions. Les prescriptions en vigueur, la politique interne de l’entreprise ou les règles relevant d’initiatives particulières peuvent servir à définir les niveaux d’éclairement adéquats (voir tableau 102.2).

Tableau 102.2 Niveaux d'éclairement dans les aires de stations-service

Zone de stations-service

Valeurs préconisées en lux

Aires de circulation intense

215

Zones et locaux de stockage

107-215

Installations sanitaires et aires d’attente

320

Ilots de distribution, plans de travail et secteurs d’encaissement

540

Aires de dépannage, entretien, lubrification et lavage

1075

Bureaux

1075-1610

Source: American National Standards Institute (ANSI), 1967.

Les procédures de consignation et de déconsignation

Les stations-service devraient élaborer et mettre en œuvre des procédures de consignation et de déconsignation, afin d’éviter la libération d’énergie potentiellement dangereuse lors des travaux de maintenance, d’entretien et de dépannage effectués sur des outils, du matériel, des machines et autres systèmes motorisés de nature électrique, mécanique, hydraulique et pneumatique, tels qu’appareils de levage et de manutention, appareils de lubrification, postes de distribution de carburant et compresseurs. Les procédures de sécurité du travail destinées à éviter le démarrage intempestif d’un moteur de véhicule lors des opérations de dépannage ou d’entretien devraient comporter l’action de débranchement de la batterie et le retrait de la clé de contact.

Les liquides utilisés en station-service

Les niveaux des liquides et des réfrigérants

Avant d’intervenir sous le capot, les travailleurs devraient s’assurer que celui-ci restera ouvert en vérifiant la tension ou en utilisant une béquille ou une tige. Il leur appartient d’agir avec précaution lorsqu’ils vérifient les liquides de moteur, afin de se prémunir contre les brûlures occasionnées par les collecteurs d’échappement. Ils devraient éviter de mettre la jauge en contact avec les bornes ou les fils électriques, et faire preuve de prudence lorsqu’ils vérifient le niveau du liquide de transmission, moteur tournant. Les travailleurs devraient suivre des procédures de sécurité du travail lorsqu’ils interviennent sur les radiateurs, à savoir laisser refroidir le circuit de chauffage (sous pression), recouvrir les bouchons de radiateur d’un morceau de tissu épais lors de cette opération, utiliser les équipements de protection individuelle et travailler en se positionnant de biais par rapport au radiateur de façon à éviter d’inhaler toutes sortes de vapeurs qui pourraient s’en dégager.

Les antigels et les lave-glaces

Les travailleurs chargés de l’entretien des véhicules devraient connaître les risques liés aux solutions antigel à base de glycol et d’alcool, ainsi qu’aux liquides concentrés destinés au lavage des glaces, et devraient savoir comment les manipuler en toute sécurité. Cela inclut les précautions à prendre notamment lors du stockage de produits à base d’alcool dans des fûts hermétiquement fermés ou des récipients à placer dans des locaux ou des casiers différents, loin de tout appareil de chauffage; cela inclut également les dispositions requises pour le confinement, afin d’éviter qu’un déversement ou qu’une fuite d’antigel de type glycol ne viennent polluer les égouts et le sol. Les solutions antigel ou lave-glaces devraient de préférence être prélevées dans des fûts stockés en position verticale à l’aide de pompes manuelles asserrées et équipées de boucles de récupération, et non à l’aide de robinets ou de soupapes placés sur des fûts en position horizontale. En effet, les robinets peuvent être source de fuites, être ouverts ou éventrés par suite de chocs entraînant des dispersions accidentelles. Les solutions antigel ou lave-glaces stockées dans des fûts ne devraient pas être soutirées par pompage sous pression d’air. Les contenants portatifs de solutions concentrées d’antigel ou de produits lave-glaces devraient être entièrement purgés avant d’être jetés, et la réglementation en vigueur en matière d’élimination des solutions antigel à base de glycol devrait être respectée.

La lubrification

Les responsables des stations-service devraient s’assurer que les travailleurs connaissent les caractéristiques et les utilisations possibles des divers carburants, huiles, lubrifiants, graisses, liquides et produits chimiques destinés à l’automobile, qui sont à disposition dans l’enceinte de la station, ainsi que leurs conditions de mise en œuvre. Des outils adaptés devraient être utilisés pour démonter les bouchons de carter d’huile moteur, de la boîte et des ponts, et des précautions prises pour retirer les sondes de test et les filtres à huile, de manière à ne pas endommager les véhicules ou les équipements. Les clés à tubes, clés extensibles et outils à frappe devraient être uniquement utilisés par ceux qui savent ôter des goupilles grippées en sécurité. Compte tenu des risques en jeu, les appareils de lubrification à haute pression ne devraient pas être mis en marche tant que les gicleurs ne sont pas placés correctement contre les raccords de graissage. En cas d’essai avant utilisation, le gicleur devrait être placé contre un fût ou un récipient vide et non mis au contact d’un chiffon ou d’un morceau de tissu tenu en main.

Les opérations de levage

Les travailleurs intervenant dans les baies de service des véhicules ou à proximité devraient pouvoir reconnaître les conditions de travail dangereuses et respecter les règles habituelles en matière de sécurité du travail, notamment ne pas stationner devant un véhicule en cours de levage, devant un véhicule qu’une autre personne viendrait garer dans la baie, sur les fosses de graissage ou sur les ponts élévateurs.

Lors des opérations de graissage des roulements, de réparation des équipements de frein, de remplacement des pneumatiques et d’autres services réalisés sur les ponts élévateurs déjà cités, les véhicules devraient être légèrement soulevés par rapport au sol pour permettre aux employés de travailler en position accroupie et de ménager ainsi leur dos. Une fois les véhicules soulevés, les roues devraient être immobilisées pour s’opposer au mouvement du véhicule, et des supports être placés sous le véhicule pour pallier une rupture de cric ou de pont. Lors de la dépose des roues sur un véhicule complet placé sur un pont à colonnes, celui-ci devrait être fermement calé pour ne pas être mis en mouvement. S’il est décidé d’utiliser des vérins ou des supports de retenue pour lever les véhicules et leur servir de plate-forme, ceux-ci devraient posséder une capacité suffisante, être placés à des points de levage appropriés sur les véhicules, après vérification de leur stabilité.

Le traitement des pneumatiques

Les travailleurs devraient savoir comment vérifier la pression et gonfler les pneumatiques en sécurité; ceux-ci seront examinés afin de détecter tout signe d’usure excessive; les travailleurs devraient respecter les pressions maximales et se tenir debout ou accroupis en se positionnant de biais lors de l’opération de gonflage. Ils devraient être informés des risques et respecter les règles relatives à la sécurité du travail lorsqu’ils interviennent sur des jantes à flasques, jantes à base creuse et jantes à jonc sur des camions ou des remorques. Lors de la réparation de pneumatiques au moyen de produits ou de liquides inflammables ou toxiques, il convient de veiller à maîtriser les sources d’inflammation, à utiliser les équipements de protection individuelle et à assurer un niveau de ventilation suffisant.

Le nettoyage des pièces

Pour le nettoyage des pièces, les travailleurs des stations-service devraient connaître les risques d’incendie et les risques pour la santé liés à l’emploi d’essence ou de solvants à faible point d’éclair; ils devraient respecter les règles de sécurité et, notamment, utiliser des solvants agréés dont le point d’éclair est supérieur à 60 °C. Les équipements de lavage des pièces devraient être dotés d’un capot de protection maintenu fermé quand ils ne sont pas en fonctionnement. Lorsqu’ils sont en service, ces équipements devraient être munis d’un dispositif de maintien en position d’ouverture, par élément fusible par exemple, lequel a pour effet de rabattre automatiquement le capot en cas d’incendie. Les travailleurs devraient veiller à ce que l’essence ou un autre liquide inflammable ne viennent pas polluer le solvant de nettoyage et diminuer son point d’éclair, créant ainsi les conditions d’un incendie potentiel. Il convient de purger le solvant de nettoyage pollué et de le mettre dans un récipient agréé, afin de le jeter ou de le récupérer dans le respect des règles y afférentes. Les travailleurs qui nettoient les pièces ou les équipements à l’aide de solvants de nettoyage devraient éviter tout contact oculaire ou cutané et porter des équipements de protection individuelle adaptés. Les solvants ne devraient en aucun cas être employés comme produits d’hygiène, notamment pour le lavage des mains.

L’air comprimé

Les stations-service devraient mettre au point des règles de sécurité du travail applicables au fonctionnement des compresseurs et à l’utilisation de l’air comprimé. Les flexibles correspondants devraient uniquement servir à gonfler les pneumatiques, à assurer la lubrification, la maintenance, etc. Les travailleurs devraient connaître les risques liés à la mise sous pression des réservoirs de carburant, avertisseurs sonores, réservoirs d’eau et récipients autres qu’à air comprimé. Pour nettoyer les mécanismes de freinage, on devrait s’abstenir d’employer de l’air comprimé ou une soufflette à air comprimé, de nombreuses garnitures de frein, notamment sur des véhicules de modèle ancien, renfermant en effet de l’amiante. Il conviendrait donc de recourir à des modes opératoires plus sûrs, par aspiration ou emploi de solutions liquides.

La manutention et les interventions sur les accumulateurs

En matière de stockage, de manutention et d’élimination des batteries et électrolytes, les stations-service devraient respecter les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise. Les travailleurs devraient connaître les risques de court-circuit électrique dès lors qu’ils chargent, déposent, posent ou manutentionnent des batteries; ils devraient commencer par débrancher la borne négative avant de déposer la batterie et brancher à nouveau cette même borne en fin d’opération. Lors de la dépose et du remplacement de la batterie, il convient d’utiliser un support pour faciliter la manutention et éviter tout contact avec la batterie.

Les travailleurs devraient connaître les règles de sécurité applicables à la manipulation de solutions entrant dans la composition des batteries:

Les travailleurs devraient vérifier le niveau de liquide dans la batterie avant de la charger et contrôler celui-ci régulièrement en cours de charge, afin de déceler tout signe de surchauffe. Avant de déconnecter la batterie, les chargeurs devraient être débranchés, afin d’éviter la formation d’étincelles susceptibles de provoquer l’inflammation de l’hydrogène dégagé lors de la charge. Lorsque les chargeurs dits «à charge rapide» sont posés dans les véhicules, ces derniers devraient être éloignés des îlots de distribution et les bornes négatives devraient être déconnectées afin de brancher les chargeurs. Si les batteries sont logées à proximité des espaces réservés aux passagers ou sous le plancher des véhicules, elles devraient être déposées avant toute opération de charge.

Les travailleurs devraient être informés des risques et connaître les procédures de sécurité permettant d’assurer le secours d’un véhicule dont les batteries sont à plat et d’éviter l’endommagement des équipements électriques ou les lésions provoquées par l’explosion des batteries si les pinces ne sont pas fixées correctement. Il ne faudrait jamais faire démarrer ou charger des batteries gelées.

La conduite et le remorquage des véhicules

Les travailleurs devraient avoir reçu la formation adéquate, posséder la qualification nécessaire et être titulaires des permis de conduire spécifiques pour se mettre au volant de véhicules appartenant à leurs clients ou à des sociétés, conduire des camions de dépannage ou de remorquage à l’intérieur ou hors du périmètre de l’établissement. Tous les véhicules devraient être conduits dans le respect des prescriptions en vigueur et de la politique interne de l’entreprise. Les opérateurs devraient impérativement vérifier le bon état des freins. Les conducteurs de véhicules de dépannage devraient connaître les règles d’exploitation et de sécurité lorsqu’ils font fonctionner les systèmes de levage ou vérifient l’état des transmissions et du châssis du véhicule à remorquer, et être attentifs à ne pas dépasser la capacité de remorquage du véhicule tracteur.

Les espaces confinés à l’intérieur des stations-service

Les travailleurs de stations-service devraient connaître les risques liés à l’entrée dans les espaces confinés tels que les réservoirs enterrés ou aériens, les puisards, les fosses de pompage, les réservoirs de confinement des déchets, les fosses septiques et les puits de collecte. Seules les personnes autorisées peuvent y avoir accès et les procédures de délivrance d’autorisations d’accès aux espaces de ce type devraient être définies tant vis-à-vis des travailleurs que des membres d’entreprises tierces.

Les procédures d’urgence

Les responsables de stations-service devraient définir les procédures d’urgence et le personnel devrait savoir comment déclencher les alarmes et comment avertir les autorités en cas d’urgence; il devrait connaître les dispositions prévues en cas d’évacuation et les mesures à prendre en fonction des circonstances (telles que la fermeture commandée par des dispositifs d’arrêt d’urgence, dans l’éventualité d’un déversement ou d’un incendie dans les zones de distribution de carburant). Les responsables de stations-service peuvent décider de mettre en place des programmes de prévention destinés aux personnels susceptibles d’être confrontés à des problèmes de vol et de violence; ces derniers risques sont plus ou moins critiques selon le lieu d’implantation de la station-service, les horaires d’ouverture et les menaces potentielles.

La sécurité et la santé dans les stations-service

La protection incendie

Les vapeurs d’essence sont plus lourdes que l’air et susceptibles de migrer sur de longues distances en direction des sources d’inflammation au cours d’opérations de ravitaillement en carburant ou d’interventions sur véhicules, et en présence de fuites ou de débordements. Une ventilation efficace des espaces confinés devra être prévue, afin d’assurer la dissipation des vapeurs d’essence. Les incendies peuvent naître de fuites ou de débordements lors des opérations de remplissage et de maintenance ou de transvasement des produits dans les réservoirs des stations-service, notamment s’il n’est pas interdit de fumer ou si les moteurs de véhicules continuent à tourner lors de la livraison de carburant. Afin d’éviter les incendies, les véhicules devraient être écartés des zones de déversement, l’essence déversée nettoyée sous le véhicule ou à proximité avant la mise en marche des moteurs. Les véhicules ne devraient pas être autorisés à accéder dans les zones affectées par les fuites ou à y circuler.

Les travailleurs devraient connaître les autres causes d’incendie dans les stations-service telles que manipulation erronée, mauvais transvasement, stockage de liquides combustibles inflammables, déversements accidentels lors des interventions sur les installations de carburant, décharge électrostatique lors du remplacement des filtres de pompes distributrices et utilisation d’éclairages inappropriés ou non protégés sur le lieu de travail. L’opération de vidange des réservoirs à carburant des véhicules peut présenter des risques très importants en raison du dégagement potentiel de carburant et de vapeurs, notamment dans les espaces confinés et en présence de sources d’inflammation.

Des autorisations de travail à chaud devraient être délivrées dans le cadre de travaux autres que les interventions sur véhicules ou les dépannages, dès lors qu’il y a source d’inflammation dans des zones susceptibles de comporter des vapeurs inflammables. Les travailleurs devraient savoir qu’il ne faut pas tenter d’amorcer le carburateur quand le moteur tourne ou quand il est lancé par le démarreur, car les retours de flamme risquent d’enflammer les vapeurs d’essence. Les travailleurs devraient respecter les consignes de sécurité consistant à utiliser du liquide de démarrage et non de l’essence pour amorcer le carburateur et se servir de brides pour maintenir le clapet (volet de démarrage) en position d’ouverture lorsqu’ils essaient de mettre le moteur en marche.

Même si les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise peuvent exiger l’installation de systèmes à poste fixe de protection contre l’incendie, les extincteurs demeurent le principal moyen de lutte dans les stations-service et il incombe à leurs responsables de prévoir des extincteurs de la classe requise en fonction de la nature des risques de l’installation. Les extincteurs et les moyens fixes de défense devraient faire l’objet de visites et d’opérations de maintenance régulières et les travailleurs devraient savoir quand, où et comment se servir des extincteurs ou déclencher les moyens fixes de lutte contre l’incendie.

Les responsables de stations-service devraient prévoir des dispositifs d’arrêt des opérations de ravitaillement en carburant en des endroits bien identifiés et accessibles; ils devraient s’assurer que les travailleurs connaissent la finalité, l’emplacement et le fonctionnement de ces dispositifs. On empêchera la combustion spontanée en enfermant les chiffons imprégnés d’huile dans des récipients métalliques, avant de les récupérer ou de les éliminer.

La sécurité

Les employés de stations-service peuvent subir des lésions pour les motifs ci-après: utilisation inadaptée d’outils, de matériel et d’échelles, absence de port des équipements de protection individuelle, glissements ou chutes, travail en posture complexe, mauvaises positions adoptées lors du soulèvement ou du port de charges lourdes. Les lésions ou les accidents peuvent également être dus au non-respect des règles de sécurité lors d’interventions sur les radiateurs chauds, les transmissions, les moteurs et les dispositifs d’échappement, les pneumatiques et les batteries; ils peuvent aussi résulter de l’utilisation d’appareils de levage, d’appareils électriques et de machines, des tentatives de vols et d’agressions, d’erreurs de manipulation des produits de nettoyage, solvants et produits chimiques destinés à l’automobile, ou encore de l’exposition à ces produits.

Les responsables de stations-service devraient élaborer et mettre en œuvre des programmes de prévention des accidents et incidents liés aux conditions matérielles prévalant dans les stations-service telles que les dysfonctionnements ou négligences en matière de maintenance, de stockage, d’organisation matérielle et logistique. Parmi les autres éléments à l’origine des accidents dans les stations-service, il convient de relever les aspects ci-après: inattention, formation ou compétences insuffisantes des travailleurs susceptibles d’entraîner une mauvaise utilisation des appareils, outillages, pièces automobile, fournitures ou matières servant aux opérations de maintenance. La figure 102.10 comporte une liste de contrôle utilisable aux fins de sécurité.

Figure 102.10 Liste de contrôle des stations-service du point de vue de l'hygiène,
de la sécurité et de la santé

Figure 102.10

Figure 102.10

Figure 102.10

Les vols représentent un risque très important en matière de sécurité dans les stations-service. Les précautions et la formation nécessaires sont abordées notamment dans l’encadré intitulé «La violence dans les stations-service», mais également aux chapitres nos 95, 97, 99, 101, entre autres, de l’Encyclopédie.

La violence dans les stations-service

Parmi les professions où les taux d’homicide sont les plus élevés, l’emploi dans les stations-service, aux Etats-Unis, vient au quatrième rang, la quasi-totalité des agressions se produisant lors de tentatives de vols à main armée et autres actes criminels (National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH), 1993b). La tendance consistant à convertir les stations-service en magasins de proximité n’a fait qu’accroître l’insécurité dans ces établissements et en rendre les travailleurs plus vulnérables. L’analyse des circonstances de survenue de ces actes a permis d’identifier les facteurs de risques conduisant à de tels crimes ou délits avec violence:

  • les transactions en espèces avec le public;
  • le travail seul ou en petit groupe;
  • le travail tard la nuit ou tôt le matin;
  • le travail dans des zones à forte délinquance;
  • le gardiennage de biens de valeurs;
  • le travail dans des quartiers sensibles.

Le risque augmente dans les lieux faciles d’accès et d’où l’on peut s’échapper facilement.

Pour se protéger contre les tentatives de vols, certains employés de stations-service se sont équipés de battes de base-ball ou de gourdins, parfois même d’armes à feu. La plupart des services de police sont opposés à de telles initiatives, faisant valoir qu’elles risquent de déclencher des réactions violentes chez les délinquants. Les mesures de prévention considérées comme étant les plus dissuasives contre les tentatives de vols sont les suivantes:

  • un éclairage puissant de la pompe à essence, des aires de stationnement et de l’intérieur des magasins, notamment à proximité des caisses;
  • de grandes baies vitrées, non obstruées et équipées de vitres pare-balles qui améliorent la visibilité de l’intérieur du magasin, ainsi que des aménagements équipés de vitres pare-balles eux aussi pour protéger le poste de travail du caissier;
  • des accès indépendants, à l’extérieur du bâtiment, aux toilettes réservées au public de façon que ce dernier n’ait pas à entrer dans le magasin (un local séparé abritant les toilettes réservées aux employés serait préférable et leur éviterait de devoir utiliser les toilettes prévues pour les clients);
  • l’installation de boîtes de dépôt et de coffres-forts à ouverture temporisée, pour n’y laisser que peu d’espèces, ainsi que la mise en place de pancartes très visibles informant clairement des dispositions prises;
  • une politique consistant à exiger l’appoint (pour ne pas avoir à rendre de monnaie) pendant les heures de nuit et tôt le matin;
  • le recrutement d’un employé supplémentaire ou d’un vigile afin que l’employé ne reste jamais seul (les exploitants de stations-service ou de magasins de proximité sont peu disposés à prendre une telle mesure en raison de son coût);
  • l’installation d’une alarme électrique ou électronique (déclenchée par des boutons faciles d’accès) qui émet des signaux de détresse sonores et visuels afin d’alerter la police et d’attirer l’attention — ainsi, éventuellement, qu’un circuit d’alarme directement relié au commissariat de police;
  • l’installation d’écrans de contrôle de haute fidélité afin d’identifier et, si possible, d’interpeller ensuite les auteurs du délit.

Les services de police locaux et les spécialistes de la prévention de la criminalité sont les mieux placés pour aider à choisir les mesures dissuasives les plus appropriées et les plus économiques. Rappelons également que les équipements devraient être correctement installés, vérifiés et régulièrement entretenus et que les employés doivent être formés à leur utilisation.

Leon J. Warshaw

La santé

Les travailleurs de stations-service devraient connaître les risques professionnels qu’ils encourent dans ce domaine et qui comprennent:

Le monoxyde de carbone. Les polluants d’échappement émis par les moteurs à explosion renferment un gaz incolore et inodore très toxique, connu sous le nom de monoxyde de carbone. Les travailleurs devraient connaître les risques liés à l’exposition à ce gaz, notamment en présence de véhicules en fonctionnement à l’intérieur d’aires de service, de garages ou de tunnels de lavage. Les polluants d’échappement des véhicules devraient être évacués à l’extérieur par des tuyauteries souples et le dispositif de ventilation devrait fournir une réserve suffisante d’air neuf. Les appareils fonctionnant au fioul, notamment pour assurer le chauffage, devraient être vérifiés pour s’assurer qu’ils ne dégagent pas de monoxyde de carbone à l’intérieur des locaux.

La toxicité des combustibles/carburants à base de pétrole. Les travail-leurs utilisant de l’essence, du gazole ou du kérosène devraient connaître les risques encourus lors de telles expositions, ainsi que les gestes nécessaires pour manipuler ces produits en sécurité. L’inhalation prolongée de concentrations suffisamment fortes de vapeurs d’essence peut conduire à des phénomènes d’intoxications légères, des malaises ou à des affections plus graves. De courtes périodes d’exposition à des concentrations élevées peuvent provoquer vertiges, maux de tête, nausées, irritations des yeux, du nez et de la gorge. L’essence, les solvants ou le fioul placés dans des récipients ou réservoirs ne devraient en aucun cas être siphonnés par la bouche, car la toxicité des hydrocarbures liquides à faible viscosité, aspirés directement dans les bronches, est 200 fois supérieure à la toxicité en cas d’ingestion. L’inhalation par voie respiratoire peut provoquer un œdème pulmonaire et des hémorragies graves, se traduisant par des lésions très sérieuses, voire mortelles. Il ne faut pas faire vomir le sujet et il est impératif d’appeler immédiatement un médecin.

Le benzène. Les travailleurs des stations-service devraient connaître les risques potentiels liés au benzène contenu dans l’essence et éviter d’inhaler des vapeurs d’essence. Bien que l’essence renferme du benzène, une faible exposition à de telles vapeurs n’est pas a priori de nature à provoquer le cancer. Selon de nombreuses études scientifiques, les travailleurs des stations-service ne sont pas exposés à des niveaux trop importants de benzène dans le cadre de leur travail normal; on ne saurait toutefois exclure l’éventualité de surexpositions.

Les risques de dermites. Les travailleurs qui, à titre professionnel, manipulent ou sont au contact de produits pétroliers devraient avoir connaissance des risques de dermites et autres affections cutanées; ils devraient respecter les mesures d’hygiène et de protection individuelle contre ce type d’exposition. En cas de contact oculaire accidentel avec de l’essence, des lubrifiants ou des solutions antigel, il faut rincer abondamment les yeux à l’eau tiède et propre avant de faire appel à un médecin.

Les lubrifiants, les huiles de moteur usées et les produits chimiques destinés à l’automobile. Les travailleurs chargés de vidanger l’huile ou d’autres liquides destinés au moteur, y compris les solutions antigel, devraient avoir connaissance des risques associés et savoir comment limiter l’exposition aux produits tels que l’essence dans les huiles usées, le glycol dans les solutions antigel et autres substances polluantes dans les liquides de transmission et lubrifiants d’engrenage; ils devraient utiliser des équipements de protection individuelle et respecter les règles d’hygiène habituelles. Si des pistolets d’injection d’huile sous haute pression se trouvent braqués accidentellement contre l’opérateur, la partie du corps concernée devra être examinée immédiatement pour vérifier que les produits pétroliers n’ont pas pénétré dans les tissus. Ces lésions ne provoquent quasiment aucune douleur ni aucun saignement, mais créent une séparation quasi instantanée des tissus, voire des atteintes plus profondes, nécessitant l’intervention immédiate d’un médecin, lequel devra être informé de la cause et du produit incriminé dans la blessure considérée.

Le soudage. Outre les risques d’incendie qu’il présente, le soudage peut comporter une exposition aux pigments de plomb lors des opérations de soudage sur les parties extérieures des automobiles, ainsi qu’aux fumées comportant des particules métalliques et des gaz de soudage. Pour prévenir ces risques, il convient de prévoir un système de ventilation avec aspiration localisée ou le port d’une protection respiratoire.

La peinture par pulvérisation et la réfection des carrosseries au moyen d’enduits. La peinture par pulvérisation peut comporter une exposition aux vapeurs de solvants et aux particules de pigments (comme les chromates de plomb). Les enduits de rebouchage pour carrosseries sont souvent à base de résines époxy ou polyester, ce qui peut présenter des risques pour la peau ou les voies respiratoires. Lors de la mise en œuvre de produits de retouche pour carrosseries, il est recommandé de travailler dans des cabines de peinture par pulvérisation comportant une plate-forme de roulement pour véhicule et de prévoir un système de ventilation avec aspiration localisée ainsi qu’une protection de la peau et des yeux.

Les accumulateurs. Ceux-ci contiennent des solutions électrolytiques corrosives d’acide sulfurique susceptibles de provoquer des brûlures et autres lésions oculaires ou cutanées. Le port de gants et de lunettes de protection permet de limiter l’exposition aux solutions électrolytiques. Les travailleurs devraient immédiatement se rincer abondamment les yeux à l’aide d’eau claire et potable (ou d’une fontaine oculaire), de même que la peau pendant une bonne quinzaine de minutes et faire immédiatement appel à un médecin. Ils devraient se laver soigneusement les mains après une intervention sur des batteries et veiller à ne pas les poser sur les yeux ou le visage. Ils devraient en outre savoir que la surcharge des batteries peut être la source d’un dégagement important d’hydrogène, lequel est à la fois explosif et toxique. Compte tenu des effets potentiellement nocifs de l’exposition au plomb, les accumulateurs usés devraient être soigneusement éliminés ou récupérés conformément aux dispositions prévues par les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise.

L’amiante. Les travailleurs chargés de vérifier et d’intervenir sur les mécanismes de freinage devraient connaître les risques liés à l’amiante, savoir en déceler la présence potentielle dans les garnitures et prendre des mesures de protection adaptées, afin de limiter l’exposition et de maîtriser le processus de traitement et d’élimination des déchets (voir figure 102.11).

Figure 102.11 Enceinte mobile de déoussiérage vient à prévenir l'exposition à
l'amiante contenu dans les tambours de frein

Figure 102.11

Les équipements de protection individuelle

Les travailleurs peuvent subir des lésions par suite de la manipulation de carburants, de solvants et d’autres produits chimiques destinés à l’automobile; ils peuvent être victimes de brûlures chimiques s’ils ont été exposés aux acides de batteries ou aux solutions caustiques. Les employés de stations-service devraient être dûment informés de la nécessité d’utiliser et de porter des équipements de protection individuelle tels que:

Dans le cadre de la prévention des incendies, des dermites et des brûlures chimiques de la peau, les vêtements fortement imprégnés d’essence, de solutions antigel ou d’huile devraient être immédiatement ôtés dans un local correctement ventilé et dépourvu de toute source d’inflammation telle que radiateurs électriques, moteurs, cigarettes, briquets, sèche-mains électriques. Les zones de peau exposées à ces produits devraient être soigneusement lavées à l’eau tiède savonneuse pour enlever toute trace de contamination. Les vêtements devraient être séchés à l’air libre, en dehors du bâtiment ou dans des locaux bien ventilés, loin de toute source d’inflammation avant d’être lavés, afin d’éviter toute contamination des égouts.

La protection de l’environnement des stations-service

Le contrôle de l’inventaire des réservoirs de stockage

Les responsables de stations-service devraient tenir en permanence des états de stocks précis et concordants quant au contenu réel des réservoirs de stockage d’essence et de carburants, afin de maîtriser les pertes. Le jaugeage manuel par tige peut servir à vérifier l’intégrité des réservoirs de stockage et des canalisations enterrées. En présence d’équipements de jaugeage automatique ou de dispositifs détecteurs de fuites, il convient de vérifier régulièrement et manuellement la précision desdits équipements. Tout réservoir ou dispositif de stockage sur lequel des fuites sont à craindre devrait être examiné, et si les fuites se confirment, il convient d’assurer la sécurité du réservoir ou de le dépoter et de le réparer, de le déposer ou de le remplacer par un réservoir sain. Les travailleurs de stations-service devraient savoir que les fuites de carburant peuvent cheminer sous terre sur de longues distances, polluer les réserves d’eau, pénétrer dans les réseaux d’eaux usées et de drainage et provoquer des incendies et des explosions.

La manutention et l’élimination des déchets

Les résidus de lubrifiants et autres produits chimiques destinés à l’automobile, les solvants et les huiles de moteur usées, les égouttures d’essence, de combustible/carburant et de solutions antigel à base de glycol devraient être recueillis dans des réservoirs et récipients agréés et correctement étiquetés, en attendant d’être repris ou récupérés conformément aux prescriptions en vigueur et à la politique interne de l’entreprise.

Quand le moteur présente une usure des cylindres ou d’autres défauts pouvant donner lieu à l’apparition de petites quantités d’essence dans le carter d’huile, des précautions devraient être prises pour éviter que les vapeurs d’essence dégagées par les réservoirs et les contenants de récupération n’atteignent les sources d’inflammation.

Les filtres à huile et à liquides de transmission usés devraient être purgés de leur huile avant d’être éliminés. Les filtres à carburant usés, dont sont équipés les véhicules ou les distributeurs de carburant, devraient être purgés dans des récipients agréés, puis stockés dans des locaux correctement ventilés, loin des sources d’inflammation, afin de pouvoir sécher avant d’être éliminés.

Les récipients ayant renfermé des électrolytes de batteries devraient être soigneusement rincés à l’eau avant d’être mis au rebut ou recyclés. Les batteries usées contenant du plomb devraient être éliminées ou récupérées selon les règles.

