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Chapitre 71 - L'industrie du bois

GÉNÉRALITÉS

Paul A. Demers

L’industrie du bois est une industrie d’exploitation des ressources naturelles très importante dans le monde. On abat des arbres pour divers usages dans la plupart des pays. Le présent chapitre est principalement consacré à la transformation du bois en vue de la fabrication de planches de bois massif et de panneaux manufacturés dans les scieries et autres établissements du même type. Le terme panneau manufacturé désigne une plaque de bois débité composée d’éléments de dimensions variées, des placages jusqu’aux fibres, qui sont agglomérés au moyen d’adhésifs liquides ou de liaisons chimiques «naturelles». La relation qui existe entre les divers types de panneaux manufacturés est représentée à la figure 71.1. En raison du grand nombre de procédés de fabrication et de risques correspondants, les panneaux manufacturés sont subdivisés en trois catégories: contreplaqué, panneaux de particules et panneaux de fibres. On entend par panneau de particules tout panneau fabriqué à partir de petits morceaux de bois tels que copeaux, fragments, éclats ou lambeaux, tandis que le terme panneau de fibres désigne tous les panneaux produits à partir de fibres de bois, à savoir les panneaux durs, les panneaux de moyenne densité et les panneaux isolants. L’autre usage industriel important du bois est lié à la fabrication de papier et de produits connexes (voir chapitre no 72, «L’industrie du papier et de la pâte à papier»).

Figure 71.1 Classification des panneaux manufacturés selon la dimension et la densité
des particules et selon le procédé de fabrication

Figure 71.1

L’industrie du sciage existe à l’état rudimentaire depuis des centaines d’années, mais des progrès techniques importants ont été réalisés au cours du XXe siècle grâce à l’avènement de l’électricité, à l’amélioration des scies et à l’automatisation du tri et d’autres opérations. Les techniques de base du contreplacage sont en usage depuis des siècles, mais le terme contreplaqué ne fait partie de la langue courante que depuis les années vingt et la fabrication de ce matériau n’a une certaine importance commerciale que depuis le début du XXe siècle. Les autres industries de fabrication de panneaux — panneaux de particules et de grandes particules, panneaux de particules orientées, panneaux isolants, panneaux de moyenne densité et panneaux durs — sont toutes relativement récentes et n’ont pris un certain essor commercial qu’après la seconde guerre mondiale.

Il est possible de produire des planches de bois massif et des panneaux manufacturés à partir de toute une série d’essences forestières. Celles-ci sont choisies en fonction de la forme et de la taille de l’arbre, des caractéristiques physiques du bois proprement dit, comme sa robustesse ou sa résistance à la décomposition, et de ses qualités esthétiques. Le «bois de feuillus» est le terme courant servant à désigner les arbres à larges feuilles (latifoliés), qui font partie de la catégorie des angiospermes, tandis que le «bois de résineux» désigne les conifères, classés dans la catégorie des gymnospermes. De nombreux feuillus et quelques résineux originaires des régions tropicales sont généralement appelés bois tropicaux ou exotiques. Bien que la majeure partie du bois récolté à l’échelle mondiale provienne de non-résineux (58% du volume total), son utilisation massive comme combustible reporte sur les résineux l’essentiel des emplois du bois à des fins industrielles (69%) (FAO, 1993). Ce phénomène tient peut-être en partie à la répartition géographique des forêts par rapport au développement industriel. Les plus grandes forêts de conifères se trouvent dans les régions septentrionales d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie, tandis que les grandes forêts de feuillus sont situées dans les régions tropicales et tempérées.

La quasi-totalité du bois destiné à la fabrication de produits ligneux et de structures en bois est transformée au préalable dans des scieries. Par conséquent, il existe des scieries dans toutes les régions du monde où le bois est utilisé à des fins industrielles. Le tableau 71.1 indique, pour l’année 1990, la quantité de bois récolté comme combustible et à des fins industrielles dans les principaux pays producteurs de bois de chaque continent, ainsi que le volume récolté sous forme de billes de sciage et de placage, une sous-catégorie de bois d’œuvre servant de matière première dans les industries dont il est question ici. Dans les pays développés, le bois récolté est surtout utilisé à des fins industrielles: billes de sciage et de placage, bois à pâte, copeaux, particules et déchets. En 1990, trois pays — les Etats-Unis, l’ex-URSS et le Canada — assuraient plus de la moitié de la production mondiale totale de bois d’œuvre et de grumes destinée aux scieries et aux usines de placage. Dans la plupart des pays en développement d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du Sud, le bois récolté sert principalement de combustible.

Tableau 71.1 Estimation de la production de bois en 1990 (en milliers de m3)

 

Bois de chauffage et charbon de bois

Bois rond industriel1

Grumes, sciage et placage

AFRIQUE

392 597

58 412

23 971

Afrique du Sud

7 000

13 008

5 193

Cameroun

10 085

3 160

2 363

Côte d’Ivoire

8 509

2 903

2 146

Nigéria

90 882

7 868

5 589

AMÉRIQUE DU NORD

137 450

613 790

408 174

Canada

6 834

174 415

123 400

Etats-Unis

82 900

426 900

249 200

Mexique

22 619

7 886

5 793

AMÉRIQUE DU SUD

192 996

105 533

58 592

Brésil

150 826

74 478

37 968

Chili

6 374

12 060

7 401

Colombie

13 507

2 673

1 960

ASIE

796 258

251 971

166 508

Chine

188 477

91 538

45 303

Inde

238 268

24 420

18 350

Indonésie

136 615

29 315

26 199

Japon

103

29 300

18 377

Malaisie

6 902

40 388

39 066

EUROPE

49 393

345 111

202 617

Allemagne

4 366

80 341

21 655

Autriche

2 770

14 811

10 751

Finlande

2 984

40 571

18 679

France

9 800

34 932

23 300

Norvège

549

10 898

5 322

Royaume-Uni

250

6 310

3 750

Suède

4 400

49 071

22 600

EX-URSS

81 100

304 300

137 300

OCÉANIE

8 552

32 514

18 534

Australie

7 153

17 213

8 516

Nouvelle-Zélande

50

11 948

6 848

Papouasie-Nouvelle-Guinée

5 533

2 655

2 480

MONDE

1 658 297

1 711 629

935 668

1 Comprend le bois de sciage et de placage, la pâte à papier, les copeaux, les particules et les résidus.

Source: d’après FAO, 1993.

Le tableau 71.2 indique les principaux producteurs mondiaux de bois débité, de contreplaqué, de panneaux de particules et de panneaux de fibres. Les trois principaux producteurs de bois d’œuvre fournissent en outre plus de la moitié des planches de bois massif fabriquées dans le monde et figurent parmi les cinq principaux producteurs dans chacune des catégories de panneaux manufacturés. La production mondiale de panneaux manufacturés est relativement peu élevée par rapport à la production de planches de bois massif, mais elle s’accroît à un rythme plus rapide. Alors que la production de planches de bois massif a augmenté de 13% entre 1980 et 1990, celle de contreplaqué, de panneaux de particules et de panneaux de fibres a progressé respectivement de 21%, 25% et 19%.

Tableau 71.2 Estimation de la production de bois d'œuvre en 1990 par secteur pour
les dix principaux producteurs du monde (en milliers de m3)

Planches de bois massif

Panneaux de contreplaqué

Panneaux de particules

Panneaux de fibres

Pays

Volume

Pays

Volume

Pays

Volume

Pays

Volume

Allemagne

14 726

Brésil

1 300

Allemagne

7 109

Allemagne

499

Brésil

17 179

Canada

1 971

Autriche

1 529

Brésil

698

Canada

54 906

Chine

1 272

Belgique-Luxembourg

2 222

Canada

774

Chine

23 160

Corée

1 124

Canada

3 112

Chine

1 209

Etats-Unis

109 800

Etats-Unis

18 771

Espagne

1 790

Espagne

430

Ex-URSS

105 000

Ex-URSS

1 744

Etats-Unis

6 877

Etats-Unis

6 438

France

10 960

Finlande

643

Ex-URSS

6 397

Ex-URSS

4 160

Inde

17 460

Indonésie

7 435

France

2 464

Japon

923

Japon

29 781

Japon

6 415

Italie

3 050

Nouvelle-Zélande

443

Suède

12 018

Malaisie

1 363

Royaume-Uni

1 517

Pologne

501

Monde

505 468

Monde

47 814

Monde

50 388

Monde

20 248

Source: d’après FAO, 1993.

