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Chapitre 73 - La sidérurgie

L’INDUSTRIE DU FER ET DE L’ACIER

John Masaitis

Le fer est très largement répandu dans l’écorce terrestre, où il se présente sous forme de minerais divers (oxydes, hydroxydes, carbonates, sulfures, silicates et autres). Depuis la préhistoire, l’être humain a appris à préparer ces minerais par lavage, concassage, criblage, élimination de la gangue, et à les traiter par réduction (fusion), agglomération sur grille ou en boulettes pour pouvoir les fondre de façon à obtenir du fer et de l’acier. A l’époque historique, une industrie florissante du fer s’est développée dans de nombreux pays à partir des gisements locaux de minerai et de la proximité de forêts qui fournissaient le combustible sous forme de charbon de bois. Au début du XVIIIe siècle, la découverte de la possibilité de remplacer le charbon de bois par le coke a révolutionné la sidérurgie, dont l’essor allait être le point de départ de tous les autres progrès de la révolution industrielle. Les grands bénéficiaires furent les pays dont les gisements de charbon et de fer étaient proches les uns des autres.

La fabrication de l’acier ne s’est véritablement développée qu’au XIXe siècle, avec l’invention des procédés de fusion: la cornue Bessemer (1855), le four à sole généralement chauffé au gaz de gazogène (1864) et le four à arc (1900). Depuis le milieu du XXe siècle, l’affinage à l’oxygène, surtout le procédé LD (Linz-Donawitz) à lance, a permis l’élaboration d’aciers de haute qualité à des coûts de production relativement faibles.

Aujourd’hui la production d’acier est un indice de la richesse nationale et elle est à la base de la production de masse dans de nombreux secteurs industriels tels que la construction navale, l’automobile, le bâtiment et les travaux publics, la construction mécanique, l’outillage et les équipements industriels et ménagers. Le développement des transports, en particulier par mer, ayant rendu le commerce international des matières premières (minerai de fer, charbon, fioul, ferrailles et additifs) économiquement rentable, il a contribué à battre en brèche la position privilégiée des pays possédant des gisements de minerai de fer à proximité de mines de charbon. On a donc vu apparaître, dans des régions côtières des grands pays industriels, des usines sidérurgiques et des aciéries importantes approvisionnées par des pays exportateurs qui sont en mesure de satisfaire la demande en matières premières de haute qualité.

Au cours des dernières décennies, on a assisté à la mise au point des procédés dits de réduction directe dans lesquels les minerais de fer, en particulier les minerais riches ou enrichis, sont réduits en éponges de fer par extraction de l’oxygène qu’ils contiennent, ce qui permet d’obtenir un matériau ferreux qui remplace la ferraille. Ces procédés connaissent un succès grandissant.

La production de fer et d’acier

En 1995, la production mondiale de fonte brute était de 578 millions de tonnes (voir figure 73.1), et celle d’acier brut de 828 millions de tonnes (voir figure 73.2).

Figure 73.1 Production mondiale de fonte brute en 1995, par région

Figure 73.1

Figure 73.2 Production mondiale d'acier brut en 1995, par région

Figure 73.2

L’industrie de l’acier traverse une ère de révolution technologique, et l’on observe une tendance à l’accroissement des capacités de production par la construction de nouvelles installations sous forme de petites usines à fours à arc utilisant des ferrailles d’acier (voir figure 73.3). Bien que des usines intégrées fabriquant l’acier à partir du minerai atteignent des rendements records, les aciéries à four à arc, avec des capacités de production de l’ordre de moins de 1 million de tonnes par an, se banalisent dans les principaux pays producteurs d’acier du monde.

Figure 73.3 Chargement de ferraille dans un four à arc

Figure 73.3

La fabrication du fer

Le processus général de la fabrication du fer et de l’acier est représenté à la figure 73.4.

Figure 73.4 Schéma de fabrication du fer et de l'acier

Figure 73.4

La fabrication du fer s’organise essentiellement autour du haut-fourneau à l’intérieur duquel s’opère la fusion (réduction) du minerai pour produire de la fonte. Le haut-fourneau est chargé par le gueulard en minerai, en coke et en castine, tandis que de l’air chaud, souvent enrichi en oxygène, est injecté par le bas. Le monoxyde de carbone produit grâce à la combustion du coke transforme le minerai en fonte, la castine jouant le rôle de fondant. A la température de 1 600 °C (voir figure 73.5), la fonte se fluidifie et s’accumule à la partie inférieure du haut-fourneau, tandis que la castine se combine à la gangue pour former le laitier. La fonte est soutirée périodiquement du haut-fourneau pour être coulée sous forme de gueuses qui seront transformées ultérieurement (par exemple, dans des fonderies) ou déversée dans des poches qui permettent son transfert, à l’état liquide, jusqu’à l’aciérie.

Figure 73.5 Mesure de la température du métal en fusion dans un haut-fourneau

Figure 73.5

Certaines grandes usines disposent de fours à coke sur le même site. Avant d’être chargés dans le haut-fourneau, les minerais sont généralement soumis à des opérations spéciales de préparation (lavage, calibrage par concassage et criblage, séparation des fines pour agglomération sur grille ou en boulettes, tri mécanisé pour éliminer la gangue, calcination, agglomération sur grille ou en boulettes). Le laitier évacué du haut-fourneau peut être transformé sur place en vue d’autres utilisations, notamment la fabrication du ciment.

La fabrication de l’acier

La fonte brute a une forte teneur en carbone et en autres impuretés (principalement du soufre et du phosphore). Il faut donc l’affiner, c’est-à-dire réduire sa teneur en carbone, oxyder et éliminer les impuretés pour la transformer en un métal très malléable pouvant être forgé et façonné. C’est l’objet de l’élaboration de l’acier, qui peut s’effectuer dans trois types de fours: le four à sole, le convertisseur à oxygène (voir figure 73.6) et le four à arc (voir figure 73.7). La plupart des fours à sole ont été remplacés par des convertisseurs à oxygène, dans lesquels l’air ou l’oxygène sont injectés dans le fer en fusion, ou par des fours à arc alimentés en ferraille ou en boulettes de fer spongieux.

Figure 73.6 Charge liquide pour convertisseur à oxygène

Figure 73.6

Figure 73.7 Vue générale d'une coulée de four à arc

Figure 73.7

Les aciers spéciaux sont des alliages auxquels on incorpore d’autres éléments métalliques pour leur conférer des propriétés particulières dans un but précis (du chrome pour éviter la corrosion, du tungstène pour augmenter la dureté et la résistance à haute température, du nickel pour améliorer la résilience, la ductilité et la résistance à la corrosion). Ces éléments peuvent être ajoutés dans la charge du haut-fourneau (voir figure 73.8) ou bien dans l’acier en fusion (dans le four ou la poche de coulée) (voir figure 73.9). L’acier en fusion est déversé dans des installations de coulée continue pour former des billettes (voir figure 73.10), des blooms (voir figure 73.11) ou des brames. Il peut également être coulé dans des moules pour former des lingots. La majorité de l’acier est produit en coulée continue (voir figure 73.12), ce qui offre à la fois un rendement accru, une meilleure qualité, des économies d’énergie et une réduction des coûts d’investissement et d’exploitation. Les lingots sont stockés dans des pits, c’est-à-dire des fours en sous-sol équipés de portes, où ils peuvent être réchauffés avant de passer aux laminoirs ou de subir d’autres transformations (voir figure 73.4). Certaines aciéries ont commencé à fabriquer de l’acier en coulée continue. Les laminoirs font l’objet de l’article suivant; les fonderies, le forgeage et la transformation sur presses sont traités au chapitre no 82, «La transformation et le travail des métaux».

Figure 73.8 Arrière d'une poche de chargement

Figure 73.8

Figure 73.9 Poche de coulée continue

Figure 73.9

Figure 73.10 Coulée continue de billettes

Figure 73.10

Figure 73.11 Coulée continue de blooms

Figure 73.11

Figure 73.12 Poste de commande de coulée continue

Figure 73.12

Les risques

Les accidents

L’industrie sidérurgique traite et transporte de grandes quantités de matières au moyen d’équipements lourds, sans commune mesure avec ceux de la plupart des autres secteurs industriels. Les aciéries se sont donc généralement dotées de programmes de sécurité et de santé pour faire face aux dangers d’un environnement qui peut être implacable. Une approche intégrée – associant de bonnes pratiques d’ingénierie et de maintenance, des procédures de travail fondées sur la sécurité, la formation des personnels et l’emploi d’équipements de protection individuelle – est généralement indispensable pour maîtriser ces dangers.

Il existe des risques de brûlures à de nombreux stades du processus de fabrication de l’acier: aux hauts-fourneaux pendant la coulée du métal ou du laitier en fusion, du fait de débordements, de jets ou d’éruptions de métal incandescent en provenance des poches de coulée ou des mélangeurs au cours de l’élaboration, de la coulée ou du transport, ou encore du contact avec le métal brûlant lors de sa transformation en produit fini.

L’eau captive dans le métal ou le laitier en fusion peut générer des explosions projetant du métal ou des matières brûlantes dans un vaste périmètre. L’introduction d’un accessoire humide dans le métal en fusion peut aussi déclencher de violentes éruptions.

Indispensables dans la sidérurgie, les engins de transport risquent de heurter les travailleurs ou de les coincer entre des éléments fixes ou mobiles. Les ponts roulants sont présents presque partout dans les aciéries. La plupart des installations importantes font aussi largement appel à des chariots-transferts sur rails ou à de grands tracteurs pour le transport des matériaux.

Les programmes de sécurité pour l’emploi des engins de levage exigent une formation pour garantir l’application de procédures correctes et sûres dans leur utilisation et dans l’arrimage des charges de façon à éviter leur chute; ils appellent également une bonne communication et l’emploi d’un code gestuel entre le pontonnier et les élingueurs pour prévenir les blessures dues à des déplacements intempestifs de l’engin, des programmes d’inspection et de maintenance des éléments qui le composent, des palans, des élingues et des crochets pour éviter la chute des charges ainsi que des moyens sûrs pour accéder aux ponts roulants afin d’éviter les chutes et les accidents sur les chemins de roulement.

Les programmes de sécurité pour les véhicules ferroviaires nécessitent aussi une bonne communication, en particulier pendant les manœuvres et l’attelage des wagons, de façon à éviter l’écrasement de personnes entre les tampons.