Le nettoyage de grandes quantités de liquides déversés peut nécessiter une formation particulière et l’utilisation d’équipements de protection individuelle. Les carburants ainsi récupérés devraient être reversés dans l’installation d’origine ou une installation de stockage en vrac; à défaut, ils seront éliminés conformément aux prescriptions en vigueur et à la politique interne de l’entreprise. Il faut s’abstenir de balayer, d’asperger d’eau ou d’évacuer les lubrifiants, huiles usées, graisses, solutions antigel, égouttures de carburants et autres matières en direction des siphons d’écoulement au sol, éviers, toilettes, égouts, puisards et autres voies d’écoulement ou en direction de la voirie. Les résidus de graisses et d’huiles devraient être éliminés desdits siphons et puisards afin que ces matières ne soient pas déversées dans les égouts. Les poussières d’amiante et les garnitures de frein usées en renfermant devraient être manipulées et éliminées conformément aux prescriptions en vigueur et à la politique interne de l’entreprise. Les travailleurs devraient être informés de l’incidence de ces déchets sur l’environnement et connaître les risques potentiels pour la sécurité, la santé et les risques d’incendie qu’ils présentent.

LE TRANSPORT FERROVIAIRE

LE TRANSPORT FERROVIAIRE: L’EXPLOITATION

Neil McManus

Le chemin de fer est, dans le monde entier, un moyen de transport important. En dépit de la concurrence exercée par les modes routier et aérien, il occupe une place de choix, parmi les modes terrestres, pour le transport de grandes quantités de marchandises. L’exploitation ferroviaire est assurée dans des sites et sous des climats très divers, qui vont du permafrost dans les zones arctiques à la jungle équatoriale, en passant par la forêt tropicale humide et le désert. L’infrastructure ferroviaire se présente sous la forme d’une voie posée sur une couche de pierres concassées (ballast) et équipée de rails en acier et de traverses en bois, en béton ou en métal. Les traverses et le ballast servent à assurer le maintien des rails en voie.

La question de la source d’énergie nécessaire à l’exploitation des trains se retrouve à chacune des étapes du développement de ce mode de transport et dans tous les pays du monde: il peut s’agir de la traction à vapeur, de la traction diesel-électrique ou de la traction électrique.

La gestion et l’exploitation ferroviaires

Les fonctions de gestion et d’exploitation ferroviaires sont les plus connues du grand public. Il s’agit de veiller à l’acheminement des marchandises du point d’origine au point de destination. Au titre des emplois de gestion, on retrouve le personnel chargé de fonctions commerciales, techniques et de gestion. L’exploitation, quant à elle, recouvre les métiers de régulation, de gestion des circulations, d’entretien des équipements de signalisation et les métiers d’agents des trains, des gares et des chantiers.

Les régulateurs assurent la commande d’un personnel roulant en une heure et un lieu donnés. Le chemin de fer fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par an. Le personnel chargé de la gestion des circulations coordonne les mouvements de trains et alloue une section de voie définie à chaque train, selon un ordonnancement et des horaires précis. L’exercice se complique dans le cas de voies uniques qui doivent être empruntées alternativement par des trains circulant dans un sens ou dans l’autre. Considérant qu’une section de voie donnée ne peut être occupée que par un seul train à un instant quelconque, il incombe au personnel chargé de la circulation des trains de gérer l’occupation des voies principales et des voies de service de façon à garantir la sécurité tout en respectant les horaires.

Les signaux présentent des indications visuelles que doivent observer les conducteurs de trains et de véhicules routiers aux passages à niveau. Vis-à-vis des conducteurs de trains, les signaux doivent transmettre des messages non ambigus quant à l’état d’occupation de la voie en aval. La signalisation vient aujourd’hui compléter les informations diffusées par le personnel de gestion des circulations grâce aux équipements radio dont sont dotées toutes les unités opérationnelles. Il incombe aux agents chargés de la maintenance des équipements de signalisation de s’assurer en permanence de leur bon fonctionnement, ce qui impose parfois de travailler dans des sites isolés, par tous les temps, de jour comme de nuit.

Les agents des gares et des chantiers doivent notamment s’assurer que le matériel de fret est en état de recevoir des chargements, ce qui est une fonction de plus en plus importante à l’ère de la gestion de la qualité. Les wagons à trois niveaux destinés au transport des automobiles doivent être nettoyés avant utilisation et préparés à recevoir des véhicules grâce au positionnement de cales mobiles en fonction des besoins. Quant à la hauteur séparant les différents niveaux des wagons porte-autos, elle ne permet pas à un homme de taille moyenne de se tenir debout, d’où la nécessité de travailler en position courbée. Par ailleurs, certains wagons sont équipés de mains courantes placées de façon telle qu’elles obligent les agents à adopter une posture complexe lors des manœuvres.

Sur de longs parcours, les agents de train prennent en charge la conduite de celui-ci entre deux points prédéfinis. Au point de relève, ils sont remplacés par d’autres agents de train qui poursuivent la marche. La première équipe doit attendre en ce lieu qu’un autre train lui permette d’effectuer le trajet retour. Les temps de trajet et d’attente cumulés peuvent représenter de longues heures.

Le parcours d’un train en voie unique peut se décomposer en multiples sous-ensembles en raison notamment de contraintes horaires, de travaux effectués sur la voie ou de pannes de matériel. Il arrive que l’équipe regagne son point d’attache en voyageant dans la cabine de la locomotive arrière ou dans le wagon-frein (lorsqu’il est encore utilisé) voire en taxi, en autobus ou en autocar.

Les agents de train peuvent avoir à détacher ou à atteler certains wagons en cours d’acheminement. Ces opérations peuvent se dérouler à toute heure du jour ou de la nuit et dans n’importe quelles conditions météorologiques. Dès lors que les agents de train se trouvent dans le périmètre d’un chantier, ce sont les seules tâches qui peuvent leur être demandées.

Il arrive qu’il y ait rupture de la partie mâle de l’attelage automatique ou fuite dans la conduite pneumatique ayant pour fonction de freiner le convoi. Un des agents de train doit alors procéder à une visite et réparer ou remplacer la pièce défectueuse. Il s’agit ensuite de porter la pièce de rechange qui pèse quelque 30 kg, en cheminant le long de la voie jusqu’au lieu de l’incident, pour procéder à son remplacement sur la rame. Les interventions des agents entre les wagons doivent être programmées et préparées minutieusement, afin que le convoi ne se mette pas en mouvement tant que la procédure n’est pas terminée.

Dans les régions montagneuses, des pannes survenant en tunnel ne sont pas à exclure. Le conducteur de la locomotive doit alors maintenir un certain niveau de puissance sur l’engin, afin que le frein reste opérationnel et qu’il n’y ait aucun mouvement de dérive. La circulation des trains en tunnel peut provoquer l’émission de polluants d’échappement (dioxyde d’azote, oxyde nitrique, monoxyde de carbone, dioxyde de soufre).

Le tableau 102.3 récapitule les conditions dangereuses associées aux activités de gestion et d’exploitation ferroviaires.

Tableau 102.3 Conditions dangereuses associées aux activités de gestion et
d'exploitation ferroviaires

Risques

Catégories concernées

Commentaires

Gaz d’échappement

Agents de train, personnel d’encadrement, agents techniques

Les gaz d’échappement contiennent principalement du dioxyde d’azote, de l’oxyde nitrique, du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre, ainsi que des particules renfermant des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Les risques d’exposition sont plus importants dans les tunnels non ventilés

Bruit

Agents de train, personnel d’encadrement, agents techniques

Le niveau sonore en cabine de conduite peut dépasser les limites fixées par la réglementation

Vibrations transmises au corps entier

Agents de train

Les vibrations induites par les structures sont transmises par le plancher et les sièges de la cabine; elles sont dues au moteur et au passage du train sur la voie, y compris au droit des abouts de rails

Champs électromagnétiques

Agents de train, agents de maintenance de la signalisation

Les champs sont soit en courant alternatif, soit en courant continu selon la conception de l’engin moteur et des moteurs de traction

Champs de radiofréquences

Utilisateurs de radio en mode bilatéral

Les effets chez l’humain ne sont pas clairement établis

Conditions météorologiques

Agents de train, agents des gares, agents de maintenance de la signalisation

Les rayons ultraviolets peuvent provoquer des coups de soleil, des cataractes et des cancers de la peau. Le froid peut provoquer une hypothermie et des gelures, la chaleur une hyperthermie

Travail posté

Régulateurs, agents de gestion des circulations, agents de train et agents de maintenance de la signalisation

Les agents de train peuvent avoir des horaires de travail irréguliers; leur rémunération est souvent calculée sur la base de parcours déterminés, assurés pendant un laps de temps donné

Lésions musculo-squelettiques

Agents de train, agents des gares ou des chantiers

Des lésions de la cheville peuvent se produire lors de la descente d’un véhicule en mouvement et des lésions de l’épaule lors de la montée sur un véhicule en mouvement. D’autres parties du corps peuvent être lésées lors du port de coupleurs sur un terrain accidenté et lorsque le travail s’effectue en postures contraignantes

Terminaux à écran de visualisation

Personnel de gestion, personnel administratif et technique, régulateurs, agents de gestion des circulations

L’utilisation efficace d’un poste de travail avec écran de visualisation passe par la prise en compte des principes de l’ergonomie de bureau quant à la conception des équipements et au confort visuel

Accidents par heurt

Tous les travailleurs

Des heurts peuvent se produire lorsqu’un agent se trouve sur une voie de circulation et n’entend pas l’arrivée de trains, d’engins d’entretien de la voie ou de véhicules en mouvement

La maintenance du matériel roulant et des engins de voie

Le matériel roulant comprend les locomotives et les wagons. Par engins de voie, on entend le matériel spécialisé utilisé lors des tournées en voie, ainsi que pour la maintenance, la construction et la remise en état de celle-ci. Selon l’importance du réseau ferré, le degré de maintenance peut varier d’une simple intervention ponctuelle effectuée sur le terrain à des opérations complètes comportant dépose, puis remontage. Le matériel roulant ne doit pas tomber en panne en service, au risque d’avoir des conséquences graves du point de vue de la sécurité, de l’environnement et vis-à-vis des clients. Si un wagon transporte des matières dangereuses, les répercussions potentielles d’un défaut mécanique seront aggravées par le fait que ce dernier n’aura pas été décelé à temps et qu’il n’y aura pas été porté remède.

Les entreprises ferroviaires d’une certaine importance disposent d’ateliers d’entretien courant et d’installations centralisées permettant la dépose des organes et la réfection complète des véhicules. Le matériel roulant fait l’objet de visites et il est préparé dans les dépôts d’entretien courant en prévision des parcours à assurer. Les petites interventions sont réalisées sur les wagons et les locomotives.

Les wagons comportent des structures rigides qui peuvent pivoter en extrémité. Le point de pivotement se situe sur un axe vertical placé dans le bogie (les roues et la structure dans laquelle elles s’encastrent). La caisse du wagon peut être désolidarisée du bogie par soulèvement en vue d’effectuer des interventions. Des interventions légères sont parfois faites sur la caisse du wagon, les pièces annexes, le frein ou d’autres parties du bogie. Il peut être nécessaire de reprofiler les roues sur un tour afin d’éliminer les zones de méplats.

Les révisions importantes peuvent comporter la dépose et le remplacement de tôles ou de châssis avariés ou corrodés, suivis du grenaillage et de la remise en peinture. Il peut également s’agir d’une dépose et du remplacement du plancher de bois d’un wagon. Les bogies, y compris les essieux montés et leurs roulements, peuvent nécessiter dépose et pose. La remise en état des bogies moulés nécessite des opérations de soudage par rechargement et de meulage. Les essieux traités doivent être usinés aux fins de recalage.

Les locomotives sont nettoyées et examinées avant chaque parcours. Ces opérations nécessitent parfois des interventions ponctuelles sur les organes mécaniques, les organes de frein ou le moteur diesel, ou encore des vidanges. Il peut être nécessaire de déposer le bogie pour vérifier le calage et l’état de surface des roues. Il faut parfois rendre la locomotive opérationnelle pour la faire entrer ou sortir du bâtiment de maintenance. Sa remise en service peut nécessiter un essai en charge au cours duquel le moteur fonctionne à pleine puissance. Les mécaniciens travaillent alors au voisinage immédiat du moteur.

Les interventions importantes exigent à l’occasion de démonter complètement la locomotive. Le moteur diesel, le compartiment moteur, le compresseur, la génératrice et les moteurs de traction doivent être soigneusement dégraissés et nettoyés en tenant compte du service assuré, en raison des encrassements provoqués par le carburant et les lubrifiants sur les surfaces soumises à température élevée. Les ensembles constitutifs peuvent alors être démontés, puis remis en place.

Il peut s’avérer nécessaire de souder les carcasses de moteurs de traction par rechargement et d’usiner les induits et les rotors pour déposer les anciens matériaux isolants, réparer les organes et assurer leur imprégnation à base de vernis.

Quant au matériel utilisé pour la maintenance de la voie, il comprend notamment les engins qui peuvent circuler sur route ou sur rail, ainsi que le matériel spécialisé uniquement apte à rouler sur rail. Les travaux peuvent nécessiter le recours à des engins très spécialisés, notamment pour l’inspection des voies ou le meulage des rails, lesquels peuvent exister en un seul exemplaire, même au sein de grands réseaux ferrés. L’entretien du matériel de maintenance de la voie peut se dérouler dans des installations de type garage ou au plus près du terrain. Les moteurs équipant ce matériel peuvent émettre un volume très important de gaz d’échappement parce qu’ils ne tournent pas fréquemment et que les mécaniciens chargés de leur maintenance manquent par conséquent de pratique. De graves phénomènes de pollution peuvent se produire si ce matériel vient à fonctionner dans des espaces clos tels que les tunnels, les remises et autres enceintes.

Le tableau 102.4 récapitule les conditions dangereuses associées aux activités de maintenance du matériel roulant et des engins de voie, ainsi que les risques inhérents aux accidents de transport.

Tableau 102.4 Conditions dangereuses associées aux activités de maintenance
et aux accidents de transport

Risques

Catégories concernées

Commentaires

Lubrifiants et huiles usés (contamination cutanée)

Mécaniciens diesel, mécaniciens chargés des moteurs de traction

La décomposition des hydrocarbures au contact de surfaces chaudes peut provoquer le dégagement d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP)

Gaz d’échappement

Tous les travailleurs des ateliers diesel, des installations de lavage, d’approvisionnement en carburant, des installations utilisées pour les essais en charge

Les gaz d’échappement contiennent principalement du dioxyde d’azote, de l’oxyde nitrique, du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre, ainsi que des particules renfermant des HAP. Les risques d’exposition sont plus importants en cas de confinement des émissions

Emissions des opérations de soudage

Soudeurs, monteurs, opérateurs de ponts roulants

Le soudage s’effectue essentiellement sur des pièces en acier au carbone et, accessoirement, en aluminium ou en acier inoxydable. Les émissions proviennent des gaz de protection et des flux de soudage, des fumées métalliques, de l’ozone, du dioxyde d’azote, des rayons visibles et ultraviolets

Emissions des opérations de brasage

Electriciens intervenant sur les moteurs de traction

Les émissions contiennent du cadmium et du plomb provenant des flux de brasage

Produits issus de la décomposition thermique des revêtements

Soudeurs, monteurs, meuleurs, opérateurs de ponts roulants

Les émissions peuvent comprendre du monoxyde de carbone, des pigments inorganiques contenant du plomb et d’autres chromates, des produits de décomposition des résines de peintures. Des biphényles polychlorés (PCB) ont pu être utilisés avant 1971. Ils peuvent générer des furannes et des dioxines lorsqu’ils sont chauffés

Résidus de matières transportées

Soudeurs, monteurs, meuleurs, mécaniciens, décapeurs

La présence de résidus s’explique par les transports assurés à bord de wagons préalablement chargés de métaux lourds, de charbon, de soufre, de lingots de plomb, etc.

Poussières dues aux opérations d’abrasion

Opérateurs de meulage et de ponçage, autres personnes présentes sur les lieux

Les poussières peuvent contenir des résidus de matières transportées, des matériaux issus des opérations d’abrasion, des particules de peinture. Les peintures utilisées avant 1971 peuvent contenir des PCB

Vapeurs de solvants

Peintres, autres personnes présentes sur les lieux

Les vapeurs de solvants peuvent être présentes là où sont stockées ou mélangées les peintures, ainsi que dans les cabines de peinture; des mélanges inflammables peuvent se former dans des espaces confinés tels que les trémies ou les citernes pendant les phases de pulvérisation

Aérosols de peinture

Peintres, autres personnes présentes sur les lieux

Les aérosols de peinture au pistolet contiennent de la peinture et des diluants; les solvants présents en fines gouttelettes et en vapeurs peuvent former des mélanges inflammables; les résines peuvent renfermer des isocyanates, des époxydes, des amines, des peroxydes et d’autres réactifs intermédiaires métabolites

Espaces confinés

Tous les travailleurs en atelier

Intérieur de certains wagons, citernes, trémies, nez de locomotives, étuves, dispositifs de dégraissage et d’imprégnation de vernis, fosses, bassins de dégorgement ou autres structures entièrement ou partiellement fermées

Bruit

Tous les travailleurs en atelier

Le niveau sonore généré par des sources et activités diverses peut dépasser les limites fixées par la réglementation

Vibrations transmises au système main-bras

Utilisateurs d’outils puissants à main et d’équipements à préhension manuelle

Les vibrations se transmettent par les poignées

Champs électromagnétiques

Utilisateurs d’équipements de soudage électrique

Les champs sont soit en courant continu, soit en courant alternatif selon la conception de l’engin moteur et des moteurs de traction

Conditions météorologiques

Travailleurs intervenant à l’extérieur

Les rayons ultraviolets peuvent provoquer des coups de soleil, des cataractes et des cancers de la peau. Le froid peut provoquer une hypothermie et des gelures, la chaleur une hyperthermie

Travail posté

Tous les travailleurs

Les agents de train peuvent avoir des horaires de travail irréguliers

Lésions musculo-squelettiques

Tous les travailleurs

Des lésions de la cheville peuvent se produire lors de la descente d’un véhicule en mouvement et des lésions à l’épaule lors de la montée sur un véhicule en mouvement ou sur un wagon. Le travail s’effectue en postures contraignantes, notamment lors du soudage, du coupage ou de l’utilisation d’outils à main puissants

Accidents par heurt

Tous les travailleurs

Des heurts peuvent se produire lorsqu’un agent se trouve sur une voie de circulation et n’entend pas l’arrivée de trains, d’engins d’entretien de la voie ou de véhicules en mouvement

La maintenance des infrastructures ferroviaires

La maintenance des infrastructures ferroviaires est avant tout une activité qui s’exerce à l’extérieur et dans laquelle les travailleurs sont confrontés aux conditions suivantes: intempéries, sable en suspension dans l’air, morsures et piqûres d’insectes, animaux dangereux, serpents venimeux et plantes toxiques.

La maintenance des infrastructures ferroviaires peut comporter des tournées de surveillance, des opérations de maintenance, de remise en état ou de rénovation des bâtiments, des ouvrages, des voies et des ponts. Le travail implique également des opérations spécifiques telles que le déneigement ou l’épandage d’herbicides, et il est confié à des équipes locales ou à des brigades de personnel spécialisé dans le renouvellement des rails, du ballast ou des traverses. Il existe des équipements qui permettent une mécanisation très poussée de chacune de ces activités. Les travaux de moindre envergure peuvent toutefois être réalisés à l’aide de petit outillage à moteur, mais aussi relever d’une activité entièrement manuelle.

La maintenance des voies en exploitation requiert la mise à disposition d’un créneau horaire afin d’effectuer les travaux. Ce créneau horaire peut être alloué, à n’importe quel moment du jour ou de la nuit, en fonction du programme de circulation des trains, notamment en voie unique. Le travail s’effectue par conséquent dans le cadre de contraintes temporelles fortes, dans la mesure où la ligne doit être restituée à l’exploitation à la fin du temps imparti, ce qui nécessite d’acheminer l’outillage sur le chantier, d’effectuer le travail prévu et de libérer la voie dans le respect du créneau horaire octroyé.

Le renouvellement du ballast d’une part, des traverses et des rails, d’autre part, sont des tâches complexes. Pour le ballast, il convient en premier lieu d’éliminer le matériau en place, car il est pollué ou de moindre qualité, afin de découvrir la plate-forme. Ce travail s’effectue à l’aide d’un outil ressemblant à un soc tracté par une locomotive, ou d’un engin de dégarnissage comportant une longue chaîne à godets qui enlève le ballast et l’évacue en bordure de voie. D’autres outillages servent à la dépose et au remplacement de crampons ou d’attaches fixés sur les traverses, de selles (pièces métalliques intercalées entre le rail et la traverse) et de traverses. Le rail se présente sous forme de longues barres souples qui ondulent et se prêtent bien à des manutentions tant sur le plan vertical que transversal. Le ballast sert à consolider la position des rails en voie. Il est acheminé, puis déchargé à l’aide de rames spécialisées; pour assurer le déchargement en voie, il est fait appel à des travailleurs qui cheminent le long de la rame et ouvrent toutes les trappes par lesquelles se déverse le ballast.

Dès que le ballast est déchargé, une bourreuse commandée hydrauliquement permet d’effectuer le bourrage, c’est-à-dire de répartir les éléments de ballast sous les traverses et en tête de celles-ci, afin de relever la voie. Un dispositif spécial permet d’enfoncer le crampon dans la traverse pour fixer le rail et le mettre dans la position requise. La régaleuse permet de restituer au ballast son profil définitif et de nettoyer la surface des traverses et des rails. Les opérations de déchargement, de régalage et de finition dégagent une quantité considérable de poussières.

Les travaux de voie peuvent se dérouler dans des sites différents du point de vue de la topographie: zones à ciel ouvert, zones semi-enterrées (tranchées, flancs de collines ou parois de rochers) et espaces clos (tunnels ou remises). Cet aspect a des répercussions importantes sur les conditions de travail. En effet, ce type d’espaces entraîne un confinement et une concentration des émissions, des poussières de ballast ou des poussières issues d’opérations de meulage, des émanations liées au soudage aluminothermique, des nuisances sonores; ce phénomène se vérifiera également pour d’autres substances ou conditions dangereuses (le soudage aluminothermique est à base d’alumine en poudre et d’oxyde de fer. Dès la mise à feu, l’alumine se met à brûler fortement, entraînant la fusion du métal par réduction de ses oxydes. Le métal en fusion vient alors remplir la lacune entre les rails qui se trouvent ainsi soudés à leurs extrémités).

On ne peut pas parler de voie ferrée sans aborder la question des appareils de voie. Ceux-ci possèdent deux sous-ensembles fonctionnellement très importants: l’aiguillage et le croisement. L’aiguillage, qui sert à diriger les circulations vers un itinéraire défini, comporte deux parties constituées de rails usinés et mobiles à une de leurs extrémités: les aiguilles. Le croisement permet aux roues de passer d’une voie sur une autre. Le cœur en est la pièce essentielle. Il peut être monobloc en acier trempé à haute teneur en manganèse, ou en éléments de rails assemblés par des boulons indesserables en acier cadmié. Les cœurs peuvent être rechargés ou réparés par soudage à l’arc électrique, après meulage. Ces opérations peuvent être effectuées en voie ou en atelier.

La réfection de la peinture des ponts est un volet important de la maintenance des infrastructures. Les ponts se trouvent souvent loin, dans des lieux isolés, ce qui complique singulièrement la mise à disposition d’installations sanitaires pour le personnel, afin d’éviter sa contamination et la pollution de l’environnement.

Le tableau 102.5 récapitule les conditions dangereuses associées aux activités de maintenance des infrastructures ferroviaires.

Tableau 102.5 Conditions dangereuses associées aux activités de maintenance
des infrastructures

Risques

Catégories concernées

Commentaires

Gaz d’échappement

Tous les travailleurs

Les gaz d’échappement contiennent principalement du dioxyde d’azote, de l’oxyde nitrique, du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre, ainsi que des particules renfermant des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Les risques d’exposition sont plus importants dans les tunnels non ventilés et en cas de confinement des émissions

Poussières de ballast/résidus de chargements

Opérateurs d’engins d’entretien de la voie, ouvriers non qualifiés

Selon leur lieu d’extraction, les poussières de ballast peuvent contenir de la silice (quartz), des sels de métaux lourds ou de l’amiante. Les travaux de voie impliquant la production ou la manipulation de matières en vrac peuvent provoquer une exposition à ces produits: charbon, soufre, sels de métaux lourds, etc.

Emissions des opérations de soudage, de coupage et de meulage

Soudeurs en voie et en atelier

Le soudage s’effectue essentiellement sur de l’acier trempé; les émissions proviennent des gaz de protection et des flux de soudage, des fumées métalliques, de l’ozone, du dioxyde d’azote, des rayons visibles et ultraviolets. Il peut y avoir exposition au manganèse et au chrome lors des travaux sur les rails; le cadmium peut être présent dans les écrous et les boulons galvanisés

Poussières dues aux opérations d’abrasion

Opérateurs de meulage/ponçage, autres personnes présentes sur les lieux

Les poussières contiennent des matières issues d’opérations d’abrasion et des particules de peinture; la peinture renferme probablement du plomb et d’autres chromates

Vapeurs de solvants

Peintres, autres personnes présentes sur les lieux

Des vapeurs de solvants peuvent être présentes là où sont stockées ou mélangées les peintures; des mélanges inflammables peuvent se former dans des espaces confinés pendant les phases de pulvérisation

Aérosols de peinture

Peintres, autres personnes présentes sur les lieux

Les aérosols de peinture au pistolet contiennent de la peinture et des diluants; les solvants présents en fines gouttelettes et en vapeurs peuvent former des mélanges inflammables; les résines peuvent contenir des isocyanates, des époxydes, des amines, des peroxydes et d’autres réactifs intermédiaires métabolites

Espaces confinés

Tous les travailleurs

Intérieur des tunnels, conduits, citernes, trémies, fosses, bassins de dégorgement et autres structures entièrement ou partiellement fermées

Bruit

Tous les travailleurs

Le niveau sonore généré par des sources et activités diverses peut dépasser les limites fixées par la réglementation

Vibrations transmises au corps entier

Conducteurs d’engins, opérateurs d’engins d’entretien de la voie

Les vibrations induites par les structures sont transmises par le plancher et les sièges de la cabine; elles sont dues au moteur et au passage du train sur la voie, y compris au droit des abouts de rails

Vibrations transmises au système main-bras

Utilisateurs d’outils puissants à main et d’équipements à préhension manuelle

Les vibrations se transmettent par les poignées

Champs électromagnétiques

Utilisateurs d’équipements de soudage électrique

Les champs sont soit en courant alternatif, soit en courant continu selon la conception de l’engin moteur

Champ de radiofréquences

Utilisateurs de radio en mode bilatéral

Les effets chez l’humain ne sont pas clairement établis

Conditions météorologiques

Travailleurs intervenant à l’extérieur

Les rayons ultraviolets peuvent provoquer des coups de soleil, des cataractes et des cancers de la peau. Le froid peut provoquer une hypothermie et des gelures, la chaleur une hyperthermie

Travail posté

Tous les travailleurs

Les brigades d’entretien de la voie n’ont pas d’horaires de travail réguliers du fait des sujétions liées à la programmation des travaux

Lésions musculo-squelettiques

Tous les travailleurs

Des lésions de la cheville peuvent se produire lors de la descente d’un véhicule en mouvement et des lésions de l’épaule lors de la montée sur un véhiculeen mouvement. Le travail s’effectue en postures contraignantes, notamment lors du soudage ou de l’utilisation d’outils à main puissants

Accidents par heurt

Tous les travailleurs

Des heurts peuvent se produire lorsqu’un agent se trouve sur une voie de circulation et n’entend pas l’arrivée de trains, d’engins d’entretien de la voie ou de véhicules en mouvement

Les accidents de transport

L’accident de transport est sans doute la préoccupation majeure des exploitants ferroviaires. En effet, en raison même du volume des matières en jeu, le transport est une source potentielle d’exposition pour le personnel et l’environnement. On ne peut en aucune façon se prémunir totalement contre le scénario d’accident le plus grave. Il s’ensuit qu’il est absolument indispensable de limiter la probabilité et les conséquences d’un accident. Les accidents de transport sont dus à de multiples causes possibles qui vont des collisions aux passages à niveau à la présence d’obstacles sur la voie, en passant par la défaillance du matériel et l’erreur humaine.

Les opérations de visite et de maintenance régulières et minutieuses des infrastructures et des équipements permettent de limiter les risques et les conséquences de tels accidents. C’est ainsi que l’on peut atténuer les répercussions potentielles d’un accident, s’agissant d’un train acheminant des marchandises de natures différentes, en veillant à positionner judicieusement dans le convoi les wagons transportant des marchandises incompatibles entre elles. Or, ce type de mesure stratégique est inopérant pour un train ne transportant qu’un seul produit. Parmi les produits les plus critiques, il convient de citer le charbon pulvérulent, le soufre, les gaz de pétrole liquéfiés, les métaux lourds, les solvants et les produits chimiques intermédiaires.

Tous les personnels d’une entreprise ferroviaire sont concernés par les accidents de transport. Plusieurs équipes chargées des travaux peuvent effectivement se trouver simultanément sur un même chantier. Il importe donc d’assurer une coordination très fine de telle sorte que l’intervention d’une équipe ne gêne pas les autres.

Les matières dangereuses restent en général confinées du fait des dispositions prises lors de la conception des conteneurs ou des wagons transportant du fret en vrac, pour les protéger contre les conséquences des chocs. En cas d’accident, le contenu du wagon endommagé est dépoté par les équipes préposées aux interventions d’urgence qui représentent le chargeur. Les équipes de maintenance du matériel roulant s’efforcent de remédier à l’avarie et de remettre le wagon sur les rails, lorsque la chose est possible. Or, la section de voie concernée par le déraillement du wagon peut également avoir été endommagée. Dans ce cas de figure, sa remise en état sera entreprise dans les meilleurs délais à l’aide d’éléments de voie préfabriqués et en appliquant des techniques comparables à celles décrites précédemment.

Il arrive aussi qu’il y ait perte de confinement et que le contenu du wagon ou du conteneur se répande sur le sol. Si le volume des matières dangereuses transportées est tel que la législation exige l’apposition de panneaux et d’étiquettes, les matières figureront nommément sur le manifeste d’expédition. A l’inverse, si le volume des matières dangereuses transportées ne justifie pas la création de ce manifeste, les matières échapperont à toute identification et caractérisation pendant un certain temps. Il incombe au chargeur, une fois sur place, de veiller au confinement et à la récupération des matières déversées.

En Amérique du Nord et dans certains pays, les cheminots sont susceptibles d’être exposés à des matières enfouies dans la neige, la terre ou la végétation lorsqu’ils effectuent des travaux de remise en état. La criticité de leur exposition sera fonction des propriétés et du volume de matières, des caractéristiques physiques du lieu et des conditions météorologiques. Cette situation peut également présenter des risques d’incendie, d’explosion, de réactivité, ainsi que des risques toxiques pour les travailleurs, les animaux et l’environnement immédiat.

Peu après un accident, le lieu du sinistre doit être dégagé et la voie rouverte à la circulation des trains. Il peut s’avérer nécessaire de transborder la marchandise et de remettre le matériel roulant et la voie en état. Ces actions seront d’autant plus délicates et critiques qu’il y aura eu, localement, perte de confinement et déversement de matières. Toute prise de décisions face à ce type de situation doit se placer dans le cadre d’un dispositif d’intervention préétabli et prendre en compte l’avis des spécialistes éclairés dans ces domaines.

Les risques et les précautions

Les tableaux 102.3, 102.4 et 102.5 récapitulent les risques auxquels sont exposées les diverses catégories de travailleurs dans le cadre de l’exploitation ferroviaire. Le tableau 102.6 résume les précautions à prendre pour gérer ce type de situations à risque.