La part de la population active travaillant dans l’industrie du bois est généralement de 1% ou moins, même dans les pays où l’industrie forestière occupe une place importante, tels que les Etats-Unis (0,6%), le Canada (0,9%), la Suède (0,8%), la Finlande (1,2%), la Malaisie (0,4%), l’Indonésie (1,4%) et le Brésil (0,4%) (BIT, 1993). Si certaines scieries sont situées à proximité de centres urbains, la plupart sont généralement installées non loin des forêts d’où proviennent les grumes et beaucoup sont établies dans de petites localités souvent isolées où elles représentent pour ainsi dire l’unique source d’emploi et constituent, par conséquent, le pivot de l’économie locale.

A l’échelle mondiale, l’industrie du bois occupe des centaines de milliers de travailleurs, bien que leur nombre exact soit difficile à déterminer. En 1987, on recensait aux Etats-Unis 180 000 travailleurs dans les scieries et dans les usines de rabotage, 59 000 dans les usines de contreplaqué et 18 000 dans les fabriques de panneaux de particules et de fibres (Bureau of the Census, 1987). Au Canada, en 1991, les chiffres correspondants étaient de 68 400 dans les scieries et les usines de rabotage et de 8 500 dans les usines de contreplaqué (Statistique Canada, 1993). Même si la production de bois augmente, le nombre de travailleurs employés dans les scieries diminue en raison de la mécanisation et de l’automatisation. Aux Etats-Unis, les scieries et les usines de rabotage ont perdu 17% de leurs effectifs entre 1977 et 1987 et, au Canada, 13% entre 1986 et 1991. Des baisses analogues ont été observées dans d’autres pays, comme la Suède, où les petites exploitations disparaissent au profit d’usines beaucoup plus grandes et plus rentables, dotées d’un équipement moderne. La majorité des emplois qui ont disparu sont des emplois manuels peu qualifiés, principalement liés au tri du bois ou à l’alimentation des machines.

LES PRINCIPAUX SECTEURS ET PROCÉDÉS: RISQUES PROFESSIONNELS ET MESURES DE SÉCURITÉ

Hugh W. Davies, Paul A. Demers, Timo Kauppinen et Kay Teschke

Le sciage

Les scieries peuvent être de taille très variable. Les plus petites sont des postes fixes ou mobiles comprenant une scie circulaire de tête, un seul chariot de châssis simple et une déligneuse double (voir descriptions ci-après) actionnés par un moteur diesel ou à essence et commandés par un ou deux travailleurs. Les plus grandes sont des structures permanentes dotées d’un équipement beaucoup plus élaboré et spécialisé, qui peuvent employer plus de 1 000 personnes. Selon la taille de l’établissement et le climat de la région, le sciage peut être effectué en plein air ou dans un lieu fermé. C’est le type de grumes et leur dimension qui déterminent principalement le genre d’équipement utilisé, mais celui-ci peut également varier considérablement d’une scierie à l’autre, en particulier selon son âge et sa taille ou selon le type et la qualité des planches produites. Le lecteur trouvera ci-après une description du déroulement des opérations dans une scierie classique.

Après le transport à la scierie, les grumes sont stockées à même le sol, dans des voies d’eau contiguës ou dans des bassins spécialement aménagés à cet effet (voir figures 71.2 et 71.3). Elles sont triées selon la qualité, l’essence ou d’autres critères. Des fongicides et des insecticides sont parfois appliqués dans les aires d’entreposage à sec si les grumes doivent y séjourner longtemps avant d’être transformées. On utilise une ébouteuse pour égaliser les extrémités des grumes avant ou après l’écorçage et préalablement à leur passage en scierie. L’écorçage d’une grume peut être effectué selon diverses méthodes. Les méthodes mécaniques sont le fraisage périphérique, qui consiste à faire pivoter les grumes contre des couteaux, l’écorçage sous l’action d’anneaux dont les pointes sont comprimées contre la grume, l’écorçage par frottement des grumes les unes contre les autres dans un tambour ou encore au moyen de chaînes qui arrachent l’écorce. L’écorce peut également être enlevée par projection de jets d’eau sous haute pression. Après l’écorçage et après chaque opération effectuée en scierie, les grumes et les planches sont acheminées d’un endroit à l’autre grâce à un système composé de convoyeurs, de courroies et de rouleaux. Dans les grandes scieries, ces systèmes peuvent devenir plutôt complexes (voir figure 71.4).

Figure 71.2 Chargement des copeaux avec bassin de flottage des grumes
à l'arrière-plan

Figure 71.2

Figure 71.3 Arrivée des grumes à la scierie; aire d'entreposage et séchoirs
à l'arrière-plan

Figure 71.3

Figure 71.4 Intérieur de la scierie; transport du bois par convoyeurs à bande
et à rouleaux

Figure 71.4

La première phase du sciage, parfois appelée débitage primaire, est effectuée par la scie de tête. La scie de tête est une grande scie circulaire ou à ruban fixe qui sert à couper la grume dans le sens de la longueur. La grume est soumise à un mouvement de va-et-vient grâce à un chariot qui peut la faire pivoter pour obtenir le résultat optimal. Une scie de tête équipée de plusieurs lames de scie à ruban peut également être utilisée, surtout pour les grumes de petite taille. La scie de tête produit un équarri (le centre équarri de la grume), une série de dosses (bords extérieurs arrondis de la grume) et, dans certains cas, de grosses planches. L’emploi de rayons laser et de rayons X comme instruments de repère et guides de coupe devient courant dans les scieries; cette méthode permet d’optimiser l’utilisation du bois ainsi que le type de planches produites et leurs dimensions.

Au cours du débitage secondaire, l’équarri et les grosses planches ou les dosses sont transformés en bois d’œuvre de dimensions pratiques. On se sert généralement à ce stade de scies à lames multiples parallèles, par exemple des batteries de quatre scies circulaires ou des scies à lames multiples qui peuvent être à châssis ou circulaires. Les planches sont coupées à la largeur et à la longueur voulues au moyen de déligneuses équipées d’au moins deux lames parallèles et de scies à ébouter. Le délignage et l’éboutage sont généralement effectués au moyen de scies circulaires, bien que les déligneuses soient parfois des scies à ruban. On recourt aussi à des tronçonneuses manuelles pour libérer les grumes coincées dans la machine. Dans les scieries modernes, chaque opération (sciage et délignage) est généralement dirigée par un seul travailleur, souvent placé dans un poste de contrôle fermé. Par ailleurs, les travailleurs peuvent également intervenir entre les diverses opérations des phases ultérieures du débitage secondaire, afin de rectifier manuellement la position des planches.

Après leur passage en scierie, les planches sont classées, triées selon leurs dimensions et leur qualité, puis empilées manuellement ou mécaniquement (voir figure 71.5). Lorsque le bois d’œuvre est manipulé à la main, l’endroit réservé à cette opération s’appelle «chaîne de tri». Des stations de tri automatiques ont été installées dans la plupart des scieries modernes pour remplacer le tri manuel qui nécessite beaucoup de main-d’œuvre. Pour accroître la circulation de l’air et faciliter ainsi le séchage, de petites pièces de bois sont parfois placées entre les planches à l’empilage.

Figure 71.5 Chariot élévateur à fourche avec son changement

Figure 71.5

Le bois de catégorie «construction» peut être séché à l’air libre ou dans des séchoirs, selon les conditions atmosphériques locales et le degré d’humidité du bois vert; par contre, le bois de catégorie «finition» est généralement séché au séchoir. Il existe de nombreux modèles de séchoirs. Les séchoirs à compartiments et les séchoirs à haute température sont des séchoirs en série. Dans les séchoirs continus, les paquets empilés peuvent traverser celui-ci en position perpendiculaire ou parallèle et le mouvement de l’air peut, lui aussi, être dirigé perpendiculairement ou parallèlement aux planches. On a eu recours à l’amiante pour isoler les tuyaux de vapeur des fours.