Il est nécessaire de laisser en permanence un espace suffisant pour le passage des grands tracteurs et autres engins similaires et d’empêcher les démarrages et les déplacements intempestifs pour éliminer les risques de heurt, de projection et de coincement des conducteurs, des piétons ou des conducteurs d’autres véhicules. L’inspection et l’entretien des équipements de sécurité et des voies de circulation doivent également faire l’objet de programmes adéquats.

Dans les usines sidérurgiques, le maintien de l’ordre est l’une des pierres angulaires de la sécurité. Il suffit de peu pour que les sols et les voies de circulation deviennent rapidement obstrués par des matériels et des accessoires qui seront autant d’occasions de trébucher. Etant donné les quantités de graisses, d’huiles et de lubrifiants divers utilisés, il ne faut pas laisser de produits répandus sur les voies de circulation ou aux postes de travail où ils risquent de causer des glissades.

Les outils sont soumis à une forte usure qui rend rapidement leur emploi délicat, voire dangereux. Bien que la mécanisation ait considérablement réduit les manipulations manuelles, certaines situations obligent encore à des efforts physiques importants.

Des outils coupants ou des bavures sur des produits en acier ou des bandes métalliques constituent autant de risques de coupures et de piqûres pour les ouvriers travaillant au finissage, à l’expédition ou encore à la manipulation de la ferraille. Des gants résistant à la coupure et des manchettes sont souvent employés pour éviter les blessures.

La protection oculaire revêt une importance particulière dans la sidérurgie. Les risques de pénétration de corps étrangers dans l’œil sont omniprésents dans la plupart des secteurs, tout particulièrement lors de la manipulation des matières brutes et des opérations de finissage de l’acier (meulage, soudage et brûlage).

Une maintenance programmée avec soin est cruciale pour la prévention des accidents. Elle a pour but d’assurer l’efficacité des équipements de protection et de les maintenir opérationnels sans défaillance. Etant donné la complexité et la puissance des équipements et des machines intervenant dans la production, il est également capital d’observer strictement des habitudes de travail sûres et de se conformer aux règles de sécurité.

Les intoxications au monoxyde de carbone

Au cours de l’élaboration du fer et de l’acier, les hauts-fourneaux, les convertisseurs et les fours à coke produisent d’importantes quantités de gaz. Après dépoussiérage, ces gaz sont utilisés comme combustibles dans les différents ateliers; ils peuvent aussi être vendus comme matières premières à des complexes chimiques. Tous contiennent d’importantes quantités de monoxyde de carbone (22 à 30% pour le gaz de haut-fourneau, 5 à 10% pour le gaz de four à coke et 68 à 70% pour le gaz de convertisseur).

Il arrive que du monoxyde de carbone s’échappe du gueulard des hauts-fourneaux ou par des fuites au niveau de la cuve ou encore des nombreuses canalisations de gaz installées dans les usines, provoquant ainsi accidentellement de graves intoxications. Le plus souvent, ces cas d’oxycarbonisme aigu surviennent à l’occasion d’interventions à proximité de hauts-fourneaux, en particulier pendant des réparations. D’autres cas apparaissent lors de travaux à proximité de fours chauds, de visites d’inspection des cuves, d’interventions près des gueulards ou des trous de coulée ou de laitier. Les intoxications au monoxyde de carbone peuvent également être causées par des émanations de gaz provenant de vannes à soupape hydraulique ou des boîtes à eau dans les aciéries ou les laminoirs, ou être consécutives à l’arrêt brutal des souffleries, des chaudières ou des aérateurs, à des fuites, à une mauvaise ventilation et à un dégazage préalable insuffisant des cuves, des canalisations ou des équipements, ainsi que pendant la fermeture de vannes sur des conduites.

Les poussières et les fumées

D’importants dégagements de poussières et de fumées se produisent à de nombreuses étapes de l’élaboration du fer et de l’acier. C’est notamment le cas pendant la préparation, en particulier de l’agglomération sur grille, devant les hauts-fourneaux et les fours d’élaboration de l’acier et au cours de la coulée des lingots. Les poussières et les fumées provenant du minerai de fer ou de métaux ferreux ne créent pas nécessairement un terrain propice à la fibrose du poumon et les pneumoconioses sont donc rares. Certains cancers du poumon pourraient être liés à des substances cancérogènes présentes dans les émissions des fours à coke. Les fumées denses dégagées pendant l’emploi des lances à oxygène ou lors de l’utilisation d’oxygène dans les fours à sole pourraient affecter particulièrement les pontonniers.

Il existe un risque de silicose pour les travailleurs procédant au garnissage, à la réfection du garni et à la réparation des hauts-fourneaux, des fours d’aciéries et des mélangeurs avec des matériaux réfractaires pouvant contenir jusqu’à 80% de silice. L’intérieur des poches de coulée est également garni de briques réfractaires ou de silice broyée et agglomérée et nécessite de fréquentes remises en état. La silice contenue dans les matériaux réfractaires se présente en partie sous forme de silicates qui provoquent non pas la silicose, mais plutôt une pneumoconiose. Les travailleurs sont rarement exposés à d’épais nuages de poussières.

L’ajout d’éléments d’alliage dans les fours d’élaboration d’aciers spéciaux peut parfois s’accompagner de risques d’exposition potentielle au chrome, au manganèse, au plomb et au cadmium.

Autres risques

Le travail sur des fours à gaz et en haut des batteries de cokéfaction, devant les hauts-fourneaux et face aux fours, dans les fours, les répartiteurs et les lingotières pendant les réparations, en lingotage et en coulée continue, implique dans chacun de ces cas des efforts pénibles dans une ambiance surchauffée. Il faut donc mettre en place des programmes de prévention des troubles liés à la chaleur.

En outre, en l’absence de moyens de protection appropriés, la lumière aveuglante provenant des fours peut provoquer des lésions oculaires dues aux rayonnements infrarouges. Les opérations manuelles telles que la pose de briques réfractaires dans le haut-fourneau ou les vibrations transmises aux mains et aux bras par les ébarbeuses ou les meuleuses électriques peuvent créer des problèmes d’ordre ergonomique (troubles musculo-squelettiques).

Les souffleries, les centrales à oxygène, les extracteurs de gaz et les fours à arc à haute puissance génèrent des niveaux sonores importants susceptibles de provoquer des lésions auditives. Les opérateurs travaillant sur les fours devraient être protégés par une enceinte d’isolation phonique confinant la source du bruit ou par des cabines insonorisées. La réduction de la durée d’exposition au bruit peut également se révéler efficace. Le port de protections individuelles (casques ou bouchons d’oreille) est souvent exigé dans les zones très bruyantes dans lesquelles une réduction appropriée du bruit ne peut être obtenue par d’autres moyens.

Les mesures de sécurité et de santé

L’organisation de la sécurité

L’organisation de la sécurité revêt une importance primordiale dans la sidérurgie où le comportement des personnes face aux dangers potentiels est décisif. Même si le premier devoir de la direction consiste à instaurer les conditions matérielles de travail les plus sûres possibles, la mise en œuvre des programmes de sécurité nécessite l’adhésion de chacun. Comités de sécurité et d’hygiène, délégués à la sécurité, incitations à la sécurité, émulation, boîtes à idées, affichage de slogans et de consignes de sécurité, chacun de ces éléments peut jouer un rôle important dans les programmes de sécurité. L’implication de tous les intéressés dans l’évaluation des risques sur le site, l’observation des comportements et la mise en pratique des retours d’expérience peuvent promouvoir des attitudes positives en matière de sécurité et encourager la formation de groupes de travail pour la promotion de la santé et la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.

L’établissement de statistiques d’accidents permet de mettre en lumière les zones à risques, les besoins de protections matérielles supplémentaires ainsi que la nécessité d’insister sur l’ordre et la propreté. On peut aussi analyser l’utilité des différents types de vêtements de protection et faire connaître leurs avantages aux travailleurs concernés.

La formation

La formation devrait comporter une information sur les risques, les méthodes de travail sûres, les comportements permettant d’éviter les dangers et le port des équipements de protection individuelle. L’introduction de nouvelles méthodes de travail peut appeler une formation complémentaire, même pour les travailleurs ayant une longue expérience des fours anciens. La formation et le recyclage du personnel à tous les niveaux sont particulièrement utiles; ils ont pour objectif de permettre aux salariés de se familiariser avec les méthodes de travail sûres, les comportements dangereux à proscrire, les règles de sécurité et les principales dispositions légales sur la prévention des accidents. La formation devrait être assurée par des experts et faire largement appel à des moyens audiovisuels performants. Il est conseillé d’organiser régulièrement des réunions ou des rencontres de sécurité pour toutes ces personnes de façon à consolider la formation et à développer l’esprit de sécurité.

Les mesures techniques et organisationnelles

Il importe de protéger efficacement toutes les parties dangereuses des machines et appareillages, y compris les monte-charges, les bandes transporteuses, les arbres de transmission et les engrenages des ponts roulants. Il faut aussi instaurer un système d’inspection, de contrôle et de maintenance périodiques pour tous les équipements de l’usine, en particulier pour le matériel de levage (ponts roulants, apparaux de levage, etc.). Une procédure de verrouillage devrait être prévue pour la maintenance et les réparations. Les apparaux reconnus défectueux seront mis à la casse. Les dispositifs de levage porteront clairement l’indication de la charge utile de sécurité et les apparaux non utilisés seront rangés avec soin. Là où cela est possible, l’accès aux ponts roulants devrait se faire par un escalier; si l’emploi d’une échelle verticale est inévitable, il faut prévoir une crinoline. Il convient en outre de prendre des dispositions efficaces pour limiter le déplacement des ponts roulants quand des personnes travaillent au-dessous. Il peut s’avérer nécessaire, comme la loi l’exige dans certains pays, d’installer des appareils de coupure appropriés destinés à éviter les collisions quand deux ou plusieurs ponts se déplacent sur un même chemin de roulement.

Les locomotives, voies ferrées, wagons, cars de coulée ou bogies, et attelages devraient être bien conçus et maintenus en bon état; le réseau sera doté d’un système efficace de signalisation et d’avertisseurs. Il faut interdire de grimper sur les tampons et de passer entre les wagons. Aucune intervention ne devrait être effectuée sur les voies tant que des mesures n’auront pas été prises pour en contrôler l’accès et limiter les déplacements des engins qui y circulent.

Le stockage de l’oxygène exige de grandes précautions. La distribution sera assurée par des réseaux de canalisations portant un marquage spécifique. Toutes les lances devraient être maintenues en parfait état de propreté.