Tableau 102.6 Démarches adoptées par les chemins de fer pour maîtriser les
conditions dangereuses

Risques

Commentaires/mesures préventives

Gaz d’échappement

Les locomotives n’ayant pas de cheminées d’échappement, il y a dégagement des gaz au niveau de la toiture. Les ventilateurs de refroidissement y étant logés, l’entrée d’air ainsi pollué dans les tunnels ou les bâtiments peut s’en trouver facilitée.

Lors de la traversée de tunnels, l’exposition des occupants de la cabine de conduite ne dépasse pas (dans des circonstances normales) les limites d’exposition fixées. En revanche, celles-ci peuvent être très largement dépassées en cas d’interventions à l’arrêt (en tunnel) dans le but d’identifier des problèmes mécaniques, de relever des véhicules déraillés ou d’assurer la maintenance de la voie. Des cas de surexpositions importantes ne sont pas à exclure lors des travaux en atelier.

L’équipement de maintenance et de construction de la voie, ainsi que les engins lourds, ont en général des cheminées d’échappement vertical. Des rejets peu importants ou diffusés par le biais de déflecteurs horizontaux peuvent provoquer une surexposition. Les petits véhicules et engins portatifs fonctionnant à l’essence dégagent des gaz vers le sol, ou ne sont pas équipés de cheminées d’échappement. La proximité de telles sources peut être à l’origine de surexpositions.

Les mesures préventives comprennent:

  • des cheminées d’échappement allongées pour que les rejets s’effectuent verticalement
  • la suppression des fuites à l’échappement
  • des ventilateurs d’échappement en toiture sur les bâtiments
  • des dispositifs de captage des gaz à la source
  • des ventilateurs dans la partie supérieure des tunnels pour accroître l’échange d’air neuf dans cette zone
  • des convertisseurs catalytiques dans les systèmes d’échappement
  • le non-fonctionnement des locomotives à l’intérieur des bâtiments
  • des équipements de protection respiratoire; des masques recouvrant l’ensemble du visage et équipés de cartouches (conformes aux normes européennes) peuvent assurer une protection suffisante dans ces conditions

Bruit

Les mesures préventives comprennent:

  • des cabines de conduite insonorisées
  • l’insonorisation du matériel existant lors des opérations d’aménagement ou de modernisation
  • des équipements de protection auditive individuelle (consulter la réglementation pour vérifier qu’elle est dûment respectée lors de la circulation des trains ou des véhicules)

Vibrations transmises au corps entier

Les mesures préventives comprennent:

  • des cabines de conduite comportant des dispositifs antivibratiles
  • l’installation de dispositifs antivibratiles lors des opérations d’aménagement et de modernisation

Champs électromagnétiques

Risque non déterminé en deçà des limites actuelles

Champs de radiofréquences

Risque non déterminé en deçà des limites actuelles

Conditions météorologiques

Les mesures préventives comprennent:

  • des vêtements de travail protégeant contre le froid
  • des vêtements de travail protégeant contre le rayonnement solaire
  • une protection oculaire contre le rayonnement solaire
  • des produits antisolaires (demander un avis médical en cas d’utilisation prolongée)

Travail posté

Organiser les horaires de travail en tenant compte des connaissances actuelles en matière de rythmes circadiens

Lésions musculo-squelettiques

Les mesures préventives comprennent:

  • la conception ergonomique des équipements
  • des exercices ayant trait à l’entraînement musculaire, au levage et à la prévention des dorsalgies
  • des pratiques de travail propres à limiter ce type de lésions

Terminaux à écrans de visualisation

Appliquer les principes de l’ergonomie de bureau lors du choix et de l’utilisation des écrans de visualisation

Accidents par heurt

Les engins circulant sur rail fonctionnent en site propre. Le matériel non motorisé est peu bruyant quand il est en mouvement. En revanche, les caractéristiques physiques du site peuvent masquer le bruit émis par les outils motorisés, mais ce dernier peut à son tour affaiblir l’intensité de l’alarme sonore déclenchée par le conducteur d’un train à l’approche. Dans le cas de l’exploitation des triages, les opérations de changement de voie peuvent être commandées à distance de sorte que les véhicules peuvent se présenter sur n’importe quelle voie, à tout moment.

Les mesures préventives comprennent:

  • des autorisations d’occupation de voie et des signaux permettant de réguler l’occupation d’une section de voie par les trains ou les engins de maintenance. Ces autorisations ont pour objet d’habiliter une seule équipe à occuper une section de voie donnée
  • des alarmes dans les bâtiments indiquant les mouvements de matériel
  • des pratiques et des procédures pour assurer la sécurité du travail à proximité des voies et du matériel ferroviaire

Manipulation du ballast et résidus de matières transportées

Le mouillage du ballast avant d’effectuer des travaux de voie supprime les poussières de ballast et les résidus de matières transportées. Des équipements de protection individuelle et respiratoire devraient être fournis

Lubrifiants et huiles usés (contamination cutanée)

Les pièces devraient être nettoyées avant démontage pour prévenir la contamination. Il convient de porter des vêtements de protection, des gants ou des crèmes de protection totale

Emissions des opérations de soudage, de coupage et de brasage; poussières de meulage

Les mesures préventives comprennent:

  • la ventilation des locaux
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire
  • l’hygiène individuelle
  • la surveillance médicale (en fonction de la composition des métaux de base et des métaux constituant le fil ou la baguette)

Produits issus de la décomposition thermique des revêtements

Les mesures préventives comprennent:

  • la ventilation des locaux
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire
  • l’hygiène individuelle
  • la surveillance médicale (en fonction de la composition du revêtement)

Résidus de matières transportées

Les mesures préventives comprennent:

  • le lavage des résidus provenant des wagons avant entretien courant (en fonction des circonstances)
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire (en fonction des circonstances)
  • l’hygiène individuelle (en fonction des circonstances)
  • la surveillance médicale (en fonction du fret transporté)

Poussières dues aux opérations d’abrasion

Les mesures préventives comprennent:

  • l’encoffrement des opérations d’abrasion
  • l’automatisation des opérations d’abrasion (robot)
  • des systèmes d’extraction des poussières
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire
  • l’hygiène individuelle
  • la surveillance médicale (en fonction de la présence des résidus d’abrasion, de revêtements et du fret transporté)

Vapeurs de solvants, aérosols de peinture

Les mesures préventives comprennent:

  • des systèmes robotisés de mise en peinture de l’intérieur des trémies
  • des types de revêtements comportant peu de solvants
  • des peintures prêtes à l’emploi
  • des systèmes d’application de peintures comportant un transfert automatique des produits par les tuyauteries
  • des cabines de peinture
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire
  • la surveillance médicale (en fonction des circonstances)

Espaces confinés

Les mesures préventives comprennent:

  • des systèmes de ventilation portatifs
  • des équipements de protection individuelle
  • des appareils de protection respiratoire

Vibrations transmises au système main-bras

Les mesures préventives comprennent:

  • des outils répondant aux normes en vigueur vis-à-vis des vibrations transmises aux membres supérieurs
  • des gants antivibrations

Le métro

Si la sécurité des chemins de fer relève de la compétence de l’Etat, qui édicte les règles et les mesures en la matière et veille à leur application, les réseaux de métro relèvent en principe des autorités locales.

En règle générale, les tarifs pratiqués ne couvrent pas les dépenses d’exploitation et ils sont maintenus artificiellement bas grâce à des subventions pour que l’usage des transports publics reste à un prix abordable. Le métro et les autres transports en commun urbains permettent de décongestionner les voies de circulation en surface et de réduire la pollution liée à l’automobile en ville.

Les restrictions budgétaires qui sont devenues si courantes ces dernières années dans de nombreux pays n’ont pas épargné les transports en commun urbains. La maintenance préventive et la modernisation des voies, de la signalisation et du matériel roulant sont touchées en premier. Les autorités de tutelle sont souvent peu enclines ou incapables d’imposer leurs propres procédures réglementaires à un réseau délaissé par les subventions publiques. Dans ces conditions, la survenue d’un accident de transport très meurtrier déclenche un tollé dans l’opinion qui exige alors des améliorations en matière de sécurité.

Malgré les différences importantes des infrastructures des transports urbains au Canada, aux Etats-Unis et dans d’autres pays, du point de vue de la conception, de la construction et de l’ancienneté, il est impératif d’assurer les fonctions essentielles de maintenance des infrastructures ferroviaires et des structures, qu’elles soient en surface ou souterraines, ainsi que des stations, gares et équipements connexes, pour préserver des conditions de sécurité optimales.

L’exploitation et la maintenance du métro

Les lignes de métro se distinguent des réseaux ferroviaires par plusieurs traits:

  • la plupart des lignes sont souterraines;
  • les métros sont à traction électrique et non à diesel ou à vapeur (bien qu’il y ait aussi des trains électriques);
  • les métros ont une fréquence beaucoup plus grande que les trains;
  • le nettoyage des graffitis pose un problème majeur.

Ces facteurs ont une incidence sur les risques encourus par les conducteurs et les équipes de maintenance du métro.

Les collisions de rames de métro sur une même voie ou avec des agents de maintenance travaillant sur la voie sont un problème grave qui est pris en compte par la programmation des horaires, la mise en œuvre de systèmes de télécommunication centralisés permettant d’alerter les machinistes, ainsi que par la signalisation lumineuse indiquant aux opérateurs à quel moment ils peuvent poursuivre la marche du train en toute sécurité. Les procédures de contrôle peuvent être défaillantes et entraîner des collisions en raison de problèmes de communication radio, de signaux lumineux hors service ou mal placés, de sorte que l’opérateur ne peut arrêter le convoi à temps, et de problèmes de fatigue liée au travail posté et à des heures supplémentaires trop nombreuses qui entraînent une baisse de vigilance.

Les équipes de maintenance font des tournées sur les installations et interviennent sur la voie ou sur les équipements de signalisation, ramassent les détritus, etc. Elles sont confrontées à un certain nombre de risques: risques électriques liés à la présence du troisième rail porteur du courant de traction; risques d’incendie et exposition à la fumée provenant d’ordures en combustion; feux d’installations électriques; risques d’inhalation de limaille d’acier et d’autres particules en suspension provenant des roues et des rails; et risque d’être heurtées par le matériel roulant. L’inondation d’un métro souterrain peut aussi créer un risque de choc électrique et d’incendie. Etant donné la nature des tunnels du métro, beaucoup de ces situations à risque sont en fait celles des espaces confinés.

L’ensemble des personnels concernés doit donc être protégé par une ventilation qui élimine effectivement les polluants, un dispositif adapté aux espaces confinés et à la gestion des situations d’urgence (par exemple, procédures d’évacuation) face aux risques d’incendie et d’inondation, et des procédures de communication adaptées, avec radio et signaux lumineux pour alerter les machinistes de la présence d’agents de maintenance sur la voie. Il importe d’aménager, le long des parois de tunnels de métro ou dans les intervalles séparant les voies, des espaces suffisamment nombreux pour que les agents de maintenance s’y mettent à l’abri lors du passage des trains.

Le nettoyage des graffiti, à l’intérieur et à l’extérieur des voitures, représente un risque qui s’ajoute aux opérations régulières de peinture et de nettoyage. Les produits utilisés contiennent en effet souvent des composants alcalins puissants et des solvants dangereux en cas de contact cutané ou d’inhalation. On élimine les graffiti extérieurs en faisant passer la rame dans une installation de lavage et en aspergeant l’extérieur des voitures avec des produits chimiques. A l’intérieur des voitures, on applique les produits au pinceau ou par pulvérisation et cette intervention en particulier peut être assimilée aux interventions en espace confiné.

Les précautions consistent à utiliser le moins possible de produits toxiques, à porter des équipements de protection respiratoire et d’autres équipements de protection individuelle, et à faire en sorte que les opérateurs sachent quels produits chimiques ils emploient.

George J. McDonald

LES TRANSPORTS PAR EAU

LES TRANSPORTS PAR EAU ET LES INDUSTRIES MARITIMES

Timothy J. Ungs et Michael Adess

Par définition, les activités maritimes ont pour cadre le milieu marin, et tous ceux qui y vivent et y travaillent (sur des navires, des quais ou dans des terminaux portuaires) sont avant tout soumis aux conditions de cet environnement aquatique. Le navire étant à la fois lieu de travail et de vie, la plupart des expositions professionnelles et non professionnelles coexistent et sont indissociables.

Le secteur maritime comprend un certain nombre de sous-secteurs, notamment le transport de marchandises, de passagers et de véhicules, la pêche industrielle, les navires-citernes et le transport par chalands. Les différents sous-secteurs regroupent des ensembles d’activités marchandes ou commerciales qui sont caractérisées par les types de bâtiments utilisés, les biens et les services concernés, des pratiques de travail et des zones de parcours typiques et par des communautés d’armateurs et de marins. Ces activités elles-mêmes, ainsi que le contexte dans lequel elles s’exercent, définissent les expositions et les risques professionnels et environnementaux qui menacent les travailleurs du secteur maritime.

Les activités maritimes marchandes organisées remontent aux premiers temps de l’histoire des civilisations. Les sociétés grecque, égyptienne et japonaise de l’Antiquité sont des exemples de grandes civilisations qui associaient l’expansion de leur puissance et de leur influence à une forte présence maritime. Les industries maritimes ont joué, et jouent aujourd’hui encore, un rôle important dans le développement de la puissance et de la prospérité des nations.

L’activité dominante dans le secteur maritime est le transport par eau, qui reste le premier mode pour les échanges internationaux. L’économie de la plupart des pays maritimes est fortement influencée par l’importation et l’exportation de biens et de services par mer. Cependant, on trouve aussi, en dehors des pays ayant une façade maritime, des économies nationales et régionales fortement dépendantes du transport par eau. Nombreux sont ceux éloignés de la mer possédant des réseaux étendus de voies navigables intérieures.

Les navires marchands modernes peuvent non seulement transporter des marchandises, mais aussi les traiter ou les transformer en produits élaborés. La mondialisation des économies, la pénurie de surfaces terrestres, des régimes fiscaux avantageux et la technologie sont au nombre des facteurs qui ont stimulé l’avènement des navires-usines. Les baleiniers illustrent bien cette tendance. Ces navires-usines sont aménagés pour pêcher, traiter, emballer et livrer des produits de la mer élaborés à des marchés régionaux (voir chapitre no 66, «La pêche», dans la présente Encyclopédie ).

Les navires marchands

Comme pour les autres véhicules de transport, la structure, la forme et la fonction des navires sont étroitement liées à leur vocation et aux principales contraintes de l’environnement dans lequel ils évoluent. C’est ainsi qu’un bateau qui transporte des liquides sur de courtes distances par les voies navigables intérieures n’aura pas du tout la même forme ou le même équipage qu’un vraquier transocéanique. Il existe des structures mobiles, semi-mobiles et fixes (comme les plates-formes de forage en mer) qui peuvent être automotrices ou remorquées. Les flottes existantes comprennent des bâtiments très divers quant à leurs dates de lancement, leurs matériaux de construction et leurs équipements techniques.

L’importance de l’équipage dépend de la durée de la mission, de la spécialisation et de la technologie du navire, des conditions environnementales prévues et du degré de perfectionnement des installations terrestres. Un équipage nombreux implique des besoins plus grands et un aménagement soigneusement pensé en matière de logement, de nourriture, d’hygiène, de soins médicaux et de soutien aux personnels. Dans le monde entier, la tendance est à l’augmentation de la taille et de la complexité des navires, à la réduction des équipages et au recours accru aux automatismes, à la mécanisation et à la conteneurisation. Le tableau 102.7 présente une classification des différents types de navires marchands.

Tableau 102.7 Types de navires marchands

Types de navires

Description

Effectif

Navires de charges

Vraquier

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)) caractérisé par des cales largement ouvertes et de nombreux espaces vides; transporte des marchandises en vrac telles que céréales et minerais; la cargaison est chargée par glissières, convoyeurs ou pelles

25-50

Transporteur de divers
(cargo classique)

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)); cargaison transportée en balles, palettes, sacs ou colis; vastes cales avec ponts intermédiaires; peut comporter des tunnels

25-60

Porte-conteneurs

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)) avec cales ouvertes; peut disposer ou non de moyens de levage autonomes (grues, mâts de charge, etc.); les conteneurs sont des 20-40 pieds (6,1-12,2 m), empilables

25-45

Vraquier-pétrolier
(navire OBO)

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)); vastes cales pouvant recevoir du vrac, solide ou liquide; les cales sont étanches et peuvent disposer de pompes et de conduites; nombreux espaces vides

25-55

Transporteur de véhicules

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)) avec importante superficie de superstructures; nombreux entreponts; les véhicules peuvent être chargés par leurs propres moyens ou hissés à bord

25-40

Roulier
(navire RORO)

Grand navire (200-600 pieds (61-183 m)) avec importante superficie de superstructures; nombreux entreponts; peut transporter d’autres cargaisons en plus des véhicules

25-40

Navires-citernes

Pétrolier

Grand navire (200-1 000 pieds (61-305 m)) caractérisé par son circuit de canalisations sur le pont; peut disposer de mâts de manutention pour flexibles de chargement-déchargement; comporte de nombreux réservoirs avec des creux (marges de vide au-dessus du liquide) importants; peut transporter du pétrole brut ou traité, des solvants et d’autres produits pétroliers

25-50

Chimiquier

Grand navire (200-1 000 pieds (61-305 m)) comparable au pétrolier, mais pouvant comporter des canalisations et des pompes supplémentaires pour la manutention simultanée de plusieurs cargaisons; celles-ci peuvent être liquides, gazeuses, pulvérulentes ou il peut s’agir de solides comprimés

25-50

Transporteur de gaz

Généralement plus petit qu’un pétrolier (200-700 pieds (61-213,4 m)) et comportant moins de citernes; les citernes sont sous pression ou réfrigérées et contiennent des produits chimiques ou pétroliers (gaz naturel liquéfié, etc.); elles sont généralement couvertes et isolées; nombreux espaces vides, conduits et pompes

15-30

Remorqueur

Taille petite à moyenne (80-200 pieds (24,4-61 m)); peut être de port, pousseur, de haute mer

3-15

Barge

Taille moyenne (100-350 pieds (30,5-106,7 m)); peut être pontée ou non; peut transporter des vracs liquides, des marchandises diverses ou des véhicules; il s’agit généralement d’une unité non automotrice et inhabitée; nombreux espaces vides

 

Navire et plate-forme de forage

Grande taille, profil similaire au vraquier; caractérisé par une grande tour de forage, de nombreux vides, une machinerie complexe, une cargaison dangereuse et un effectif important; certaines de ces unités peuvent être remorquées, d’autres sont automotrices

40-120

Navire à passagers

Toutes tailles (50-700 pieds) (15-215 m)); caractérisé par un effectif important en membres d’équipage et en passagers (parfois plus de 1 000 personnes)

20-200

La morbidité et la mortalité dans le secteur maritime

Les personnels de santé, médecins et épidémiologistes ont souvent à décider si un problème de santé a une origine professionnelle ou non. La décision est particulièrement difficile à prendre lorsqu’ils ont affaire à des marins, du fait que les navires sont à la fois des lieux de travail et d’habitation, de surcroît dans un environnement tout à fait particulier. Le périmètre limité des navires impose un confinement et un partage des espaces de travail, des salles des machines, des aires de stockage, des passages et autres secteurs avec les espaces de vie. Les navires n’ont souvent qu’un seul système de distribution d’eau, de ventilation ou d’évacuation des eaux usées pour les zones de travail et les locaux de l’équipage.

Une caractéristique de la structure sociale à bord des navires est sa stratification entre, d’une part, les officiers ou les opérateurs (capitaine, second, etc.) et, d’autre part, les membres de l’équipage. En règle générale, les officiers et les opérateurs sont plus instruits, viennent de milieux plus aisés et ont une carrière plus stable. Il n’est pas rare que les équipages aient des nationalités ou des origines ethniques complètement différentes de celles des officiers et des opérateurs.

Depuis toujours, les communautés maritimes sont moins permanentes, moins homogènes et un peu plus indépendantes que les communautés terrestres. Les horaires de travail à bord sont souvent plus fragmentés et plus imbriqués avec les horaires de repos qu’à terre.

Ce sont là quelques-unes des raisons pour lesquelles il est difficile de décrire ou de quantifier les problèmes de santé dans le secteur maritime ou de les associer correctement à des expositions. Les données sur la morbidité et la mortalité des marins sont incomplètes et ne sont pas représentatives de l’ensemble des équipages ou des sous-secteurs d’activité. Une autre insuffisance de nombre de séries de données et de systèmes d’information sur les industries maritimes est qu’ils ne permettent pas de faire de distinction entre les problèmes de santé dus au travail, au navire ou à l’environnement plus vaste. Comme pour les autres métiers, la collecte d’informations sur la morbidité et la mortalité est particulièrement difficile dans le cas des maladies chroniques (cardio-vasculaires, par exemple) et, notamment, de celles qui ont une longue période de latence (comme le cancer).

Il ressort de données recueillies aux Etats-Unis sur onze années (1983 à 1993) dans le secteur maritime que la moitié des décès en mer (collisions ou chavirements) — mais 12% seulement des lésions non mortelles — sont imputables aux navires, les autres étant le fait de l’humain. Les causes associées à ces accidents sont indiquées aux figures 102.12 et 102.13. On ne dispose pas de chiffres comparables sur la mortalité et la morbidité non attribuables à des accidents.

Figure 102.12 Causes des principaux accidents involontaires mortels imputables à
un comportement individuel (industries maritimes, Etats-Unis, 1983-1993)

Figure 102.12

Figure 102.13 Causes des principaux accidents involontaires non mortels imputables
à un comportement individuel (industries maritimes, Etats-Unis, 1983-1993)

Figure 102.13

Si l’on prend l’ensemble des décès en mer (du fait du navire et de l’humain), soit 2 559, les données des Etats-Unis montrent que la majorité d’entre eux (42%) sont survenus sur des bateaux de pêche. Les remorqueurs viennent en deuxième position (avec 11%), devant les cargos (10%) et les navires à passagers (10%).

L’analyse des accidents du travail déclarés fait apparaître des similitudes avec les caractéristiques des industries manufacturières et de la construction. Les traits communs sont que la plupart des dommages corporels sont dus à des chutes, heurts par objets, coupures et contusions, lésions musculaires et efforts physiques excessifs. Il faut toutefois interpréter ces données avec prudence, car les déclarations sont entachées d’un biais. Les blessures graves sont sans doute surreprésentées et les lésions chroniques/latentes, dont le lien avec le travail est moins évident, probablement sous-déclarées.

Les risques professionnels et environnementaux

Pour la plupart, les risques pathologiques dans le milieu maritime sont les mêmes que ceux rencontrés à terre dans les industries manufacturières, la construction et les agro-industries. La différence est que l’environnement maritime limite et comprime l’espace disponible, forçant les travailleurs à côtoyer de près les risques potentiels et entremêlant les espaces de vie et de travail avec les réservoirs de combustible, les salles de machines, les cargaisons et les zones de stockage.

Le tableau 102.8 résume les risques pour la santé communs à tous les types de navires, et le tableau 102.9 les risques propres à différents types de bâtiment. Les paragraphes ci-après sont consacrés à l’examen de certains risques pour la santé concernant l’environnement, les risques physiques et chimiques et l’hygiène.

Tableau 102.8 Risques pour la santé communs à tous les types de navires

Risques

Description

Exemples

Mécaniques

Equipements ou pièces mobiles sans protection physique ou laissés exposés, qui peuvent frapper, pincer, écraser ou accrocher. Il peut s’agir d’équipements mécaniques (chariot de manutention, etc.) ou simplement d’un objet (une porte qui bat, etc.)

Treuils, pompes, ventilateurs, arbres moteurs, compresseurs, hélices, trappes, portes, mâts de chargement, grues, amarres, déplacements de la cargaison

Electriques

Générateurs statiques (batteries, etc.) ou tournants (alternateurs, etc.), distribution de l’énergie (câbles, etc.) et équipements motorisés (moteurs, etc.) qui, tous, peuvent causer des dommages corporels induits par l’électricité

Batteries, groupes générateurs de bord, sources électriques à terre, moteurs électriques sans protection mécanique ou électrique (motopompes, motoventilateurs, etc.), câbles exposés, électronique de navigation et de communications

Thermiques

Dommages causés par la chaleur ou le froid

Canalisations de vapeur, chambres froides, bouches d’échappement des groupes motorisés, exposition aux rigueurs climatiques sur le pont

Bruit

Problèmes auditifs et autres troubles physiologiques par exposition excessive et prolongée à une énergie sonore

Système de propulsion du navire, pompes, ventilateurs, treuils, dispositifs à vapeur, bandes transporteuses

Chutes

Glissades, faux pas et chutes entraînant des traumatismes induits par énergie cinétique

Echelles raides, cales profondes, garde-corps manquants, passerelles étroites, plates-formes élevées

Chimiques

Maladies et lésions aiguës ou chroniques résultant de l’exposition à des substances chimiques organiques ou inorganiques et à des métaux lourds

Cargaisons, solvants de nettoyage, détergents, soudage, rouille/corrosion, fluides frigorigènes, pesticides, fumigants

Hygiène

Maladies liées à la mauvaise qualité de l’eau potable, au manque d’hygiène dans les cuisines ou à l’évacuation des déchets

Eau potable contaminée, denrées alimentaires avariées, système d’évacuation des déchets défectueux

Biologiques

Troubles ou maladies par exposition à des organismes vivants ou à leurs produits

Poussières céréalières, produits de bois brut, balles de coton, fruits ou viandes en vrac, produits de la mer, agents contagieux

Rayonnements

Lésions dues à des rayonnements non ionisants

Lumière solaire intense, soudage à l’arc, radar, systèmes de communications à micro-ondes

Violence

Violence interpersonnelle

Agression, homicide, conflit violent entre membres de l’équipage

Espaces confinés

Troubles toxiques ou anoxiques suite à la pénétration dans un espace clos à accès réglementé

Cales, réservoirs de ballast, passages étroits, réservoirs de combustible, chaudières, soutes de stockage, cales réfrigérées

Travaux physiques

Problèmes de santé dus à une activité physique excessive, au non-respect des pratiques de travail ou à des pratiques non adaptées

Pelletage de la glace dans les cales à poissons, manipulation de charges encombrantes dans des espaces exigus, manipulation d’amarres lourdes, longues stations debout pendant les quarts

Tableau 102.9 Principaux risques physiques et chimiques par types de navires

Types de navires

Risques

Navire-citerne

Benzène et autres vapeurs d’hydrocarbures; émanations de sulfure d’hydrogène dégagées par le brut; gaz inertes utilisés pour créer une atmosphère pauvre en oxygène (pour prévenir les explosions); incendies et explosions dus à la combustion d’hydrocarbures

Vraquier

Formation de poches de gaz fumigants utilisés sur les produits agricoles; risques posés par la fluidité ou le ripage de la cargaison (personnels pris au piège ou étouffés); espaces confinés dans les tunnels de convoyeurs ou les galeries de passage dans les profondeurs des cales; manque d’oxygène résultant de l’oxydation ou de la fermentation de la cargaison

Chimiquier

Rejets dans l’atmosphère de gaz ou de poussières toxiques; rejets d’air ou de gaz comprimés; fuites de substances dangereuses dans les soutes ou les conduites de transfert; incendies et explosions dus à la combustion des produits chimiques

Porte-conteneurs

Exposition aux produits répandus ou fuites résultant de substances dangereuses dégradées ou mal stockées; émanations de gaz inertes agricoles; rejets provenant de conteneurs de produits chimiques ou de gaz; exposition à des substances dangereuses mal étiquetées; explosions, incendies ou expositions toxiques suite au mélange de substances séparées formant un produit dangereux (par exemple, acide et cyanure de sodium)

Transporteur de divers
(cargo classique)

Risques découlant du ripage de la cargaison ou d’arrimages mal assurés; explosions, incendies ou expositions toxiques suite au mélange de cargaisons incompatibles; manque d’oxygène dû à l’oxydation ou à la fermentation des cargaisons; rejets de gaz frigorigènes

Navire à passagers

Eau potable contaminée; manque d’hygiène dans la préparation et le stockage des denrées; problèmes posés en cas d’évacuation générale; urgences médicales

Navire de pêche

Risques thermiques liés aux cales réfrigérées; manque d’oxygène dû à la décomposition des produits pêchés ou à l’utilisation d’agents de conservation antioxydants; rejets de gaz frigorigènes; enchevêtrement dans des filets ou des amarres; contact avec des poissons ou des animaux marins dangereux ou venimeux

Les risques environnementaux

Assurément, le risque principal dans les industries maritimes est dû à l’omniprésence de l’eau. L’environnement le plus aléatoire et le plus difficile est la haute mer. Les surfaces des océans sont sans cesse mouvantes, les climats extrêmes et les conditions de voyage par conséquent hostiles. Cette combinaison crée un environnement en mouvement perpétuel, turbulent, qui peut entraîner des troubles vestibulaires (mal des transports, en l’occurrence mal de mer), déstabiliser des objets (portes qui battent, agrès qui se balancent) et provoquer des chutes.

L’être humain, livré à lui-même, ne peut survivre longtemps en pleine mer; en cas d’immersion, la noyade et l’hypothermie sont des menaces immédiates. Les navires sont des plates-formes qui permettent la présence de l’individu en mer mais, comme ils sont le plus souvent loin de tout, ils doivent consacrer une part importante de leur espace aux équipements de survie, aux réservoirs de carburant, à l’intégrité structurelle et à la propulsion, souvent aux dépens de l’habitabilité, de la sécurité des personnes et du facteur humain. Les pétroliers géants modernes, qui offrent des espaces plus généreux et un meilleur agrément de vie, représentent une exception.

L’exposition au bruit est quasiment constante, du fait que l’énergie sonore se transmet facilement à presque toutes les parties du navire de par sa structure métallique; le matériel insonorisant n’étant que peu utilisé, les zones silencieuses sont rares. Les sources de bruit sont les moteurs, le système de propulsion, la machinerie, les ventilateurs, les pompes et le choc des vagues contre la coque.

Les marins forment un groupe à risque bien identifié pour le développement des cancers de la peau, notamment mélanomes malins, carcinomes spinocellulaires et carcinomes basocellulaires. Ce risque accru est dû à la forte exposition au rayonnement solaire ultraviolet direct et réfléchi par la surface de l’eau. Les parties du corps particulièrement exposées sont le visage, le cou, les oreilles et les avant-bras.

Une isolation limitée, une ventilation insuffisante, des sources internes de chaleur et de froid (par exemple, salles des machines et espaces réfrigérés), la présence de surfaces métalliques sont autant de facteurs de stress thermique potentiel, qui s’ajoute au stress physiologique ayant d’autres causes, et entraîne une baisse de la performance physique et cognitive. Un stress thermique mal maîtrisé, contre lequel on ne se protège pas, peut provoquer des lésions, que ce soit par la chaleur ou par le froid.

Les risques physiques et chimiques

Le tableau 102.9 présente les risques qui sont spécifiques, ou plus particulièrement préoccupants, pour différents types de navires. Les risques physiques sont les plus courants et les plus présents à bord de tout navire. L’espace limité fait qu’il y a des couloirs étroits, des jeux de passage restreints, des escaliers raides et de faibles gardes au plafond. Les machines, tuyauteries, bouches d’aération, canalisations électriques, réservoirs, etc. sont installés au plus juste avec des séparations matérielles réduites. Les navires ont des ouvertures permettant l’accès vertical direct à tous les niveaux. Les espaces intérieurs au-dessous du pont principal sont principalement des cales de grandes dimensions, des espaces compacts et des compartiments cachés. Une telle structure physique expose les membres d’équipage aux risques de glissades, trébuchements, chutes, coupures, contusions et heurts contre des objets en mouvement ou qui tombent.