Avant le stockage du bois vert, surtout dans les lieux humides, on applique parfois des fongicides pour empêcher la croissance de champignons qui provoquent un bleuissement ou un noircissement du bois (coloration de l’aubier). Des fongicides peuvent aussi être appliqués lors du passage à la chaîne de production (généralement par pulvérisation) ou après le bottelage du bois (le plus souvent dans des cuves d’immersion). On a commencé à utiliser le pentachlorophénolate de sodium dans les années quarante pour prévenir la coloration de l’aubier, puis ce produit a été remplacé dans les années soixante par le tétrachlorophénate qui est plus soluble dans l’eau. L’utilisation de chlorophénate a cependant été largement abandonnée en raison des craintes suscitées par ses effets sur la santé et par la contamination aux dibenzo-p-dioxines polychlorées. Les produits de remplacement sont le chlorure de didécyldiméthylammonium, le 3-iodo-2-propynyl-butyl carbamate, l’azaconazole, le borax et le 2-(thiocyanomethylthio)benzothiazole, dont les effets sur les utilisateurs ont été peu étudiés dans l’ensemble. Il n’est généralement pas nécessaire de traiter le bois d’œuvre, surtout s’il est passé au séchoir. En outre, le bois de certaines essences ligneuses comme le cèdre rouge de l’Ouest n’est pas sensible à la coloration de l’aubier.

Avant ou après le séchage, le bois peut être vendu comme bois vert ou bois brut; il doit toutefois subir une autre phase de transformation pour la plupart des usages industriels. Le bois est coupé à dimensions et raboté dans une usine de rabotage. Les raboteuses servent à en réduire l’épaisseur aux dimensions commerciales courantes et à en aplanir la surface. La tête de raboteuse se compose d’une série de couteaux montés sur un cylindre qui tourne à haute vitesse. L’opération est généralement mécanique et elle s’effectue parallèlement au grain du bois. Le rabotage se fait souvent simultanément sur les deux faces de la planche. Les raboteuses quatre faces sont appelées raboteuses-dresseuses. On se sert parfois de moulurières pour arrondir les bords du bois.

Après sa transformation, le bois doit être trié, empilé et bottelé en vue de l’expédition. Ces opérations sont de plus en plus automatisées. Dans certaines usines spécialisées, le bois peut être traité chimiquement au moyen de conservateurs et d’ignifugeants ou d’autres produits visant à en protéger la surface contre l’usure mécanique ou les intempéries. Par exemple, les traverses de chemin de fer, les pieux, les piquets de clôture, les poteaux télégraphiques ou autres pièces de bois devant être en contact avec le sol ou avec l’eau peuvent être traités sous pression à l’arséniate de cuivre chromaté ou ammoniacal, au pentachlorophénol ou à la créosote dans du pétrole lampant. On peut également utiliser des teintures et des colorants pour en faciliter la vente, ainsi que des peintures pour sceller les extrémités des planches ou pour apposer le sceau de la compagnie.

Le sciage et les autres opérations de transformation du bois dans les scieries produisent de grandes quantités de poussières et de débris. Dans bien des scieries, les dosses et autres gros morceaux de bois sont déchiquetés. Les déchiqueteuses sont généralement de gros rotors munis de lames droites encastrées dans la face et percés de trous pour l’évacuation des copeaux. La machine produit des copeaux lorsque les grumes ou les rebuts entrent en contact avec les lames par gravité, par auto-alimentation horizontale ou par alimentation mécanique contrôlée. D’une façon générale, l’action des déchiqueteuses est perpendiculaire aux lames. On utilise des modèles différents selon qu’il s’agit de grumes entières ou de dosses, de délignures ou autres pièces de rebut. Une déchiqueteuse est souvent intégrée à la scie de tête pour déchiqueter les dosses inutilisables. On emploie également des déchiqueteuses autonomes pour les rebuts des autres opérations. Les copeaux et la sciure peuvent être vendus pour la fabrication de pâte à papier ou de panneaux reconstitués, pour la conception d’espaces verts, comme combustible ou pour d’autres usages. L’écorce, les copeaux, la sciure et autres matières peuvent également être brûlés dans un but utilitaire ou pour s’en débarrasser.

Les grandes scieries modernes disposent généralement d’un personnel d’entretien important comprenant des équipes de nettoyage, des mécaniciens monteurs (industriels), des charpentiers, des électriciens et autres travailleurs qualifiés. Des déchets peuvent s’accumuler sur les machines, les convoyeurs et les planchers si les scieries ne sont pas équipées d’un système de ventilation par aspiration à la source ou si l’équipement est défectueux. Le nettoyage est généralement effectué à l’air comprimé pour enlever la poussière de bois et la saleté des machines, du sol et des autres surfaces. Les scies doivent être régulièrement inspectées pour s’assurer qu’elles n’ont pas de dents cassées, de fissures ou d’autres défauts et elles doivent être bien équilibrées pour éviter les vibrations. Ce travail est effectué par un corps de métier propre aux industries du bois — les affûteurs de scies qui sont chargés d’en réparer les dents cassées, de les affûter et de procéder à d’autres travaux d’entretien sur les scies circulaires et les scies à ruban.

Les risques pour la sécurité et la santé

Le tableau 71.3 indique les principaux types de risques pour la sécurité et la santé rencontrés dans les diverses aires de travail d’une scierie. Les risques d’accidents graves sont nombreux. Des dispositifs de protection sont nécessaires au poste de commande des scies et autres outils de coupe ainsi qu’au niveau des engrenages, des courroies, des chaînes, des pignons et des points d’impact des convoyeurs, courroies et rouleaux. Des dispositifs antirebond sont indispensables sur de nombreuses machines, telles que les scies circulaires, pour éviter que le bois bloqué ne soit éjecté. Les passages contigus aux machines et les passerelles surplombant les convoyeurs et autres chaînes de production doivent être équipés de barrières de sécurité. Un bon nettoyage est impératif pour éviter l’accumulation excessive de poussières et de débris de bois qui pourraient provoquer des chutes et déclencher un incendie et une explosion. Les zones dangereuses, normalement inaccessibles pendant que la scierie est en activité, comprennent de nombreux endroits nécessitant un nettoyage et un entretien réguliers. Au cours des travaux d’entretien, de réparation et de nettoyage, il est extrêmement important de respecter scrupuleusement les procédures de verrouillage des machines. L’équipement mobile doit être doté de signaux d’alarme sonores et lumineux. Les voies de circulation et les passages pour piétons doivent être signalés clairement. Le port d’un gilet de sécurité réfléchissant est également nécessaire pour accroître la visibilité des piétons.

Tableau 71.3 Risques pour la sécurité et la santé par aire de transformation
de l'industrie du bois

Aire de transformation

Risques d’accidents

Risques physiques

Risques associés aux poussières et aux substances chimiques

Risques biologiques

Cour à bois et bassin d’entreposage

Matériel mobile*; grumes/bois en déséquilibre*; convoyeurs

Bruit; températures extrêmes

Poussières de la route; autres particules; produits antiparasitaires

Moisissures et bactéries*

Ecorçage

Passerelles; rebond des machines; grumes/bois en déséquilibre*; convoyeurs; scies/outils de coupe; projection de débris*; non-verrouillage des machines

Bruit

Poussières de bois; poussières de la route; autres particules; composants volatils du bois

Moisissures et bactéries*

Sciage, rognage, éboutage

Passerelles; rebond des machines*; grumes/bois en déséquilibre; convoyeurs*; scies/outils de coupe*; projection de débris; fragments; non-verrouillage des machines*

Bruit;* microtraumatismes répétés

Poussières de bois*; composants volatils du bois*

Moisissures et bactéries

Séchage au séchoir

Matériel mobile

Températures extrêmes

Composants volatils du bois; amiante

Moisissures et bactéries

Rabotage

Passerelles; rebond des machines*; grumes/ bois en déséquilibre; convoyeurs*; scies/outils de coupe*; projection de débris; fragments; non-verrouillage des machines

Bruit;* microtraumatismes répétés

Poussières de bois*; composants volatils du bois; produits antiparasitaires

 

Tri et classement

Passerelles; grumes/bois en déséquilibre; convoyeurs*; fragments; non-verrouillage des machines

Bruit; microtraumatismes répétés*

Poussières de bois; produits antiparasitaires

 

Déchiquetage et opérations connexes

Passerelles; rebond des machines; convoyeurs; scies/outils de coupe*; projection de débris*; non-verrouillage des machines

Bruit*

Poussières de bois*; composants volatils du bois

Moisissures et bactéries*

Découpage des bois de placage

Passerelles; matériel mobile; convoyeurs; scies/outils de coupe; fragments; non-verrouillage des machines

Bruit*

Poussières de bois; composants volatils du bois

Moisissures et bactéries*

Séchage des bois de placage

Matériel mobile; fragments

Températures extrêmes; microtraumatismes répétés

Composants volatils du bois; amiante

Moisissures et bactéries

Mélange de colle et jointage

 

Microtraumatismes répétés

Formaldéhyde*; autres composants des résines*

 