La lutte contre le désordre appelle une vigilance de tous les instants. Les chutes et les trébuchements dus à des sols encombrés ou à des appareils ou outils abandonnés par négligence ne sont pas seulement dangereux en soi: ils risquent également de précipiter quelqu’un contre des matières incandescentes ou en fusion. Tous les matériaux devraient être stockés en piles et le personnel devrait disposer de casiers pour ranger commodément les outils. La graisse ou l’huile renversée devraient être essuyées immédiatement. Il est recommandé de veiller à une très bonne qualité de l’éclairage dans toutes les zones des ateliers.

L’hygiène industrielle

Il faut non seulement veiller au respect des consignes les plus exigeantes possibles en matière d’ordre et de propreté, mais aussi assurer une bonne ventilation générale de l’ensemble des locaux et un captage des émissions à la source partout où se dégagent d’importantes quantités de poussières et de fumées ou encore là où il existe des risques de fuites de gaz. Les appareils et les canalisations de gaz devraient faire l’objet de visites régulières et d’un entretien attentif de façon à prévenir toute fuite. Chaque fois qu’une intervention doit être effectuée dans un milieu susceptible de contenir du gaz ou du monoxyde de carbone, il est indiqué d’employer des détecteurs appropriés pour tester l’atmosphère. Si l’on ne peut éviter de pénétrer dans une zone dangereuse, il faut porter des appareils de protection respiratoire autonomes ou à adduction d’air. Il convient en outre de prévoir des bouteilles d’air prêtes à servir et d’entraîner les travailleurs à les utiliser correctement.

Il est conseillé d’améliorer les conditions de travail en installant une ventilation forcée amenant de l’air frais. Des ventilateurs peuvent être mis en place en fonction des besoins individuels des personnes, en particulier sur les lieux de travail soumis à une forte chaleur. La pose d’écrans d’isolation thermique entre les travailleurs et les sources de chaleur rayonnante, l’installation de rideaux d’eau ou d’air devant les fours ou la mise en place de rideaux de chaînes résistant à la chaleur sont autant de protections possibles. La meilleure protection des opérateurs affectés aux fours est assurée par le port d’une combinaison et d’une cagoule résistant à la chaleur avec appareil respiratoire à adduction d’air frais. La chaleur régnant près des fours étant intense, la ventilation de la combinaison par des conduites d’alimentation en air frais est également recommandée. De plus, il est essentiel de définir une procédure pour fixer la durée de refroidissement des fours avant qu’il soit permis d’y pénétrer.

L’acclimatation conduit à une adaptation naturelle de la teneur en sel de la sueur. Il est possible de diminuer notablement la fréquence des troubles dus à la chaleur en adaptant la charge de travail et en ménageant des périodes de repos bien réparties, surtout si ces pauses peuvent être prises dans un local frais, climatisé si nécessaire. A défaut, il faut prévoir de grandes quantités d’eau et d’autres boissons non alcoolisées et aménager des locaux pour la prise de repas légers. Les boissons fraîches ne devront pas être trop froides, et les travailleurs n’absorberont pas une trop grande quantité de liquide à la fois. Pendant les heures de travail, il est préférable de prendre des repas légers. Les travailleurs soumis à une sudation intense doivent remplacer les sels minéraux perdus; la meilleure façon de le faire étant encore d’augmenter la dose de sel aux repas.

Dans les climats froids, il faut prévenir les effets néfastes d’une exposition prolongée au froid ou à de brusques et violents changements de température. Les réfectoires et les sanitaires devraient donc être installés de préférence à proximité du lieu de travail. Les sanitaires comporteront des douches et des vestiaires avec placards, tous maintenus en parfait état de propreté et d’hygiène.

Les sources de bruit devraient être isolées partout où cela est possible. Des panneaux de commande à distance permettront d’éloigner les opérateurs des zones bruyantes. Il convient d’imposer le port de protections individuelles de l’ouïe dans les zones au niveau sonore élevé. En plus du confinement des machines bruyantes par des matériaux d’isolation phonique ou du travail en cabines insonorisées, les programmes de protection de l’ouïe se sont avérés efficaces pour maîtriser les pertes auditives dues au bruit.

Les équipements de protection individuelle

Dans la plupart des opérations, aucune partie du corps n’est à l’abri. Les types d’équipements de protection nécessaires varient évidemment selon les postes. Les personnes affectées aux fours ont besoin de vêtements qui les protègent des brûlures: combinaison ignifuge, guêtres, bottes, gants, casque avec écran facial ou lunettes de protection contre les projections d’étincelles et la lumière aveuglante. Les bottes, lunettes de protection et casques sont requis à presque tous les postes; il en va de même des gants de protection. Le choix des vêtements de protection doit prendre en compte les risques pour la santé et l’inconfort liés à la chaleur excessive. Ainsi, une cagoule ignifuge à voilette en treillis métallique assure une bonne protection contre les étincelles et la chaleur; diverses fibres synthétiques se sont également révélées efficaces contre la chaleur. La vigilance de l’encadrement et une action de sensibilisation permanente sont indispensables pour faire en sorte que les équipements de protection individuelle soient effectivement portés et bien entretenus.

L’ergonomie

L’approche ergonomique, c’est-à-dire l’étude de la relation humain-machine-environnement, revêt une importance particulière à certains postes de travail de la sidérurgie. Une telle étude est nécessaire pour analyser non seulement les conditions dans lesquelles un opérateur effectue diverses tâches, mais aussi l’impact de l’environnement de travail sur le travailleur et la fonctionnalité des moyens techniques mis en œuvre. Une prise en compte du travail posté et surtout du travail de nuit fixe, instauré pour cause d’économies d’énergie, a également sa place dans ce domaine.

La surveillance médicale

Les examens médicaux d’embauche sont déterminants pour recruter des personnes aptes aux travaux pénibles caractéristiques de la sidérurgie. La plupart des postes requièrent une constitution robuste. L’hypertension, les maladies cardiaques, l’obésité et la gastro-entérite chronique sont autant de critères qui conduisent à écarter les personnes accusant de tels troubles. La sélection des grutiers et des pontonniers nécessite une attention particulière prenant en considération à la fois les aptitudes physiques et mentales.

La surveillance médicale devrait porter tout spécialement sur les personnes exposées à une chaleur intense; des examens pulmonaires périodiques seront prévus pour les salariés exposés aux poussières, et des contrôles audiométriques pour ceux qui travaillent dans le bruit. Les conducteurs d’engins mobiles devraient également subir des examens médicaux périodiques visant à contrôler que leur état de santé reste compatible avec leur poste de travail.

Il est indispensable de vérifier constamment le bon fonctionnement de tous les appareils de réanimation et d’entraîner les travailleurs secouristes appelés à les utiliser.

Un poste central de premier secours devrait être doté de l’équipement médical nécessaire pour faire face aux urgences. Dans la mesure du possible, il est souhaitable de disposer d’une ambulance placée sous l’autorité d’un ambulancier qualifié qui se chargera de transporter les blessés graves à l’hôpital le plus proche. Dans les grandes usines, des postes ou des armoires de premier secours seront répartis en plusieurs points centraux.

Le travail aux batteries de fours à coke

La préparation du charbon

Le facteur le plus important dans la production du coke métallurgique réside dans la sélection des charbons. Les plus recherchés sont ceux qui ont un faible taux de cendres et de soufre. Pour obtenir les caractéristiques souhaitées, le charbon maigre est généralement mélangé, à concurrence de 40%, à du charbon flambant. Le paramètre physique le plus important du coke métallurgique est sa résistance, surtout à la fragmentation et à l’abrasion pendant les manutentions et son utilisation dans le haut-fourneau. Les opérations de manipulation du coke comprennent le déchargement des wagons de chemins de fer, des barges ou des camions, le mélange, le dosage, la pulvérisation, le fioulage et le convoyage vers les trémies des batteries de fours à coke.

La cokéfaction

La majeure partie du coke est produite dans des fours de cokéfaction à récupération de sous-produits, conçus et exploités pour collecter les matières volatiles provenant du charbon. Ces fours se composent de trois parties: les cellules, les carneaux de chauffage et le régénérateur. A l’exception de l’acier et du béton formant leur ossature, les fours sont construits en briques réfractaires. Une batterie comprend habituellement quelque 45 fours distincts. Les cellules ont généralement une hauteur de 1,8 à 6,7 m et une longueur de 9,1 à 15,5 m; la température y est de 1 535 °C à la base des carneaux. La durée de cokéfaction, variable selon la taille du four, se situe le plus souvent entre 16 et 20 heures.

Dans les grands fours verticaux, un wagon-chargeur (enfourneuse) amène le charbon des trémies aux bouches situées à la partie haute du four. Quand la cokéfaction est terminée, un bélier pousse le coke hors du four depuis l’un des côtés. Les dimensions du bélier sont légèrement inférieures à celles du four de façon à éviter tout contact avec le garnissage intérieur. Le coke tombe dans un wagon à coke ou dans le guide-coke, situé du côté de la batterie opposé au bélier, d’où il est transporté vers la tour d’extinction pour être refroidi à l’eau avant d’être déchargé sur le quai à coke. Sur certaines batteries, le coke chaud est éteint à sec pour récupérer une quantité de chaleur non négligeable pour la production de vapeur.

La carbonisation du charbon pour la production de coke donne lieu à des réactions complexes. Dans un premier temps, on trouve, parmi les produits de décomposition du charbon, de l’eau, des oxydes de carbone, du sulfure d’hydrogène, des composés hydro-aromatiques, des paraffines, des oléfines ainsi que des composés phénoliques et azotés. Les synthèses et les dégradations qui se produisent au sein de ces produits primaires dégagent de grandes quantités d’hydrogène, de méthane et d’hydrocarbures aromatiques. La décomposition ultérieure des composés azotés complexes produit de l’ammoniac, du cyanure d’hydrogène, des bases de pyridine et de l’azote. L’extraction continue de l’hydrogène des résidus se trouvant dans les fours produit le coke dur souhaité.

Les fours à coke dotés d’équipements de récupération et de traitement des sous-produits chimiques issus du charbon fournissent les substances indiquées au tableau 73.1.