Cette exiguïté entraîne également une proximité étroite avec les machines, lignes électriques, réservoirs et tuyauteries sous pression et surfaces dangereusement chaudes ou froides. Si ces équipements ne disposent pas de protections physiques (capotages, isolation, etc.), le contact peut provoquer des brûlures, abrasions, lacérations, lésions oculaires, écrasements, voire des blessures plus graves.

Comme un navire est essentiellement une juxtaposition d’espaces dans une enveloppe étanche, la ventilation peut être faible ou déficiente dans certains locaux qui deviennent alors des espaces confinés dangereux. Si la concentration en oxygène est insuffisante, que de l’air a été chassé ou que des gaz toxiques se sont introduits, l’entrée dans ces locaux peut mettre la vie en danger.

Il y a dans tous les navires des fluides frigorigènes, des carburants, des solvants, des agents de nettoyage, des peintures, des gaz inertes et d’autres substances chimiques. Des activités courantes à bord telles que le soudage, la peinture et le brûlage de déchets peuvent avoir des effets toxiques. Les navires de transport (cargos, porte-conteneurs, pétroliers, etc.) contiennent toutes sortes de produits biologiques ou chimiques dont beaucoup sont toxiques s’ils sont inhalés, ingérés ou entrent en contact direct avec la peau. D’autres produits peuvent devenir toxiques en cas de dégradation, de contamination ou de mélange avec d’autres substances. Leur toxicité peut être aiguë, provoquant des éruptions cutanées et des brûlures oculaires, ou chronique, donnant alors lieu à des troubles neurocomportementaux, à des troubles de la fertilité, voire à des effets cancérogènes. Certaines expositions peuvent être immédiatement mortelles. Parmi les produits toxiques transportés par eau, il faut citer les produits pétrochimiques contenant du benzène, l’acrylonitrile, le butadiène, le gaz naturel liquéfié, le tétrachlorure de carbone, le chloroforme, le dibromure d’éthylène, l’oxyde d’éthylène, les solutions de formaldéhyde, le nitropropane, la o-toluidine et le chlorure de vinyle.

L’amiante reste un risque sur certains navires, principalement sur ceux qui ont été construits avant les années soixante-dix. Les qualités d’isolation thermique, d’ignifugation, de durabilité et le faible coût de l’amiante en faisaient un matériau d’élection dans la construction navale. Le danger principal de l’amiante est que ses fibres se libèrent lors de travaux de construction, de rénovation ou de réparation.

L’hygiène et les risques de maladies transmissibles

A bord d’un navire, les membres d’équipage vivent nécessairement en contact étroit. La promiscuité permanente, dans le travail comme dans les loisirs, oblige à respecter un programme d’hygiène efficace. Les zones critiques comprennent les cabines, dont les toilettes et les douches, les aires de stockage, de préparation et de consommation des aliments, la blanchisserie, les espaces de loisirs et, enfin, le salon de coiffure s’il y en a un. Egalement essentielle est la lutte contre les parasites, dont beaucoup peuvent transmettre des maladies. Les occasions sont nombreuses où des insectes et rongeurs peuvent infester un navire, et il est ensuite très difficile de s’en débarrasser, en particulier une fois en mer. Tout navire doit avoir un programme sûr et efficace de lutte contre les parasites. Cela suppose une formation des personnels, avec un recyclage tous les ans.

Les cabines des marins doivent être tenues propres, sans déchets, linge sale ou denrées périssables. La literie devrait être changée au moins une fois par semaine (plus souvent si elle est salie), et il faudrait prévoir un service de blanchisserie adapté aux effectifs. Les aires de stockage, de préparation et de consommation des aliments doivent respecter des règles sanitaires strictes. Les préposés au service d’alimentation doivent recevoir une formation adéquate sur la préparation des aliments, la conservation des vivres et la tenue de la cuisine. Des installations de stockage appropriées doivent être prévues. Les normes recommandées doivent être respectées pour que les aliments préparés soient propres à la consommation et exempts de contamination chimique ou biologique. Une maladie d’origine alimentaire à bord d’un navire peut avoir de graves conséquences. Un équipage affaibli ne peut accomplir ses tâches. Le navire, notamment s’il est en mer, risque de ne pas avoir suffisamment de médicaments pour traiter tout le monde, ni de personnel médical compétent pour soigner les malades. En outre, s’il est obligé de changer de destination, l’armateur peut subir de lourdes pertes économiques.

L’intégrité et la maintenance du circuit d’eau potable ont aussi une importance vitale. Les maladies d’origine hydrique ont été dans l’histoire la cause la plus fréquente d’infections aiguës et de décès chez les marins. L’eau potable doit donc provenir d’une source d’approvisionnement agréée (lorsque c’est possible) et être exempte de toute contamination chimique et biologique. A défaut, le navire doit disposer des moyens de décontaminer l’eau pour la rendre potable. Le circuit d’eau potable doit être protégé contre la contamination par toute source, notamment par des liquides non potables, et contre la contamination chimique. Il doit être nettoyé et désinfecté périodiquement. On assure une désinfection efficace en remplissant le circuit avec de l’eau propre contenant au moins 100 parties par million (ppm) de chlore et en rinçant, après plusieurs heures, avec de l’eau contenant de nouveau 100 ppm de chlore. Il faudrait ensuite rincer le circuit avec de l’eau potable fraîche. L’eau potable du bord doit avoir en permanence une teneur résiduelle en chlore d’au moins 2 ppm, attestée par des analyses périodiques.

A bord des navires, la transmission de maladies contagieuses peut poser un problème sérieux. Le temps de travail perdu, le coût du traitement médical et l’éventualité de devoir évacuer les membres d’équipage en font une préoccupation importante. A côté des agents pathogènes habituels (par exemple, ceux qui causent la gastro-entérite, comme Salmonella , ou une maladie des voies respiratoires supérieures, comme le virus de la grippe), on voit réapparaître des agents que l’on croyait maîtrisés ou éliminés de la population générale. La tuberculose, des souches hautement pathogènes d’Escherichia coli et de Streptococcus , ainsi que la syphilis et la gonorrhée ont fait leur réapparition avec une incidence et une virulence accrues. De plus, des agents pathogènes auparavant inconnus ou rares sont apparus, comme le virus VIH et le virus Ebola, qui sont non seulement très résistants au traitement, mais aussi particulièrement mortels. Il est donc indispensable de s’assurer que l’équipage est vacciné contre des maladies telles que la poliomyélite, la diphtérie, le tétanos, la rougeole et l’hépatite A et B. D’autres vaccinations peuvent être nécessaires pour des expositions potentielles ou particulières, du fait qu’un navire peut faire escale dans de très nombreux ports où les équipages se trouveront exposés à divers agents pathogènes.

Il est essentiel que les membres d’équipage reçoivent une formation périodique sur la manière d’éviter un contact avec les agents pathogènes. Le programme devrait porter sur les agents pathogènes à diffusion hématogène, les maladies sexuellement transmissibles (MST), les infections et toxi-infections collectives d’origine alimentaire et hydrique, l’hygiène individuelle, les symptômes des maladies contagieuses les plus courantes et la conduite à tenir en présence de tels symptômes. La survenue d’une maladie contagieuse à bord peut avoir des conséquences désastreuses: de nombreux membres d’équipage peuvent être touchés, la maladie est suceptible d’avoir des effets débilitants et parfois d’entraîner la mort. Dans certains cas, le navire doit se dérouter, ce qui a de lourdes conséquences financières. Il est de l’intérêt des armateurs d’avoir un programme efficace de lutte contre les maladies contagieuses.

La maîtrise et la réduction des risques

Fondamentalement, les principes de maîtrise et de réduction des risques sont les mêmes que pour les autres milieux professionnels, à savoir:

Tableau 102.10 Démarches d'identification et de gestion des risques à bord
des navires

Thèmes

Activités

Développement et évaluation du programme

Recenser les risques pouvant exister tant à bord qu’à quai
Evaluer la nature, l’étendue et l’ampleur des expositions potentielles
Identifier les membres d’équipage exposés aux risques
Etablir des méthodes appropriées pour éliminer ou limiter les risques et pour protéger le personnel
Développer un système de suivi de santé
Evaluer et surveiller l’état de santé des personnes exposées
Mesurer l’efficacité du programme
Apporter les ajustements nécessaires au programme

Identification des risques

Recenser les risques chimiques, physiques, biologiques et environnementaux à bord, dans les espaces de travail comme dans les espaces de vie (garde-corps cassés, utilisation et stockage des agents de nettoyage, présence d’amiante, etc.)
Etudier les dangers de la cargaison et les dangers à quai

Evaluation de l’exposition

Comprendre les pratiques et les tâches de travail (aussi bien les tâches prescrites que celles effectivement accomplies)
Qualifier et quantifier les niveaux d’exposition (par exemple, nombre d’heures passées dans les zones où sont stockées des cargaisons dangereuses, niveaux ambiants de H2s dus aux rejets de gaz, type d’organismes dans l’eau potable, niveaux sonores dans les différents espaces du navire)

Personnel exposé

Examiner les affectations de tâches, les états de service et les données de suivi de tous les membres d’équipage, saisonniers et permanents

Gestion des risques et protection du personnel

Connaître les normes d’exposition définies et recommandées (NIOSH, OIT, UE, etc.)
Eliminer les risques qui peuvent l’être (remplacer la surveillance humaine des marchandises dangereuses par des systèmes de télésurveillance)
Réduire les risques qui ne peuvent pas être éliminés (capoter et isoler les treuils au lieu de les laisser exposés, afficher des panneaux d’avertissement de danger, etc.)
Prévoir les équipements de protection individuelle nécessaires (port de détecteurs de gaz toxiques et d’oxygène pour l’accès dans les espaces confinés)

Surveillance de la santé

Elaborer un système de recueil et de déclaration de tous les accidents et de toutes les maladies (tenir un journal quotidien des malades, etc.)

Surveillance de la santé de l’équipage

Mettre en place une surveillance médicale, établir des normes de rendement et fixer des critères d’aptitude à l’emploi (par exemple, pour les personnels appelés à manutentionner des grains, présélection et examens pulmonaires périodiques)

Efficacité de la gestion des risques

Concevoir et fixer des priorités pour les objectifs (par exemple, diminuer le nombre de chutes à bord)
Etablir des résultats à atteindre et les mesurer (par exemple, nombre de jours d’incapacité de travail résultant de chutes)
Déterminer l’efficacité des efforts de réalisation des objectifs

Evolution du programme

Modifier les activités de prévention et de gestion des risques en fonction des circonstances et des priorités

Cependant, pour être efficaces, les moyens et les méthodes de mise en œuvre de ces principes doivent être adaptés au monde maritime. Les activités professionnelles sont complexes et exercées dans des systèmes intégrés (exploitation du navire, organisations employeurs/travailleurs, déterminants des échanges, etc.). L’essentiel, pour la prévention, est de comprendre ces systèmes et leur contexte, ce qui suppose une coopération et une interaction étroites entre tous les niveaux organisationnels de la communauté maritime, du simple matelot à la haute direction de la compagnie en passant par les exploitants des navires. Les interventions gouvernementales et réglementaires pèsent assez fortement sur les industries maritimes. Un partenariat entre les pouvoirs publics, les organismes de réglementation, les employeurs et les travailleurs est essentiel pour l’élaboration de programmes valables d’amélioration des conditions de sécurité et de santé dans le secteur maritime.

L’Organisation internationale du Travail (OIT) a établi un certain nombre de conventions et de recommandations sur le travail à bord des navires, comme la convention (no 134) et la recommandation (no 142) sur la prévention des accidents (gens de mer), 1970, la convention (no 147) sur la marine marchande (normes minima), 1976, [et Protocole, 1996], la recommandation (no 155) sur la marine marchande (amélioration des normes), 1976, et la convention (no 164) sur la protection de la santé et les soins médicaux (gens de mer), 1987. L’OIT a également publié un recueil de directives pratiques sur la prévention des accidents à bord des navires en mer et dans les ports (BIT, 1996).

Environ 80% des accidents corporels à bord des navires sont imputables à des facteurs humains. De même, la morbidité et la mortalité liées aux accidents ont le plus souvent pour cause des facteurs humains. La réduction des accidents et des décès dans le secteur maritime appelle donc l’application des principes de l’ergonomie aux activités professionnelles et à la vie sur les navires. Un tel objectif suppose que l’on intègre dans l’exploitation, la conception des navires, les activités professionnelles, les systèmes et les politiques de gestion des éléments relevant de l’anthropométrie, de la performance, de la cognition et du comportement. Par exemple, le chargement et le déchargement des cargaisons présentent des risques potentiels. La prise en compte des facteurs humains mettrait en lumière la nécessité d’assurer des communications claires et une bonne visibilité, de penser l’adaptation travailleur-tâche en termes d’ergonomie, d’interposer des protections entre les travailleurs et les machines et charges en mouvement, et de disposer de personnels formés, connaissant bien les processus de travail.

La prévention des maladies chroniques et des états pathologiques favorisant les maladies à longue période de latence est plus problématique que la prévention et la maîtrise des accidents. Il est facile en général d’établir une relation de causalité pour les accidents s’accompagnant de dommages corporels. De plus, l’association de la cause/effet avec les pratiques et les conditions de travail est habituellement moins compliquée à établir que pour les maladies chroniques. Il existe peu de données sur les risques, les expositions et la santé dans le secteur maritime, où les systèmes de surveillance, de déclaration et d’analyse sont généralement moins développés que dans beaucoup de secteurs d’activité à terre. L’insuffisance des données sur les maladies chroniques ou latentes caractéristiques du secteur maritime fait obstacle à l’élaboration et à l’application de programmes ciblés de prévention et de contrôle.

LE STOCKAGE

LE STOCKAGE ET LE TRANSPORT DU PÉTROLE BRUT, DU GAZ NATUREL, DES PRODUITS PÉTROLIERS LIQUIDES ET D’AUTRES PRODUITS CHIMIQUES

Richard S. Kraus

On utilise des pipelines, des navires-citernes, des camions-citernes, des wagons-citernes, etc. pour transporter du pétrole brut, des gaz d’hydrocarbures comprimés ou liquéfiés, des produits pétroliers liquides et d’autres produits chimiques de leur point d’origine à leur point d’arrivée (terminaux de pipelines, raffineries, distributeurs et consommateurs).

Le brut et les produits pétroliers liquides sont transportés, manutentionnés et stockés à l’état liquide naturel. Les gaz d’hydrocarbures le sont à l’état gazeux ou liquide et doivent être entièrement confinés dans des pipelines, des réservoirs, des bouteilles ou d’autres récipients avant d’être utilisés. La caractéristique la plus importante des gaz d’hydrocarbures liquéfiés (GHL) est qu’ils sont stockés, manutentionnés et expédiés sous forme liquide, ce qui permet de réduire leur volume, pour être ensuite détendus en phase gazeuse lors de leur utilisation. Par exemple, le gaz naturel liquéfié (GNL) est stocké à –162 °C; lorsqu’il est libéré, la différence entre la température de stockage et la température de l’atmosphère le fait se détendre et se gazéifier. Un litre de GNL donne environ 0,66 m3 de gaz à température et pression normales. Comme le gaz liquéfié est beaucoup plus «concentré» que le gaz comprimé, on peut en transporter et en fournir une plus grande quantité dans un récipient donné.

Les pipelines

En général, le pétrole brut, le gaz naturel, les gaz de pétrole liquéfiés (GPL) et les produits pétroliers empruntent un pipeline, à un moment ou à un autre, pour passer du puits de production à une raffinerie, puis de là à un terminal et arriver finalement au consommateur. Des pipelines de surface, sous-marins ou souterrains, de quelques centimètres à un mètre ou plus de diamètre, transportent de grandes quantités de pétrole brut, de gaz naturel, de gaz d’hydrocarbures liquéfiés et de produits liquides à travers le monde, des toundras gelées de l’Alaska et de la Sibérie aux déserts torrides du Moyen-Orient, traversant des cours d’eau, des lacs, des mers, des marécages, des forêts et des montagnes, ou passant sous des villes. Bien que les pipelines soient difficiles et coûteux à construire, une fois installés, convenablement entretenus et exploités, ils sont l’un des moyens les plus sûrs et les plus économiques de transporter ces produits.

Le premier pipeline opérationnel de transport de pétrole brut, un tuyau en fer forgé de 5 cm de diamètre, long de 9 km et d’une capacité d’environ 800 barils par jour, a été ouvert en Pennsylvanie en 1865. Aujourd’hui, les pipelines acheminent le pétrole brut, le gaz naturel comprimé et les produits pétroliers liquides sur de longues distances, à des vitesses allant de 5,5 à 9 km/h, à l’aide de pompes et de compresseurs puissants placés à des intervalles allant de 90 à plus de 270 km. La distance entre les stations de pompage ou de compression est déterminée par la capacité des pompes, la viscosité du produit, le diamètre du pipeline et la nature du terrain traversé. Indépendamment de ces facteurs, les pressions de pompage et les débits sont contrôlés tout au long de l’ouvrage afin de maintenir un écoulement régulier du produit.

Les types de pipelines

Les quatre principaux types de pipelines, dans l’industrie pétrolière et gazière, sont les conduites d’écoulement, les conduites d’amenée, les conduites principales de brut et les conduites principales de produits pétroliers.

Les règlements et les normes

Les pipelines sont construits et exploités en conformité avec les normes de sécurité et de protection de l’environnement établies par les organismes réglementaires et les associations professionnelles. Aux Etats-Unis, le ministère des Transports (US Department of Transportation (USDOT)) réglemente l’exploitation des pipelines; l’Agence de protection de l’environnement (Environmental Protection Agency (EPA)) réglemente les déversements accidentels et les rejets; l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)) promulgue des normes relatives à la sécurité et à la santé des travailleurs; et la Commission du commerce interEtats (Interstate Commerce Commission (ICC)) réglemente les pipelines de transport en commun (pipelines multiutilisateurs transportant pour le compte de tiers). Diverses organisations professionnelles, comme l’Institut américain du pétrole (American Petroleum Institute (API)) et l’Association américaine du gaz (American Gas Association (AGA)), publient également des recommandations sur l’exploitation des pipelines.

La construction des pipelines

Les tracés des pipelines sont préparés à l’aide de cartes topographiques établies à partir de relevés photogrammétriques aériens, suivis de relevés au sol. Après l’établissement du tracé, l’obtention des emprises et l’autorisation des travaux, il faut installer des camps de base et ouvrir des voies d’accès pour les engins de construction. On peut construire les pipelines en partant de leurs deux extrémités ou en réalisant simultanément les différents tronçons que l’on relie par la suite.

La première étape dans la pose d’un pipeline consiste à construire une voie de desserte de 15 à 30 m de large le long du tracé prévu, afin de disposer d’une base stable pour le matériel de pose et d’assemblage des tubes et, le cas échéant, pour les engins d’excavation et de remblayage. Les différents tronçons sont posés sur le sol le long de la voie de desserte. Les extrémités des tubes sont nettoyées, les tubes sont cintrés horizontalement ou verticalement si nécessaire et mis sur bois au-dessus du sol, puis réunis par soudage à l’arc électrique multipasse. Les soudures sont contrôlées visuellement, puis par gammagraphie pour s’assurer qu’elles ne présentent aucun défaut. Chaque tronçon assemblé est ensuite enduit d’une solution de savon et testé à l’air comprimé pour détecter les fuites éventuelles.

Le pipeline est ensuite nettoyé, enduit d’une couche de peinture à froid, puis revêtu d’un matériau goudronneux posé à chaud pour éviter la corrosion; il est enfin enveloppé d’une couche extérieure de papier fort, de laine minérale ou de plastique. S’il doit être enterré, le fond de la tranchée est garni d’un lit de sable ou de gravier. On leste parfois les tubes de courts manchons de béton pour empêcher qu’ils ne se soulèvent sous l’effet de la pression des eaux souterraines. Après que le pipeline a été mis en place, la tranchée est remblayée et le sol rendu à son aspect normal. Les conduites en surface, une fois revêtues et enveloppées, sont levées sur des pilotis ou des châssis préparés à l’avance, qui peuvent comporter des amortisseurs antisismiques ou d’autres dispositifs. Les pipelines peuvent être isolés ou équipés de matériel de détection de la chaleur pour maintenir les produits à la température voulue pendant la durée du transport. Tous les tronçons sont soumis à des essais hydrostatiques avant d’être mis en service.

L’exploitation des pipelines

Un pipeline peut être détenu et exploité par une entreprise privée et ne transporter que les produits de son propriétaire, ou servir de transporteur public et être tenu d’acheminer les produits de n’importe quelle société, à condition que les prescriptions techniques du pipeline et les tarifs soient respectés. L’exploitation d’un pipeline couvre trois grands types d’opérations: la régulation, les stations de pompage du pétrole et de compression des gaz et les terminaux de livraison. Le stockage, le nettoyage, les communications et l’expédition sont également des fonctions importantes.

On utilise couramment des pompes, avec ou sans canalisation de retour de la vapeur ou d’équilibrage de la pression, dans les petits pipelines transportant du gaz naturel liquéfié, du gaz naturel comprimé ou des gaz de pétrole liquéfiés. Des détecteurs de chute de pression signalent toute fuite, et des soupapes de surdébit ou d’autres dispositifs limitent l’écoulement en cas de fuite. Les cuves et les réservoirs de stockage peuvent être isolés de la canalisation principale par des vannes de réglage, des vannes automatiques ou des vannes à élément fusible, commandées manuellement ou à distance.

Le transport des lots et les interfaces entre lots

Si, au début, les pipelines transportaient uniquement du pétrole brut, ils acheminent aujourd’hui tous les types de produits pétroliers liquides de différentes qualités. Comme ces produits sont transportés en lots qui se suivent, ils s’entremêlent et se mélangent aux interfaces. Trois méthodes sont possibles pour pallier cet inconvénient: déclassement de la partie hétérogène, utilisation de séparateurs solides ou liquides ou encore retraitement de la partie hétérogène. Des traceurs radioactifs, des colorants et des sphères de séparation peuvent être placés dans le pipeline pour localiser l’interface. Aux installations de réception, on utilise des détecteurs radioactifs, l’observation visuelle ou des contrôles de densité pour identifier les différents lots.

Les produits pétroliers sont normalement transportés de façon que se succèdent des lots de bruts ou de produits dérivés compatibles. La première méthode utilisée pour maintenir la qualité et l’intégrité des produits, appelée déclassement, consiste à abaisser l’interface entre les deux lots au niveau du produit de qualité inférieure. Par exemple, un lot de supercarburant à indice d’octane élevé sera en général expédié immédiatement avant ou après un lot d’essence ordinaire à indice d’octane faible, la petite quantité de produits mélangés étant déclassée comme essence ordinaire dont l’indice d’octane est plus faible. Lors de l’expédition d’essence avant ou après un lot de gazole, on laisse une petite quantité de gazole de l’interface mélangée à l’essence, plutôt que de laisser de l’essence dans le gazole, ce qui pourrait abaisser son point d’éclair. Les interfaces entre lots sont en général détectées par observation visuelle, gravimétrie ou échantillonnage.

Avec la deuxième méthode, il est possible d’utiliser des séparateurs liquides ou solides, ou des racleurs afin de séparer physiquement et d’identifier différents lots de produits. Les séparateurs solides sont détectés par un signal radioactif et déviés du pipeline dans une gare spéciale installée au terminal quand le lot change d’un produit à l’autre. Les séparateurs liquides peuvent être de l’eau ou tout autre produit non miscible; les lots qu’ils séparent sont ensuite extraits et retraités. On peut aussi utiliser du kérosène déclassé sur un autre produit en stock ou recyclé.

La troisième méthode, souvent employée du côté raffinerie d’un pipeline, consiste à renvoyer l’interface pour qu’elle soit retraitée. Les produits et les interfaces qui ont été contaminés par de l’eau peuvent également être renvoyés pour être retraités.

La protection de l’environnement

Etant donné les importantes quantités de produits transportés en permanence par pipeline, les risques d’atteintes à l’environnement par fuites sont réels. Selon les exigences de sécurité définies par l’exploitant ou par la réglementation, le type de construction du pipeline, son emplacement, les conditions météorologiques, son accessibilité et son mode d’exploitation, de grandes quantités de produit peuvent se répandre en cas de rupture de la canalisation ou de fuite. Il importe par conséquent d’élaborer des plans d’intervention en cas d’urgence et de pouvoir compter sur des matériels de rétention et de nettoyage, des personnels et des équipements. Des solutions simples, comme la construction de digues en terre ou de fossés de drainage, peuvent être rapidement mises en œuvre par des opérateurs expérimentés pour contenir ou canaliser le produit répandu.

L’entretien des pipelines et la préservation de la sécurité et de la santé des travailleurs

Les premiers pipelines étaient en fonte. Les conduites principales modernes sont faites de tubes d’acier à haute résistance soudés, capables de supporter des pressions élevées. Des contrôles d’épaisseur sont régulièrement effectués sur les parois des tubes pour déterminer s’il y a corrosion interne ou accumulation de dépôts. Les soudures sont contrôlées visuellement et par gammagraphie pour détecter la présence de défauts. Des matières plastiques peuvent être utilisées pour les conduites basse pression de petit diamètre, les conduites d’écoulement et les conduites d’amenée installées dans les champs de production de gaz et de brut, les plastiques étant légers et faciles à manutentionner, assembler et transporter.

Lorsqu’un pipeline est séparé par découpe, écartement de brides, dépose d’une vanne, etc., il peut se former un arc électrostatique du fait de la tension qui est appliquée au pipeline par le système de protection cathodique, de la corrosion, des anodes sacrificielles, des lignes haute tension voisines ou des courants telluriques vagabonds. Ce risque peut être réduit par la mise à la terre de la canalisation, la mise hors tension des redresseurs de protection cathodique de part et d’autre de la séparation et la pose d’un câble de liaison de chaque côté de la conduite avant de commencer le travail. Lorsque des tronçons, des valves supplémentaires, etc. sont ajoutés à un pipeline en construction ou à un pipeline existant, il faut au préalable assurer la continuité électrique avec le pipeline déjà en place.

Le travail sur des pipelines devrait être interrompu en cas d’orage électrique. Les équipements de levage et de pose des tubes ne devraient pas être utilisés à moins de 3 m des lignes électriques haute tension. Tous les véhicules et engins utilisés à proximité de ces lignes devraient avoir des bracelets traînants de mise à la terre. Les constructions métalliques provisoires devraient également être reliées à la terre.

Les pipelines reçoivent des revêtements intérieurs et extérieurs spéciaux contre la corrosion. Une protection cathodique peut également être nécessaire. Une fois que les tronçons ont reçu leurs couches de revêtement et d’isolation, ils sont assemblés par des brides de fixation spéciales reliées à des anodes métalliques. Le pipeline reçoit alors un courant continu provenant d’une source mise à la terre, de capacité suffisante pour lui permettre de faire fonction de cathode et de ne pas se corroder.

Avant d’être exploités, tous les tronçons d’un pipeline sont soumis à un essai hydrostatique, puis ces essais sont répétés, selon les prescriptions en vigueur ou les règles de l’exploitant, à intervalles réguliers pendant la durée de vie de l’ouvrage. L’air doit être chassé du pipeline avant l’essai et la pression hydrostatique augmentée ou diminuée suivant les normes de sécurité. Les pipelines sont régulièrement inspectés, généralement par voie aérienne, pour la détection visuelle des fuites, ou surveillés depuis le centre de commande au moyen de détecteurs de chute de débit ou de pression qui signalent toute rupture ou fuite de la conduite.

Les réseaux de pipelines sont équipés de systèmes d’alerte et de signalisation permettant aux opérateurs d’intervenir en cas d’incident. Ils peuvent avoir aussi des systèmes automatiques qui actionnent des vannes d’arrêt d’urgence en cas de détection d’une montée ou d’une baisse de pression. En règle générale, des vannes d’isolement, manuelles ou automatiques, sont placées à intervalles stratégiques le long du pipeline, par exemple aux stations de pompage et de part et d’autre des traversées de cours d’eau.

Il est important que les entreprises de construction ou autres effectuant des travaux à proximité d’un pipeline soient avisées de la présence de celui-ci, afin de ne pas risquer de l’endommager accidentellement et de provoquer une explosion de vapeurs ou de gaz et un incendie. En général, des règlements imposent des permis de construire; les exploitants de pipelines disposent d’un numéro central que les entrepreneurs peuvent appeler avant de commencer leurs travaux.

L’acheminement de pétrole brut et de produits inflammables par pipeline comporte un risque d’incendie ou d’explosion en cas de rupture de la conduite ou de fuite de vapeurs ou de liquides. La pression devrait être ramenée à un niveau de sécurité avant toute intervention sur les pipelines haute pression. Avant une réparation ou un entretien, quels qu’ils soient, impliquant un travail à chaud ou un piquage sur conduite en charge, un test de présence de gaz combustibles devrait être effectué et une autorisation être délivrée. Les liquides, vapeurs et gaz inflammables devraient être évacués du pipeline avant intervention. Si ce n’est pas possible et si un obturateur homologué doit être utilisé, des modes opératoires de sécurité seront définis et appliqués par des opérateurs qualifiés. La ligne devrait être ventilée à distance sûre du point d’intervention à chaud afin d’éliminer toute surpression qui aurait pris forme en arrière de l’obturateur.

Des procédures de sécurité appropriées devraient être établies pour les piquages sur conduites en charge, et les travaux être exécutés par des opérateurs qualifiés se conformant à ces procédures. En cas de soudage ou de piquage en charge dans une zone où il y a eu fuite ou déversement, l’extérieur de la conduite devrait être nettoyé du liquide présent, et le sol contaminé enlevé ou recouvert pour éviter un incendie.

Il est essentiel d’avertir les opérateurs des stations de pompage les plus proches situées de part et d’autre du point où une intervention doit être effectuée sur un pipeline en fonctionnement. Lorsque du brut ou du gaz sont pompés dans un pipeline par un producteur, l’exploitant du pipeline doit leur fournir des instructions précises sur les mesures à prendre lors d’une réparation, d’un entretien ou d’une intervention d’urgence. Ainsi, avant le raccordement de réservoirs ou de lignes de production à un pipeline, toutes les vannes d’arrêt et tous les purgeurs des réservoirs et des lignes impliqués dans la jonction devraient être fermés et rester consignés jusqu’à la fin de l’opération.

Les précautions de sécurité normales relatives à la manutention des tubes et matériaux, aux expositions toxiques et dangereuses, aux opérations de soudage et aux travaux de terrassement s’appliquent durant la construction d’un pipeline. Les personnes travaillant à la préparation du terrain sur le tracé du pipeline devraient se prémunir contre les conditions climatiques, les plantes vénéneuses, les insectes, les serpents, les chutes d’arbres, de pierres, etc. Les fouilles et les tranchées devraient avoir des parois en pente ou être étayées pour éviter les éboulements lors de la construction ou de la réparation de pipelines enterrés (voir l’article «Les fouilles en tranchée» dans le chapitre no 93, «Le bâtiment et les travaux publics»). Enfin, l’isolement ou la mise hors tension d’un transformateur ou d’un dispositif de coupure électrique devrait s’effectuer conformément aux règles de sécurité.