Utilisation des presses à chaud

Matériel mobile; fragments; non-verrouillage des machines*

Bruit; microtraumatismes répétés

Composants volatils du bois; formaldéhyde*; autres composants des résines*

 

Ponçage et finition des panneaux

Matériel mobile; scies/outils de coupe; projection de débris; fragments; non-verrouillage des machines

Bruit* microtraumatismes répétés

Poussières de bois; formaldéhyde; autres composants des résines

 

Opérations de nettoyage

Passerelles; convoyeurs*; projection de débris*; fragments; non-verrouillage des machines*

Bruit

Poussières de bois*; formaldéhyde; autres composants des résines; amiante

Moisissures et bactéries*

Affûtage des scies

Passerelles; scies/outils de coupe; projection de débris; non-verrouillage des machines

Bruit

Fumées métalliques*

 

Autres opérations d’entretien

Passerelles; matériel mobile*; non-verrouillage des machines*

 

Poussières de bois; amiante; fumées métalliques

 

Emballage et expédition

Passerelles; matériel mobile;* grumes/bois en déséquilibre; convoyeurs; fragments; non-verrouillage des machines

Bruit; températures extrêmes; micro-traumatismes répétés

Poussières de la route; autres particules; produits antiparasitaires

 

* Degré de risque élevé.

Les opérations de tri, de classement et certaines autres opérations peuvent nécessiter une manutention manuelle des planches et des pièces de bois lourdes. Un aménagement ergonomique des convoyeurs et des bacs de réception et l’utilisation de techniques de manutention adéquates permettent de prévenir les accidents lombalgiques et les lésions des membres supérieurs. Le port de gants est nécessaire pour éviter les échardes, les blessures punctiformes ainsi que le contact avec les xyloprotecteurs. Il convient de placer des panneaux en verre de sécurité ou en une matière analogue entre les opérateurs et les zones de coupe en raison des risques de blessures aux yeux ou d’autres types de lésions que les poussières de bois, les copeaux et les divers débris éjectés des scies sont susceptibles de causer. Les rayons laser peuvent également présenter certains risques pour les yeux, et des panneaux d’avertissement doivent signaler les zones où l’on utilise des lasers de classe II, III ou IV. Les lunettes, les casques et les chaussures à embout d’acier font partie de l’équipement de protection individuelle qui doit être porté pendant la majeure partie des opérations.

Le bruit constitue un risque dans la plupart des zones d’écorçage, de sciage, de délignage, d’éboutage, de rabotage et de déchiquetage; il est également causé par l’entrechoquement des grumes sur les convoyeurs, les galets et les trieuses par longueur. Parmi les mesures techniques qu’il est possible d’adopter pour pallier ce problème, notons les postes de commande insonorisés pour les opérateurs, l’isolement des machines de coupe et l’utilisation de matériaux absorbant le son à l’entrée et à la sortie des machines ainsi que la construction d’écrans en matériaux insonorisants. D’autres mesures de prévention technique sont également possibles. On peut, par exemple, abaisser le niveau sonore des scies circulaires tournant à vide en installant des lames à denture de forme adéquate ou en ajustant la vitesse de rotation. La pose de matériaux insonorisants sur les murs et les plafonds peut contribuer à réduire le bruit réfléchi dans toute la scierie, en complément des mesures d’insonorisation à la source, nécessaires en cas d’exposition directe.

Dans presque toutes les zones de la scierie, les travailleurs risquent d’être en contact avec des particules. L’exposition aux poussières de bois est faible sinon nulle pendant les opérations d’écorçage, puisque le but est de laisser le bois intact, mais l’exposition à des agents aériens provenant du sol et des écorces, ainsi qu’à des agents biologiques comme les bactéries et les champignons, n’est pas à exclure. Dans la quasi-totalité des aires de sciage, de déchiquetage et de rabotage, il existe un risque d’exposition aux poussières de bois. En outre, la chaleur dégagée au cours de ces opérations peut provoquer la libération de matières volatiles du bois telles que des monoterpènes, des aldéhydes, des cétones et autres substances analogues variant selon l’essence et la température. Ce sont les travailleurs se servant d’air comprimé pour les travaux de nettoyage qui sont le plus exposés aux poussières de bois, ceux qui se trouvent à proximité des séchoirs étant davantage susceptibles d’être exposés aux substances volatiles qu’il contient. Les champignons et les bactéries pathogènes qui se multiplient à des températures inférieures à 70 °C constituent aussi un risque présent jusque dans la manutention des copeaux ou des déchets ligneux et le transport des grumes dans la cour à bois.

On peut avoir recours à certains moyens de prévention technique tels que des systèmes de ventilation par aspiration localisée pour limiter le niveau des contaminants atmosphériques et il est possible de réduire à la fois le bruit et les poussières. Les postes de commande en cabine permettent en outre d’éviter les blessures oculaires ou d’autres types. Ce genre de protection étant toutefois limité à l’opérateur, il est préférable de contrôler l’exposition à la source en isolant les machines. L’encoffrement des opérations de rabotage est devenu de plus en plus fréquent et a eu pour effet de réduire l’exposition au bruit et à la sciure des travailleurs qui ne doivent pas pénétrer dans ces enceintes. Les méthodes de nettoyage à l’aspirateur et à l’eau ont été utilisées dans certaines usines, le plus souvent par des entrepreneurs en nettoyage, mais leur usage n’est pas généralisé. Les risques d’exposition aux champignons et aux bactéries peuvent être limités en abaissant ou en augmentant la température des séchoirs et en prenant d’autres mesures pour éliminer les conditions propices à la prolifération de ces micro-organismes.

Il existe d’autres types d’exposition pouvant avoir des effets nocifs sur la santé. Les températures extrêmes, chaudes ou froides, sont à craindre à proximité des endroits où le bois entre dans le bâtiment et en sort. Il peut également faire très chaud autour des séchoirs et, pendant le sciage de grumes humides, l’humidité peut être élevée. Les contacts avec les fongicides se font principalement par voie cutanée et sont possibles si les planches sont encore humides au cours des opérations comme le classement ou le tri. Il est nécessaire de porter des gants et un tablier de protection lorsqu’on manipule des planches mouillées traitées aux fongicides. Les opérations de pulvérisation doivent se faire sous ventilation par aspiration localisée avec rideaux et séparateurs de gouttelettes. L’utilisation de matériel mobile pour transporter les grumes et le bois dans les aires d’entreposage et pour charger les semi-remorques ou les wagons de chemin de fer s’accompagne d’un risque d’exposition au monoxyde de carbone et à d’autres produits de combustion. Enfin, les affûteurs de scies peuvent être exposés à des concentrations dangereuses de fumées métalliques telles que le cobalt, le chrome et le plomb pendant le meulage et le soudage. Un système de ventilation par aspiration à la source ainsi qu’une protection des machines sont nécessaires.

La production de placage et de contreplaqué

Le terme contreplaqué désigne des panneaux composés de deux ou trois placages qui ont été collés ensemble. Ce terme est également employé pour qualifier des panneaux dont l’âme est constituée de bandes de bois massif ou des panneaux de particules dont les surfaces inférieures et supérieures sont recouvertes d’un placage. Le contreplaqué peut être fabriqué avec du bois provenant de diverses essences, aussi bien des résineux que d’autres espèces.

Les placages sont généralement obtenus directement par déroulage de grumes entières écorcées. Une dérouleuse est une machine semblable à un tour que l’on utilise pour produire des placages, c’est-à-dire de minces feuilles de bois, par tronçonnage de grumes entières. La grume maintenue contre un couteau par une barre de pression pivote pour produire une feuille de 0,25 à 5 mm d’épaisseur. Les billes utilisées à cet effet peuvent être trempées dans de l’eau bouillante ou réchauffées à la vapeur pour les ramollir en vue du déroulage. Les bords de la feuille sont généralement découpés par des couteaux fixés à la barre de pression. Des placages décoratifs peuvent être créés en découpant un équarri (le centre équarri de la grume), selon un procédé analogue au déroulage. Après avoir été déroulés ou tranchés, les placages sont recueillis sur de longs plateaux ou sur des rouleaux. Le placage est découpé aux dimensions voulues au moyen d’un massicot; il est séché par chauffage artificiel ou ventilation naturelle. Les panneaux séchés sont inspectés et, si nécessaire, colmatés au moyen de petits morceaux ou de languettes de bois et de résines à base de formaldéhyde. Si les placages séchés sont de plus petite dimension qu’un panneau de dimension standard, ils peuvent être éboutés à l’aide d’un adhésif liquide à base de formaldéhyde que l’on applique sur les tranches avant de les presser les unes contre les autres et de les réchauffer pour faire sécher la résine.