Tableau 73.1 Sous-produits récupérables des fours à coke

Sous-produits

Composants récupérables

Gaz de four à coke

Hydrogène, méthane, éthane, monoxyde de carbone, dioxyde de carbone, éthylène, propylène, butylène, acétylène, sulfure d’hydrogène, ammoniac, oxygène et azote

Liqueur ammoniacale

Ammoniac libre et combiné

Goudron

Pyridine, huiles acides de goudron, naphtalène, créosote et brai

Huiles légères

Quantités variables de produits de gaz de houille ayant des points d’ébullition allant de 40 à 200 ºC environ, ainsi que benzène, toluène, xylène et solvant naphta

Après un refroidissement suffisant pour éviter une dégradation des tapis transporteurs, le coke est dirigé vers le poste de tamisage et de broyage où il est calibré pour son utilisation en haut-fourneau.

Les risques

Les risques physiques

Les opérations de déchargement, de préparation et de manutention portent sur des milliers de tonnes de charbon, ce qui entraîne de la poussière, du bruit et des vibrations. Compte tenu des grandes quantités de poussière accumulée, ce ne sont plus seulement les risques d’inhalation qui sont à craindre, mais aussi les explosions.

Pendant la cokéfaction, les principaux problèmes physiques sont la chaleur ambiante et la chaleur rayonnante qui règnent, en particulier en haut des batteries, là où se trouvent la majorité des travailleurs. Le bruit peut être aussi un problème sur les équipements mobiles, surtout celui qui provient des mécanismes d’entraînement et d’éléments vibrants mal entretenus. De plus, des appareils produisant des rayonnements ionisants ou des faisceaux laser sont parfois employés pour positionner des équipements mobiles.

Les risques chimiques

En exploitation, on recourt généralement à de l’huile minérale pour le fioulage du charbon et le dépoussiérage des gaz. Il se peut également que des produits aient été appliqués sur le charbon avant son chargement dans la trémie afin de faciliter son écoulement et l’évacuation des déchets dangereux provenant de la récupération des sous-produits.

Le principal problème de santé lié à la cokéfaction réside dans les émissions libérées par les fours au moment du chargement ou encore pendant la cokéfaction et le défournement du coke. Ces émissions contiennent de nombreux hydrocarbures aromatiques polycycliques, dont certains sont cancérogènes. Les matériaux utilisés pour colmater les fuites dans les couvercles et les portes peuvent également présenter des risques au moment du mélange de leurs composants et lors de la dépose des couvercles et des portes. Bien que des produits de substitution acceptables soient maintenant employés, il n’est pas impossible que l’on trouve encore de l’amiante et des céramiques réfractaires dans les joints d’étanchéité et les matériaux d’isolation.

Les risques mécaniques

Les risques inhérents à la préparation du charbon, de même que ceux liés aux wagons, aux barges et à la circulation des véhicules ainsi qu’au déplacement des tapis transporteurs, devraient être reconnus comme tels. La plupart des accidents se produisent quand des personnes sont heurtées, coincées ou happées par des engins, quand elles font une chute de hauteur ou encore lors-qu’elles oublient d’immobiliser ces engins en verrouillant leurs commandes.

Les principaux risques mécaniques sont liés aux équipements mobiles côté bélier, côté coke, et au wagon-chargeur en haut des batteries. Pendant pratiquement toute la campagne, ces équipements mobiles fonctionnent dans un espace restreint. Les coincements ou heurts par des équipements mobiles sur rails sont responsables du plus grand nombre des accidents mortels survenus aux fours à coke. Les brûlures superficielles de la peau par des matières ou des surfaces incandescentes et les irritations oculaires dues à des poussières sont moins graves mais plus fréquentes.

Les mesures de sécurité et de santé

Il est nécessaire de confiner et d’isoler les systèmes de criblage, de broyage et de transport sur bande pour maintenir les concentrations de poussières à des niveaux acceptables pendant la préparation du charbon. En plus de l’emploi de produits de mouillage pour le charbon, il peut être indispensable d’installer des captages à la source. La mise en place de programmes d’entretien et de surveillance des bandes transporteuses est impérative pour réduire les débordements et éviter de souiller par du charbon les passages le long des équipements de traitement et les transporteurs. Le système transporteur sera équipé de dispositifs permettant de réduire efficacement les déversements accidentels et de maintenir le confinement (racleurs de bandes, jupes, régulateurs de tension des bandes, etc.).

Compte tenu de la toxicité des hydrocarbures aromatiques polycycliques émis pendant la cokéfaction, il est important de contenir et de collecter ces émissions, de préférence en associant des moyens de prévention technique, des méthodes de travail éprouvées et un programme d’entretien. Il est également nécessaire de disposer d’appareils de protection respiratoire performants. Les contrôles devraient porter sur les points suivants:

Il faut aussi former les travailleurs pour qu’ils emploient de bonnes méthodes de travail et les sensibiliser à l’importance d’appliquer des procédures correctes pour réduire les émissions.

Enfin, le contrôle de l’exposition courante des travailleurs devrait permettre de vérifier que les niveaux d’exposition sont acceptables. Une surveillance continue des émanations de gaz et la mise en place de mesures de secours s’imposent, du fait principalement de la présence de monoxyde de carbone dans les fours à coke. Un programme de surveillance médicale devrait également être mis en œuvre.

LES LAMINOIRS

H. Schneider*

* Adapté de la 3e édition de l'Encyclopaedia of Occupational Health and Safety.

Les brames d’acier sont transformées à chaud en larges bandes minces, enroulées en bobines, dans des trains de laminage en continu. Les bobines peuvent être expédiées directement aux clients ou bien nettoyées et laminées à froid pour obtenir des produits finis. La figure 73.13 représente le schéma de fabrication.

Figure 73.13 Schéma du laminage à chaud et à froid

Figure 73.13

Le laminage à chaud par train continu

Le transporteur à rouleaux d’un train de laminage en continu à chaud peut atteindre une longueur de plusieurs centaines de mètres. La brame d’acier sort du four de réchauffage pour entrer sur le transporteur. Après élimination de la calamine superficielle, la brame réchauffée pénètre dans les cages dégrossisseuses où des cylindres horizontaux diminuent sa section et allongent sa longueur. Des galets latéraux assurent le maintien d’une largeur constante. La bande entre ensuite dans les cages finisseuses qui lui confèrent sa section finale, puis parcourt le refroidisseur où elle défile à une vitesse pouvant atteindre 80 km/h avant d’être bobinée.

La bande laminée à chaud subit généralement un nettoyage ou un décapage à l’acide sulfurique ou chlorhydrique pour éliminer les oxydes de surface (calamine) qui se sont formés pendant le laminage à chaud. Une ligne de décapage moderne fonctionne en continu. Dès qu’une bobine est décapée, son extrémité est cisaillée à l’équerre et soudée bout à bout à l’amorce de la bobine suivante. Un laminoir de planage intégré à la ligne de décapage facilite l’élimination de la calamine avant l’entrée du feuillard dans les bains d’acide.

Sous les bacs de décapage chemisés de caoutchouc, les postes de rinçage et les sécheurs, on trouve un accumulateur de boucle qui alimente les bacs de décapage en bande pendant l’arrêt en début de ligne pour le soudage d’une nouvelle bobine. Cette réserve permet de décaper la bande en continu à la vitesse de 360 m/min. Un système à boucle plus petit en sortie de ligne autorise le fonctionnement en continu même pendant les interruptions pour le bobinage.

Le laminage à froid

Les bobines de bande laminée à chaud, propres, peuvent subir un laminage ultérieur pour obtenir un produit plus mince et plus lisse et conférer à l’acier un coefficient résistance/masse supérieur à celui que procure un laminage à chaud. Il ne faut pas plus de deux minutes à un train à froid moderne de cinq cages en tandem pour transformer des tôles épaisses de 2,5 mm et d’une longueur pouvant atteindre 1,2 km en bandes d’une épaisseur de 0,76 mm et longues de plus de 3,2 km.

Le laminage à froid écrouit la tôle, de sorte qu’il faut généralement la recuire pour la rendre plus malléable. Pour ce faire, les bobines de tôles laminées sont empilées sur une sole et les piles couvertes de coiffes avant d’être recouvertes par la descente du four de recuit. Le processus de chauffe et de refroidissement peut durer cinq à six jours.

Après avoir été détendu par recuit, l’acier traverse un train de finissage qui confère la planéité, les caractéristiques métallurgiques et le fini de surface souhaités. Le produit peut ensuite être expédié aux clients sous forme de bobines, subir un cisaillage des rives ou encore être débité en longueurs marchandes.

Les risques et leur prévention

Accidents . La mécanisation a réduit le nombre des risques de coincement sur les machines; ce risque persiste néanmoins, en particulier dans les ateliers de laminage à froid et de finition.

Sur les laminoirs à froid, les mains risquent d’être happées entre les cylindres, en particulier si l’on tente un nettoyage en marche. Il faut donc protéger efficacement les angles rentrants et interdire strictement tout nettoyage en fonctionnement. Les cisailles, ébouteuses, ébarbeuses et guillotines peuvent occasionner des blessures graves si leurs parties dangereuses ne sont pas équipées de protecteurs. Il est essentiel de prévoir une procédure de verrouillage pour l’entretien et les réparations.

Les opérateurs qui tentent d’enjamber les transporteurs à rouleaux à des endroits non autorisés, en particulier en laminage à chaud, s’exposent à de graves blessures. Il convient donc de mettre en place des passerelles en nombre suffisant et d’en imposer l’utilisation. Le serpentage et le fouettement du métal peuvent provoquer des blessures et des brûlures importantes, voire le sectionnement des membres inférieurs. Partout où la mécanisation intégrale n’a pas éliminé ce risque, il est nécessaire d’installer des parois de protection ou d’autres dispositifs.

Les risques de coupures sur les trains à feuillards et à bandes requièrent une attention particulière. Ces blessures ne sont pas seulement dues aux bords de la tôle, mais aussi aux bandes métalliques de ligaturage des bobines qui deviennent très dangereuses dans l’éventualité d’une casse.

L’emploi de grandes quantités d’huile, d’inhibiteurs de rouille et d’autres produits, généralement appliqués par pulvérisation, représente un autre risque fréquemment rencontré aux laminoirs. Malgré les mesures prises pour confiner les nuages de ces produits, ils s’accumulent souvent sur le sol ou sur les voies de circulation, provoquant chutes et glissades. En plus du nettoyage régulier du sol, il faut installer des caillebotis, utiliser des matériaux absorbants et porter des bottes à semelles antidérapantes.

Même dans les ateliers automatisés, des accidents se produisent au moment des opérations de conversion, lors du changement des cylindres dans les cages. Un ordonnancement judicieux permet souvent de réduire le nombre des changements requis de cylindres, qui nécessitent l’emploi d’outils appropriés et ne doivent en aucun cas être effectués dans l’urgence.