Les personnels d’exploitation et de maintenance des pipelines travaillent souvent seuls et sont responsables de tronçons d’une grande longueur. Ils devraient être munis d’appareils de contrôle de l’atmosphère et d’équipements de protection individuelle leur permettant, respectivement, de déterminer les niveaux d’oxygène et de gaz inflammables et de se protéger contre les émissions toxiques de sulfure d’hydrogène et de benzène dans l’accomplissement de leurs tâches. C’est le cas, par exemple, lors des jaugeages sur les réservoirs, de l’ouverture de conduites, du nettoyage de produits déversés, des échantillonnages et des contrôles, des manœuvres pour l’expédition ou la réception des produits, etc. Ils devraient porter des dosimètres personnels ou des dosimètres photographiques et éviter de s’exposer lorsqu’ils utilisent des indicateurs de densité, des porte-source ou d’autres matières radioactives. L’emploi d’équipements de protection individuelle devrait être envisagé contre les risques de brûlures par le bitume chaud utilisé dans les opérations de revêtement des conduites ou par les vapeurs toxiques contenant des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).

Les navires-citernes et les barges pétrolières

La majeure partie du pétrole brut dans le monde est transportée par navires-citernes, depuis les zones de production telles que le Moyen-Orient et l’Afrique vers les raffineries des zones de consommation comme l’Europe, le Japon et les Etats-Unis. Au début, les produits pétroliers étaient transportés dans de gros fûts sur des cargos. Le premier navire spécialisé, construit en 1886, pouvait transporter 2 300 tpl (tonnes de port en lourd). Les pétroliers géants d’aujourd’hui peuvent avoir plus de 300 m de long et une capacité près de 200 fois supérieure (voir figure 102.15). Les conduites d’amenée et d’alimentation aboutissent souvent à des terminaux portuaires ou à des appontements en mer, où le brut est chargé dans des navires ou des barges-citernes pour être transporté vers des conduites principales ou des raffineries. Les produits pétroliers sont eux aussi transportés par navires et barges des raffineries vers des terminaux de distribution. Après livraison de leur chargement, les navires retournent à vide vers leur installation de chargement pour une nouvelle rotation.

Figure 102.15 Le pétrolier Paul L. Fahrney

Figure 102.15

Le gaz naturel liquéfié (GNL) est transporté sous forme de gaz cryogénique dans des navires spécialisés dotés de compartiments ou de réservoirs à isolation renforcée (voir figure 102.16). Au port de livraison, le GNL est déchargé dans des installations de stockage ou des usines de regazéification. Les gaz de pétrole liquéfiés (GPL) peuvent être transportés sous forme liquide dans des navires ou des barges non isolés, ou sous forme cryogénique dans des navires isolés. En outre, les GPL en bouteille peuvent être transportés comme cargaison ordinaire sur des navires ou des barges.

Figure 102.16 Le méthanier Leo chargement à Arun dans l'île de Sumatra

Figure 102.16

Les navires transporteurs de gaz de pétrole liquéfiés et de gaz naturel liquéfié

Les trois types de navires utilisés pour le transport de GPL et de GNL sont:

Le transport de gaz d’hydrocarbures liquéfiés par navire exige que l’on accorde une attention constante à la sécurité. Les flexibles de transfert devraient être adaptés aux températures et pressions des GHL manutentionnés. Pour éviter un mélange inflammable des vapeurs dégagées et de l’air, une couverture de gaz inerte (azote) devrait être prévue autour des réservoirs, et une détection des fuites assurée en permanence dans la zone avoisinante. Avant le chargement, il importe d’inspecter les réservoirs de stockage pour contrôler l’absence de contaminants. S’ils contiennent du gaz inerte ou de l’air, il faut d’abord les purger avec des vapeurs de GHL générées à la charge thermique maximale. Des systèmes de lutte contre l’incendie ainsi que des procédures pour tous les cas d’urgence possibles sont prévus pour les navires transporteurs de gaz.

Les navires transporteurs de pétrole brut et de produits pétroliers

Sur les navires-citernes et les barges, les moteurs et le poste d’équipage sont à l’arrière, le reste du navire étant divisé en compartiments spéciaux (citernes) destinés au transport des combustibles liquides en vrac. Les pompes de cargaison sont installées dans la chambre des pompes, et des systèmes de ventilation forcée et d’inertage sont prévus pour réduire les risques d’incendie et d’explosion dans la chambre des pompes et dans les citernes. Les navires et les barges pétrolières modernes ont une double coque et d’autres dispositifs de protection et de sécurité, exigés par la loi sur la pollution par les hydrocarbures des Etats-Unis (1990) (United States Oil Pollution Act) et les normes de sécurité de l’Organisation maritime internationale (OMI) relatives aux pétroliers. Sur certains bâtiments nouveaux, la double coque est prolongée sur les côtés afin d’assurer une protection supplémentaire. En général, les gros pétroliers transportent du brut, et les petits pétroliers et les barges, des dérivés du pétrole.

Le chargement et le déchargement des navires et des barges

Des procédures de transfert navire-terre, des listes de contrôle de sécurité et des instructions devraient être établies et acceptées par les exploitants des terminaux et des navires. Le guide de la Chambre internationale de la marine marchande (International Chamber of Shipping, 1978) donne des informations et des exemples de listes de contrôle, principes directeurs, autorisations de travail et autres procédures visant la sécurité des opérations de chargement-déchargement, qui peuvent être utilisés par les exploitants de navires et de terminaux.

Bien que les navires reposent sur l’eau et soient, de ce fait, «mis à la terre», il faut néanmoins les protéger contre l’électricité statique qui peut se former durant les opérations de chargement-déchargement. A cette fin, on relie des objets métalliques du quai ou les parties métalliques des installations de chargement-déchargement au métal du navire. On utilise aussi des tuyaux souples ou rigides conducteurs. Par ailleurs, une étincelle électrostatique, d’intensité suffisante pour provoquer une inflammation, peut prendre naissance lorsque des équipements ou des appareils de mesurage sont descendus dans les compartiments immédiatement après le chargement; il faut donc attendre un temps suffisant pour permettre aux charges électrostatiques de se dissiper.

Des courants électriques navire-terre, différents de l’électricité statique, peuvent être engendrés par la protection cathodique de la coque du navire ou du quai, ou par des différences de potentiel galvanique entre le navire et la terre. Ces courants se forment également dans les équipements métalliques de chargement-déchargement. Des brides isolantes peuvent être intercalées dans le bras de chargement et au point où les flexibles se raccordent au système de pipeline à terre. Ainsi, lors du désaccouplement, une étincelle ne peut pas cheminer d’une surface métallique à une autre.

Tous les navires et terminaux ont besoin de procédures d’intervention d’urgence mutuellement convenues en cas d’incendie ou de rejet de produits, de vapeurs ou de gaz toxiques. Ces procédures devraient couvrir les opérations d’urgence, l’arrêt du débit et l’éloignement d’urgence du navire. Les plans d’action devraient viser les communications, la lutte contre l’incendie, l’élimination des nuages de vapeurs, l’aide mutuelle, les secours, le nettoyage et les mesures correctives. Les équipements portatifs et les systèmes fixes de lutte contre le feu devraient être conformes aux exigences officielles et aux normes internes et être adaptés à la taille, à la fonction, au potentiel de risque et à la valeur des installations à quai. Le guide susmentionné (International Chamber of Shipping, 1978) donne un exemple de notice anti-incendie qui peut être utilisée par les exploitants de terminaux pour la prévention des incendies à quai.

La sécurité et la santé à bord des navires

En plus des risques professionnels habituels en mer, le transport de brut et de produits inflammables crée un certain nombre de situations spéciales au regard de la sécurité, de la santé et de la prévention des incendies: soulèvement de niveau et mouvements de la cargaison liquide, risques liés aux vapeurs inflammables pendant le transport et les opérations de chargement-déchargement, possibilité d’inflammation pyrophorique, expositions à des substances toxiques telles que le sulfure d’hydrogène et le benzène et considérations de sécurité lors du dégazage, du rinçage et du nettoyage des citernes. L’économie d’exploitation des pétroliers modernes nécessite qu’ils soient en mer pendant de longues périodes avec seulement de courts arrêts au port pour charger ou décharger. Si l’on ajoute le fait que les navires-citernes sont hautement automatisés, il en résulte des contraintes mentales et physiques particulières pour des équipages par ailleurs restreints.

La protection contre les incendies et les explosions

Il faut concevoir et mettre en œuvre des plans et des procédures d’urgence en fonction du type de cargaison et des autres risques potentiels. Des équipements de lutte contre le feu devraient être prévus. Les membres des équipes chargées de la lutte contre le feu, des secours et du nettoyage des déversements à bord devraient être formés, exercés et équipés pour faire face aux urgences potentielles. L’eau, la mousse, les produits chimiques secs, le halon, le dioxyde de carbone et la vapeur d’eau sont utilisés comme agents de refroidissement, d’inhibition et d’extinction du feu à bord des navires, encore que le halon soit progressivement abandonné pour des raisons écologiques. Les prescriptions applicables aux équipements et systèmes de lutte contre le feu à bord des navires sont définies par le pays du pavillon du bâtiment et par la compagnie, mais elles suivent en général les recommandations de la convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS).

Pour réduire les risques d’incendie et d’explosion, il faut contrôler strictement et en permanence les flammes ou lumières nues, les cigarettes allumées, les arcs de soudage, les étincelles de meulage, les équipements électriques et les lampes non protégées. Si un travail à chaud doit être exécuté, la zone devrait être préalablement examinée et testée pour s’assurer que la sécurité n’est pas engagée, et une autorisation devrait être délivrée pour chaque tâche spécifique.

Un moyen de prévenir les explosions et les incendies dans les espaces libres des citernes où règnent des vapeurs est de maintenir le taux d’oxygène au-dessous de 11% en inertant l’atmosphère au moyen d’un gaz non combustible. Les gaz inertes sont fournis par les gaz d’échappement des chaudières du navire, un générateur de gaz indépendant ou une turbine à gaz équipée d’un système de postcombustion. La convention SOLAS exige que les navires transportant des cargaisons ayant un point d’éclair inférieur à 60 °C aient des compartiments dotés de systèmes d’inertage. Sur les navires utilisant de tels systèmes, les citernes devraient être maintenues en permanence en condition d’ininflammabilité. Une surveillance continue des compartiments est indispensable pour garantir la sécurité et empêcher qu’ils ne deviennent inflammables en raison du risque posé par les dépôts pyrophoriques.

Les espaces confinés

Les espaces confinés à bord des navires (compartiments pour la cargaison, réserves de peintures, salles des pompes, soutes à combustible et espaces entre la double coque) devraient être traités comme n’importe quel espace confiné pour ce qui est de l’autorisation d’accès et des travaux à chaud. Il faut y mesurer les teneurs en oxygène, les vapeurs inflammables et les substances toxiques, dans cet ordre, avant d’y accéder, et instaurer un système d’autorisation de travail indiquant les niveaux admissibles d’exposition et les équipements de protection individuelle requis. Dans les eaux territoriales des Etats-Unis, ces contrôles peuvent être faits par des spécialistes appelés chimistes de la marine.

Les compartiments des navires tels que les citernes à cargaisons et les salles des pompes sont des espaces confinés. Lorsqu’on nettoie ceux qui ont été rendus inertes ou contiennent des atmosphères inflammables, toxiques ou inconnues, il faudrait y faire des mesurages et suivre des procédures spéciales de sécurité et de protection respiratoire. Après déchargement des cargaisons de brut, de petites quantités de résidus adhérents subsistent sur les parois intérieures des citernes, que l’on peut laver et remplir d’eau de ballast. Une méthode permettant de réduire la quantité de résidus consiste à installer des équipements fixes qui en éliminent jusqu’à 80% en lavant les parois des compartiments rendus inertes avec du pétrole brut pendant le déchargement.

Les pompes, les vannes et les équipements

Il faudrait disposer d’une autorisation de travail et respecter les pratiques de sécurité (telles que mise à la terre, vidange, dégazage, mesurage des vapeurs inflammables et des expositions toxiques, fourniture d’équipements de protection incendie) pour toute opération qui, pour les besoins du fonctionnement du navire, d’un entretien ou d’une réparation, nécessite l’ouverture des pompes de cargaison, des conduites, des vannes ou des équipements installés à bord.

Les expositions toxiques

Le risque que les gaz rejetés (gaz de combustion, sulfure d’hydrogène, etc.) atteignent les ponts des navires existe, même avec des systèmes d’évacuation spécialement conçus. Des contrôles devraient être effectués en continu pour déterminer les concentrations de gaz inertes sur tous les navires et les concentrations de sulfure d’hydrogène sur ceux qui contiennent ou ont transporté du brut soufré ou du fioul résiduel. Des contrôles de l’exposition au benzène devraient être réalisés sur les navires transportant du brut et de l’essence. Les eaux usées et les condensats des laveurs de gaz inertes sont acides et corrosifs et il est donc préconisé de porter des équipements de protection individuelle lorsqu’il y a risque de contact.

La protection de l’environnement

Pour les navires et les terminaux, il faudrait prévoir des procédures et des matériels permettant de protéger l’environnement contre les déversements accidentels en mer et sur terre, ainsi que contre les rejets de vapeurs dans l’atmosphère. L’emploi d’importants systèmes de récupération des vapeurs se généralise dans les terminaux maritimes. Les purges à l’atmosphère des compartiments et espaces clos des navires devraient être faites dans le respect des règlements sur la pollution atmosphérique. Il conviendrait de prévoir des procédures d’urgence, des équipements appropriés et des personnels convenablement formés pour intervenir en cas de déversements accidentels ou de fuites de brut ou de liquides inflammables ou combustibles. Il faudrait aussi que soit désigné un responsable chargé de signaler à la compagnie et aux autorités compétentes tout déversement ou rejet dont la déclaration est obligatoire.

Dans le passé, les eaux de ballast souillées par les hydrocarbures et les eaux de lavage des citernes étaient rejetées à la mer. Aux termes de la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires, 1973, le résidu d’hydrocarbures doit être séparé de l’eau avant que celle-ci ne soit évacuée en mer, et gardé à bord pour être ensuite traité à terre. Les pétroliers modernes ont des systèmes de ballast séparés, avec des conduites, des pompes et des chambres, différents de ceux qui sont utilisés pour la cargaison (conformément aux recommandations internationales), ce qui évite tout risque de contamination. Les navires plus anciens continuent à se ballaster dans leurs citernes; ils doivent donc suivre des procédures spéciales, telles que le pompage de l’eau contenant du pétrole dans des cuves et installations de traitement spéciales à terre, pour éviter toute pollution.

Le transport des produits pétroliers par route et par rail

Le pétrole brut et les produits pétroliers ont d’abord été transportés dans des citernes tirées par des chevaux, puis dans des wagons-citernes et, enfin, par des véhicules à moteur. Une fois livrés dans les terminaux par des navires ou des pipelines, les produits pétroliers liquides en vrac sont acheminés directement par wagons-citernes ou camions-citernes sans pression intérieure aux stations-service et aux consommateurs ou à des installations de stockage en vrac pour être redistribués. Les gaz de pétrole liquéfiés (GPL), les composés antidétonants de l’essence, l’acide fluorhydrique et beaucoup d’autres produits, substances chimiques et additifs employés dans l’industrie du pétrole et du gaz, sont acheminés par wagons-citernes et camions-citernes sous pression. Le brut peut aussi être transporté par camions-citernes des petits puits de production vers des réservoirs de collecte, et par camions-citernes et wagons-citernes des réservoirs de stockage vers les raffineries ou pipelines principaux. Les produits pétroliers conditionnés dans des récipients de vrac, des fûts ou des caisses de petits récipients sont transportés dans des camions ordinaires ou des wagons couverts.

Les règlements officiels

Le transport de produits pétroliers par véhicules routiers ou ferroviaires est réglementé dans la plupart des pays. Des autorités telles que le ministère des Transports des Etats-Unis (United States Department of Transportation (USDOT)) et l’Office des transports du Canada (OTC) (Canadian Transportation Agency (CTA)) ont établi des règlements régissant la conception, la construction, les dispositifs de sécurité, les essais, la maintenance préventive, l’inspection et l’exploitation des camions-citernes et des wagons-citernes. Les règlements applicables aux camions-citernes et aux wagons-citernes portent en général sur les essais et l’homologation des dispositifs de pression et de décompression des citernes avant la première mise en service, puis à intervalles réguliers. Parmi les organismes publiant des spécifications et des prescriptions sur la sécurité des citernes routières et ferroviaires, on peut citer notamment l’Association des chemins de fer américains (Association of American Railroads (AAR)) et l’Association nationale de protection contre l’incendie (National Fire Protection Association (NFPA)). La plupart des pays se sont dotés de règlements ou adhèrent aux conventions de l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui imposent l’identification et la fourniture d’informations sur les matières dangereuses et les produits pétroliers expédiés en vrac ou dans des récipients. Les wagons-citernes, les camions-citernes et les camions ordinaires devraient porter des panneaux identifiant les produits dangereux qu’ils transportent et donnant les instructions pour les interventions d’urgence.

Les wagons-citernes

Les wagons-citernes sont construits en acier au carbone ou en aluminium et peuvent être sous pression ou non. Les wagons-citernes modernes peuvent contenir jusqu’à 171 000 litres de gaz comprimé à des pressions pouvant atteindre 4,1 MPa. On est passé des petits wagons-citernes en bois de la fin du XIXe siècle aux énormes wagons-citernes d’aujourd’hui qui peuvent transporter 1,31 million de litres de produits sous des pressions de 0,6 MPa. Ces citernes, qui peuvent comporter un ou plusieurs compartiments, sont acheminées soit en wagons isolés chargés individuellement, soit en rames complètes de wagons-citernes, qui peuvent être chargés et déchargés en un seul point. Les citernes, sous pression ou non, peuvent être chauffées, réfrigérées, isolées ou ignifugées en fonction du service assuré et des produits transportés.

Tous les wagons-citernes ont des vannes de chargement-déchargement, montées en partie haute ou basse, et des trappes d’accès pour le nettoyage. Ils sont également équipés de dispositifs destinés à empêcher l’augmentation de la pression interne en cas d’exposition à des conditions anormales. Ces dispositifs comprennent des soupapes de sûreté maintenues fermées par un ressort et qui s’ouvrent pour laisser échapper une certaine quantité de fluide, puis se referment, ou des disques de rupture qui éclatent en cas de surpression et ne peuvent pas se refermer ensuite, ou bien les deux. Les citernes à pression atmosphérique sont pourvues d’une soupape de dépression qui empêche la formation d’un vide en cas de soutirage par le bas. Toutes les citernes, sous pression ou non, comportent des logements protecteurs autour des connexions de chargement en partie haute, ainsi que des prises pour l’échantillonnage, des puits de thermomètre et des dispositifs de jaugeage. Elles sont parfois dotées, en partie supérieure, de passerelles pour les opérateurs. Les citernes anciennes peuvent comporter un ou plusieurs dômes d’expansion. Les citernes sont équipées en partie basse de vannes pour le déchargement et le nettoyage. Enfin, des boucliers sont prévus aux extrémités des wagons-citernes pour éviter la perforation du réservoir par l’attelage d’un autre wagon en cas de déraillement.

Le gaz naturel liquéfié est transporté sous forme de gaz cryogénique dans des camions-citernes ou des wagons-citernes sous pression isolés, qui ont un réservoir intérieur en acier inoxydable suspendu dans un réservoir extérieur en acier au carbone. L’espace vide annulaire est garni d’un matériau isolant qui maintient une température basse durant le transport. Pour éviter les retours de gaz enflammé vers les citernes, celles-ci sont équipées de deux vannes d’isolement d’urgence, télécommandées, à sécurité intégrée, sur les conduites de remplissage et de déchargement; elles ont également des indicateurs de niveau sur leurs réservoirs intérieur et extérieur.

Les GPL sont transportés dans des wagons-citernes (jusqu’à 130 m3 de capacité) ou des camions-citernes (jusqu’à 40 m3) spéciaux qui sont en général des cylindres en acier, non isolés, à fonds sphériques, pourvus de jauges, de thermomètres, de deux soupapes de surpression, d’un détecteur de niveau de gaz, d’un indicateur de remplissage maximal et de chicanes.

Les wagons-citernes de transport de GNL ou de GPL ne devraient pas être surchargés car ils peuvent rester sur des voies d’évitement pendant des périodes assez longues et se trouver exposés à des températures élevées qui pourraient provoquer des surpressions et des dégazages. Les plates-formes de chargement ont des fils de connexion et des câbles de mise à la terre pour aider à neutraliser et à dissiper l’électricité statique; il importe de les connecter avant le début des opérations et de ne les désaccoupler qu’à la fin, après avoir fermé tous les robinets. La protection incendie des postes de chargement des citernes ferroviaires et routières est en général assurée par des systèmes de pulvérisation d’eau ou de brumisation, ou par des extincteurs.

Les camions-citernes

Les citernes des camions transportant du brut et des produits pétroliers sont en général en acier au carbone, en aluminium ou en fibre de verre plastifiée et peuvent contenir de 1 900 à 53 200 litres pour les plus grandes d’entre elles. La capacité des camions-citernes est fixée par la réglementation et dépend habituellement des contraintes imposées par les routes et les ouvrages d’art, du poids admissible par essieu ou de la quantité totale de produit autorisée.

Les camions-citernes peuvent être sous pression ou non, isolés ou non, selon le service assuré et le produit transporté. Les citernes sous pression ont en général un seul compartiment; celles à pression atmosphérique peuvent en avoir plusieurs. Quel que soit le nombre de compartiments, chacun d’eux doit être considéré individuellement, avec ses propres dispositifs de chargement-déchargement et de sécurité. Ces compartiments sont séparés par des cloisons simples ou doubles. Les règlements peuvent imposer que les produits incompatibles et les liquides inflammables et combustibles transportés dans des compartiments différents d’une même citerne soient séparés par des doubles cloisons. Lors des essais de pression des compartiments, il faut également vérifier qu’il n’y ait pas de liquides ou de vapeurs entre les cloisons.

Les camions-citernes ont des trappes de chargement par le haut, ou des vannes pour le chargement-déchargement en circuit fermé par le haut ou par le bas, ou bien les deux. Tous les compartiments ont des trous d’homme pour le nettoyage et sont dotés de dispositifs de sécurité pour atténuer la pression interne en cas d’exposition à des conditions anormales. Ces dispositifs peuvent être soit des soupapes de sûreté maintenues fermées par un ressort, qui s’ouvrent pour décharger l’excès de pression et se referment ensuite, soit des trappes qui s’ouvrent en cas de défaillance des soupapes de sûreté (sur les citernes à pression atmosphérique), soit encore des disques de rupture (sur les citernes sous pression). Les citernes à pression atmosphérique sont munies d’une soupape de dépression qui évite une dépression lors d’un soutirage par le bas. Les citernes à pression atmosphérique ont des rambardes de protection des trappes de chargement en partie haute, des valves de surpression et un système de récupération des vapeurs en cas d’accident avec renversement du véhicule. Les camions-citernes sont généralement équipés de dispositifs à fermeture automatique installés sur les vannes et accessoires de chargement-déchargement en partie basse des compartiments pour prévenir les fuites de produit en cas de collision ou de renversement du véhicule.

Le chargement et le déchargement des wagons-citernes et des camions-citernes

Si les wagons-citernes sont presque toujours chargés et déchargés par des opérateurs spécialement affectés à ces tâches, les camions-citernes peuvent l’être aussi bien par des chargeurs que par des chauffeurs. Les wagons-citernes et les camions-citernes sont chargés dans des installations spéciales, les rampes de chargement. Le chargement se fait par le haut à travers une trappe ou en circuit fermé. Le chargement en dôme peut s’effectuer à l’air libre par une trappe ou en circuit fermé par branchement de raccords. Le chargement en source se fait en circuit fermé.

Le chargement

Les opérateurs qui chargent et déchargent le brut, les gaz de pétrole liquéfiés, les produits pétroliers, ainsi que les acides et additifs utilisés dans l’industrie pétrolière et gazière devraient avoir un minimum de connaissances sur les caractéristiques des produits qu’ils manipulent, leurs risques et les expositions admissibles. Ils devraient également connaître les procédures opératoires et les pratiques de travail leur permettant de s’acquitter de leurs tâches en sécurité. Souvent, les organismes réglementaires et les sociétés imposent que des formulaires d’inspection soient complétés lors de la réception et de l’expédition et avant le chargement ou le déchargement des citernes ferroviaires ou routières. Celles-ci peuvent être remplies par les trappes du haut ou par des raccords et robinets situés en haut ou en bas de chaque citerne ou compartiment. Le circuit fermé est exigé pour les chargements sous pression et lorsqu’il y a des systèmes de récupération des vapeurs. Si, pour une raison quelconque, le système de chargement ne se met pas en marche (par exemple, défaut du système de récupération des vapeurs ou du système de mise à la terre), il faut requérir une autorisation pour procéder au remplissage par un autre moyen. Les trappes devraient être refermées et verrouillées durant le transport.

Les opérateurs devraient observer les règles de sécurité pour éviter les glissades et les chutes lors des chargements en dôme. Si les commandes de chargement sont à prédétermination, ils devraient veiller à ce que les produits soient chargés dans les citernes et les compartiments prévus. Toutes les trappes devraient être fermées lors des chargements en source et, lors des chargements en dôme, seule celle par laquelle s’effectue l’opération devrait être ouverte. Pour les chargements en dôme, le remplissage «en pluie» sera évité en descendant le tube ou le flexible plongeur jusqu’au fond du compartiment et en ouvrant le débit lentement, jusqu’à ce que le liquide recouvre graduellement l’embouchure du tube. Lors d’un chargement manuel en dôme, les opérateurs devraient rester présents, ne pas bloquer la commande de coupure automatique et ne pas trop remplir le compartiment. Lors des remplissages en dôme à ciel ouvert, ils éviteront de s’exposer au produit et aux vapeurs en se tenant sous le vent et en détournant la tête. Lors de manutentions d’additifs, de prélèvements d’échantillons ou de vidanges de flexibles, ils porteront un équipement de protection. Enfin, les opérateurs devraient connaître et observer la marche à suivre en cas de rupture d’un flexible ou d’une conduite, de déversement, de fuite, d’incendie ou d’autre situation d’urgence.

Le déchargement et la livraison

Lors du déchargement de wagons-citernes et de camions-citernes, il est essentiel de s’assurer d’abord que le produit est transféré dans le bon réservoir de stockage et que celui-ci a la capacité voulue. Bien que les vannes, tuyaux, conduites et couvercles du circuit de remplissage des réservoirs soient normalement repérés par des codes de couleur, ou marqués d’une autre manière pour indiquer la nature du produit contenu, le conducteur devrait rester responsable de la qualité du produit pendant la livraison. Les erreurs de livraison, mélanges de produits ou contamination devraient être immédiatement signalés au destinataire et à la compagnie pour éviter des conséquences graves. Lorsque les conducteurs ou les opérateurs doivent ajouter des produits ou prélever des échantillons dans les réservoirs de stockage après la livraison, par exemple pour s’assurer de la qualité du produit, ils devraient se conformer aux règles de sécurité et de santé applicables. Les personnes effectuant des opérations de livraison et de déchargement devraient être présentes en permanence et connaître la marche à suivre en cas d’urgence, notamment qui avertir, comment arrêter le débit et nettoyer les déversements accidentels et quand quitter la zone.

Les citernes sous pression peuvent être déchargées par compresseur ou pompe et les citernes à pression atmosphérique par gravité, pompe du véhicule ou pompe du destinataire. On décharge parfois les wagons-citernes et les camions-citernes qui transportent des lubrifiants ou des huiles industrielles, des additifs et des acides en mettant sous pression la citerne avec un gaz inerte tel que l’azote. Il peut être nécessaire de chauffer les citernes à l’aide de serpentins de vapeur ou électriques pour décharger les bruts lourds, les produits visqueux et les paraffines. Toutes ces activités comportent des risques. Lorsque les règlements l’exigent, le déchargement ne devrait pas commencer tant que les conduites de récupération des vapeurs n’ont pas été branchées entre la citerne de livraison et le réservoir de stockage. Lors des livraisons de produits pétroliers aux particuliers, aux exploitations agricoles et aux commerces, les conducteurs devraient jauger les cuves qui ne sont pas équipées d’un évent à sifflet pour prévenir un remplissage excessif.

La protection incendie sur les rampes de chargement

Des incendies et des explosions peuvent se produire sur les rampes de chargement des camions-citernes et des wagons-citernes par suite de l’accumulation de charges électrostatiques, de la formation d’arcs dangereux dans une atmosphère inflammable, de travaux à chaud non autorisés, de retour de flamme d’une unité de récupération des vapeurs, du non-respect de l’interdiction de fumer et d’autres pratiques contraires à la sécurité.

Il importe d’éviter les sources d’inflammation telles que cigarettes, moteurs à combustion interne en marche et travaux à chaud à tout moment et, en particulier, lors des chargements et autres opérations comportant un risque de déversement ou de fuite de produit. Les postes de chargement peuvent être équipés d’extincteurs portatifs et de dispositifs d’extinction à mousse, à eau ou à poudre chimique à fonctionnement manuel ou automatique. Les systèmes de récupération des vapeurs devraient être dotés de pare-flammes empêchant les retours de flamme de l’unité de récupération vers la rampe de chargement.

Un système de drainage sera prévu pour évacuer les produits répandus hors de la zone de chargement. Ces systèmes devraient être équipés de pièges à feu pour empêcher la propagation de flammes ou de vapeurs vers le réseau d’égouts. Les autres dispositifs de sécurité comprennent des commandes d’arrêt d’urgence aux points de chargement et en d’autres endroits stratégiques du terminal, ainsi que des vannes automatiques à détection de pression qui arrêtent l’écoulement du produit vers la rampe en cas de fuite dans les conduites. Certaines sociétés installent sur leurs sites de chargement de camions-citernes des systèmes automatiques de blocage des freins qui empêchent le départ du véhicule tant que les conduites de remplissage n’ont pas été désaccouplées.

Les risques dus à l’électricité statique

Certains produits comme les distillats intermédiaires et les carburants et les solvants à faible pression de vapeur tendent à accumuler des charges électrostatiques. Lors du chargement des wagons-citernes et des camions-citernes, il y a toujours un risque de générer des charges électrostatiques par friction lorsque le produit passe dans les conduites et les filtres et lors du remplissage en pluie. Pour limiter ce risque, on peut concevoir des rampes de chargement permettant un temps de relaxation dans les tuyauteries en aval des pompes et des filtres. Il faut s’assurer que les compartiments ne contiennent pas d’objets flottants pouvant faire office d’accumulateurs d’électricité statique. Les compartiments chargés en source peuvent être équipés de câbles internes favorisant la dissipation des charges électrostatiques. Avant de descendre des appareils d’échantillonnage, des thermomètres ou d’autres objets dans les compartiments, il faudrait attendre au moins une minute pour permettre aux charges électrostatiques qui ont pu s’accumuler de se dissiper.

La mise à la terre est une précaution importante pour la dissipation des charges électrostatiques qui s’accumulent pendant les opérations de chargement. En maintenant la conduite de remplissage en contact avec le côté métallique de la trappe lors du remplissage en dôme et en utilisant des bras de chargement métalliques ou des flexibles conducteurs pour les remplissages en circuit fermé, le wagon ou le camion se trouvent reliés électriquement à la rampe de remplissage; la même charge électrique est ainsi maintenue entre les objets, ce qui empêche la formation d’une étincelle lorsque le tube ou le flexible de chargement est retiré. On peut aussi utiliser un câble de liaison entre le véhicule et la rampe de chargement, de manière à transporter les charges accumulées jusqu’à la rampe qui est elle-même mise à la terre par un câble et une tige de mise à la terre. Des précautions analogues sont nécessaires lors des déchargements. Certaines rampes de chargement disposent de capteurs et de connecteurs électroniques qui empêchent le démarrage des pompes tant qu’une bonne continuité électrique n’est pas assurée.