Pour fabriquer les panneaux, les feuilles de placage sont enduites de résines à base de formaldéhyde par une encolleuse à rouleau ou par pulvérisation, puis placées, à fils croisés, entre deux autres placages non encollés. L’ensemble est ensuite passé sous une presse à plaques chauffantes afin de faire prendre la résine. On utilise généralement des adhésifs à base de résine phénol pour fabriquer les contreplaqués en bois de résineux destinés à une utilisation intensive, notamment à la construction en général et à la construction navale en particulier. On emploie très souvent des adhésifs urée-formol dans la production des contreplaqués en bois de feuillus destinés à la fabrication de meubles et aux revêtements intérieurs; ils peuvent être renforcés au moyen de résine de mélamine. Les colles à base de formaldéhyde servent à l’assemblage des contreplaqués depuis plus de trente ans. Avant leur apparition, dans les années quarante, on utilisait de la colle de soja et de l’albumine de sang, et les panneaux étaient pressés à froid. Ces méthodes se font maintenant de plus en plus rares.

Les panneaux sont découpés aux dimensions voulues au moyen de scies circulaires, puis passés à la ponceuse à tambours ou à courroie. Un façonnage supplémentaire peut également être effectué pour produire du contreplaqué présentant des caractéristiques particulières. Dans certains cas, des produits antiparasitaires tels que chlorophénols, lindane, aldrine, heptachlore, chloronaphthalènes et oxyde de tributylétain peuvent être ajoutés aux adhésifs ou utilisés pour traiter la surface des panneaux. On peut également appliquer sur les panneaux des huiles légères (pour les coffrages à béton, par exemple), des peintures, des teintures, des laques et des vernis. Ces traitements de surface peuvent être effectués dans divers ateliers. Les placages et les panneaux sont souvent transportés au moyen de matériel mobile entre deux opérations.

Les risques pour la sécurité et la santé

Le tableau 71.3 indique les principaux types de risques pour la sécurité et la santé présents dans les grands ateliers d’une usine de contreplaqué. La plupart de ces risques étant analogues à ceux qui existent dans les scieries, de même que les mesures de prévention, nous n’examinerons ici que la situation spécifique à la fabrication du contreplaqué.

Les expositions cutanées et respiratoires au formaldéhyde et aux autres composants des colles, des résines et des adhésifs concernent les travailleurs chargés de la préparation des colles, de l’éboutage, du jointage, du ponçage et du pressage à chaud, ainsi que leurs collègues qui travaillent à proximité. Les résines à base d’urée libèrent plus facilement du formaldéhyde pendant le séchage que celles à base de phénol, mais les améliorations qui ont été apportées à leur préparation ont toutefois réduit les risques d’exposition. Un système adéquat d’aspiration localisée et le port de gants et d’autres moyens de protection appropriés sont nécessaires pour réduire l’exposition respiratoire et cutanée au formaldéhyde et aux autres composants des résines.

Le bois utilisé pour produire le placage est mouillé et les opérations de déroulage et de rognage ne produisent généralement pas beaucoup de poussières. Dans la fabrication du contreplaqué, c’est au cours du ponçage, du façonnage et du sciage nécessaires à la finition que les travailleurs sont le plus exposés aux poussières de bois. Le ponçage en particulier peut produire de grandes quantités de poussières fines, les panneaux perdant de 10 à 15% de leur volume pendant le surfaçage. Ces opérations doivent être réalisées dans un espace fermé, doté d’un système de ventilation par aspiration à la source, et les ponceuses à main doivent être équipées d’un sac d’aspirateur intégré. En l’absence de système d’aspiration localisée ou en cas de mauvais fonctionnement de celui-ci, les risques d’exposition aux poussières de bois peuvent être élevés. Les méthodes de nettoyage par aspiration et à l’eau sont assez couramment employées dans les usines de contreplaqué, car les autres méthodes sont moins efficaces étant donné la finesse des poussières. Si aucune mesure de réduction du bruit n’a été prise, le niveau de puissance sonore résultant des opérations de ponçage, de sciage et de façonnage est susceptible de dépasser 90 dBA.

Pendant le séchage du contreplaqué, plusieurs constituants chimiques du bois tels que des monoterpènes, des acides résiniques, des aldéhydes et des cétones peuvent être libérés dans l’atmosphère. Les types et les quantités de substances chimiques libérées dépendent de l’essence forestière utilisée et de la température du séchoir. Un système d’aspiration adéquat s’impose et il est indispensable de procéder rapidement aux réparations nécessaires en cas de fuite du séchoir. L’exposition aux gaz d’échappement des chariots élévateurs à fourche est un risque omniprésent dans l’usine de contreplaqué et le matériel mobile présente également certains risques pour la sécurité. Les produits antiparasitaires mélangés aux colles ne sont que légèrement volatils et ne devraient pas être détectables dans l’air de la salle de travail, à l’exception des chloronaphtalènes, qui sont très volatils. Les produits antiparasitaires peuvent aussi pénétrer dans l’organisme par voie cutanée.

Autres procédés de fabrication de panneaux

Ces fabrications spéciales — panneaux de particules, de grandes particules et de grandes particules orientées, panneaux d’isolation, panneaux de fibres et panneaux durs — regroupent tous les panneaux composés de morceaux de bois de grosseur variable, allant des grands copeaux ou grandes particules aux fibres, agglomérés au moyen de colles résiniques ou, comme dans le cas des panneaux de fibres fabriqués selon le procédé humide, par liaison «naturelle» entre les fibres. Pour simplifier les choses, disons que ces panneaux sont fabriqués en deux étapes. La première consiste à tirer la matière première directement de grumes entières ou des chutes d’autres opérations de transformation du bois comme le sciage et, la seconde, à mélanger ce matériau à des adhésifs chimiques pour produire des feuilles ou des panneaux.

Les panneaux de particules, les panneaux de copeaux ainsi que les panneaux de grandes particules et de grandes particules orientées sont fabriqués à partir de copeaux de bois de dimensions et de formes variées, selon des procédés analogues. Les panneaux de particules et de copeaux, composés de petits éléments, servent souvent de support à des placages de bois ou de stratifiés qui entrent dans la fabrication de meubles, de rangements et d’autres produits en bois. La plupart des éléments peuvent être fabriqués directement à partir des déchets ligneux. Les panneaux de grandes particules et de grandes particules orientées sont fabriqués à partir de très grandes particules — rognures et brins de bois — et sont principalement utilisés à des fins structurelles. Les éléments sont extraits directement des grumes au moyen d’une machine dotée d’une série de couteaux rotatifs qui enlèvent de minces particules. Il s’agit d’une machine semblable à une déchiqueteuse, à la différence près que le bois doit être présenté de façon que le fil soit parallèle aux couteaux. On peut également utiliser des machines à fraisage périphérique. On emploie souvent du bois saturé d’eau et des rondins ou de courtes billes, plus faciles à orienter.

Avant la fabrication des feuilles ou des panneaux, les éléments doivent être triés selon la taille et la catégorie, puis séchés par des moyens artificiels pour abaisser leur teneur en eau à un niveau étroitement contrôlé. Les éléments séchés sont mélangés à un adhésif et étalés à plat. On utilise des résines à base de phénol-formaldéhyde et d’urée-formaldéhyde. Comme dans le cas des contreplaqués, on a tendance à employer des résines phénoliques pour la fabrication de panneaux destinés à des usages nécessitant une grande robustesse sous de fortes contraintes, tandis que les résines d’urée-formaldéhyde sont plutôt réservées aux revêtements intérieurs. Des résines mélaminiques à base de formaldéhyde peuvent également être mises en œuvre pour accroître la robustesse, mais elles ne sont pas d’usage courant étant donné leur coût plus élevé. Au cours des dernières décennies, une nouvelle industrie produisant du bois reconstitué destiné à divers usages structurels, comme des poutres, des supports et d’autres éléments porteurs, a vu le jour. Les procédés de fabrication sont souvent les mêmes que pour les panneaux de particules, mais on se sert de résines isocyanates pour obtenir une plus grande résistance.