L’automatisation des usines modernes s’accompagne souvent de multiples pannes mineures auxquelles le personnel remédie souvent lui-même sans arrêter tout ou partie de la ligne. Dans ce cas, il peut arriver que l’on oublie d’activer les sécurités mécaniques nécessaires, ce qui risque d’entraîner de graves accidents. On néglige aussi souvent les risques d’incendie inhérents aux réparations sur les circuits hydrauliques. La protection contre les incendies doit impérativement être planifiée et organisée avec un soin particulier dans les ateliers comportant des équipements hydrauliques.

Les pinces de retournement dont on se sert pour saisir le métal chaud peuvent s’entrechoquer; les clés carrées employées pour déplacer à la main de lourds profilés risquent, en cas de jeu, de causer de graves lésions à la tête et à la partie supérieure du torse. Tous les outils à main devraient être judicieusement conçus, régulièrement contrôlés et bien entretenus. Il importe de remplacer fréquemment les rivets des pinces de retournement utilisées sur laminoirs, de fournir aux équipes chargées du changement des cylindres des clés polygonales et des tournevis à frapper et de ne pas se servir de clés plates coudées. Les travailleurs devraient être formés à l’emploi correct de tous ces outils à main, pour lesquels il convient de prévoir des matériels de rangement appropriés.

De nombreux accidents sont imputables à une mauvaise utilisation des engins de levage et de manutention et à des défaillances des ponts roulants ou des apparaux de levage. Tous les ponts et portiques roulants ainsi que leurs apparaux devraient être soumis à un plan systématique de visites et de contrôles. On accordera un soin particulier au stockage et à l’emploi des élingues. Les pontonniers et les élingueurs seront sélectionnés judicieusement et dûment formés. Les transports mécaniques ne sont jamais exempts de risques d’accidents: les locomotives, wagons et bogies devraient être soigneusement entretenus et leurs utilisateurs avoir parfaitement assimilé les codes de signaux et d’avertissements qu’il faut impérativement instaurer. Il importe de veiller à ce que les voies de circulation des chariots-élévateurs à fourche et autres tracteurs soient marquées et dégagées.

Les chutes, les trébuchements, le mauvais état des sols, l’empilage défectueux des matériaux, les extrémités des billettes et des rouleaux transporteurs faisant saillie sont cause de nombreux accidents qui pourraient être évités par un bon entretien des sols et des voies d’accès, une signalisation claire des voies de circulation, un empilage correct du matériel et une évacuation régulière des déchets. Il est essentiel de veiller à faire régner un bon ordre dans toutes les parties de l’usine, même dans les cours. L’ensemble de l’usine devrait être convenablement éclairé.

Lors du laminage à chaud, la projection de scories peut provoquer des brûlures et des lésions oculaires: des carters peuvent retenir efficacement les projections de calamine et d’eau chaude. Les particules de poussières et le fouettement des élingues peuvent également blesser les yeux, qui risquent par ailleurs de souffrir d’éblouissement.

L’équipement de protection individuelle revêt une grande importance pour la prévention des accidents aux laminoirs. Le port de casques, de chaussures renforcées, de guêtres, de manchettes, de gants, de masques et de lunettes de sécurité permet de se prémunir contre de nombreux risques. Il est essentiel dans ce domaine d’obtenir la collaboration éclairée des travailleurs. Autant que la formation, une organisation efficace de la sécurité avec la participation active des travailleurs et de leurs représentants a une importance décisive.

Chaleur. On a mesuré, à certains postes de travail des laminoirs, des niveaux de chaleur rayonnante atteignant 1 000 kcal/m2. Les troubles liés à la contrainte thermique posent problème; les opérateurs travaillant dans des ateliers modernes sont généralement protégés par la climatisation des cabines de commande. On se reportera à l’article «L’industrie du fer et de l’acier» pour les mesures de prévention applicables.

Bruit. Dans toute la zone de laminage règne un bruit considérable produit par les engrenages des cages et des redresseuses, les pompes à eau sous pression, les cisailles et les scies, ainsi que par la chute des produits finis dans un puits et l’arrêt de la course des matériaux par des plaques de métal. Le niveau sonore général en exploitation peut avoisiner 84 à 90 dBA; des pics de 115 dBA ou plus ne sont pas rares. On se reportera également à l’article «L’industrie du fer et de l’acier» pour les mesures de sécurité et de santé.

Vibrations . Le nettoyage des produits finis au moyen d’outils à percussion à haute vitesse peut provoquer des atteintes musculo-squelettiques au niveau des coudes, des épaules, des clavicules, de l’articulation distale du cubitus et du radius ainsi que des lésions des os naviculaires et lunaires.

Les travailleurs des laminoirs risquent de subir des déformations des articulations des membres supérieurs du fait du recul et du rebondissement des matériaux introduits dans les cylindres.

Gaz et vapeurs nocifs. Le laminage des aciers alliés au plomb ou l’emploi de meules de tronçonnage contenant du plomb peuvent causer l’inhalation des particules toxiques. Il importe dès lors de contrôler en permanence les concentrations en plomb aux postes de travail et de faire subir régulièrement un examen médical aux personnes susceptibles d’avoir été exposées. L’inhalation de plomb se produit également lorsqu’on se sert de chalumeaux de lavage ou de découpage qui, outre ces particules, dégagent aussi parfois des oxydes d’azote (NOx) et des vapeurs de chrome, de nickel et d’oxyde de fer.

Le soudage bout à bout entraîne la formation d’ozone, dont l’inhalation peut provoquer des irritations similaires à celles dues aux NOx. Les opérateurs de fours pits et de recuit risquent d’être exposés à des gaz toxiques dont la composition dépend du combustible employé (gaz de haut-fourneau, gaz de four à coke, fioul), mais qui contiennent généralement du monoxyde de carbone et du dioxyde de soufre. Des captages à la source ou des protections respiratoires pourront se révéler nécessaires.

La santé des travailleurs chargés de lubrifier les laminoirs en appliquant des brouillards d’huile peut être altérée du fait des lubrifiants et des additifs qu’ils contiennent. En cas d’emploi d’huiles ou d’émulsions pour le laminage, il faut s’assurer que les proportions d’huile et d’additifs sont correctes afin d’exclure non seulement l’irritation des muqueuses, mais aussi des dermatites aiguës chez les personnes chargées de ce travail. On se reportera à l’article «Les lubrifiants industriels, les fluides d’usinage des métaux et les huiles pour moteurs automobiles» au chapitre no 82 «La transformation et le travail des métaux» de la présente Encyclopédie.

Les opérations de finissage consomment de grandes quantités de produits de dégraissage qui s’évaporent et peuvent donc être inhalés. Outre leur effet toxique, ces solvants provoquent un dessèchement de la peau qui peut perdre son film sébacé en cas de manipulation erronée. Il convient de prévoir des systèmes d’aspiration localisée et le port de gants.

Acides . Les acides forts employés pour le décapage ont des effets corrosifs sur la peau et les muqueuses. Il faut installer un système de captage à la source et des équipements de protection individuelle.

Rayonnements ionisants. On peut utiliser des rayons X et d’autres rayonnements ionisants pour le calibrage et le contrôle, à condition de se conformer strictement aux précautions énoncées par la législation en vigueur.

Note: la description du laminage à chaud et à froid est reproduite avec l’aimable autorisation de l’Institut américain du fer et de l’acier (American Iron and Steel Institute (AISI)).

LES PROBLÈMES DE SÉCURITÉ ET DE SANTÉ *

* Adapté, partiellement, d'un article non publié de Simon Pickvance.

La sidérurgie est une «industrie lourde». En plus des risques inhérents au gigantisme des usines, aux équipements imposants et aux mouvements de quantités massives de matériaux, les travailleurs sont exposés à la chaleur du métal et du laitier en fusion dont la température peut atteindre 1 800 °C, à des substances toxiques et corrosives, à des polluants véhiculés par l’air, ainsi qu’au bruit. Sous la pression conjuguée des syndicats, des réglementations nationales et de la nécessité d’obtenir des gains de productivité, la sidérurgie a fait de grands progrès en modernisant les équipements et en améliorant les procédés qui offrent désormais une plus grande sécurité et permettent une meilleure maîtrise des risques. Les accidents mortels et ceux entraînant un arrêt de travail ont nettement régressé, même s’ils constituent encore un problème important (BIT, 1992). La fabrication de l’acier demeure néanmoins une activité dangereuse dans laquelle les risques potentiels ne peuvent pas toujours être éliminés à la source. Pour la direction chargée d’une aciérie, la marche au jour le jour représente un défi formidable qui nécessite une recherche continue, une surveillance permanente, un encadrement responsable et une actualisation de l’enseignement et de la formation des personnels à tous les niveaux.

Les risques physiques

Les problèmes ergonomiques

Les troubles musculo-squelettiques sont monnaie courante. Malgré la mécanisation et les dispositifs auxiliaires, la manipulation à la main d’objets de grandes dimensions, lourds ou volumineux, ne peut être évitée. Il faut veiller en permanence au maintien de l’ordre et de la propreté pour réduire le nombre des glissades et des chutes. Les travailleurs qui risquent le plus de souffrir de lombalgies ou de problèmes au niveau des membres supérieurs sont les maçons chargés de la pose des briques réfractaires. La prise en compte de l’ergonomie dans la conception des équipements et de leurs commandes (cabines des pontonniers, par exemple), fondée sur l’étude des aptitudes physiques et mentales requises, et combinée à des mesures comme la rotation des postes et le travail en équipe, représente une évolution récente visant à accroître la sécurité, le bien-être et le rendement des travailleurs des aciéries.

Le bruit

La fabrication de l’acier reste l’une des industries les plus bruyantes, même si les programmes de protection de l’ouïe ont permis de réduire les risques de troubles de l’audition. Au nombre des principales sources de bruit, on trouve les extracteurs de fumées, les circuits de vide utilisant des éjecteurs de vapeur, les transformateurs électriques, les arcs des fours, les laminoirs et les grands ventilateurs. Après dix à quinze ans d’exposition tout au plus, la moitié au moins des travailleurs souffriront de troubles de l’audition. Les programmes de protection de l’ouïe, dont une description détaillée est donnée au chapitre no 11, «Les systèmes sensoriels», de la présente Encyclopédie , prévoient des évaluations périodiques des niveaux sonores et de l’ouïe, des mesures de prévention technique et de maintenance des équipements, le port d’un équipement de protection individuelle et l’éducation et la formation des personnels.