Pendant les opérations de nettoyage, d’entretien ou de réparation des wagons-citernes et des camions-citernes de transport de gaz sous pression, on ouvre habituellement les citernes à l’atmosphère pour permettre l’entrée d’air. Lors du premier chargement effectué ensuite, pour éviter une inflammation due aux charges électrostatiques, il faut ramener le niveau d’oxygène à moins de 9,5% en isolant la citerne avec un gaz inerte tel que l’azote. Il faut également veiller à ne pas introduire d’azote liquide dans la citerne lorsqu’on utilise des bouteilles portatives.

Le chargement successif de deux produits différents

Lorsque des produits à faible ou à moyenne pression de vapeur (gazole ou fioul) sont chargés dans un compartiment ayant contenu un produit inflammable comme l’essence, l’électricité statique générée durant le remplissage peut se décharger dans une atmosphère qui se trouve dans la plage d’inflammabilité et provoquer un incendie. Pour pallier ce danger, lors des remplissages en dôme, il faudrait descendre le tube de remplissage au fond du compartiment et ouvrir le débit lentement jusqu’à ce que l’extrémité du tube soit submergée, ce qui évite le remplissage en pluie et l’agitation du liquide. Le contact métal/métal devrait être maintenu pour assurer une bonne continuité électrique entre le tube de chargement et la trappe de la citerne. Pour le chargement en source, un remplissage lent ou des déflecteurs de projections sont utilisés pour réduire l’accumulation de charges électrostatiques. Avant toute permutation de produit, les citernes que l’on ne peut entièrement vidanger peuvent être rincées avec une petite quantité du produit à charger afin d’éliminer tout résidu inflammable dans les puisards, conduites, vannes et pompes du véhicule.

Le transport des produits par wagons couverts et par camions de détail

Les produits raffinés sont livrés par camions de détail ou par wagons couverts lorsqu’ils sont conditionnés en charges unitaires dans des récipients de métal, de fibre ou de matière plastique de tailles diverses: fûts de 210 litres, seaux de 20 litres et récipients de 1 à 10 litres sous suremballage de carton ondulé et généralement sur palette. De nombreux produits destinés à des clients industriels et commerciaux sont souvent livrés en gros récipients de vrac en métal, plastique ou matériau mixte métal/plastique, d’une capacité allant de 380 à plus de 2 660 litres. Les gaz de pétrole liquéfiés sont livrés dans des bouteilles sous pression, grandes ou petites. Les échantillons de pétrole brut, de produits raffinés et de produits usés sont expédiés par la poste ou la messagerie à des laboratoires, pour expertise. Tous ces produits, récipients et emballages devraient être manipulés conformément aux règlements applicables aux produits chimiques dangereux, aux liquides inflammables et combustibles et aux substances toxiques. Il faut pour cela des manifestes de matières dangereuses, documents d’expédition, autorisations, bons de réception et autres formalités exigées telles que le marquage des suremballages, récipients, camions et wagons, avec l’identification correcte des produits et une étiquette signalant le danger. Une utilisation rationnelle des camions et des wagons est importante pour l’industrie pétrolière. Comme les capacités de stockage sont limitées, les délais d’acheminement doivent être respectés, qu’il s’agisse de la livraison de brut pour maintenir les raffineries en activité, de la livraison d’essence aux stations-service, de la livraison de lubrifiants aux clients commerciaux et industriels ou encore de celle de fioul aux particuliers.

Les GPL sont livrés aux consommateurs par des camions-citernes de vrac qui pompent le produit directement dans de petits réservoirs de stockage sur site; ceux-ci peuvent être aériens ou enterrés (comme pour les stations-service, exploitations agricoles, consommateurs industriels et commerciaux, etc.). Ces gaz sont également livrés en bouteilles par camions ou camionnettes. Le GNL est livré dans des récipients cryogéniques spéciaux qui comportent un réservoir intérieur entouré d’une isolation et d’une enveloppe extérieure. Il existe des récipients similaires pour les véhicules et appareils fonctionnant au GNL. Le gaz naturel comprimé est normalement livré en bouteilles classiques de gaz comprimés, comme celles utilisées sur les chariots élévateurs industriels.

En plus des précautions normales de sécurité et de santé applicables aux opérations de transport de charges unitaires par wagons et camions (déplacement et manutention d’objets lourds, conduite de chariots industriels, etc.), les opérateurs devraient connaître les risques associés aux produits qu’ils manutentionnent et transportent et savoir comment réagir en cas de déversement accidentel, de rejet ou de toute autre situation d’urgence. Il faudrait, par exemple, éviter de jeter à terre depuis le camion ou par le hayon arrière les fûts et les récipients intermédiaires de vrac. Les entreprises et les autorités administratives ont défini des règles et des prescriptions spéciales pour les conducteurs et les opérateurs se chargeant du transport et de la livraison de produits pétroliers inflammables et dangereux.

Les chauffeurs de camions-citernes et de camions ordinaires travaillent souvent seuls et peuvent être appelés à parcourir de grandes distances pendant plusieurs jours pour livrer la marchandise. Ils travaillent de jour comme de nuit, et par tous les temps. Manœuvrer un maxiciterne dans les stations-service et sur les lieux de livraison sans heurter des véhicules stationnés ni des objets fixes exige de la patience, de l’habileté et de l’expérience; les chauffeurs devraient posséder les qualités physiques et mentales indispensables.

La conduite des camions-citernes est différente de celle des camions ordinaires en ceci que le chargement liquide oscille vers l’avant lors des freinages, vers l’arrière lors des accélérations et d’un côté à l’autre dans les virages. Les compartiments des camions-citernes devraient par conséquent être équipés de chicanes pour prévenir un ballottement excessif. Une très grande habileté est requise des chauffeurs pour maîtriser l’inertie créée par ce phénomène. D’autre part, ils doivent parfois se ravitailler eux-mêmes à partir des réservoirs de stockage. Cette opération exige des équipements spéciaux, notamment des tuyaux d’aspiration et des pompes de transfert, ainsi que des précautions particulières comme la prévention des fuites accidentelles de liquides ou de vapeurs et la mise à la terre pour dissiper les charges d’électricité statique.

Les procédures d’urgence pour les camions-citernes et les wagons-citernes

Les chauffeurs et les opérateurs devraient connaître la chaîne de notification d’alerte et les mesures d’urgence à prendre en cas d’incendie ou de déversement accidentel de liquide ou de rejet de gaz ou de vapeurs. Les wagons-citernes et les camions-citernes comportent des plaques d’identification du produit et des dangers, conformes aux normes de marquage de la profession, des associations industrielles ou des règlements nationaux, pour permettre aux services d’intervention de connaître les précautions à prendre. Les chauffeurs des camions-citernes et les personnels des trains peuvent être également tenus d’avoir sur eux les fiches de données de sécurité (FDS) ou autres documents décrivant les risques et les précautions à prendre pour la manutention des produits transportés. L’employeur ou l’administration exige parfois que les véhicules chargés de liquides inflammables ou de matières dangereuses soient équipés de trousses de premier secours, d’extincteurs, de matériels de nettoyage des produits répandus et d’appareils de signaux de détresse permettant d’alerter les automobilistes en cas d’immobilisation du camion sur le bord de la route.

Des techniques et des équipements spéciaux sont nécessaires quand il faut vider une citerne ferroviaire ou routière à la suite d’un accident ou d’un renversement. La méthode d’élection consiste à utiliser des tubes fixes munis de vannes ou des plaques spéciales sur les trappes des citernes. Dans certaines conditions, toutefois, la seule solution consiste à pratiquer une ouverture dans la citerne, tout en s’entourant des précautions nécessaires. Dans tous les cas, la citerne accidentée devrait être mise à la terre et la continuité électrique assurée avec la citerne réceptrice.

Le nettoyage des citernes ferroviaires et routières

Pénétrer à l’intérieur d’une citerne pour l’inspecter, la nettoyer, l’entretenir ou la réparer est une activité dangereuse qui exige que toutes les prescriptions concernant la ventilation, les tests préalables, le dégazage, les autorisations d’entrée dans la citerne et de réalisation des travaux, etc., soient respectées. Le nettoyage des véhicules-citernes n’est en rien différent du nettoyage des réservoirs de stockage d’hydrocarbures et est soumis aux mêmes précautions et procédures quant à la prévention. Les citernes peuvent contenir des résidus de matières inflammables, dangereuses ou toxiques dans leurs puisards et conduites de déchargement; elles peuvent aussi avoir été déchargées au moyen d’un gaz inerte, comme l’azote, si bien qu’un espace intérieur apparemment propre et sans danger ne l’est pas nécessairement. Les citernes qui ont contenu du brut, des résidus, des produits bitumineux ou à point de fusion élevé devront parfois être nettoyées à la vapeur ou par voie chimique avant que l’on puisse les ventiler et y accéder; elles pourront également présenter un risque pyrophorique. La ventilation, qui a pour but d’évacuer les vapeurs et les gaz toxiques ou inertes, peut se faire en ouvrant dans chaque compartiment le robinet ou le raccord le plus bas et le plus éloigné et en plaçant un éducteur d’air à l’orifice le plus haut. Si l’opérateur doit pénétrer dans la citerne sans protection respiratoire, il devrait s’assurer au préalable que tous les recoins et points bas, tels que les puisards, ont été soigneusement ventilés; la ventilation devrait se poursuivre pendant toute la durée de l’intervention.

Le stockage en surface des hydrocarbures liquides

Le pétrole brut, les gaz, les PL et le GNL, les additifs, les produits chimiques et les produits raffinés sont stockés dans des réservoirs sous pression atmosphérique (où le produit n’est pas sous pression) ou des réservoirs sous pression aériens ou enterrés. Ces réservoirs se trouvent à l’extrémité des conduites de collecte et d’alimentation, le long des conduites principales, sur les sites de charge-ment-déchargement maritimes et dans les raffineries, terminaux et dépôts de stockage en vrac. Il sera question ici des bacs de stockage atmosphériques installés en surface dans les raffineries, terminaux et dépôts (on trouvera ci-après des informations sur les réservoirs aériens sous pression; les réservoirs enterrés et les petits réservoirs aériens sont traités dans l’article «Les opérations d’approvisionnement en carburant et de petit entretien des véhicules à moteur») du présent chapitre.

Les terminaux et les installations de stockage en vrac

Les terminaux sont des installations de stockage qui reçoivent généralement du brut et des produits dérivés amenés par pipelines principaux ou par navires et qui les stockent et les redistribuent aux raffineries, à d’autres terminaux, aux installations de stockage en vrac, aux stations-service et aux consommateurs au moyen de pipelines, de navires, de wagons-citernes et de camions-citernes. Les terminaux peuvent être exploités par des compagnies pétrolières, des exploitants de pipelines, des exploitants indépendants, de grandes entreprises industrielles ou commerciales ou des distributeurs de produits pétroliers.

Les installations de stockage en vrac sont généralement plus petites que les terminaux; elles sont le plus souvent approvisionnées par wagons-citernes ou camions-citernes depuis ces terminaux, mais parfois aussi directement par les raffineries. Elles stockent les produits et les redistribuent aux stations-service et aux consommateurs par wagons-citernes ou camions-citernes (camions-citernes d’une capacité comprise entre 1 900 à 9 500 litres). Elles peuvent être exploitées par des compagnies pétrolières, des distributeurs ou des propriétaires indépendants.

Les parcs de stockage

Les parcs de stockage sont des groupes de bacs situés sur les gisements exploités, dans les raffineries, les terminaux (maritimes, de pipelines et de distribution) et sur le site des installations de stockage en vrac où sont stockés le brut et les produits pétroliers. Dans ces parcs, les bacs individuels ou groupes de bacs sont en général entourés d’ouvrages de protection, appelés bermes, digues ou merlons, de construction et de hauteur variables, depuis les bermes en terre de 45 cm élevées autour des conduites et des pompes jusqu’aux murs en béton montant plus haut que les réservoirs qu’ils entourent. Les digues peuvent être en terre, argile ou autres matériaux; on les recouvre de gravier, de chaux ou de coquillages pour limiter l’érosion; leur hauteur est variable et leur largeur suffisante pour que des véhicules puissent y circuler. Elles servent essentiellement à canaliser et détourner les eaux de pluie, à séparer physiquement les réservoirs pour éviter la propagation d’un incendie d’un secteur à l’autre et à contenir les déversements accidentels, fuites ou débordements d’un réservoir, d’une pompe ou d’une conduite.

Les réglementations et les normes d’entreprise peuvent imposer que les digues soient dimensionnées et entretenues de manière à pouvoir retenir une quantité donnée de produit. Par exemple, une digue pourrait devoir contenir au moins 110% de la capacité du plus gros réservoir du périmètre, en prenant en compte le volume occupé par les autres bacs et la quantité de produit restant dans le bac le plus gros une fois l’équilibre hydrostatique atteint. Il pourrait être également prescrit que les digues soient construites en argile imperméable ou recouvertes d’une doublure plastique pour empêcher la pollution du sol ou des nappes phréatiques.

Les bacs de stockage

Il y a, dans les parcs de stockage, divers types de réservoirs atmosphériques ou sous pression de surface, verticaux et horizontaux, qui contiennent du pétrole brut, des produits de base de raffinage, des stocks intermédiaires ou des produits raffinés. Leurs dimensions, forme, conception, configuration et fonctionnement dépendent de la qualité et du type du produit stocké, ainsi que des dispositions réglementaires ou des prescriptions de l’entreprise. Les réservoirs verticaux peuvent être munis d’un double fond pour éviter les fuites et d’une protection cathodique pour limiter la corrosion. Les réservoirs horizontaux peuvent comporter une paroi double ou être placés dans des chambres creusées dans le sol pour contenir les fuites.

Les réservoirs atmosphériques à toit conique

Les réservoirs à toit conique sont des cuves à pression atmosphérique, cylindriques, couvertes, horizontales ou verticales, situées en surface. Ils sont équipés à l’extérieur d’escaliers ou d’échelles et de passerelles. La soudure entre le toit et la robe est à faible résistance. Ils sont dotés d’orifices de respiration, de drainage ou de trop-plein. Ils peuvent comporter des accessoires tels que tubes de jaugeage, conduites et chambres de mousse, systèmes de détection et de signalisation de trop-plein, systèmes de jaugeage automatique, etc.

Lorsque du brut volatil et des produits pétroliers liquides inflammables sont stockés dans un réservoir à toit conique, il y a un risque que l’espace de vapeurs se trouve dans sa plage d’inflammabilité. En effet, bien que l’espace entre la surface du produit et le toit soit normalement riche en vapeurs, une atmosphère inflammable peut être créée quand le produit est introduit dans un réservoir vide ou que de l’air pénètre dans le réservoir par les évents ou les soupapes de surpression ou de vide à l’occasion d’un soutirage du produit, ou de la «respiration» du réservoir lors des changements de température. Les réservoirs à toit conique peuvent être raccordés à des systèmes de récupération des vapeurs.

Les réservoirs à conservation sont un type particulier de réservoirs à toit conique dont les parties supérieure et inférieure sont séparées par une membrane souple destinée à contenir les vapeurs dégagées quand le produit chauffe et se dilate sous l’effet du soleil durant la journée, et qui permet leur retour au réservoir lors de leur recondensation nocturne. Les réservoirs à conservation sont en général utilisés pour le stockage d’essence aviation ou de produits similaires.

Les réservoirs atmosphériques à toit flottant

Les réservoirs à toit flottant sont des cuves à pression atmosphérique, cylindriques, verticales, ouvertes ou fermées à leur partie supérieure et équipées d’un toit flottant. L’objectif principal du toit flottant est de limiter l’espace de vapeurs entre la surface du produit et la partie inférieure du toit, de sorte que l’atmosphère dans cet espace soit toujours riche en vapeurs, ce qui exclut la possibilité de formation d’un mélange vapeurs-air dans la plage d’inflammabilité. Tous les réservoirs à toit flottant sont équipés à l’extérieur d’escaliers ou d’échelles et de passerelles, ainsi que d’escaliers ou d’échelles réglables permettant d’accéder au toit depuis la passerelle. Ils peuvent comporter des accessoires tels que shunts de continuité électrique entre le toit et la robe, tubes de jaugeage, conduites et chambres de mousse, systèmes de détection et de signalisation de trop-plein, systèmes de jaugeage automatique, etc. Le pourtour du toit flottant est équipé d’un joint d’étanchéité ou d’un soufflet pour empêcher que le produit ou les vapeurs ne s’échappent et s’accumulent sur l’extrados du toit flottant ou immédiatement au-dessus.

Les toits flottants comportent des béquilles qui peuvent être réglées en position haute ou basse selon le type d’opération. Elles sont normalement en position basse pour que la plus grande quantité possible de produit puisse être soutirée sans créer d’espace de vapeurs au-dessus du niveau. Lorsque les réservoirs sont mis hors service pour être inspectés, entretenus, réparés ou nettoyés, il faut régler les béquilles en position haute afin que les opérateurs puissent travailler sous le toit une fois le réservoir vide. Lors de la remise en service, les béquilles sont de nouveau rétractées après le remplissage du réservoir.

Parmi les réservoirs aériens à toit flottant, on distingue ceux qui ont un toit flottant externe de ceux qui ont un toit flottant interne, ou encore un toit flottant externe couvert.

Les réservoirs à toits flottants externes découverts sont aussi dits à toits ouverts. Ils sont généralement construits en acier et comportent des pontons ou d’autres moyens de flottaison. Ils sont équipés d’avaloirs, d’un joint d’étanchéité ou d’un soufflet pour empêcher les dégagements de vapeurs et d’échelles réglables permettant d’atteindre le toit depuis le haut du réservoir, quelle que soit la position du toit. Ils peuvent être aussi dotés de joints secondaires pour limiter les pertes de vapeurs vers l’atmosphère, d’écrans de protection des joints contre les intempéries et de dispositifs de retenue de mousse destinés à maintenir la mousse injectée au niveau du joint en cas d’incendie ou de perte d’étanchéité de ce dernier. L’accès au toit flottant externe à des fins de jaugeage, de maintenance ou de toute autre activité peut être considéré comme une entrée en espace confiné, selon le niveau du toit par rapport au haut du réservoir, les produits contenus, les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise.

Les réservoirs à toit flottant interne sont généralement des réservoirs à toit conique que l’on a convertis en installant à l’intérieur un couvercle flottant (pont, radeau, etc.). Ils sont construits en tôle, en aluminium, en plastique ou en mousse expansée avec un revêtement métallique et peuvent être du type ponton ou cuvette, caisson plein flottant, ou une combinaison des deux. Ils sont munis d’un joint périphérique empêchant les vapeurs de passer entre son extrados et le toit extérieur. Des soupapes de pression et de vide ou des évents sont en principe installés en haut du réservoir pour contrôler les vapeurs d’hydrocarbures pouvant s’accumuler au-dessus du flotteur interne. Ces réservoirs comportent des échelles permettant d’accéder du toit conique au toit flottant. Tout accès au toit flottant interne devrait être considéré comme une entrée dans un espace confiné.

Les réservoirs à toit flottant externe couvert sont essentiellement des réservoirs à toit flottant externe qui ont été équipés d’un dôme géodésique, d’une calotte de neige ou d’une autre couverture similaire semi-fixe mettant le toit flottant à l’abri du contact direct avec l’atmosphère. Les réservoirs à toit flottant externe couvert de construction nouvelle peuvent avoir un toit flottant conçu pour les réservoirs à toit flottant interne. L’accès aux toits flottants externes couverts à des fins de jaugeage, de maintenance ou de toute autre activité peut être considéré comme une entrée dans un espace confiné, selon le type de construction du dôme ou de la calotte, le niveau du toit par rapport au haut du réservoir, les produits contenus, les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise.

La réception des produits livrés par pipelines ou par navires

Du point de vue de la sécurité, de la qualité des produits et de la protection de l’environnement, il est essentiel d’empêcher les mélanges de produits et les trop-pleins en mettant en place des procédures opératoires et des méthodes de travail appropriées. Pour la sécurité d’exploitation, il faut déterminer avant la livraison quels réservoirs vont recevoir le produit, de façon que leur capacité nominale ne soit pas dépassée; il faut les jauger pour connaître la capacité disponible et régler les vannes pour que seule soit ouverte l’entrée du réservoir de destination. Les dispositifs de drainage installés dans les cuvettes de rétention devraient être fermés durant les réceptions pour parer à l’éventualité d’un trop-plein ou d’un déversement. On peut se prémunir contre les débordements par diverses méthodes, notamment l’usage de commandes manuelles, de détecteurs automatiques, de systèmes de signalisation et de coupure de débit, et d’un moyen de communication. Dans tous les cas, ces procédures devraient être comprises et acceptées par les personnels des pipelines, navires, terminaux et raffineries chargés des transferts.

Les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise peuvent imposer l’emploi de détecteurs automatiques de niveau des réservoirs recevant des liquides inflammables ou d’autres produits provenant des conduites principales ou des navires. Lorsque de tels systèmes sont installés, des tests d’intégrité de l’électronique de commande devraient être effectués régulièrement ou avant un transfert de produit; en cas de défaillance du système, les transferts devraient se faire par des moyens manuels. Une surveillance manuelle ou automatique de la réception sur place ou à distance est nécessaire pour garantir le bon déroulement des opérations. Une fois le transfert terminé, toutes les vannes devraient être remises en position de fonctionnement normal ou réglées pour la réception suivante. Les pompes, vannes, raccords, canalisations de purge et d’échantillonnage, collecteurs, drains et puisards devraient être inspectés et entretenus pour assurer leur bon état de marche et prévenir les déversements et les fuites de produits.

Le jaugeage et l’échantillonnage des réservoirs

Les exploitants d’installations de stockage devraient définir, pour le jaugeage et l’échantillonnage du brut et des produits raffinés, des procédures et des méthodes de travail sûres tenant compte des risques potentiels associés à chaque produit stocké et à chaque type de réservoir. Bien que le jaugeage soit souvent réalisé au moyen de dispositifs mécaniques ou électroniques automatiques, un jaugeage manuel devrait être effectué à intervalles fixes pour tester la précision des systèmes automatiques.

Les opérations manuelles de jaugeage et d’échantillonnage exigent en général que l’opérateur grimpe sur le réservoir. Pour les réservoirs à toit flottant, il doit ensuite descendre sur le toit, sauf s’il y a des tubes de jaugeage et d’échantillonnage accessibles depuis la passerelle. Avec les réservoirs à toit conique, l’opérateur doit ouvrir une trappe dans le toit pour descendre la jauge. Les opérateurs qui doivent accéder à des toits flottants couverts ou descendre sur des toits flottants externes qui se trouvent au-dessous d’un certain niveau devraient connaître les prescriptions et les risques relatifs à l’entrée dans les espaces confinés. Ils pourraient être tenus d’utiliser des détecteurs d’oxygène, de gaz combustibles et de sulfure d’hydrogène et de disposer d’un équipement de protection individuelle adapté.

On peut profiter du jaugeage manuel pour mesurer la température du produit et prélever des échantillons. On peut aussi enregistrer la température automatiquement et prélever des échantillons au moyen de tubulures d’échantillonnage intégrées aux réservoirs. Les jaugeages et les échantillonnages manuels sont normalement interdits durant les réceptions de produits. Lorsqu’une réception est terminée, une période de relaxation de 30 minutes à 4 heures, suivant le produit et les normes internes, devrait être prévue pour permettre l’évacuation des charges électrostatiques avant de procéder à un échantillonnage ou un jaugeage manuel. Certains exploitants imposent qu’il y ait des communications ou un contact visuel avec d’autres personnes lorsqu’un opérateur descend sur un toit flottant. En cas d’orage, des limitations très strictes devraient être imposées à l’accès aux toits et passerelles des réservoirs.

Le dégazage et le nettoyage des réservoirs

Les réservoirs de stockage sont mis hors service pour inspection, contrôle, entretien, réparation, modification ou nettoyage, lorsque c’est nécessaire ou à intervalles réguliers selon les prescriptions en vigueur, la politique interne de l’entreprise et les exigences du service. Bien que le dégazage, le nettoyage et l’entrée dans un réservoir soient des opérations potentiellement dangereuses, ce travail peut être effectué sans incident sous réserve que des procédures convenables aient été établies et que des méthodes de travail sûres soient observées. Faute de telles précautions, on risque de déplorer des dommages corporels ou matériels à la suite d’explosions, d’incendies, de manque d’oxygène, d’expositions toxiques ou de risques physiques.

Les précautions préliminaires

Un certain nombre de précautions préliminaires sont nécessaires dès lors qu’il a été décidé qu’un réservoir devait être mis hors service pour inspection, maintenance ou nettoyage. Ces précautions comprennent: des solutions de rechange pour le stockage et la fourniture du produit, l’examen de l’historique du réservoir afin de déterminer s’il a jamais contenu des produits plombés ou s’il a déjà été nettoyé et certifié sans plomb, la détermination de la quantité et du type des produits qui y ont été stockés et la quantité de résidus restante, l’inspection de l’extérieur du réservoir, de ses abords et des équipements qui seront utilisés pour sa vidange, pour évacuer les vapeurs et pour le nettoyer, l’assurance que le personnel est formé, qualifié et au courant des procédures d’autorisation et de sécurité en vigueur sur le site, l’attribution des responsabilités en fonction des prescriptions applicables pour l’accès aux espaces confinés, les autorisations de travail à chaud et d’exécuter des travaux en toute sécurité et, enfin, la tenue d’une réunion rassemblant les personnels du terminal et les personnels (ou le sous-traitant) chargés du nettoyage avant l’intervention.

La maîtrise des sources d’inflammation

Une fois que la totalité du produit a été extraite du réservoir par les conduites fixes et avant toute ouverture des tubulures de drainage d’eau ou d’échantillonnage, toutes les sources d’inflammation devraient être éliminées de la zone avoisinante jusqu’à ce que le réservoir soit déclaré vide de vapeurs. Les camions-vidangeurs, compresseurs, pompes et autres équipements commandés par moteur devraient être placés en amont soit sur le chemin de roulement, soit à l’extérieur des digues de sécurité ou, s’ils sont placés à l’intérieur des digues, à 20 m au moins du réservoir ou de toute autre source de vapeurs inflammables. La préparation du réservoir, son dégazage et son nettoyage devraient être interrompus en cas d’orages électriques.

L’élimination des résidus

L’étape suivante consiste à enlever autant de produit restant ou de résidus que possible via les tubulures de raccordement avec les pipelines et de drainage d’eau. La délivrance d’une autorisation d’exécuter des travaux en toute sécurité peut être nécessaire pour cette opération. On injecte parfois de l’eau ou du fioul distillé par les tubulures fixes pour évacuer le produit par flottage. Les résidus extraits de réservoirs ayant contenu du brut sulfuré devraient être maintenus humides jusqu’à leur mise en décharge afin d’éviter une combustion spontanée.

L’isolement du réservoir

Une fois que la totalité du produit a été vidée par les tubulures fixes, toutes les conduites connectées au réservoir (conduites de produit, de récupération des vapeurs, de mousse, d’échantillonnage, etc.) devraient être déconnectées en fermant les vannes les plus proches du réservoir et en insérant des brides pleines dans les conduites, du côté réservoir de la vanne, pour empêcher tout retour de vapeurs dans le réservoir. La portion de conduite comprise entre la bride pleine et le réservoir devrait être vidangée et rincée. Les vannes situées à l’extérieur de la cuvette de rétention devraient être fermées et immobilisées mécaniquement ou étiquetées. Les équipements internes du réservoir tels que pompes, mélangeurs, protection cathodique, systèmes électroniques de jaugeage et de détection de niveau, etc. devraient être déconnectés, mis hors tension et verrouillés ou marqués.

La ventilation-dégazage

Le réservoir est maintenant prêt à être débarrassé de ses vapeurs. Des contrôles de vapeurs, intermittents ou continus, devraient être effectués et le travail dans la zone gazée être interdit durant la ventilation du réservoir. La ventilation naturelle, en mettant le réservoir en contact avec l’atmosphère, n’est pas la méthode généralement préférée, étant donné qu’elle n’est ni aussi rapide ni aussi sûre que la ventilation forcée. Il existe plusieurs méthodes de ventilation mécanique selon la dimension, la construction, l’état et la configuration interne des réservoirs. Dans l’une d’elle, on peut dégazer les réservoirs à toit conique en plaçant un éducteur (un ventilateur d’extraction portatif) sur la trappe située à son sommet; on le met en route lentement tandis qu’une autre trappe en bas du réservoir est ouverte, puis on augmente la vitesse pour extraire l’air et les vapeurs à travers le réservoir.

Les opérations de dégazage devraient faire l’objet d’une autorisation d’exécuter des travaux en toute sécurité ou d’une autorisation de travail à chaud. Tous les ventilateurs et les éducteurs devraient être reliés à la masse du réservoir par une liaison de bonne qualité pour éviter les arcs électrostatiques. Pour des raisons de sécurité, les ventilateurs et les éducteurs fonctionneront de préférence à l’air comprimé, mais on a parfois recours à des moteurs électriques antidéflagrants ou à des moteurs à vapeur. Pour les réservoirs à toit flottant interne, il pourra être nécessaire de ventiler séparément les parties situées au-dessus et au-dessous du toit flottant. Si les vapeurs sont évacuées par une trappe inférieure, il faudra utiliser un tube vertical placé à au moins 4 m au-dessus du sol et d’une hauteur au moins égale à la digue environnante pour éviter que les vapeurs ne s’accumulent aux points bas ou n’atteignent une source d’inflammation avant d’être dissipées. Si nécessaire, ces vapeurs pourront être envoyées dans le système de récupération du site.

A mesure que le dégazage progresse, les résidus peuvent être lavés et évacués par la trappe inférieure ouverte, au moyen de flexibles d’eau et d’une aspiration qui devraient être liés à la masse du réservoir de façon à éviter les arcs électrostatiques. Les réservoirs qui ont contenu du brut acide ou des produits résiduels à haute teneur en soufre peuvent provoquer un autoéchauffement et s’enflammer lorsqu’ils sèchent durant le dégazage. Si l’on veut éviter ce phénomène, il convient de mouiller les parois intérieures du réservoir avec de l’eau pour que les dépôts n’entrent pas au contact de l’air et ne s’échauffent pas. Tout résidu de sulfure de fer devrait être évacué par la trappe ouverte afin d’éviter l’inflammation des vapeurs durant le dégazage. Les opérateurs procédant au lavage, à l’enlèvement des résidus et au mouillage des parois devraient porter une protection individuelle adaptée.

Le premier accès à l’intérieur du réservoir, l’inspection et la certification

Un moyen de savoir si le bac est suffisamment dégazé est de mesurer les vapeurs au point d’évacuation durant la ventilation. Une fois qu’il apparaît que la concentration des vapeurs inflammables est inférieure au seuil fixé par les prescriptions en vigueur et par la politique interne de l’entreprise, l’opérateur peut pénétrer dans le réservoir à des fins d’inspection et de contrôle, équipé de la protection individuelle nécessaire et d’un appareil respiratoire à adduction d’air. Après avoir procédé à des prélèvements d’ambiance au niveau de la trappe, une autorisation d’accès intérieur est délivrée. L’opérateur peut alors pénétrer dans le réservoir pour poursuivre les contrôles et l’inspection. Il vérifiera notamment la présence d’obstacles, la solidité du toit et des supports, l’existence de trous dans le fond du réservoir, etc.