Les gâteaux sont divisés en sections de la taille d’un panneau, généralement au moyen d’une machine à air comprimé ou d’une lame droite. Cette opération se déroule dans un espace fermé pour pouvoir recycler les déchets. Les panneaux sont transformés en feuilles par séchage de la résine thermodurcissable au moyen d’une presse à plaques chauffantes, selon un procédé analogue à celui utilisé pour le séchage du contreplaqué. Les panneaux sont ensuite refroidis et recoupés aux dimensions voulues. On peut utiliser des ponceuses pour le surfaçage si nécessaire. En outre, les panneaux de bois reconstitué recouverts d’un placage de bois ou de plastique stratifié doivent être poncés pour obtenir une surface relativement lisse. On avait recours autrefois à des ponceuses à tambours, mais les ponceuses à bandes les ont aujourd’hui généralement remplacées. Des enduits de surface peuvent également être appliqués.

Les panneaux de fibres (y compris les panneaux isolants, les panneaux de moyenne densité et les panneaux durs) sont composés de fibres de bois liées. Leur production varie quelque peu de celle des panneaux de particules et autres panneaux manufacturés (voir figure 71.1). Pour produire les fibres, de courtes grumes ou des copeaux de bois sont réduits en pâte selon une méthode analogue à celle utilisée dans l’industrie papetière (voir chapitre no 72, «L’industrie du papier et de la pâte à papier»). On utilise généralement un procédé mécanique pour la fabrication de la pâte, les copeaux de bois étant trempés dans de l’eau bouillante, puis moulus par des machines. Les panneaux de fibres peuvent être de densité très variable, depuis les panneaux isolants à faible masse volumique jusqu’aux panneaux durs. Le bois de résineux et le bois de feuillus sont tous deux utilisables, le premier convenant mieux à la fabrication de panneaux isolants et le second à celle de panneaux durs. Le procédé employé pour réduire le bois en pâte n’entraîne qu’une faible réaction chimique: il fait disparaître une petite quantité de lignine et de matières extractives.

On dispose de deux procédés différents, humide et à sec, pour lier les fibres et fabriquer les panneaux. Les panneaux durs (panneaux de fibres à haute densité) et de moyenne densité peuvent être fabriqués selon l’un ou l’autre de ces procédés, tandis que les panneaux isolants (panneaux de fibres à faible densité) ne peuvent être obtenus que par le procédé humide. C’est celui-ci qui a été mis au point en premier lieu, pour la papeterie, tandis que le procédé par voie sèche est plus tardif et directement issu des techniques de fabrication des panneaux de particules. Le procédé humide consiste à étendre une pâte liquide sur une toile pour former une nappe qui est ensuite pressée, séchée, découpée et surfacée. La cohésion des panneaux ainsi manufacturés est assurée par des composants du bois analogues à des adhésifs et par la formation de liaisons hydrogènes. Le procédé à sec est un procédé comparable, à la différence près que la formation de la nappe comporte l’addition d’un liant (une résine thermodurcissable, une résine thermoplastique ou une huile siccative) pour amalgamer les fibres. D’une façon générale, on utilise des résines de phénol-formaldéhyde ou d’urée-formaldéhyde dans la fabrication des panneaux de fibres par voie sèche. Un certain nombre d’autres produits chimiques peuvent aussi être employés comme additifs, notamment des sels minéraux pour ignifuger et des fongicides pour préserver le bois.

En règle générale, les risques pour la sécurité et la santé liés à la fabrication de panneaux de particules et d’autres productions annexes sont très semblables à ceux qui existent dans l’industrie du contreplaqué, sauf en ce qui concerne les opérations de réduction en pâte pour les panneaux de fibres (voir tableau 71.3). L’exposition aux poussières de bois est pour ainsi dire omniprésente pendant tout le processus, mais elle peut varier considérablement selon la teneur en eau du bois et selon le procédé utilisé. C’est pendant le découpage et la finition des panneaux, et principalement pendant les opérations de ponçage, que les risques d’exposition sont les plus élevés s’il n’existe pas de moyens de prévention technique ou s’ils sont défectueux. La plupart des ponceuses sont des systèmes fermés qui nécessitent une grande capacité d’aspiration pour évacuer les poussières. L’exposition aux poussières de bois, ainsi qu’aux champignons et aux bactéries, est également possible à l’étape du déchiquetage et du broyage du bois sec et pendant le transport des copeaux entre les lieux d’entreposage et les aires de transformation. Par ailleurs, toutes les opérations de ponçage, de déchiquetage, de broyage et autres travaux de même nature sont très bruyantes. Il existe enfin un risque d’exposition au formaldéhyde et à d’autres constituants de la résine pendant le mélange des colles, le façonnage de la nappe et le pressage à chaud. Les mesures de prévention technique appliquées pour limiter les risques d’accidents et d’exposition aux poussières de bois, au bruit et au formaldéhyde dans les usines de fabrication de panneaux de bois sont analogues à celles en vigueur dans les usines de contreplaqué et dans les scieries.

LES TYPES DE MALADIES ET DE LÉSIONS

Paul A. Demers

Les lésions

Les scieries et les autres usines de transformation du bois sont des milieux de travail extrêmement dangereux en raison de la nature du processus qui implique le déplacement et le débitage de grosses pièces de bois très lourdes à des vitesses relativement élevées. Même si de bonnes mesures de prévention technique ont été prises, il est impératif d’observer rigoureusement les règles et les consignes de sécurité. Un certain nombre de facteurs d’ordre général peuvent contribuer aux risques d’accidents: un entretien insuffisant peut accroître les risques de glissades, de trébuchements et de chutes; la poussière de bois peut déclencher un incendie ou une explosion; le bruit intense peut rendre la communication entre les travailleurs difficile et empêcher d’entendre les avertissements sonores. Enfin, dans la plupart des grandes scieries, le travail est organisé en équipes et les horaires de travail, ainsi que les changements de poste, sont des facteurs supplémentaires de risques d’accidents.

Parmi les causes fréquentes d’accidents ou de lésions graves ou mortels, il faut signaler les collisions avec le matériel mobile, les chutes du haut des passerelles et plates-formes, les opérations d’entretien sur des machines que l’on a oublié de mettre hors tension ou de verrouiller, ou les manœuvres faites pour libérer des pièces bloquées, les rebonds de scies, de déligneuses et de raboteuses ainsi que les noyades dans les bassins ou les voies d’eau où sont entreposées les grumes. Les travailleurs novices courent davantage de risques que les autres. Ainsi, d’après une étude sur les causes de 37 accidents mortels survenus en Colombie-Britannique (Canada) entre 1985 et 1994, 13 (35%) de ces accidents se sont produits au cours de la première année de travail et 5 au cours de la première semaine (4 le premier jour) (Howard, 1995).

Les risques de lésions non mortelles sont également élevés. Les particules ou petits morceaux de bois ou débris éjectés des machines peuvent blesser l’œil. Le contact du bois avec la peau non protégée est à l’origine d’échardes, de coupures et de lésions punctiformes. Les efforts fournis pour pousser, tirer ou soulever des objets lourds pendant le tri, le classement et d’autres opérations peuvent entraîner des foulures, des entorses ou d’autres traumatismes musculo-squelettiques.

Les maladies bénignes

Les travailleurs des scieries et usines de transformation du bois sont exposés à divers risques de troubles respiratoires dus notamment à l’inhalation de poussières de bois, de composants volatils du bois, de moisissures ou de bactéries aériennes et de formaldéhyde. Les problèmes respiratoires chez les travailleurs des scieries, des usines de contreplaqué et des fabriques de panneaux de fibres ou de grandes particules orientées ont fait l’objet de diverses études. Celles concernant les scieries sont généralement axées sur les problèmes engendrés par les poussières de bois; les autres s’intéressent plutôt à l’exposition au formaldéhyde.

L’exposition professionnelle aux poussières de bois est liée à toute une série d’effets sur les voies respiratoires supérieures et inférieures. En raison de la taille des particules produites par les opérations de transformation du bois, le nez est particulièrement exposé. Divers effets rhino-sinusaux ont été signalés: rhinite, sinusite, obstruction nasale, hypersécrétion nasale et déficiences de l’épuration mucociliaire. Au niveau des voies respiratoires inférieures, l’asthme, la bronchite chronique et l’obstruction chronique de l’écoulement de l’air sont également associés à l’exposition aux poussières de bois. Ces affections des voies respiratoires supérieures et inférieures s’observent tant avec les bois résineux qu’avec les bois feuillus, originaires aussi bien des régions tempérées que tropicales. On a notamment rattaché des cas d’asthme professionnel à l’exposition à la poussière d’érable africain, de zébra africain, de frêne, de séquoia de Californie, de cèdre du Liban, de noyer d’Amérique centrale, de thuya occidental, d’ébène, d’iroko, d’acajou, de chêne, de ramin et de cèdre de l’Ouest et de plusieurs autres essences forestières.