Quand elles ne sont pas imputables au bruit, les pertes auditives peuvent être dues à des brûlures tympaniques provoquées par des particules de laitier, de calamine ou de métal en fusion, à des perforations du tympan consécutives à une impulsion sonore intense ou à un traumatisme causé par la chute ou le mouvement d’objets. Une étude des demandes de réparation présentées par des travailleurs canadiens de l’acier a révélé que la moitié de ceux qui avaient subi des lésions auditives de nature professionnelle souffraient également d’acouphènes (McShane, Hyde et Alberti, 1988).

Les vibrations

Les vibrations potentiellement dangereuses sont liées à des mouvements mécaniques périodiques, le plus souvent en l’absence d’un équilibre convenable des machines, à des machines installées directement sur le sol de l’atelier et à l’utilisation d’outillages portatifs tels que les perceuses, marteaux pneumatiques, scies et meuleuses. Un certain nombre d’études menées auprès de pontonniers (Bongers et coll., 1988) attribuent aux vibrations subies par l’ensemble du corps les tassements des disques intervertébraux, les lombalgies et la dégénérescence de la colonne vertébrale.

Les vibrations transmises à l’ensemble du corps sont responsables de divers symptômes (mal des transports, étourdissements, perte d’acuité visuelle) susceptibles d’être la source d’accidents. Les vibrations mains-bras ont été corrélées au syndrome du canal carpien, aux déformations articulaires dégénératives et au phénomène de Raynaud dans les extrémités des doigts («maladie des doigts morts») qui peuvent entraîner une incapacité permanente. Une étude portant sur des ébarbeurs et des meuleurs a montré qu’ils ont deux fois plus de risques de développer une contracture de Dupuytren qu’un groupe de travailleurs de référence (Thomas et Clarke, 1992).

L’exposition à la chaleur

L’exposition à la chaleur est un problème qui intéresse l’ensemble de la sidérurgie, mais qui est particulièrement aigu dans les usines situées dans les pays chauds. Des recherches ont montré que, contrairement à ce que l’on pensait, les expositions les plus intenses se produisent pendant le forgeage, quand les travailleurs surveillent en permanence l’acier incandescent, et non pendant la fusion où les températures sont plus élevées, mais où elles sont intermittentes et où leurs effets sont limités par l’échauffement intense de la peau exposée et par le port de protections oculaires (Lydahl et Philipson, 1984). L’absorption d’une quantité suffisante de liquide, une bonne ventilation, l’emploi d’écrans d’isolation thermique, le port de vêtements de protection, des pauses appropriées ou le travail à un poste plus au frais réduisent les dangers de stress thermique.

Les lasers

Utilisés pour des applications très variées dans la fabrication de l’acier, les lasers peuvent causer des lésions rétiniennes à des niveaux de puissance très inférieurs à ceux qui ont des effets sur la peau. Les opérateurs de lasers peuvent être protégés par une focalisation minutieuse du faisceau et le port de lunettes, mais d’autres personnes peuvent être exposées directement en traversant le faisceau sans le savoir ou, indirectement, si le faisceau est réfléchi vers elles par inadvertance.

Les radionucléides

De nombreux appareils de mesure font appel à des nucléides radioactifs. Les expositions peuvent généralement être limitées par une signalisation et un blindage adéquat, mais il subsiste un danger bien plus important: la présence, par accident ou négligence, de matières radioactives dans les ferrailles à recycler. Pour éviter de les inclure dans la charge des fours, de nombreuses aciéries contrôlent toutes les ferrailles au moyen de détecteurs de rayonnement.

Les polluants en suspension dans l’air

Selon le procédé mis en œuvre, les matières utilisées et l’efficacité de la surveillance continue et des mesures de lutte contre la pollution, les travailleurs des aciéries peuvent être exposés à de multiples polluants dont les effets indésirables dépendent de l’état physique et des affinités des polluants en cause, de l’intensité et de la durée de l’exposition, du niveau déjà accumulé dans l’organisme et de la sensibilité du sujet. Certains effets sont immédiats, tandis que d’autres ne se manifestent qu’après plusieurs années, voire des décennies. La modification des procédés et des équipements, jointe à l’amélioration des mesures visant à maintenir les expositions au-dessous des niveaux dangereux ont permis de réduire les risques pour les travailleurs. Ces changements ont parfois aussi donné lieu à de nouvelles combinaisons de polluants, et les dangers d’accidents, d’incendies et d’explosions n’ont pas disparu.

Les poussières et les fumées

Les émissions de fumées et de matières particulaires constituent un problème potentiel d’importance majeure pour les personnes qui travaillent avec des métaux en fusion, qui fabriquent ou manipulent du coke, qui chargent les hauts-fourneaux ou en soutirent la fonte. Elles représentent également une gêne pour les travailleurs affectés à l’entretien du matériel, au nettoyage des gaines et à la casse des réfractaires. Leurs répercussions sur la santé dépendent de la taille des particules, de la proportion de celles qui peuvent être inhalées ainsi que des métaux et aérosols éventuellement adsorbés à leur surface. Il a été établi que l’exposition à des poussières et à des fumées irritantes risque d’augmenter la prédisposition des travailleurs des aciéries à des crises d’asthme (constriction réversible des bronchioles) qui, à la longue, peuvent devenir permanentes (Johnson et coll., 1985).

La silice

Autrefois relativement commune parmi les travailleurs chargés de l’entretien des hauts-fourneaux et des fours de fonderies, l’exposition à la silice, avec pour conséquence la silicose, a pu être réduite grâce à l’emploi de matériaux de substitution pour le garnissage des fours et à l’automation qui a permis de diminuer le nombre des personnes affectées à ces travaux.

L’amiante

Autrefois très répandu comme matériau d’isolation thermique et phonique, l’amiante ne se rencontre plus guère que dans les travaux d’entretien et de rénovation qui conduisent à perturber l’ordonnance de matériaux contenant de l’amiante et donc à libérer des fibres d’amiante dans l’air. Parmi les effets à long terme de l’exposition à l’amiante, décrits en détail en particulier dans le chapitre no 10 «L’appareil respiratoire», de la présente Encyclopédie , on trouve l’asbestose, le mésothéliome et d’autres cancers. Une enquête réalisée sur un échantillon de 900 travailleurs de l’acier a établi que 20 d’entre eux, soit près de 2%, souffraient d’un syndrome respiratoire restrictif caractéristique de l’asbestose (Kronenberg et coll., 1991).

Les métaux lourds

Les émissions résultant de la fabrication de l’acier peuvent contenir des métaux lourds (plomb, chrome, zinc, nickel, manganèse, etc.) sous forme de fumées, de particules et d’adsorbats sur des particules de poussières inertes. Ces métaux sont souvent présents dans la ferraille, mais peuvent aussi être introduits en tant que tels dans la fabrication d’aciers spéciaux. Des recherches menées sur des travailleurs élaborant des alliages au manganèse ont montré une altération des capacités physiques et mentales et d’autres symptômes de manganisme à des niveaux d’exposition notablement inférieurs à ceux couramment autorisés dans la plupart des pays (Wennberg et coll., 1991). Une exposition de courte durée à des niveaux élevés de zinc ou d’autres métaux vaporisés peut causer la «fièvre des fondeurs» qui se caractérise par de la fièvre, des frissons, des nausées, des difficultés respiratoires et de la fatigue. Les autres effets toxiques dus aux métaux lourds sont étudiés en particulier dans le chapitre no 63, «Les métaux: propriétés chimiques et toxicité», de la présente Encyclopédie.

Les brouillards acides

Les brouillards acides qui se dégagent des bacs de décapage risquent de causer des irritations de la peau, des yeux et des voies respiratoires. Une étude a établi une corrélation entre l’exposition aux brouillards d’acides chlorhydrique et sulfurique provenant des bains de décapage et une incidence presque doublée de cancer du larynx (Steenland et coll., 1988).

Les composés soufrés

En sidérurgie, la principale source des émissions contenant du soufre résulte de l’emploi de combustibles fossiles et de laitier de haut-fourneau à forte teneur en soufre. Le sulfure d’hydrogène dégage une odeur d’œuf pourri caractéristique et les effets à court terme d’une exposition à des niveaux relativement faibles se traduisent par une sécheresse et une irritation des voies nasales et respiratoires supérieures, de la toux, un souffle court et une pneumonie. Des expositions de plus longue durée à de faibles concentrations risquent d’entraîner une irritation des yeux tandis que, à un niveau élevé, elles peuvent causer des lésions oculaires permanentes. En cas de concentrations importantes, les personnes peuvent perdre temporairement l’odorat, ce qui les conduit à penser qu’elles ne sont plus exposées.

Les brouillards d’huile

Les brouillards d’huile générés dans le laminage à froid peuvent provoquer des irritations de la peau, des muqueuses et des voies respiratoires supérieures, des nausées, des vomissements et des céphalées. Une étude a rapporté des cas de pneumonie lipoïdique chez des travailleurs de laminoirs ayant subi des expositions prolongées (Cullen et coll., 1981).

Les hydrocarbures aromatiques polycycliques

La plupart des procédés de combustion dégagent des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP); dans la sidérurgie, la cokéfaction en est la principale source. La combustion partielle du charbon pour produire du coke s’accompagne de l’extraction par distillation d’un grand nombre de composés volatils comme ceux du brai de houille, au nombre desquels on trouve des HAP. Ceux-ci peuvent se présenter sous forme de vapeurs, d’aérosols ou de fines particules. Des expositions brèves sont susceptibles de causer des irritations de la peau et des muqueuses, des vertiges, des céphalées et des nausées, tandis que les expositions prolongées ont été corrélées à l’apparition de cancers. Des études ont montré que les travailleurs des fours à coke avaient un taux de mortalité par cancer du poumon deux fois supérieur à celui du reste de la population. Les personnes qui encourent les plus grands risques sont celles qui sont soumises à une exposition importante aux fractions volatiles du brai, celles qui travaillent en haut des fours à coke et celles qui ont subi les durées d’exposition les plus longues (Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), 1984; Costantino, Redmond et Bearden, 1995). Dans certains pays, des mesures de prévention technique ont permis de réduire le nombre des personnes à risque.