Le nettoyage, l’entretien et la réparation

A mesure que le dégazage se poursuit et que la concentration des vapeurs baisse, de nouvelles autorisations d’accès peuvent être délivrées pour d’autres opérateurs (avec protection individuelle adaptée) qui procéderont au nettoyage. Le mesurage des concentrations en oxygène, en vapeurs inflammables et en substances toxiques ne devrait pas être interrompu; si les résultats indiquent que ces concentrations ont dépassé les seuils autorisés, l’autorisation d’accès devrait automatiquement expirer. Les opérateurs présents dans le réservoir devraient alors immédiatement en sortir, attendre que les concentrations reviennent à des valeurs sûres et que des autorisations d’accès soient à nouveau délivrées. La ventilation devrait se poursuivre durant les opérations de nettoyage tant qu’il reste des résidus ou des boues dans le réservoir. Seuls des appareils d’éclairage faible tension ou des lampes-torches d’un type agréé devraient être utilisés pendant l’inspection et le nettoyage.

Une fois le réservoir nettoyé et séché, on procède à une dernière inspection et à une ultime série de mesures avant de commencer les travaux d’entretien, de réparation ou de transformation. Il faut inspecter minutieusement les collecteurs de boues, puisards, platelages de plancher, pontons de toit flottant, supports et poteaux pour s’assurer qu’il n’y a pas de trous ou d’interstices par lesquels le produit stocké aurait pu fuir ou s’infiltrer sous le plancher. Les espaces entre les barrières de retenue de mousse et les écrans de protection des joints contre les intempéries ou autres joints secondaires devraient également faire l’objet d’un contrôle de présence de vapeurs. Si le réservoir a contenu de l’essence plombée, ou si l’on ne dispose pas de son historique, une recherche de plomb dans l’air devrait être effectuée et le réservoir être certifié exempt de plomb avant que des opérateurs ne soient admis à l’intérieur sans équipement respiratoire à adduction d’air.

Une autorisation de travail à chaud est indispensable pour le soudage, le coupage et autres travaux à chaud, et une autorisation d’exécuter des travaux en toute sécurité devrait être délivrée pour les autres activités de réparation et d’entretien. Le soudage et autres travaux à chaud peuvent donner lieu à des vapeurs toxiques et nécessiter des prélèvements d’ambiance, une protection respiratoire et une ventilation continue. Si le réservoir doit être modifié, par exemple pour être équipé d’un double fond ou d’un toit flottant interne, on découpe généralement un grand trou sur le côté pour faciliter le passage et s’affranchir de la nécessité de délivrer des autorisations d’accès en espace confiné.

Il est courant de faire suivre le nettoyage du réservoir par une réfection en état de ses surfaces extérieures par décapage au jet et peinture, avant la remise en service. Ces activités, de même que le nettoyage et la mise en peinture des tuyauteries du parc de stockage, peuvent être menées alors que les bacs et conduites sont en service — sous réserve de l’observation des prescriptions de sécurité en vigueur, telles que mesure des vapeurs d’hydrocarbures et interruption du traitement des surfaces durant les transferts de liquides inflammables dans des réservoirs voisins. Le sablage présente le risque d’une exposition dangereuse à la silice; très souvent, l’administration et les entreprises imposent l’emploi d’abrasifs spéciaux non toxiques (grenaille, etc.) qui peuvent être collectés, épurés et recyclés. Des procédés spéciaux de collecte des particules sous vide peuvent être utilisés pour éviter la contamination lors des décapages de peintures au plomb sur les bacs et tuyauteries. Une fois les surfaces mises à nu par traitement mécanique, les points suspects (fuites, suintements) des parois et tuyauteries devraient être vérifiés et réparés avant l’étape de peinture.

La remise en service du réservoir

Dès que l’intervention est terminée, les trappes sont refermées, les brides pleines retirées et les tuyauteries rebranchées sur le réservoir. Les robinets sont déverrouillés, ouverts et réglés, et les dispositifs mécaniques et électriques remis en fonction. Les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise imposent souvent que les réservoirs fassent l’objet d’un essai hydrostatique avant la remise en service, pour s’assurer de l’absence de fuites. Comme une quantité d’eau considérable serait nécessaire pour obtenir la hauteur manométrique voulue pour la validité de l’essai, une procédure fréquente consiste à remplir de gazole la partie inférieure du réservoir et à faire le complément avec de l’eau. Après cet essai, le réservoir est vidé et préparé pour recevoir un produit. Sur les réservoirs à toit flottant, après remplissage et après un temps de relaxation suffisant, les béquilles du toit sont replacées en position rétractée.

La prévention des incendies

La présence d’hydrocarbures dans une enceinte fermée, comme c’est le cas des réservoirs de stockage des raffineries, des terminaux et des dépôts de stockage, comporte toujours le risque d’un rejet de liquide ou de vapeurs. Des vapeurs peuvent se mélanger à l’air dans la plage d’inflammabilité et, si une source d’inflammation est présente, provoquer une explosion ou un incendie. Indépendamment de la fiabilité des systèmes de protection contre l’incendie et des personnels du site, la clé de la protection incendie réside dans la prévention. Il faut empêcher les produits déversés ou dégagés d’atteindre les réseaux d’égout et de drainage. Pour que les produits répandus ne dégagent pas de vapeurs qui se mélangent à l’air, on peut placer des couvertures humides sur les petites flaques et répandre de la mousse sur les nappes plus importantes. Il faut veiller à éliminer ou à éloigner toute source d’inflammation dans les zones où des vapeurs d’hydrocarbures peuvent être présentes. Des extincteurs portatifs devraient être prévus sur les véhicules de service, de même que sur tous les points stratégiques du site, pour autant qu’ils soient accessibles.

L’établissement et l’application de mesures et de méthodes de sécurité au travail — telles que les systèmes d’autorisation de travail à chaud et les autorisations d’exécuter des travaux en toute sécurité pour les travaux à froid, la classification électrique des matériels, les consignes de consignation/déconsignation des appareils, ainsi que les programmes de formation et de sensibilisation des travailleurs et des sous-traitants — sont essentielles pour la prévention. Les exploitants de sites de stockage élaboreront des procédures d’urgence et les opérateurs devraient savoir qui alerter et comment agir en cas d’incendie et d’évacuation. Les numéros de téléphone des personnes responsables et des administrations à avertir en cas d’urgence devraient être affichés sur le site et les moyens de communication nécessaires être prévus. Il conviendrait en outre que les brigades locales de sapeurs-pompiers, les organisations de sécurité et d’aide mutuelle soient également informées de ces procédures et connaissent le site et ses risques.

Diverses méthodes sont utilisées, parfois concurremment, pour lutter contre les feux d’hydrocarbures:

La protection des réservoirs de stockage contre le feu

La protection des réservoirs de stockage contre le feu est une discipline spécialisée qui doit prendre en compte plusieurs facteurs interdépendants: le type, l’état et la dimension des réservoirs; la nature et la quantité du produit stocké; l’espacement entre les réservoirs, l’endiguement et le drainage; les moyens de protection du site contre le feu et les moyens d’intervention; l’assistance extérieure; enfin, la politique de la société, les normes de la profession et les prescriptions en vigueur. Les incendies de réservoirs de stockage peuvent être faciles ou très difficiles à maîtriser, en fonction essentiellement de la rapidité de détection et d’attaque du feu. Les exploitants de sites de stockage devraient se référer aux nombreuses pratiques et normes mises en place et recommandées par des organismes comme l’Institut américain du pétrole (American Petroleum Institute (API)) et l’Association nationale de protection contre l’incendie (National Fire Protection Association (NFPA)), aux Etats-Unis, qui couvrent de façon très détaillée la prévention des incendies des réservoirs de stockage et la lutte contre le feu.

Des vapeurs peuvent s’échapper d’un réservoir et former avec l’air un mélange inflammable aux points où il y a un défaut d’étanchéité (déformation d’arrondi sur un réservoir à toit flottant découvert, ou joint d’étanchéité usé ou ne s’appliquant pas hermétiquement contre la robe du réservoir). Dans ce cas, la foudre peut provoquer des incendies à la ligne de joint avec la robe. Les petits feux détectés dès leur naissance peuvent souvent être éteints par des extincteurs à poudre portatifs ou par de la mousse appliquée à l’aide d’une lance ou d’un extincteur à mousse.

Si le feu au niveau du joint ne peut être maîtrisé de cette façon ou s’il a pris de grandes proportions, de la mousse peut être appliquée sur le toit par des systèmes fixes ou semi-fixes, ou grâce à de gros canons de mousse. Toutefois, des précautions sont nécessaires lorsqu’on applique de la mousse sur un toit flottant; en effet, en cas de surcharge du toit, celui-ci peut s’incliner ou couler et une importante surface de produit se trouve exposée et participe à l’incendie. Des dispositifs de retenue de mousse sont prévus sur les réservoirs à toit flottant pour piéger la mousse dans la zone comprise entre le joint et la robe du bac. Lorsque la mousse se tasse, elle relargue de l’eau sous les retenues à mousse et cette eau doit être évacuée par le système de drainage du toit pour éviter la surcharge et l’affaissement du toit.

Selon les prescriptions en vigueur et la politique interne de l’entreprise, les réservoirs peuvent être équipés de systèmes à mousse fixes ou semi-fixes comprenant les conduites d’amenée aux réservoirs, les colonnes montantes et les chambres à mousse montées sur les réservoirs, les tubulures et les ajutages d’injection sous surface dans le fond du réservoir, et les tuyauteries de distribution et de retenue à mousse en partie haute. Avec les systèmes fixes, des solutions eau-mousse sont élaborées dans des centrales à mousse et pompées jusqu’aux réservoirs par un réseau de canalisations. Les systèmes semi-fixes comprennent en général des cuves, des générateurs et des pompes à mousse mobiles qui peuvent être amenés au pied du réservoir, branchés sur une borne d’eau et connectés aux canalisations de mousse du réservoir. Les solutions eau-mousse peuvent également être élaborées dans une centrale et distribuées sur l’ensemble du site par un réseau de canalisations et de prises incendie. En cas d’incendie, le système semi-fixe du réservoir est branché par un flexible sur la prise la plus proche.

Lorsque les réservoirs ne sont pas équipés de systèmes fixes ou semi-fixes, la mousse peut être envoyée en haut des réservoirs par des monitors, des lances flexibles ou des ajutages. La méthode d’application reste cependant secondaire: pour maîtriser un feu qui a entièrement pris sur un réservoir, il est avant tout important d’appliquer une quantité donnée de mousse au moyen de techniques spéciales, à une concentration et à un débit donnés, pendant un temps minimal qui est essentiellement fonction de la dimension du réservoir, du produit qu’il contient et de l’étendue du feu. S’il n’y a pas suffisamment de concentré de mousse disponible pour répondre aux critères d’application, il est peu probable que l’incendie puisse être maîtrisé ou éteint.

Seuls des sapeurs-pompiers formés et compétents devraient être autorisés à utiliser de l’eau contre les feux d’hydrocarbures liquides. Des éruptions instantanées ou des débordements peuvent en effet se produire quand de l’eau, envoyée directement sur les feux de réservoirs contenant du brut ou des sous-produits lourds, se transforme en vapeur. Comme l’eau est plus dense que la plupart des hydrocarbures, elle se dépose au fond du réservoir et, si elle est envoyée en trop grande quantité, elle le remplit et repousse le produit en feu vers le haut en le faisant déborder.

L’eau est utilisée en particulier pour éteindre les feux de flaques à l’extérieur des réservoirs, de manière que les vannes permettant de maîtriser l’écoulement du produit puissent être manœuvrées pour refroidir les parois des réservoirs en question, afin d’éviter les explosions dites BLEVE (Boiling Liquid Expanding Vapour Explosion) ou explosions dues à l’expansion des vapeurs d’un liquide en ébullition (voir plus loin «Les risques d’incendie liés aux gaz d’hydrocarbures liquéfiés»), et pour réduire l’effet du choc de la chaleur et des flammes sur les réservoirs et équipements voisins. En raison de la nécessité de disposer à la fois de moyens humains et matériels spécialisés, de nombreux terminaux et installations de stockage, au lieu d’autoriser les opérateurs à tenter de combattre les incendies, ont adopté la pratique consistant à dépoter autant de produit que possible hors du réservoir concerné, à protéger les structures adjacentes de la chaleur et des flammes et à laisser ce qui reste de produit brûler dans le réservoir, sous conditions contrôlées, jusqu’à épuisement du feu.

La sécurité et la santé au travail dans les terminaux et les installations de stockage en vrac

Le bon état des fondations, des supports et des conduites des bacs de stockage devrait être régulièrement contrôlé (corrosion, érosion, affaissement, autres dommages visibles) afin d’éviter toute perte ou dégradation des produits. Les soupapes de pression et de vide, les joints, les écrans de protection, les évents, les chambres à mousse, les purges d’eau de toit, les robinets de drainage d’eau et les dispositifs détecteurs de trop-plein devraient être inspectés, testés et entretenus à intervalles réguliers, en procédant notamment à l’élimination de la glace en hiver. Lorsque des pare-flammes sont installés sur les évents des réservoirs ou dans les conduites de récupération des vapeurs, il faudrait prendre soin de les inspecter, de les nettoyer régulièrement et de les dégivrer en hiver pour qu’ils fonctionnent bien. L’état opérationnel des vannes montées sur les sorties du réservoir et qui se ferment automatiquement en cas d’incendie ou de chute de pression devrait être vérifié.

La pente des cuvettes de rétention devrait éloigner des réservoirs, pompes et conduites les produits déversés accidentellement et les acheminer vers une zone sûre. Les murs des digues devraient être maintenus en bon état, avec les vannes de drainage gardées fermées sauf pour évacuer l’eau, et les cuvettes de rétention être recreusées si nécessaire pour conserver leur capacité nominale. Il conviendrait aussi que les escaliers, rampes d’accès, échelles, passerelles et garde-corps des rampes de chargement, digues et réservoirs soient également maintenus en bon état et exempts de givre, de neige et de corps gras. Toute fuite constatée sur les réservoirs et les conduites devrait être réparée sans délai. L’emploi de joints Victaulic ou similaires sur les conduites courant à l’intérieur des cuvettes de rétention qui pourraient être exposés à la chaleur est déconseillé, car ils risquent de s’ouvrir lors d’un incendie.

Des procédures et méthodes de travail sûres devraient être définies et appliquées, et il faudrait assurer une formation théorique et pratique aux personnels d’exploitation et d’entretien des terminaux, dépôts et installations de stockage en vrac, ainsi qu’aux chauffeurs de camions et au personnel des entreprises sous-traitantes pour qu’ils connaissent et observent les règles de sécurité. Celles-ci devraient inclure au minimum une information de base sur les feux d’hydrocarbures (causes, maîtrise, extinction); les risques d’exposition aux substances toxiques telles que le sulfure d’hydrogène, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dans le brut et les carburants résiduels, le benzène dans l’essence et les additifs comme le tétraéthylplomb et le méthyl-tert-buthyléther (MTBE); les interventions d’urgence; et, enfin, les risques physiques et climatiques liés aux activités considérées.

L’amiante et d’autres matériaux isolants peuvent entrer dans la protection des réservoirs et des conduites. Il faudrait par conséquent prendre et appliquer des mesures appropriées de sécurité et de protection individuelle pour la manipulation, l’enlèvement et la mise en décharge de ces matériaux.

La protection de l’environnement

Les exploitants et les travailleurs des terminaux devraient connaître et respecter les règlements officiels et les normes applicables à la protection des nappes phréatiques, des eaux de surface, du sol et de l’atmosphère contre la pollution par les liquides et les vapeurs d’hydrocarbures, ainsi qu’à la manutention et à la mise en décharge des déchets dangereux.

Le stockage et la manutention des gaz d’hydrocarbures liquéfiés

Les réservoirs de stockage en vrac

Les gaz d’hydrocarbures liquéfiés (GHL) sont stockés dans de gros réservoirs de vrac aux points de traitement (gisements de gaz et de pétrole, raffineries) et aux points de distribution aux consommateurs (terminaux et dépôts). Les deux méthodes les plus couramment employées pour le stockage en vrac des GHL sont:

Les réservoirs de stockage en vrac pour les gaz de pétrole liquéfiés (GPL) sont des réservoirs horizontaux cylindriques (40 à 200 m3) ou sphériques (jusqu’à 8 000 m3). Le stockage réfrigéré est la méthode normale pour les réservoirs de plus de 2 400 m3. La conception et la construction de ces deux types de réservoirs, qu’ils soient fabriqués en atelier, puis transportés sur le site, comme les premiers, ou construits sur place, comme les seconds, sont soumises à des spécifications rigoureuses.

La pression nominale des réservoirs de stockage ne devrait pas être inférieure à la pression de vapeur des GHL qui y seront contenus à la température de service maximale. Les réservoirs de mélanges propane-butane devraient être conçus pour une pression du propane de 100%. Il faudrait aussi prendre en compte les surpressions résultant de la pression hydrostatique du produit au remplissage maximal et la pression partielle des gaz non condensables dans l’espace de vapeurs. Dans l’idéal, les cuves de stockage des GHL devraient être conçues pour le vide total; dans le cas contraire, il faut prévoir des soupapes de dépression. Les caractéristiques de conception devraient également comprendre des dispositifs de décompression, des jauges de niveau de liquide, des capteurs de température et de pression, des vannes d’isolement internes, des clapets antirefoulement et des vannes de limitation de débit. Il peut aussi y avoir des vannes d’arrêt d’urgence à sûreté intégrée et des sorties de signaux haut niveau pour relayages, etc.

Les réservoirs horizontaux peuvent être installés en surface, surélevés sur butte ou enterrés, en général sous le vent par rapport à toute source d’inflammation existante ou potentielle. Dans le cas d’un réservoir horizontal, en cas de rupture d’un fond, le réservoir sera projeté dans le sens opposé. Il est donc prudent de monter les réservoirs de surface cylindriques parallèlement à toute structure importante en évitant d’orienter leur axe longitudinal vers celle-ci. Les autres facteurs comprennent l’espacement entre les réservoirs, leur emplacement et la prévention des incendies. Les règlements spécifient les distances horizontales minimales à respecter entre les cuves de stockage des GHL et les constructions, réservoirs ou structures avoisinants, ainsi que par rapport aux sources d’inflammation potentielles telles que torches, appareils de chauffage, lignes électriques, transformateurs, installations de chargement-déchargement, moteurs à combustion interne, turbines à gaz et processus industriels.

Le confinement et le drainage des déversements sont des facteurs importants dans la conception et l’exploitation des sites de stockage des GHL. Il faut en effet que les produits répandus soient dirigés vers un point où ils ne feront courir que peu de risques aux installations et zones voisines. Des systèmes de rétention et des digues peuvent être construits là où les déversements présentent un risque potentiel pour d’autres installations ou pour la population. Les réservoirs de stockage ne sont généralement pas entourés de digues, mais le sol est incliné de manière que les vapeurs et les liquides ne s’accumulent ni sous eux ni autour d’eux et que, en cas de flaque en feu, les flammes n’entrent pas en contact avec le réservoir.

Les bouteilles de gaz

Les GHL livrés aux consommateurs, sous forme de GPL ou de GNL, sont stockés en bouteilles à des températures supérieures à leur point d’ébullition à température et pression normales. Toutes les bouteilles de GPL et de GNL portent une collerette de protection, une soupape de sûreté et un chapeau de valve. Les principaux types de bouteilles sont:

Les propriétés des gaz d’hydrocarbures

Selon la NFPA, les gaz inflammables (combustibles) sont ceux qui brûlent aux concentrations normales d’oxygène dans l’air. Leur combustion est analogue à celle des vapeurs inflammables d’hydrocarbures liquides, car il faut une température d’inflammation déterminée pour amorcer la réaction de combustion et chaque gaz ne peut brûler que dans une certaine fourchette du mélange air-gaz. Les liquides inflammables ont un point d’éclair qui est la température (toujours inférieure au point d’ébullition) à laquelle ils émettent suffisamment de vapeurs pour la combustion. Il n’y a pas de point d’éclair apparent pour les gaz inflammables, étant donné qu’ils sont normalement à des températures supérieures à leur point d’ébullition, même lorsqu’ils sont liquéfiés, et se trouvent donc toujours à des températures nettement supérieures à leur point d’éclair.

La NFPA (1976) définit les gaz comprimés et les gaz liquéfiés comme suit:

Le principal facteur qui détermine la pression à l’intérieur du récipient est la température du liquide. Exposé à l’atmosphère, un gaz liquéfié se vaporise très rapidement en restant au niveau du sol ou des nappes d’eau, à moins d’être dispersé par le vent ou par une agitation mécanique de l’air. Aux températures atmosphériques normales, environ un tiers du liquide contenu se vaporise.

Les gaz inflammables sont en outre classés comme gaz combustibles ou gaz industriels. Les gaz combustibles, notamment le gaz naturel (méthane) et les GPL (propane et butane), sont brûlés en présence d’air pour la chauffe des fours, chaudières, etc. Les gaz industriels, comme l’acétylène, sont utilisés dans les processus industriels, le soudage, l’oxycoupage et les traitements thermiques. Les différences entre les propriétés de combustion du GNL et des GPL sont indiquées au tableau 102.11.

Tableau 102.11 Propriétés de combustion des GHL (valeurs indicatives)

Type de gaz

Plage d’inflammabilité (% de gaz dans l’air)

Pression de vapeur à 21 °C (bar)

Température normale d’ébullition initiale (°C)

Masse volumique (kg/l)

Pouvoir calorifique (MJ/m3)

Densité (air = 1)

GNL

4,5-14

0,10

– 162

0,42-0,48

39,1

9,2-10

GPL (propane)

2,1-9,6

9,10

– 46

0,51

93,1

1,52

GPL (butane)

1,9-8,5

1,17

– 9

0,58

119,2

2,0

Les risques présentés par les gaz de pétrole liquéfiés et le gaz naturel liquéfié

Tous les GHL présentent les risques habituels liés à l’inflammabilité, à la réactivité chimique, à la température et à la pression. Le plus grave d’entre eux est la libération accidentelle hors du récipient (bouteille ou réservoir) et le contact avec une source d’inflammation. Un échappement de gaz peut se produire par suite d’une rupture du récipient ou d’un robinet (du fait d’un surremplissage ou pour d’autres raisons) ou à la suite d’une décharge des surpressions produites par la dilatation du gaz sous l’effet de la chaleur.

Les GPL en phase liquide ont un coefficient de dilatation élevé, le propane liquide se dilatant seize fois plus et le butane liquide onze fois plus que l’eau pour la même hausse de température. Il faut tenir compte de cette propriété pour le remplissage des bouteilles, de manière à laisser un espace libre pour la phase vapeur. La quantité correcte est déterminée par un certain nombre de variables, dont la nature du gaz liquéfié, la température au moment du remplissage, les températures ambiantes prévues, la taille, le type (calorifugé ou non) et l’emplacement du récipient (aérien ou enterré). Des règlements définissent les quantités admissibles, dites «densités de remplissage», qui sont propres à chaque gaz ou famille de gaz. Elles peuvent être exprimées soit en poids, et l’on a alors une valeur absolue, soit en volume de liquide, auquel cas il faut apporter une correction pour tenir compte de la température.

La quantité maximale de remplissage de liquide dans les récipients de GPL sous pression est de 85% à 40 °C (moins à des températures plus élevées). Pour le GNL, du fait qu’il est stocké à basse température, les récipients peuvent être remplis de liquide à 90-95%. Tous les récipients sont équipés de soupapes de sûreté normalement tarées à des pressions correspondant à des températures du liquide supérieures à la pression normale. Comme ces soupapes ne peuvent pas abaisser la pression interne à la pression atmosphérique, le liquide conserve toujours une température supérieure à son point d’ébullition normal. A l’état pur, les gaz d’hydrocarbures comprimés et liquéfiés ne sont pas corrosifs pour les aciers et la plupart des alliages de cuivre. La corrosion est cependant à redouter s’ils renferment des composés de soufre ou des impuretés.

Les GPL sont une fois et demie à deux fois plus lourds que l’air lorsqu’ils sont libérés; dans l’atmosphère, ils se répandent rapidement à la surface du sol ou des eaux en stagnant aux points bas. Cependant, dès lors que les vapeurs sont diluées par l’air et forment un mélange inflammable, leur densité est pratiquement la même que celle de l’air et leur dispersion est différente. Le vent réduit sensiblement la distance de dispersion, et cela quelle que soit l’importance de la fuite. Les vapeurs de GNL réagissent différemment. Comme le gaz naturel a une faible densité de vapeur (0,6), il se mélange et se disperse rapidement dans des espaces ouverts, réduisant le risque de formation d’un mélange inflammable avec l’air. Dans les espaces clos, le gaz naturel s’accumule et forme des nuages de vapeurs inflammables.

Bien que les GHL soient incolores lorsqu’ils sont libérés dans l’air, leurs vapeurs sont observables du fait de la condensation et du givrage de la vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère au contact des vapeurs de gaz. Cela peut ne pas se produire si la température des vapeurs est proche de la température ambiante et si leur pression est relativement faible. Il existe des appareils capables de détecter une fuite de GHL et de transmettre une alarme pour des concentrations aussi basses que 15 à 20% de la limite inférieure d’inflammabilité (LII). Ces appareils peuvent également provoquer l’arrêt des opérations en cours et activer des systèmes de protection si les concentrations viennent à dépasser 40 à 50% de la LII. Certains sites industriels sont dotés d’une ventilation forcée permettant de maintenir les concentrations des mélanges air-gaz au-dessous de la LII. Les brûleurs d’appareils de chauffage et de fours peuvent également être équipés de dispositifs coupant immédiatement le débit de gaz en cas d’extinction de la flamme.

Les fuites de GHL hors de leurs réservoirs et récipients peuvent être réduites au minimum par l’emploi de limiteurs et de dispositifs de régulation. Lorsqu’ils sont détendus et libérés, les GHL s’échappent de leur récipient sous une pression négative et une basse température. La température d’autorefroidissement du gaz à basse pression devrait être prise en compte dans le choix des matériaux de construction des récipients et des vannes afin d’éviter la fragilisation et, partant, la rupture du métal du fait de son exposition aux basses températures.

Les GHL peuvent contenir de l’eau en phase liquide comme en phase gazeuse. La vapeur d’eau peut saturer le gaz dans une quantité, une température et une pression données. Si la température ou la pression changent, ou si la teneur en vapeur d’eau dépasse les limites d’évaporation, l’eau se condense, ce qui peut créer des bouchons de glace à l’intérieur des vannes et des régulateurs de débit et former des cristaux d’hydrates d’hydrocarbures dans les canalisations et autres appareils. On peut décomposer ces hydrates en chauffant le gaz, en abaissant sa pression ou en introduisant des produits comme le méthanol qui font baisser la pression de vapeur de l’eau.

Les gaz comprimés et les gaz liquéfiés ont des caractéristiques différentes qu’il convient de prendre en considération sous l’angle de la sécurité et de la santé. Certaines de ces caractéristiques sont illustrées au tableau 102.12.

Tableau 102.12 Comparaison des caractéristiques du gaz naturel comprimé
ou liquifiée

Type de gaz

Plage d’inflammabilité (% de gaz dans l’air)

Pouvoir calorifique (MJ/l)

Pression de stockage (bar)

Risques d’incendie

Risques pour la santé

Gaz naturel comprimé

5,0-15

5,51

En phase gazeuse
165,5-275,8

Gaz inflammable

Asphyxiant; surpression

Gaz naturel liquéfié

4,5-14

22,98

En phase liquide
2,8-9,7

Gaz inflammable: taux de détente 625:1; BLEVE

Asphyxiant; liquide cryogénique

Les risques des gaz d’hydrocarbures liquéfiés pour la santé

Le principal risque professionnel lié à la manipulation des GHL est la morsure par le froid de la peau et des yeux par contact avec le gaz liquide à l’occasion des échantillonnages, des mesurages, des remplissages, des réceptions, des livraisons et des autres activités liées à la manutention et au stockage. Par ailleurs, comme pour les autres gaz d’hydrocarbures, la combustion incomplète des GHL produit des quantités anormales de monoxyde de carbone.

A la pression atmosphérique et à faible concentration, les gaz d’hydrocarbures comprimés et liquéfiés ne sont normalement pas toxiques, mais ils sont asphyxiants, c’est-à-dire qu’ils chassent l’oxygène (l’air) s’ils sont libérés dans des espaces clos ou confinés. Ils peuvent être toxiques s’ils contiennent des composés soufrés, en particulier du sulfure d’hydrogène. Comme les GHL sont incolores et inodores, on ajoute aux gaz destinés à la consommation des agents odorants, comme les mercaptans, afin de permettre la détection des fuites. Des mesures de sécurité devraient être mises en application pour protéger les opérateurs contre les expositions aux mercaptans et autres additifs lors des opérations de stockage et d’injection. L’exposition aux vapeurs de GPL en concentrations égales ou supérieures à la LII peut provoquer une dépression générale du système nerveux central comparable à l’effet des gaz anesthésiants ou intoxicants.

Les risques d’incendie liés aux gaz d’hydrocarbures liquéfiés

La rupture d’un récipient de gaz liquéfiés (GNL ou GPL) est un danger plus grave que la rupture d’un récipient de gaz comprimés du fait de la plus grande quantité de gaz libérée. Chauffés, les gaz liquéfiés réagissent différemment que les gaz comprimés, car ce sont des produits diphasiques (liquide-vapeurs). A mesure que la température s’élève, la pression de vapeur du liquide augmente et entraîne une hausse de pression à l’intérieur du récipient. Il y a d’abord expansion de la phase vapeur, puis du liquide, qui comprime alors les vapeurs. On suppose donc que la pression nominale des cuves de GHL est proche de la pression du gaz à la température ambiante maximale.

Lorsqu’un récipient de gaz liquéfié est exposé au feu, la situation peut devenir sérieuse si le métal situé au niveau de l’espace de vapeur s’échauffe. Contrairement à la phase liquide, la phase vapeur absorbe peu de chaleur. De ce fait, le métal chauffe rapidement jusqu’à un point critique où se produit une explosion catastrophique instantanée du réservoir. C’est ce que l’on appelle les explosions BLEVE (explosions dues à l’expansion des vapeurs d’un liquide en ébullition). L’importance d’une explosion BLEVE dépend de la quantité de liquide qui se vaporise au moment de la rupture du réservoir, de la taille des éclats, de la distance à laquelle ils sont projetés et des zones qu’ils atteignent. On peut protéger les conteneurs de GPL non calorifugés contre les explosions BLEVE en les arrosant d’eau sur les parties en contact avec la phase vapeur (non celles en contact avec le gaz liquéfié).

Les autres risques plus courants associés aux gaz d’hydrocarbures comprimés et liquéfiés sont les décharges électrostatiques, les explosions par combustion, les fortes explosions à l’air libre et les petites fuites des récipients, des vannes, des conduites, des flexibles et des raccords, ou de celles qui peuvent se produire au droit des joints des pompes.

La maîtrise des sources d’inflammation dans les zones dangereuses est indispensable pour la sécurité de manutention des gaz d’hydrocarbures comprimés ou liquéfiés. On peut à cet effet établir un système d’autorisation et de réglementation des travaux à chaud, de l’usage du tabac, de l’utilisation de véhicules et autres moteurs à combustion interne, ainsi que de celle de flammes nues dans les zones où des gaz d’hydrocarbures comprimés et liquéfiés sont transportés, stockés ou manutentionnés. Les autres précautions comprennent l’emploi d’équipements électriques antidéflagrants et de systèmes de mise à la terre pour neutraliser et dissiper les charges d’électricité statique.