Le bois est principalement constitué de cellulose, de polyoses et de lignine, mais il contient également des composés organiques biologiquement actifs tels que des monoterpènes, des tropolones, des acides résiniques (diterpènes), des acides gras, des phénols, des tannins, des flavinoïdes, des quinones, des lignanes et des stilbènes. L’observation ayant montré que les effets sur la santé varient parfois selon les espèces, on pense qu’ils sont peut-être liés à des substances chimiques naturelles appelées produits d’extraction qui diffèrent d’une essence à l’autre. Un lien direct a été établi entre certains de ces produits et des problèmes de santé dus à l’exposition au bois. Par exemple, l’acide plicatique, qui se trouve à l’état naturel dans le cèdre de l’Ouest et dans le thuya occidental, est responsable de l’asthme et d’autres effets allergiques chez l’être humain. Si les produits d’extraction à poids moléculaire élevé tombent avec la poussière pendant le travail du bois, d’autres, plus légers, comme les monoterpènes, se volatilisent facilement pendant le passage au séchoir, le sciage et l’éboutage. Les monoterpènes (tels que α-pinène, β-pinène, δ3-carène et limonène) sont des composants essentiels de la résine de bien des résineux courants et sont associés à des irritations de la bouche et de la gorge, à la dyspnée et au dysfonctionnement pulmonaire.

Les moisissures qui se développent sur le bois sont à l’origine d’un autre type d’exposition à un élément naturel du bois susceptible d’avoir des effets nocifs sur la santé. Ce risque semble être courant dans les régions où le climat est suffisamment humide et chaud pour favoriser la croissance des moisissures. Des cas d’alvéolite allergique, également appelée pneumopathie par hypersensibilité, ont en outre été observés chez des travailleurs de scieries en Scandinavie, au Royaume-Uni et en Amérique du Nord (Halpin et coll., 1994). Un effet beaucoup plus courant, quoique moins grave, de l’exposition aux moisissures est la fièvre par inhalation, appelée également syndrome toxique dû aux poussières organiques, qui se manifeste par des accès de fièvre aiguë, des malaises, des douleurs musculaires et de la toux. En Suède, il fut un temps où la fréquence de la fièvre par inhalation chez les ébouteurs oscillait entre 5% et 20%, mais cette proportion est probablement beaucoup plus faible actuellement, grâce à l’introduction de mesures préventives.

Certains problèmes respiratoires sont également possibles suite à l’exposition à des substances chimiques utilisées comme adhésifs dans l’industrie du bois. Le formaldéhyde est un irritant qui peut causer une inflammation du nez et de la gorge. Des effets aigus sur la fonction respiratoire ont été observés et l’on soupçonne l’existence d’effets chroniques. Des cas d’asthme et de bronchite chronique associés à ces substances ont d’ailleurs été signalés.

Les effets irritants ou allergiques dus à l’exposition aux poussières de bois, au formaldéhyde et à d’autres substances ne se limitent pas uniquement au système respiratoire. Ainsi, les études qui signalent des symptômes dans la sphère nasale indiquent aussi généralement une fréquence accrue de cas d’irritation oculaire. On a établi un lien entre la dermatite et la poussière de plus de 100 essences forestières, y compris de certains feuillus, résineux et arbres tropicaux courants. Le formaldéhyde est également un irritant cutané et peut causer une dermatite de contact allergique. En outre, un certain nombre de fongicides utilisés pour empêcher la coloration de l’aubier sur les bois résineux provoquent des irritations oculaires ou cutanées.

Les travailleurs des scieries et d’autres usines de transformation du bois courent des risques élevés de perte auditive due au bruit. Ainsi, une étude conduite dans une scierie américaine a montré que 72,5% des travailleurs présentaient des troubles de l’ouïe pour une ou plusieurs des fréquences contrôlées par les tests audiométriques (Tharr, 1991). Les travailleurs se trouvant à proximité des scies et autres machines de transformation du bois sont généralement exposés à des niveaux sonores supérieurs à 90 ou 95 dBA. Pourtant, on ne fait pas beaucoup d’efforts pour réduire le bruit (à l’exception de l’encoffrement des raboteuses) et on enregistre régulièrement de nouveaux cas de déficits auditifs dus au bruit.

Le cancer

Le travail dans les industries du bois peut entraîner l’exposition à des cancérogènes connus ou présumés. La poussière de bois, source d’exposition la plus fréquente dans ce type d’activité, a été classée parmi les agents cancérogènes pour les humains (Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) — Groupe l). Des risques proportionnellement très élevés de cancer rhino-sinusal et, plus particulièrement, d’adénocarcinome du nez et des sinus ont été observés chez les travailleurs exposés à de grandes quantités de poussières de bois de feuillus tels que le bouleau, le chêne et l’acajou, dans l’industrie du meuble. En ce qui concerne les poussières de bois de résineux, les preuves sont moins concluantes et les risques excessifs semblent moins nombreux. Les résultats d’une analyse globale des données brutes de douze études cas-témoins de cancer rhino-sinusal témoignent d’un risque excessif chez les travailleurs des scieries et autres industries apparentées (CIRC, 1995). Le cancer rhino-sinusal est un cancer relativement rare dans presque toutes les régions du monde, le nombre de cas n’étant que d’environ 1 pour 100 000 habitants par an. On estime que 10% des cancers rhino-sinusaux sont des adénomes. Bien que certains liens entre les poussières de bois et d’autres types de cancers plus courants aient été signalés dans quelques études, les résultats sont beaucoup moins nets qu’en ce qui concerne le cancer rhino-sinusal.

Le formaldéhyde, auquel sont couramment exposés les travailleurs des usines de contreplaqué, de panneaux de particules et de fabrications connexes, fait partie des agents cancérogènes présumés pour les êtres humains (CIRC — Groupe 2A). On sait qu’il cause le cancer chez les animaux et un nombre excessif de cancers du rhinopharynx et de cancers du nez et des sinus a été observé dans certaines études sur l’humain, mais les données disponibles manquent de cohérence. Les produits antiparasitaires à base de pentachlorophénol et de tétrachlorophénol, couramment utilisés jusqu’à une date récente dans les entreprises de transformation du bois, sont contaminés par des furanes et des dioxines. Le pentachlorophénol et la 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-p-dioxine ont été rangés dans la catégorie des cancérogènes possibles pour les humains (CIRC — Groupe 2B). Certaines études ont révélé l’existence d’une corrélation entre les chlorophénols et le risque de lymphome non hodgkinien et de sarcome des tissus mous, avec des résultats plus clairs dans le premier cas que dans le second. Parmi les autres substances potentiellement cancérogènes auxquelles peuvent être exposés les travailleurs des usines de transformation du bois, il faut citer l’amiante (CIRC — Groupe 1) utilisé comme isolant pour les tuyaux de vapeur et les séchoirs, les émissions des moteurs diesel (CIRC — Groupe 2A) du matériel mobile et la créosote (CIRC — Groupe 2A) employée comme xyloprotecteur pour les traverses de chemin de fer et les poteaux télégraphiques.

Les études consacrées au cancer chez les travailleurs des scieries, usines de contreplaqué et autres fabriques de panneaux de bois sont relativement peu nombreuses. La plus importante, effectuée par Hertzman et coll. (1997), porte sur une cohorte de plus de 26 000 travailleurs canadiens et s’efforce de déterminer les risques de cancer associés à l’exposition aux produits antiparasitaires à base de chlorophénol. Elle met en évidence une fréquence deux fois supérieure à la normale pour le cancer rhino-sinusal et légèrement supérieure à la normale pour le lymphome non hodgkinien. Le surnombre de cas de lymphome non hodgkinien semble être associé à l’exposition aux chlorophénates. Les autres études effectuées sont beaucoup plus limitées. En Finlande, Jäppinen, Pukkala et Tola (1989) ont étudié 1 223 travailleurs de scieries et ont observé un nombre excessif de cas de cancers de la peau, de la bouche et du pharynx ainsi que de lymphomes et de leucémies.