Les autres produits chimiques

On trouve plus de 1 000 produits chimiques en sidérurgie; ils peuvent être présents sous forme de matières premières ou de polluants dans la ferraille et le combustible, d’additifs dans des procédés spéciaux, de matériaux réfractaires, de fluides hydrauliques ou de solvants utilisés pour l’exploitation et l’entretien. La cokéfaction génère des sous-produits tels que goudrons, benzène et ammoniac; d’autres se forment à divers stades de l’élaboration de l’acier. Tous peuvent être potentiellement toxiques selon la nature des produits, le type, le niveau et la durée des expositions, ou encore selon leur réactivité vis-à-vis d’autres produits chimiques et la prédisposition des travailleurs exposés. De fortes expositions accidentelles à des fumées contenant du dioxyde de soufre et des oxydes d’azote sont à l’origine de cas de pneumonie chimique; cette maladie peut également être provoquée par du vanadium et d’autres éléments d’alliage. Le monoxyde de carbone dégagé dans tous les procédés de combustion peut être dangereux en cas d’insuffisances dans la maintenance des matériels et dans les contrôles. Le benzène, tout comme le toluène et le xylène, également présents dans le gaz de four à coke, provoque des troubles de l’appareil respiratoire et du système nerveux en cas d’exposition intense. Des expositions prolongées au benzène peuvent entraîner des altérations de la moelle osseuse, des aplasies médullaires et des leucémies.

Le stress

Le travail dans la sidérurgie provoque des niveaux élevés de stress. A l’exposition à la chaleur rayonnante et au bruit s’ajoute la nécessité d’une vigilance de tous les instants pour éviter les accidents et les expositions potentiellement dangereuses. Du fait que de nombreux procédés se déroulent en continu, le travail posté est inévitable; son impact sur le bien-être des personnels et sur le soutien que l’entourage peut apporter, et qui joue un rôle si important, fait l’objet de commentaires détaillés dans le chapitre no 34, «Les facteurs psychosociaux et organisationnels», de la présente Encyclopédie . Il ne faut pas oublier non plus les facteurs potentiels de stress que constituent les craintes de perte d’emploi due à l’automatisation et aux évolutions des procédés, aux délocalisations et aux réductions d’effectifs.

Les programmes de prévention

La protection des travailleurs de la sidérurgie contre les sources de toxicité potentielle suppose l’affectation de ressources suffisantes à un programme suivi, cohérent et global qui devrait inclure les éléments ci-après:

LES PROBLÈMES D’ENVIRONNEMENT ET DE SANTÉ PUBLIQUE*

* Adapté du rapport technique du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et de l'Institut international du fer et de l'acier (International Iron and Steel Institute (IISI) (PNUE/IISI, 1997) et d'un article non publié de Jerry Spiegel.

Du seul fait du volume et de la complexité de ses activités et de sa consommation d’énergie et de matières premières, la sidérurgie, comme les autres «industries lourdes», est capable d’exercer un impact considérable sur l’environnement et sur les populations avoisinantes. La figure 73.14 récapitule schématiquement les polluants et les déchets générés aux principaux stades de la production. Ceux-ci se répartissent en trois catégories principales: les polluants atmosphériques, les polluants hydriques et les déchets solides.

Figure 73.14 Diagramme des polluants et déchets générés par les différents
processus

Figure 73.14

A l’origine, les études d’impact des activités sidérurgiques sur la santé publique ont porté essentiellement sur les effets localisés dans les zones à forte densité de population où la production d’acier était concentrée et, en particulier, dans des régions qui avaient connu des épisodes de très forte pollution atmosphérique comme les vallées de la Donora et de la Meuse et le triangle situé entre la Pologne, l’ancienne Tchécoslovaquie et l’ancienne République démocratique allemande (Organisation mondiale de la santé (OMS), 1992).

Les polluants atmosphériques

Depuis fort longtemps, les émissions de polluants atmosphériques provenant des opérations de fabrication du fer et de l’acier sont une source de préoccupation pour l’environnement. Au nombre de ces polluants, on peut ranger des substances gazeuses comme les oxydes de soufre, le dioxyde d’azote et le monoxyde de carbone. Les matières particulaires comme les suies et les poussières susceptibles de contenir des oxydes de fer ont également retenu l’attention. Les émissions des fours à coke et des usines utilisant les sous-produits de fours à coke ont aussi été une cause d’inquiétude, encore que les améliorations constantes apportées aux technologies de lutte contre les émissions, au cours des vingt dernières années, conjuguées à des législations nationales plus contraignantes, aient entraîné une réduction notable de ces émissions en Amérique du Nord, en Europe occidentale et au Japon. Il a été estimé que les dépenses totales de lutte contre la pollution, dont plus de la moitié est consacrée aux rejets dans l’atmosphère, représentaient entre 1 et 3% de l’ensemble des coûts de production; les installations de dépollution correspondantes ont représenté environ 10 à 20% du montant global des investissements des usines. De telles dépenses constituent évidemment une barrière à la généralisation de ce type d’installations modernes dans les pays en développement et pour les entreprises les plus anciennes à la limite de la rentabilité.

Les polluants atmosphériques varient selon le procédé employé, la technique et la configuration de l’usine, les matières premières mises en œuvre, les sources et les quantités de l’énergie utilisée, l’ampleur du recyclage des déchets et l’efficacité des mesures de dépollution. L’introduction de la conversion à l’oxygène, par exemple, a permis de collecter et de recycler rationnellement les gaz de combustion rejetés et de réduire ainsi les quantités évacuées, tandis que la coulée continue a fait baisser la consommation d’énergie et donc les émissions. Il en est résulté des gains de productivité et une amélioration de la qualité.

Le dioxyde de soufre

La quantité de dioxyde de soufre, dont l’essentiel se forme pendant les combustions, dépend principalement de la teneur en soufre du combustible fossile utilisé. Le coke et le gaz de coke en sont, en tant que combustibles, d’importantes sources. Dans l’atmosphère, le dioxyde de soufre peut réagir avec des radicaux oxygène et de la vapeur d’eau pour former un aérosol d’acide sulfurique qui, en se combinant à l’ammoniac, peut donner un aérosol de sulfate d’ammonium. Les effets sur la santé des oxydes de soufre sont dus à la fois au dioxyde proprement dit et à sa tendance à former de tels aérosols inhalables. Le dioxyde de soufre peut en outre être adsorbé sur des particules dont la plupart sont suffisamment fines pour pénétrer dans les voies respiratoires. La réduction des expositions potentiellement dangereuses passe dès lors non seulement par le recours à des combustibles contenant moins de soufre, mais aussi par la diminution de la concentration en particules. En supprimant les besoins en coke, l’usage accru des fours à arc a fait baisser les émissions d’oxydes de soufre, mais a reporté ainsi sur les centrales électriques la charge de lutter contre cette pollution. La désulfuration du gaz de four à coke est réalisée par extraction avant la combustion des composés soufrés réduits, en particulier du sulfure d’hydrogène.

Les oxydes d’azote

Comme les oxydes de soufre, les oxydes d’azote, essentiellement le monoxyde et le dioxyde, sont le fruit des processus de combus-tion. Sous l’effet du rayonnement ultraviolet, ils réagissent avec l’oxygène et les composés organiques volatils pour former de l’ozone. Ils se combinent aussi à l’eau pour donner de l’acide nitrique qui, à son tour, entre en réaction avec l’ammoniac pour produire du nitrate d’ammonium. Ils sont donc susceptibles de former des aérosols inhalables qui peuvent être éliminés de l’atmosphère par déposition humide ou sèche.

Les matières particulaires

Les matières particulaires, forme la plus visible de la pollution, sont un mélange complexe et variable de matières organiques et inorganiques. Elles peuvent provenir des tas de minerai de fer, de charbon ou de chaux, ou encore à l’occasion d’opérations de chargement ou de transport. Les blocs de matériaux génèrent des poussières par abrasion entre eux ou broyage sous les roues des véhicules. Les processus d’agglomération et de fabrication de la fonte et de l’acier entraînent le dégagement de fines particules quand le fer en fusion entre en contact avec l’air, ce qui provoque la formation d’oxyde de fer. Les fours à coke, de leur côté, produisent du poussier et des émissions de goudron. Les effets potentiels sur la santé dépendent de la concentration des particules dans la plage respirable, de leur composition chimique, ainsi que de la durée et de l’intensité de l’exposition.

On a réussi à réduire considérablement les niveaux de pollution par les particules. Ainsi, en employant des filtres électrostatiques pour épurer les rejets gazeux secs, une aciérie allemande a ramené le niveau des poussières émises de 9,3 kg par tonne (kg/t) d’acier brut en 1960 à 5,3 kg/t en 1975, et à un peu moins de 1 kg/t en 1990, au prix il est vrai d’une nette augmentation de la consommation d’énergie. D’autres méthodes de lutte contre la pollution particulaire font appel à l’utilisation de dépoussiéreurs par voie humide, de chambres à filtres et de cyclones (dont l’efficacité se limite aux particules de grandes dimensions).

Les métaux lourds

Les métaux comme le cadmium, le plomb, le zinc, le mercure, le manganèse, le nickel et le chrome peuvent être émis par les fours sous forme de poussières, de fumées ou de vapeurs, ou encore d’adsorbats sur les particules. Leurs effets sur la santé, décrits au chapitre no 63, «Les métaux: propriétés chimiques et toxicité», de la présente Encyclopédie , dépendent du niveau et de la durée de l’exposition.

Les émissions organiques

Les émissions organiques provenant de l’élaboration de l’acier brut peuvent comprendre du benzène, du toluène, du xylène, des solvants, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des dioxines et des phénols. Selon leur provenance et leur précédente utilisation (par exemple, peinture ou autre procédé de revêtement, métaux ou lubrifiants), les ferrailles employées comme matière première peuvent contenir plusieurs de ces substances. Certains de ces polluants organiques échappent aux systèmes conventionnels d’épuration des gaz.

La radioactivité

On a signalé ces dernières années des cas où des matières radio-actives étaient accidentellement présentes dans des ferrailles destinées à la fabrication d’acier. Leur devenir au cours de l’élaboration de l’acier dépend des propriétés physico-chimiques des nucléides rencontrés (températures de fusion et d’ébullition, affinité avec l’oxygène, par exemple). Elles peuvent se trouver en quantité suffisante pour contaminer les produits finis, les sous-produits et divers types de déchets, ce qui nécessite une évacuation et un nettoyage onéreux. Il existe aussi un risque potentiel de contamination des matériels de l’aciérie et donc d’exposition potentielle des travailleurs. De nombreuses aciéries ont installé des détecteurs de rayonnement auxquels ils soumettent toutes les ferrailles de provenance extérieure à l’usine.