Le meilleur moyen de réduire les risques d’incendie dans le cas de fuites de gaz d’hydrocarbures comprimés ou liquéfiés est d’arrêter la fuite ou l’écoulement du produit lorsque c’est possible. Bien que la plupart des GHL se vaporisent au contact de l’air, les GPL à faible pression de vapeur, comme le butane, et même certains GPL à pression de vapeur plus élevée, comme le propane, forment des flaques si la température ambiante est assez basse. Ces flaques ne devraient pas être arrosées d’eau, car l’agitation ainsi créée augmenterait le taux de vaporisation. La vaporisation des flaques de produit répandu peut être prévenue par l’application de mousse, opération qui doit être conduite avec soin. L’eau, à la condition d’être appliquée correctement sur un robinet qui fuit ou une petite fissure, peut geler au contact du gaz liquéfié froid et colmater la fuite. Les feux de GHL exigent un contrôle du choc thermique sur les réservoirs et les récipients par arrosage d’eau froide. Bien que les feux de gaz d’hydrocarbures comprimés et liquéfiés puissent être éteints par pulvérisation d’eau et par des extincteurs à poudre, il est souvent plus prudent de les laisser brûler en les surveillant de façon qu’un nuage de vapeurs explosibles combustibles ne puisse se former et se réenflammer si le gaz continuait de s’échapper une fois l’incendie éteint.

L’ENTREPOSAGE

John Lund

L’entreposage est depuis longtemps une industrie mondiale; les magasins et les entrepôts sont intimement liés au commerce et au transport des marchandises par rail, par mer, par air ou par route. Les magasins de stockage peuvent être classés suivant le type de produits stockés: produits alimentaires conservés dans des locaux secs, chambres froides ou congélateurs-chambres; articles d’habillement et textiles; équipements et matériaux de construction; machines et pièces détachées. Aux Etats-Unis, en 1995, 1 877 000 personnes étaient employées dans le secteur du camionnage et de l’entreposage (Bureau of Labor Statistics (BLS), 1996); ce chiffre ne peut être décomposé en effectifs par types ou catégories de magasins. Les magasins vendent à des clients externes (détail) ou internes (gros). Les quantités déstockées peuvent être des charges complètes (palettes entières) ou fractionnées (un ou plusieurs colis prélevés d’une palette). Des moyens mécaniques (chariots élévateurs à fourche, convoyeurs, transtockeurs, etc.) peuvent être utilisés pour le transport de charges complètes ou fractionnées; des opérateurs peuvent aussi les transporter manuellement sans l’assistance d’engins spéciaux. Quels que soient la nature de l’entreprise, les produits stockés ou le mode de transport employé dans le magasin, ce schéma de base reste pratiquement inchangé, malgré les différences susceptibles d’exister probable-ment au niveau de l’ampleur des opérations, de la terminologie et des techniques mises en œuvre (pour des informations plus complètes sur les transtockeurs, voir Martin, 1987).

Les produits sont amenés par les transporteurs ou les fournisseurs à des quais de réception. On les référence alors dans un système de gestion de stock manuel ou informatisé, on leur affecte un rayonnage, casier ou alvéole (l’adresse de rangement), et on les transporte ensuite vers cet emplacement, habituellement par un moyen mécanique (convoyeur, transtockeur, chariot élévateur à fourche ou tracteur). Lorsque des palettes entières sont déstockées, on se sert d’un moyen mécanique, par exemple un chariot élévateur à fourche ou un tracteur conduit par un opérateur (voir figure 102.17). Dans le cas d’une charge fractionnée (un ou plusieurs colis pris d’un rayonnage ou d’une alvéole), la manutention est manuelle et est assurée par un préparateur de commandes, qui prélève les articles et les place sur un transpalette, un chariot ou un convoyeur. La commande d’un client donné est assemblée sur une palette ou dans un autre type d’emballage en vue de son expédition, avec apposition d’une étiquette ou d’un autre marquage contenant la facture et les instructions d’expédition. Cette tâche peut être effectuée par un préparateur de commandes ou un cariste, ou encore, lorsqu’un convoyeur est utilisé pour amener les colis sur une aire de groupage des commandes, par un préposé ou «assembleur». Quand la commande est prête pour l’expédition, elle est chargée par un moyen mécanique sur un camion, une remorque, un wagon ou un navire (voir figure 102.18).

Figure 102.17 Chariot élévateur à fourche chargeant des pommes au Royaume-Uni

Figure 102.17

Figure 102.18 Docker utilisant un appareil de levage pour manutentionner des
quartiers de bœuf au Royaume-Uni

Figure 102.18

Près de 60% des activités ont directement trait aux déplacements dans le magasin; le reste se rapporte aux manutentions manuelles. En dehors du travail important réalisé par les employés administratifs, les contrôleurs de mouvements, les agents de nettoyage et les personnels d’encadrement et de direction, la plus grande part des activités de transport et de manutention des produits est assurée essentiellement par deux catégories d’opérateurs: les caristes et les préparateurs de commandes.

L’intense concurrence mondiale et l’arrivée rapide de nouvelles firmes ont suscité la volonté d’améliorer l’efficacité de la main-d’œuvre et des espaces de stockage, qui à son tour a donné naissance à une nouvelle discipline appelée systèmes de gestion d’entrepôt (Warehouse Management systems (WMS)) (Register, 1994). Ces systèmes sont de moins en moins chers et de plus en plus performants; ils font appel à des réseaux d’ordinateurs, des codes-barres, des logiciels et des communications radio, permettant ainsi une gestion et un contrôle beaucoup plus rigoureux des stocks et des opérations des magasins de stockage; ceux-ci sont dès lors en mesure de réduire leurs délais et d’accroître leur réactivité, parallèlement à une amélioration spectaculaire de la précision des inventaires et à une réduction notable des coûts (Firth, 1995).

Essentiellement, les systèmes de gestion d’entrepôt informatisent la tenue des stocks et la gestion de la préparation des commandes. Lorsqu’un produit est reçu d’un fournisseur ou d’un transporteur au quai de chargement, des lecteurs de codes-barres enregistrent son code et sa désignation, mettant instantanément à jour la base de données du stock; dans le même temps, le produit se voit affecter une adresse dans le magasin. Grâce aux systèmes de communication radio embarqués, un cariste est averti et se charge d’enlever le produit.

Les commandes des clients sont reçues par un autre programme informatique qui consulte dans la base de données l’adresse et la disponibilité du produit pour chaque article requis, puis trie la commande en fonction des trajets les plus efficaces, afin de limiter au minimum les déplacements. Des étiquettes portant le nom, le code et l’emplacement du produit sont imprimées et remises aux préparateurs qui traitent alors la commande. S’il est clair que ces fonctionnalités de l’informatique permettent d’améliorer le service au client et l’efficacité, elles sont aussi largement à la base de l’établissement de normes scientifiques de rendement (Engineered Work Standards (EWS)), qui peuvent entraîner des risques supplémentaires de sécurité et de santé pour les caristes et les préparateurs de commandes.

Les informations relatives à chaque commande (nombre de colis, distances de déplacement, etc.), générées par le programme de préparation des commandes, peuvent être combinées à des temps types ou alloués pour chaque activité afin de calculer un temps standard global pour la préparation d’une commande donnée. Il serait extrêmement long et difficile d’extraire ces informations sans outil informatique. La surveillance par ordinateur peut être utilisée pour enregistrer le temps passé sur chaque commande, comparer le temps effectif au temps alloué, puis calculer un indice d’efficacité que tout superviseur ou membre de la direction peut consulter en pianotant simplement sur un clavier d’ordinateur.

Les normes scientifiques de rendement pour les magasins de stockage se sont diffusées des Etats-Unis vers l’Australie, le Canada, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Autriche, la Finlande, la Suède, l’Italie, l’Afrique du Sud, les Pays-Bas et la Belgique. Bien que ces normes n’ajoutent pas nécessairement par elles-mêmes des risques de sécurité et de santé, de nombreux indices permettent de penser que la charge de travail élevée, le manque de contrôle sur le rythme de travail et la fréquence accrue des opérations de levage contribuent sensiblement aux risques d’accidents. En outre, la pression imposée par ces normes peut forcer les opérateurs à faire des manœuvres risquées et à ne pas appliquer les méthodes de sécurité appropriées. Ces risques et dangers sont exposés ci-après.

Les risques

Tout magasin de stockage, quels que soient son niveau technologique ou son degré d’informatisation, comporte une myriade de risques de sécurité et de santé pour le personnel. Les systèmes de gestion d’entrepôt peuvent être liés à différentes catégories de risques.

Les risques de base pour la santé sont en premier lieu ceux que posent les matériaux potentiellement toxiques se trouvant dans le magasin, par exemple les produits pétroliers, les solvants, les colorants, etc. Ces substances nécessitent un étiquetage correct, une bonne formation et une sensibilisation des travailleurs, ainsi qu’une information efficace sur les risques professionnels, comprenant notamment les fiches de données de sécurité (FDS), s’adressant à tous les employés concernés, qui connaissent souvent mal les effets pathologiques des produits qu’ils manutentionnent et encore plus mal les méthodes de manutention appropriées et les procédures à suivre pour le nettoyage et en cas de déversement (voir, par exemple, la convention (no 170) et la recommandation (no 177) sur les produits chimiques, 1990, de l’Organisation internationale du Travail (OIT)). Il faut citer ensuite le bruit produit par les chariots à moteur à essence ou à gaz, les convoyeurs, les systèmes de ventilation et les équipements pneumatiques. En outre, les opérateurs de ces équipements peuvent être soumis à des vibrations transmises à l’ensemble du corps (voir, par exemple, la convention (no 148) et la recommandation (no 156) sur le milieu de travail (pollution de l’air, bruit et vibrations), 1977, de l’OIT).

Les caristes et les préparateurs de commandes sont exposés aux gaz d’échappement des véhicules diesel ou à essence accostés aux quais de chargement-déchargement lorsqu’ils remettent ou prennent des marchandises et, à l’intérieur du magasin, aux gaz d’échappement des chariots à moteur. L’éclairage peut ne pas être suffisant pour la bonne exécution des opérations (conduite des chariots et autres véhicules, identification des articles à prélever). Les opérateurs travaillant en chambre froide (chambres frigorifiques ou pour produits congelés) peuvent souffrir d’hypothermie du fait de l’exposition aux basses températures et aux systèmes de recirculation de l’air. Les chambres froides sont souvent à des températures proches de – 20 °C, même lorsque le facteur mouvement de l’air est négligé. En outre, comme peu de magasins de stockage sont climatisés durant les mois d’été, les opérateurs, en particulier ceux qui assurent des manutentions manuelles, peuvent être exposés à une forte contrainte thermique.

Les risques matériels sont eux aussi nombreux et divers. En dehors des risques les plus évidents découlant de la circulation simultanée de piétons et de véhicules, nombre d’accidents de personnes dans les magasins proviennent de glissades, de faux pas et de chutes sur des sols rendus glissants soit par la présence de givre, d’eau ou de flaques de produits répandus, soit du fait qu’ils sont mal entretenus; beaucoup d’accidents concernent des caristes qui glissent ou tombent en montant ou en descendant de leur engin. Les opérateurs sont souvent exposés à des chutes d’objets depuis des rayonnages en hauteur. Ils risquent également d’être pris dans les mâts, fourches et charges des chariots et être alors victimes d’accidents graves. La manipulation des palettes en bois peut également provoquer des blessures par des échardes. L’emploi de couteaux pour couper les emballages provoque souvent des lacérations. Les opérateurs qui enlèvent ou placent des objets sur des convoyeurs peuvent se trouver pris dans les mécanismes. Les préparateurs de commandes, assembleurs et autres opérateurs sont exposés à des degrés divers au risque de lombalgies et autres lésions apparentées. Les réglementations relatives aux poids à soulever et les méthodes préconisées pour la manipulation des charges sont traitées dans d’autres chapitres de l’Encyclopédie.

Aux Etats-Unis, par exemple dans le secteur de l’entreposage, le nombre des accidents corporels à déclaration obligatoire et celui des journées de travail perdues sont beaucoup plus élevés que pour le reste de l’industrie.

On ne dispose pas de données sur les lésions corporelles (en particulier les lombalgies) chez les préparateurs de commandes de produits alimentaires — le groupe le plus exposé aux lésions liées au soulèvement de charges —, ni à l’échelon national, ni à l’échelon international. L’Institut national de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Safety and Health (NIOSH)), aux Etats-Unis, a mené des études sur les pathologies liées au soulèvement de charges et les autres lésions connexes dans deux entrepôts de produits alimentaires (voir encadré). Il a conclu que «tous les préparateurs de commandes présentent un risque élevé de troubles musculo-squelettiques, notamment de lombalgies, en raison de la combinaison de facteurs de travail contribuant tous à la fatigue, d’une charge métabolique élevée et du fait qu’ils ne sont pas en mesure d’adapter leur rythme de travail à cause des exigences de leurs tâches» (NIOSH, 1995).

Etudes de l’Institut national de la sécurité et de la santé au travail (National
Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH)), aux Etats-Unis, sur les
lésions corporelles chez les préparateurs de commandes dans les entrepôts de
produits alimentaires

Le NIOSH a étudié les lésions liées au levage et d’autres lésions connexes dans deux entrepôts de produits alimentaires (ci-après «entrepôt A» et «entrepôt B» (NIOSH, 1993a; NIOSH, 1995). Le travail dans ces deux entrepôts est régi par des normes techniques qui servent à mesurer la performance des préparateurs de commandes; ceux qui n’atteignent pas la norme sont sanctionnés. Les données du tableau 102.13 sont exprimées en pourcentages et se réfèrent soit à l’ensemble des lésions, soit uniquement aux lombalgies déclarées au cours des années 1987 à 1992.

Tableau 102.13 Lésions du dos et ensemble des lésions et des maladies d'origine
professionnelle déclarés par les préparateurs de commandes dans deux entrepôts
de produits alimentaires ayant fait l'objet d'une étude du NIOSH, 1987-1992

Année

Entrepôt A: toutes affections confondues (%)

Entrepôt B: toutes affections confondues (%)

Entrepôt A: lombalgies uniquement (%)

Entrepôt B: lombalgies uniquement (%)

1987

79

nd

28

nd

1988

88

nd.

31

nd

1989

87

62

39

21

1990

81

62

31

31

1991

52

83

28

29

1992

nd

86

nd

17

Note: nd = non disponible.

Sources: National Institute for Safety and Health (NIOSH), 1993a, 1995.

Au risque de généraliser ces données au-delà de leur contexte, les chiffres des lésions et des maladies à déclaration obligatoire relevés pour ces établissements, quel que soit le mode de calcul, sont très importants et nettement plus élevés que pour l’ensemble du secteur industriel considéré, toutes catégories professionnelles confondues. Si le total des lésions est en légère baisse dans l’entrepôt A, il augmente dans l’entrepôt B. Toutefois, le nombre des lombalgies dans l’entrepôt B, à l’exception de l’année 1992, est à la fois très stable et très élevé. D’une manière générale, ces données indiquent que les préparateurs de commandes ont pratiquement trois chances sur dix, dans une année donnée, de souffrir d’une lombalgie imposant un traitement médical ou un arrêt de travail.

L’Association américaine des entrepôts de produits alimentaires (National Association of Grocery Warehouses of America (NAGWA)) a signalé que les lumbagos et les entorses représentaient 30% de toutes les lésions enregistrées dans les entrepôts de produits alimentaires et qu’un tiers de l’ensemble des opérateurs de ces établissements (et non pas seulement les préparateurs de commandes) s’inflige une blessure à déclaration obligatoire par an; ces chiffres concordent avec les études du NIOSH. En outre, la NAGWA estime le coût de ces lésions (essentiellement en indemnisations) à 0,61 dollar par heure pour la période 1990-1992 (près de 1 270 dollars par travailleur et par an). Elle a également établi que le levage manuel était la cause principale des lombalgies dans 54% des cas étudiés.

En plus de cette analyse des statistiques des traumatismes et des maladies, les enquêteurs du NIOSH ont demandé à tous les préparateurs de commandes de ces entrepôts de remplir un questionnaire. Dans l’entrepôt A, sur les 38 préparateurs à temps plein, 50% ont signalé au moins un traumatisme et 18% au moins une lombalgie au cours des douze mois précédents. Pour l’entrepôt B, 63% des 19 préparateurs à temps plein ont déclaré avoir été victimes d’au moins un accident à déclaration obligatoire au cours des douze mois précédents et 47% d’au moins une lombalgie. Parmi les préparateurs à temps plein de l’entrepôt A, 70% ont signalé des douleurs lombaires importantes dans l’année précédente, de même que 47% des préparateurs à temps plein de l’entrepôt B. Ces chiffres, issus des questionnaires, correspondent étroitement aux données des études sur les lésions et les maladies.

Outre l’étude des données sur les lésions du dos, le NIOSH a appliqué son équation modifiée du levage à un échantillon de tâches de levage manuel des préparateurs de commandes et a constaté que toutes les tâches incluses dans l’échantillon dépassaient très sensiblement la limite de poids recommandée, ce qui indique que les tâches étudiées étaient hautement contraignantes du point de vue ergonomique. En outre, les efforts de compression ont été estimés sur le disque intervertébral L5/S1; tous dépassaient la limite biomécanique recommandée de 3,4 kN (kilonewtons) considérée comme étant le seuil supérieur pour la protection de la plupart des opérateurs contre le risque de traumatismes de la région lombaire.

Enfin, le NIOSH, en appliquant les méthodes de la dépense énergétique et de la consommation d’oxygène, a calculé la demande énergétique des préparateurs de commandes de produits alimentaires dans les deux entrepôts. Il a constaté que la demande moyenne dépassait le critère établi de 5 kcal/min (4 METS) pour une journée de travail de huit heures, qui est considéré comme un travail de modéré à dur pour une majorité de préparateurs en bonne santé. Dans l’entrepôt A, la dépense énergétique allait de 5,4 à 8,0 kcal/min, et le rythme cardiaque de travail de 104 à 131 pulsations par minute. Dans l’entrepôt B, ces chiffres étaient respectivement 2,6 à 6,3 kcal/min, et 138 à 146 pulsations par minute. La demande énergétique des préparateurs du fait de levages continus à raison de 4,1 à 4,9 par minute entraîne probablement une fatigue musculaire, spécialement dans les postes de dix heures ou plus. Ces éléments illustrent clairement le coût physiologique du travail dans les deux entrepôts étudiés. En résumant ses observations, le NIOSH conclut à propos des risques encourus par les préparateurs de commandes dans les entrepôts de produits alimentaires:

En résumé, tous les préparateurs de commandes présentent un risque élevé de troubles musculo-squelettiques, notamment de lombalgies, en raison de la combinaison de facteurs contribuant tous à la fatigue, d’une charge métabolique élevée et de leur incapacité de réguler leur rythme de travail du fait des exigences de leur tâche. Suivant les critères reconnus définissant la capacité des opérateurs et le risque connexe de douleurs lombaires, l’emploi de préparateurs dans cet établissement fait encourir, même à des travailleurs sérieusement sélectionnés, un risque substantiel de développer des lésions de la région lombaire. En outre, d’une manière générale, on peut penser que les normes de rendement existantes encouragent ces niveaux d’effort excessifs (NIOSH, 1995).

Une application générale de l’ergonomie aux magasins de stockage ne devrait pas se limiter au soulèvement des charges et à la préparation des commandes. Il faut adopter une perspective plus large et faire une analyse détaillée des charges, avec des mesurages et des évaluations minutieuses (une partie de l’analyse des tâches doit commencer par l’analyse des conditions de sécurité au poste de travail décrites ci-après). Il faut envisager de façon plus globale la conception des casiers et des rayonnages et établir une collaboration plus étroite avec les constructeurs d’engins pour que les chariots élévateurs à fourche soient conçus d’origine, ou rééquipés, avec des postes de conduite permettant de réduire les facteurs de risques ergonomiques (distances d’atteinte des commandes, flexion et extension des jambes, rotation des bras, positions malcommodes du cou et du corps). Les fournisseurs de matériels devraient proposer des récipients moins lourds et moins encombrants, munis de poignées et de dispositifs de saisie afin de diminuer les risques liés au levage des charges.

Les actions correctives

Les risques de santé de base

Les employeurs, les travailleurs et les syndicats devraient collaborer pour élaborer et appliquer un programme efficace d’information sur les risques professionnels, en mettant l’accent sur les trois principes fondamentaux ci-après:

  1. un étiquetage approprié de toutes les substances toxiques;
  2. la mise à disposition de FDS donnant pour chaque substance des informations détaillées sur les risques pour la santé, les risques d’incendie, la réactivité, les équipements de protection individuelle, les premiers secours, le nettoyage en cas de déversement accidentel et les autres procédures d’urgence;
  3. une formation régulière et appropriée des opérateurs aux techniques correctes de manutention.

Parmi les infractions relevées par l’Administration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), aux Etats-Unis, dans le secteur de l’entreposage, l’absence d’un programme d’information efficace sur les risques professionnels est l’une des plus courantes.

Le bruit et les vibrations des équipements mécaniques, convoyeurs automatiques et autres sources nécessitent des contrôles fréquents des niveaux de bruit et de vibrations et une formation des opérateurs, ainsi que des mesures de prévention technique en cas de besoin. Ces mesures sont d’autant plus efficaces qu’elles sont appliquées à la source du bruit sous forme d’isolation phonique, de silencieux et d’autres solutions (comme les caristes sont en général assis au-dessus du moteur, l’amortissement du bruit et des vibrations en cet emplacement est généralement très efficace). L’éclairage devrait être vérifié fréquemment et maintenu à des niveaux suffisants pour réduire les collisions véhicules-piétons et permettre une lecture aisée de l’identification des produits et d’autres informations. Des programmes de prévention du stress thermique (chaleur ou froid) devraient être mis en application dans les établissements situés dans les climats chauds et humides et pour les préparateurs de commandes et les caristes travaillant en chambre froide, afin de s’assurer que les pauses, boissons, formation et informations nécessaires leur sont fournies et que les mesures préventives nécessaires sont mises en œuvre. Enfin, lorsque des carburants diesel ou à base de pétrole sont utilisés, les systèmes d’échappement devraient être périodiquement contrôlés pour vérifier que les émissions de monoxyde de carbone et d’oxydes d’azote n’excèdent pas les limites admissibles. Le bon entretien des véhicules et la limitation de leur emploi en zones convenablement ventilées contribueront également à réduire le risque de surexposition à ces émissions.

Les risques pour les caristes et les opérateurs de véhicules

Les collisions véhicules-piétons sont un risque permanent dans les magasins de stockage. Les allées réservées aux piétons devraient être clairement marquées et respectées. Tous les conducteurs devraient être formés à la sécurité de conduite de leur véhicule, comprenant les règles de circulation et les limitations de vitesse; un recyclage périodique devrait être prévu. Des miroirs devraient être placés aux carrefours fréquentés ou dans les angles morts pour permettre aux conducteurs de voir l’arrivée d’autres véhicules ou de piétons avant de s’engager; l’avertisseur sonore devrait être systématiquement utilisé. L’emploi de signaux de recul, sonores ou autres, peut aussi être envisagé. Les ponts de liaison des quais de chargement-déchargement des camions, des wagons ou des barges devraient pouvoir supporter leurs charges et être solidement fixés.

Le tableau 102.14 présente une analyse de sécurité des tâches pour les caristes, ainsi que des recommandations.

Tableau 102.14 Analyse de sécurité d'un poste: cariste

Eléments du poste ou tâches

Risques présents

Mesures de protection recommandées

Montée/descente du chariot élévateur à fourche

Glissades/trébuchements sur le sol (graisse, eau, carton) lors des montées/descentes; douleurs au dos ou à l’épaule suite aux montées/descentes répétées dans de mauvaises postures et chocs de la tête contre la structure de protection

Entretenir et nettoyer correctement les sols, en particulier dans les zones à forte circulation; faire attention lors des montées/descentes; utiliser la méthode trois points pour accéder et sortir de la cabine de conduite; faire attention à ne pas se cogner la tête contre le toit de protection: saisir les montants du toit de protection avec les deux mains, placer le pied gauche sur le marchepied (s’il existe) puis, en poussant du pied droit, se hisser dans la cabine

Conduite à vide et en charge

Piétons et autres véhicules pouvant traverser soudainement; éclairage insuffisant; risques provenant du bruit et des vibrations; rotation et torsion du cou dans des postures contraignantes; conduite pouvant nécessiter des mouvements de torsion des poignets, de rotation des bras ou des efforts excessifs; pédales de frein et d’accélérateur nécessitant souvent des positions anormales du pied et de la jambe en postures statiques

Ralentir dans les zones à forte circulation; s’arrêter et donner un coup d’avertisseur à tous les croisements de travées; contourner les piétons avec précaution; respecter les limitations de vitesse; veiller au bon éclairage et procéder à des vérifications périodiques de l’éclairement; installer et maintenir en bon état des protections antivibrations et antibruit sur tous les véhicules et équipements; procéder à des contrôles réguliers des niveaux de bruit; les opérateurs doivent pivoter le torse à hauteur de la taille, non du cou, en particulier pour regarder derrière les rétroviseurs installés sur le chariot et observer les alentours; installer (en première monte ou en rééquipement) et maintenir en bon état une direction assistée et un volant réglable en inclinaison et en hauteur qui soit bien adapté au cariste et qui lui permette de maîtriser les retours brusques du volant; prévoir des pauses fréquentes pour récupérer de la fatigue des postures statiques; envisager de modifier les pédales pour diminuer l’angle du pied (extension) et pour que la pédale d’accélérateur soit articulée au plancher

Levage ou abaissement des fourches à vide et en charge

Extension et torsion du cou pour bien voir la charge; atteinte des commandes manuelles pouvant nécessiter des mouvements exagérés d’extension ou de rotation des bras

Pivoter ou pencher le torse, non le cou; choisir un chariot offrant une bonne visibilité à travers le mât et ayant des commandes placées à bonne distance (sur le côté, non pas sur le tableau de bord à côté du volant) sans être toutefois trop proches ou trop élevées ni nécessiter des mouvements de rotation des bras; envisager d’adapter le matériel avec l’autorisation du constructeur

Remplissage du réservoir ou remplacement des batteries

Le remplissage du réservoir de carburant, le remplacement de la bouteille de GPL ou des batteries peuvent demander des efforts de levage excessifs dans des positions inconfortables

Assurer les levages par au moins deux personnes ou à l’aide d’un palan; envisager de modifier le chariot pour aménager un emplacement plus accessible du réservoir

L’application de solutions ergonomiques efficaces nécessite une coordination plus étroite avec les constructeurs de chariots élévateurs à fourche et de véhicules; il ne suffit pas de s’en remettre à la seule formation des opérateurs et aux règles de circulation. En outre, les organismes de prévention ont établi des normes obligatoires pour la conception et l’utilisation des chariots élévateurs à fourche, par exemple avec l’obligation de toits ou de cadres de protection contre la chute d’objets (voir figure 102.19).

Figure 102.19 Chariot élévateur à fourche équipé d'un toit de protection

Figure 102.19

Les risques de sécurité pour les préparateurs de commandes

Le tableau 102.15 présente une analyse de sécurité des tâches énumérant la plupart des mesures correctives à prendre pour réduire les risques d’accidents et ceux liés au levage encourus par les préparateurs de commandes. Cependant, de même qu’une meilleure conception des chariots élévateurs à fourche en vue de réduire les facteurs de risque ergonomiques nécessite une collaboration plus étroite avec les constructeurs, la réduction des risques d’accidents associés au levage exige, pour les préparateurs, une collaboration similaire avec les concepteurs des systèmes de rayonnages, les bureaux d’études qui conçoivent et installent les systèmes informatiques de gestion de magasin et les normes scientifiques, ainsi qu’avec les fournisseurs qui stockent leurs produits dans le magasin. Ceux-ci pourraient être invités à proposer des produits moins encombrants et moins lourds, munis le cas échéant de poignées ou de dispositifs de saisie mieux étudiés. Les constructeurs de rayonnages pourraient être utilement mis à contribution pour la conception et l’adaptation de systèmes permettant aux préparateurs de commandes de prélever les articles tout en restant debout.

Tableau 102.15 Analyse de sécurité de poste: préparateur de commandes

Eléments de travail ou tâches

Risques présents

Mesures de protection recommandées

Monter/descendre du transpalette

Glissades/trébuchements sur le sol (graisse, eau, carton) lors des montées/descentes

Entretenir et nettoyer correctement les sols, en particulier dans les zones à forte circulation; faire attention lors des montées/descentes

Se déplacer dans les allées

Piétons et autres véhicules pouvant traverser soudainement; éclairage; bruit

Ralentir dans les zones à forte circulation; s’arrêter et donner un coup d’avertisseur à tous les croisements de travées; contourner les piétons avec précaution; respecter les limitations de vitesse; veiller au bon éclairage et procéder à des vérifications périodiques de l’éclairement; installer et maintenir en bon état des protections antivibrations et antibruit sur tous les véhicules et équipements; procéder à des contrôles réguliers des niveaux sonores

Prélever l’article dans le casier, le porter jusqu’à la palette, le placer sur la palette

Lésions dues au levage de charges, douleurs aux épaules, au dos et au cou; chocs de la tête contre les rayonnages; stress thermique; contrainte froide dans les congélateurs-chambres ou les chambres froides

Travailler en collaboration avec les fournisseurs pour réduire au minimum le poids des emballages et installer des poignées ou autres moyens de saisie sur les articles encombrants ou lourds; stocker les articles lourds à la hauteur des genoux (au moins); ne pas stocker les articles nécessitant des efforts importants plus haut que les épaules ou prévoir des escabeaux, emmarchements ou plates-formes avec utilisation de palettes afin que le préparateur des commandes n’ait pas à étendre le corps par-dessus des colis déjà posés sur la palette pour placer un article prélevé; modifier les chariots ou les transpalettes pour qu’ils montent plus haut afin que le préparateur n’ait pas à se pencher pour placer les articles sur le chariot ou le transpalette; limiter le volume
des palettes pour éviter les mouvements «bras en l’air»; prévoir une surveillance régulière des contraintes thermiques; mettre à disposition des boissons en quantité suffisante; prévoir des programmes de formation; fournir les vêtements adaptés et ménager des pauses fréquentes

Séparer les palettes en vue de leur suremballage, les marquer ou les transporter au quai de chargement

Glissades/trébuchements sur le sol (graisse, eau, carton) lors des montées/descentes

Entretenir et nettoyer correctement les sols, en particulier dans les zones à forte circulation; faire attention lors des montées/descentes

Les bureaux d’études qui conçoivent et installent les systèmes informatiques de gestion de magasin et les normes scientifiques devraient être mieux informés des risques pour la sécurité et la santé que l’intensification du travail fait peser sur les manutentions manuelles. Le NIOSH (1993a, 1995) a recommandé le recours à des méthodes plus objectives de détermination des majorations pour fatigue (telles que des mesures de la consommation d’oxygène ou du rythme cardiaque). Il a également préconisé que la hauteur des palettes chargées soit limitée à 1,50 m, et qu’on ménage une pause après qu’une palette a été assemblée par le préparateur de commandes afin d’augmenter la fréquence des périodes de récupération entre les commandes. En plus des pauses plus fréquentes, le NIOSH a préconisé de limiter les heures supplémentaires demandées aux travailleurs sur la base des normes scientifiques, d’envisager une rotation appropriée des effectifs et de prévoir un allégement des tâches pour les préparateurs de commandes qui reviennent de convalescence ou de congé.

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