Blair, Stewart et Hoover (1990) et Robinson et coll. (1986) ont fait porter leurs travaux respectivement sur 2 309 et 2 283 travailleurs d’usines de contreplaqué aux Etats-Unis. L’analyse de l’ensemble des données provenant des deux cohortes révèle un nombre excessif de cancer du rhinopharynx, de myélome multiple, de maladie de Hodgkin et de lymphome non hodgkinien, mais les études n’indiquent pas clairement si cette situation est en rapport avec les risques professionnels. Les autres recherches, plus limitées, ne permettaient pas d’examiner les risques de cancers rares et bon nombre des excès constatés étaient fondés sur de très petits nombres de cas. Ainsi, on n’a observé aucun cancer rhino-sinusal sur les travailleurs de scieries; on prévoyait seulement une incidence de 0,3, les chiffres correspondants étant de 0,3 et 0,1 dans les études sur les travailleurs d’usines de contreplaqué.

LES PROBLÈMES D’ENVIRONNEMENT ET DE SANTÉ PUBLIQUE

Kay Teschke et Anya Keefe

L’utilisation et l’élimination des déchets de bois

Les rejets atmosphériques, les effluents liquides et les déchets solides de l’industrie du bois peuvent engendrer des problèmes pour l’environnement. Dans la plupart des cas, la source de ces problèmes réside dans les déchets de bois, notamment les copeaux ou la sciure venant de l’usinage, l’écorce arrachée des arbres et les débris des grumes dans les voies d’eau où celles-ci sont entreposées.

La sciure et la poussière produites par les autres procédés de transformation présentent un risque d’incendie et d’explosion dans les usines. Pour écarter autant que possible ce danger, on peut enlever la poussière manuellement ou, mieux encore, la récolter dans des dépoussiéreurs à sacs filtrants ou cyclones grâce à des systèmes de ventilation par aspiration localisée. Les déchets de bois de grosse taille sont déchiquetés. La majeure partie de la sciure et des copeaux issus des premières opérations de transformation peut entrer dans la fabrication d’autres produits en bois (panneaux de particules, papier et pâte à papier, par exemple). La valorisation de ce type de déchets est aujourd’hui d’autant plus fréquente que les coûts d’évacuation augmentent et que l’intégration verticale des compagnies forestières est plus poussée. Certains types de déchets de bois, particulièrement la poussière fine et l’écorce, ne sont toutefois pas très faciles à recycler et doivent donc être éliminés par d’autres moyens.

L’écorce peut représenter une forte proportion du volume de l’arbre, surtout dans les régions où les fûts sont de petit diamètre. L’écorce et la sciure fine et, dans certains cas, tous les déchets de bois, y compris les copeaux, peuvent être brûlés (voir figure 71.6). Les installations les plus anciennes font appel à des techniques d’incinération inefficaces (fours wigwam, par exemple) qui produisent toutes sortes de résidus organiques dus à une combustion incomplète. La pollution de l’air par les matières en suspension qui en résulte, formant une sorte de brouillard dans le voisinage de ces fours, représente un problème courant. A ce risque s’ajoute celui du dégagement de dioxines et de furanes dans les fours des scieries où l’on utilise des chlorophénols. Certaines usines modernes sont équipées de chaudières électriques à température contrôlée installées dans un espace clos qui produisent de la vapeur pour les séchoirs ou de l’électricité pour l’installation ou d’autres consommateurs. D’autres entreprises vendent leurs déchets ligneux à des usines de l’industrie papetière, où ils sont incinérés pour répondre aux besoins énergétiques élevés de ces dernières (voir chapitre no 72, «L’industrie du papier et de la pâte à papier»). Les chaudières et autres fours doivent généralement répondre aux normes d’émission de particules et être dotés de systèmes tels que des électrofiltres et des dépoussiéreurs par voie humide. Afin de réduire le plus possible la quantité de déchets de bois à incinérer, on peut trouver d’autres usages pour l’écorce et la sciure, notamment comme compost ou comme paillis dans l’aménagement paysager, en agriculture, dans la restauration de la couverture végétale sur l’emplacement des mines à ciel ouvert et dans la régénération forestière, ou encore comme matière de charge dans certains produits commerciaux. En outre, l’utilisation de scies munies de lames de très faible épaisseur permet de réduire sensiblement la production de sciure.

Figure 71.6 Transport des déchets par convoyeur à bande vers un four wigwam

Figure 71.6

L’écorce, les débris de grumes et autres déchets de bois peuvent s’accumuler au fond des bassins de stockage et tuer ainsi des organismes benthiques. Pour tenter d’y remédier, on peut lier et délier les grumes sur le sol, où les débris sont faciles à recueillir. De toute façon, il faut draguer de temps en temps les voies d’eau. Les billes récupérées peuvent être utilisées, mais les autres déchets doivent être éliminés. L’industrie les déverse généralement dans des décharges ou en eaux profondes. Les effluents de l’écorçage hydraulique posent des problèmes analogues, d’où la tendance actuelle à utiliser des systèmes mécaniques.

Les tas de copeaux peuvent engendrer des problèmes liés à l’écoulement des eaux pluviales, car le percolat du bois contient des acides résiniques et des acides gras ainsi que des composés phénoliques extrêmement toxiques pour le poisson. L’élimination des déchets par déversement dans des décharges contrôlées produit également un lixiviat qui nécessite l’adoption de mesures afin de réduire ce problème, et ce, pour protéger les eaux souterraines et les eaux de surface.

Les fongicides antitache colorée de l’aubier et les fongicides de préservation du bois

Le traitement du bois aux fongicides pour empêcher la croissance d’organismes provoquant la coloration de l’aubier a entraîné la contamination des cours d’eau (tuant parfois un grand nombre de poissons), ainsi que la contamination du sol où le traitement est effectué. Les systèmes de traitement qui consistent à faire passer les grumes bottelées dans de vastes bassins découverts et à les drainer dans la cour à bois peuvent poser des problèmes de débordement sous l’action des eaux de pluie, avec des écoulements susceptibles de se répandre un peu partout. Les cuves d’immersion couvertes, munies d’élévateurs automatiques, les cabines de pulvérisation intégrées à la chaîne de production et l’aménagement de bermes (levées de terre) de rétention autour de l’aire de traitement et de séchage du bois réduisent considérablement ces risques et leurs conséquences. Toutefois, si les enceintes de pulvérisation contre la coloration de l’aubier limitent sensiblement les risques environnementaux, elles présentent un plus grand danger pour les travailleurs situés en aval que les cuves d’immersion dans lesquelles on traite le bois fini bottelé.

La nouvelle génération de fongicides qui a remplacé les chlorophénols semble avoir permis de réduire les atteintes à l’environnement. Bien que leur toxicité pour les organismes aquatiques reste la même, certains de ces nouveaux fongicides se lient davantage au bois, ce qui les rend moins biodisponibles et plus facilement dégradables. Par ailleurs, le coût plus élevé de la plupart de ces produits de remplacement et les coûts d’élimination ont encouragé le recyclage des déchets liquides et le recours à d’autres procédures de réduction des risques.

Les traitements thermique et mécanique du bois pour lui donner une résistance durable aux champignons et aux insectes se déroulent généralement dans des espaces plus fermés que le traitement antitache et n’engendrent, par conséquent, pas le même problème de rejets liquides. Ils produisent cependant l’un et l’autre des déchets solides, notamment des boues de traitement et de vidange des cuves d’entreposage, qu’il faut éliminer. Plusieurs solutions sont possibles, parmi lesquelles l’entreposage en conteneurs étanches dans une zone imperméable entourée de bermes, l’enfouissement dans une décharge pour déchets dangereux située à l’écart de tout système hydrologique ou l’incinération à haute température (1 000 °C, par exemple) pendant une durée précise (2 secondes, par exemple).

Les problèmes spécifiques à la fabrication de contreplaqué et de panneaux de particules

Les séchoirs à placages des usines de contreplaqué peuvent dégager une brume bleue caractéristique composée de produits d’extraction du bois volatils comme les terpènes et les acides résiniques. Ce problème se pose principalement à l’intérieur de l’usine bien que ces produits puissent aussi être présents dans les panaches de vapeur d’eau qui s’échappent des séchoirs. Les usines de panneaux de particules et de contreplaqué incinèrent généralement leurs déchets de bois afin de produire de la chaleur pour les presses. Des techniques de réduction de la vapeur et des rejets de particules permettent de limiter ces émissions atmosphériques.

L’eau de lavage et les autres effluents liquides produits par les usines de contreplaqué et de panneaux de particules peuvent contenir des résines de formaldéhyde utilisées comme adhésifs; à l’heure actuelle, toutefois, les eaux usées sont généralement recyclées dans la préparation des colles.

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