Le dioxyde de carbone

Bien qu’aux niveaux atmosphériques habituels le dioxyde de carbone soit totalement inoffensif pour la santé humaine et les écosystèmes, il est important par sa contribution à l’effet de serre lié au réchauffement de la planète. La sidérurgie en génère de grandes quantités, plus du fait de l’utilisation du carbone pour la réduction du minerai de fer que de son emploi comme source d’énergie. En 1990, la mise en œuvre de mesures visant à réduire la part du coke dans les hauts-fourneaux, à récupérer la chaleur et à économiser l’énergie avait permis de ramener les émissions de dioxyde de carbone à 47% de leurs niveaux de 1960.

L’ozone

L’ozone, qui est l’un des principaux constituants du smog atmosphérique à proximité de la surface de la terre, est un polluant secondaire qui se forme dans l’air par réaction photochimique du rayonnement solaire avec les oxydes d’azote, facilitée à un degré variable, selon leur structure et leur réactivité, par divers composés organiques volatils. Les principaux précurseurs de l’ozone proviennent des gaz d’échappement des véhicules à moteur, mais certains sont aussi générés par les usines sidérurgiques et d’autres industries. Selon les conditions atmosphériques et topographiques, l’ozone peut se former très loin de ces sources.

Les polluants des eaux usées

Les aciéries rejettent de grandes quantités d’eau dans les lacs, les fleuves et les rivières, sans compter celles qui le sont sous forme de vapeur après extinction du coke ou refroidissement de l’acier. Les eaux usées stockées dans des bassins de rétention non étanches ou présentant des fuites peuvent s’infiltrer dans le sol et contaminer les nappes phréatiques et les eaux souterraines locales. Une telle contamination risque également de se produire du fait de la lixiviation par les eaux de pluie ruisselant à travers les tas de matières premières ou les accumulations de déchets solides. Au nombre de ces polluants figurent des matières en suspension, des métaux lourds, des huiles et des graisses. Le réchauffement des eaux naturelles dû au rejet d’eaux de procédés à haute température (70% de l’eau utilisée dans les procédés de fabrication d’une aciérie sert au refroidissement) peut affecter les écosystèmes aquatiques. Il est donc primordial de mettre en œuvre des moyens techniques appropriés pour refroidir ces effluents avant de les rejeter.

Les matières en suspension

Les matières en suspension forment la majeure partie des polluants hydriques rejetés pendant la production de l’acier. Elles se composent principalement d’oxydes de fer provenant de la calamine, mais peuvent également contenir du charbon, des boues activées, des hydroxydes métalliques et d’autres matières. La plupart ne sont pas toxiques dans un environnement aquatique à des niveaux normaux de rejet; leur présence à des concentrations plus élevées peut cependant entraîner une altération de la couleur des cours d’eau, un appauvrissement en oxygène et un envasement.

Les métaux lourds

Les eaux utilisées dans l’élaboration du fer peuvent avoir des teneurs élevées en zinc et en manganèse, tandis que les effluents du laminage et du finissage peuvent contenir du zinc, du cadmium, de l’aluminium, du cuivre et du chrome. Ces métaux sont présents à l’état naturel dans le milieu aquatique. Si leurs concentrations ne dépassent pas les niveaux habituels, on peut craindre néanmoins des répercussions sur la santé humaine et les écosystèmes. Ces préoccupations sont d’autant plus justifiées que, contrairement à de nombreux polluants organiques, ces métaux lourds ne subissent pas de dégradation biologique aboutissant à des produits ultimes inoffensifs, mais s’accumulent dans les sédiments et dans les tissus des poissons et autres organismes aquatiques. De plus, en se combinant à d’autres polluants (ammoniac, composés organiques, huiles, cyanures, alcalis, solvants, acides), ils peuvent devenir plus toxiques.

Les huiles et les graisses

On peut trouver des huiles et des graisses dans les eaux usées à la fois sous forme soluble et insoluble. La plupart des huiles lourdes étant insolubles, il est relativement facile de les éliminer. Elles émulsionnent cependant au contact de détergents ou d’alcalis ou en cas d’agitation. Les huiles en émulsion font traditionnellement partie du laminage. Si on excepte l’altération de la couleur des eaux de surface, la plupart des composés aliphatiques huileux sont sans danger en petites quantités. Les composés gras aromatiques monohydriques peuvent cependant être toxiques. De plus, certains composants des huiles peuvent contenir des toxiques comme les biphényles polychlorés, le plomb ou d’autres métaux lourds. En plus du problème de la toxicité, la demande chimique et biologique en oxygène des huiles et autres composés organiques risque d’appauvrir la teneur de l’eau en oxygène et d’affecter ainsi la faune et la flore aquatiques.

Les déchets solides

La plus grande partie des déchets solides produits dans la fabrication de l’acier sont réutilisables. La cokéfaction, par exemple, s’accompagne de la formation de dérivés du charbon très appréciés comme matières premières par l’industrie chimique. Plusieurs sous-produits (comme le poussier de coke) sont réinjectés dans le processus de production. Le laitier qui résulte de la combinaison des impuretés présentes dans le charbon et le minerai de fer avec la castine employée comme fondant a de nombreux usages: matériau de comblement pour des projets d’assèchement, construction de routes, matière première pour les usines d’agglomération alimentant les hauts-fourneaux. L’acier, quels que soient sa qualité, ses dimensions, son usage et sa durée de service, est intégralement et perpétuellement recyclable sans dégradation de ses caractéristiques mécaniques, physiques ou métallurgiques. Le taux de recyclage est estimé à 90%. Le tableau 73.2 donne une vue d’ensemble du taux de recyclage des déchets auquel est parvenue la sidérurgie japonaise.

Tableau 73.2 Déchets générés et recyclés dans la production d’acier
au Japon

 

Génération (A)
(1 000 tonnes)

Mise en décharge (B)
(1 000 tonnes)

Réutilisation
(A-B)/A (%)

Laitier
Hauts-fourneaux
Convertisseurs à oxygène
Fours à arc
Sous-total


24 717
9 236
2 203
36 156


712
1 663
753
3 128


97,1
82,0
65,8
91,3

Poussières

4 763

238

95,0

Boues

519

204

60,7

Huiles usées

81

   

Total

41 519

3 570

91,4

Source: International Iron and Steel Institute (IISI), 1992.

Les économies d’énergie

Les économies d’énergie sont souhaitables non seulement pour des raisons économiques, mais aussi pour réduire la pollution au niveau des installations de production d’énergie comme les centrales électriques. La quantité d’énergie consommée dans la production d’acier dépend fortement du procédé employé et des parts relatives de ferraille et de minerai de fer mises en œuvre. En 1988, l’intensité énergétique des aciéries alimentées en ferraille s’élevait en moyenne à 21,1 gigajoules par tonne (GJ/t) aux Etats-Unis, tandis que les aciéries japonaises en consommaient près de 25% de moins. Une aciérie modèle, fonctionnant à partir de ferrailles, telle qu’elle a été définie par l’Institut international du fer et de l’acier (International Iron and Steel Institute (IISI)), ne demande que 10,1 GJ/t (IISI, 1992).

L’augmentation des coûts de l’énergie a stimulé la mise au point de technologies moins gourmandes en énergie et en matières premières. Les gaz faiblement énergétiques, comme les sous-produits dégagés par les hauts-fourneaux et les fours à coke, sont récupérés, épurés et utilisés comme combustibles. La consommation de coke et de combustible d’appoint par la sidérurgie allemande, qui était en moyenne de 830 kg par tonne (kg/t) en 1960, a été ramenée à 510 kg/t en 1990. Au Japon, sa part dans la consommation globale d’énergie est tombée de 20,5% en 1973 à environ 7% en 1988. Aux Etats-Unis, les entreprises sidérurgiques ont massivement investi dans les économies d’énergie; elles ont réduit leur consommation d’énergie de 45% en moyenne depuis 1975 grâce à une modification des procédés, à la mise en œuvre de nouvelles technologies et aux restructurations. Les émissions de dioxyde de carbone ont diminué dans la même proportion.

Affronter l’avenir

Les gouvernements, les organisations professionnelles et les divers secteurs de l’industrie ont traditionnellement choisi d’aborder les défis que pose la protection de l’environnement sous des angles spécifiques, traitant par exemple séparément les questions de pollution de l’air, de l’eau et de l’évacuation des déchets. Si cette méthode s’est avérée utile, elle a parfois déplacé la difficulté d’un milieu à un autre, comme dans le cas des coûteux traitements des eaux usées qui posent le problème de l’évacuation des boues de traitement lorsqu’elles peuvent causer une grave pollution des eaux souterraines.

Ces dernières années, cependant, l’industrie mondiale de l’acier a décidé de relever ce défi par le biais d’un programme de lutte intégrée contre la pollution qui a donné lui-même naissance au programme de gestion totale des risques pour l’environnement, lequel prend simultanément en compte tous les impacts et s’attaque systématiquement aux domaines prioritaires. Tout aussi important a été le recentrage sur la prévention plutôt que sur les remèdes, qu’il s’agisse du choix du site d’implantation, de sa préparation, de son aménagement, des installations de l’usine, de la définition des responsabilités de la gestion au jour le jour ou de l’affectation d’un personnel et de ressources financières suffisants pour veiller au respect de la réglementation en matière d’environnement et faire rapport aux autorités compétentes.

Le Centre de l’industrie et de l’environnement, créé en 1975 par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), vise à encourager la coopération entre les industries et les gouvernements pour promouvoir un développement industriel compatible avec le respect de l’environnement. Il a pour objectifs:

Le PNUE travaille en étroite coopération avec l’IISI, première institution industrielle internationale s’occupant d’un seul secteur d’activité. Les membres de l’IISI sont des sociétés sidérurgiques à capitaux publics ou privés, des associations régionales et nationales de la sidérurgie, des associations diverses et des instituts de recherche de 51 pays qui, ensemble, représentent plus de 70% de la production mondiale d’acier. L’IISI, souvent de concert avec le PNUE, publie des déclarations de principe et de politique de l’environnement ainsi que des rapports techniques, comme celui qui a servi de base au présent article (PNUE et IISI, 1997). Ensemble, ils œuvrent pour étudier les facteurs économiques, sociaux et moraux, ainsi que les éléments liés au personnel, à la gestion et à la technologie qui influent sur les principes, les politiques et les règlements relatifs à l’environnement.

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